MANUEL DU GUERILLERO
URBAIN
PAR CARLOS MARIGHELLA
(1969)
En rédigeant
ce manuel, je désire rendre un double hommage.
Le premier, à
la mémoire d'Edson Luis José de Almeida, "
Escoteiro " et tant d'autres combattants et guérilleros
urbains, assassinés par la police politique (la D.O.P.S.)
et par l'armée de la dictature militaire qui sévit
au Brésil. Le second à nos courageux camarades,
hommes et femmes, qui croupissent dans les geôles qui n'ont
rien à envier aux crimes commis par les nazis. Comme ce
le fut pour eux, notre seul devoir est de lutter.
AVERTISSEMENT
Toute personne hostile
à la dictature militaire ou tout autres formes d'exploitation
et d'injustice, désireuse de combattre peut faire quelques
choses, même si cette action est modeste, plusieurs petites
action en feront naître une immense.
Ceux qui, après
avoir lu ce manuel, auront conclu qu'il s ne peuvent rester passifs,
je les invite à suivre les instructions que je propose
et à s'engager tout de suite dans la lutte. Car, en toute
hypothèse et dans toutes circonstances, le devoir du révolutionnaire
est de faire la révolution.
S'il importe de lire cette ouvrages, il est également
très souhaitable de la divulguer. Que ceux qui acceptent
les idées qui s'y trouvent défendues, la fasse
ronéotyper ou imprimer, fût-ce sous la protection
d'un groupe armé.
Si je l'ai signée, c'est parce qu'elle est le résultat
systématisé d'une expérience vécue
par un groupe d'hommes qui , au Brésil, luttent les armes
à la main et dont j'ai l'honneur de faire partie.
Contre ceux qui
mettent en doute ce que j'y recommande, qui continuent d'affirmer
que ne sont pas encore réunis les conditions propre au
combat ou qui nient les faits décrits, le mieux est que
je revendique ouvertement la responsabilité de mes paroles
et de mes actions. Je refuse donc les commodités ambiguës
de l'anonymat.
Mon but est de recruter le plus grand nombre possible de partisans.
Le nom d'agresseur ou de terroriste n'a plus le sens qu'on lui
donnait jadis. Il ne suscite plus la terreur ou le blâme
; il éveille des vocations. Être appelé "
agresseur " ou " terroriste ", dans le Brésil
d'aujourd'hui, honore le citoyen, puis que cela signifie qu'il
lutte, les armes à la main, contre la monstruosité
et l'abjection que représente l'actuelle dictature militaire.
QU'EST-CE QU'UN
GUERILLERO URBAIN ?
La crise chronique
des structures qui caractérise la situation au Brésil
et l'instabilité politique qui en découle ont favorisé
le déclenchement de la guerre révolutionnaire.
Celle-ci se manifeste en termes de guérilla urbaine, de
guérilla rurale ou de guerre psychologique.
C'est au guérillero
urbain qu'il incombe de faire, dans les villes, la guérilla
aussi bien que la guerre psychologique.
C'est de lui que
je parlerai.
Le guérillero urbain est un homme armé qui lutte
contre la dictature militaire ou tout autres formes d'oppression
par des moyens non conventionnels. Révolutionnaire sur
le plan politique et vaillant patriote. Il lutte pour la libération
de son pays, il est ami du peuple et de la liberté. Son
champ de bataille, ce sont les grandes villes du pays.
Dans ces villes agissent également des bandits communément
traités, au Brésil, de " marginaux ".
Il arrive souvent que des attaques lancées par ces hors-la-loi
passent pour des actions opérées par de guérilleros.
Ceux-ci diffèrent
cependant radicalement de ceux-là.
Le " marginal " n'a en vue que son profit personnel
et attaque sans discrimination les exploiteurs ou les exploités,
ce qui fait que nombre de victimes sont des hommes et des femmes
du peuple. Le guérillero urbain, lui, lutte dans un but
politique et n'attaque que le gouvernement, les grands capitalistes
et les agents de l'impérialisme, en particulier les Américains
du Nord.
D'autres éléments aussi nuisibles que les hors-la-loi
sévissent dans les villes ; ce sont les contre-révolutionnaires
de droite, qui sèment la confusion, dévalisent
des banques, enlèvent ou assassinent des guérilleros,
des prêtres révolutionnaire, des étudiants
et des citoyens ennemis du fascisme et amants de la liberté.
Le guérillero
urbain est un implacable ennemi du gouvernement ; il porte systématiquement
préjudice aux autorités et aux hommes qui dominent
le pays et détiennent le pouvoir. Sa tâche principale
est de déjouer, discréditer et harceler les militaires
et toutes les forces de répression, de détruire
ou de saccager les biens appartenant aux nord-américains,
aux chefs d'entreprise étrangers ou à la grande
bourgeoisie brésilienne.
Le guérillero urbain ne craint pas de démanteler
et de détruire le système économique, politique
et social en vigueur, car son objectif est d'aider la guérilla
rurale et de contribuer à l'instauration de structures
sociales et politiques entièrement nouvelles et révolutionnaires,
où le pouvoir sera donné au peuple armé.
Le guérillero urbain doit acquérir un minimum de
connaissances politiques.
Il convient qu'il
cherche à lire les écrits suivants :
- La Guerre de guérilla, de Che Guevara (publié
dans Écrits militaires, petite Maspéro, Paris)
- Quelques questions sur les guérillas au Brésil
- Opérations et tactiques de guérilla (publié
dans le numéro de 1969 des temps modernes)
- Problèmes et Principes de stratégie (publié
dans le numéros de 1969 des temps modernes)
- Quelques principes tactiques pour les camarades qui réalisent
des opérations de guérilla
- Questions touchant l'organisation (publié dans le numéro
de 1969 des temps modernes)
- Le rôle de l'action révolutionnaire dans l'organisation
(publié dans le numéro de 1969 des temps modernes)
- Le guérillero, journal des groupes révolutionnaires
brésiliens.
LES QUALITES
PERSONNELLES DU GUERILLERO URBAIN
Le guérillero
urbain se caractérise par le courage et l'esprit d'initiative.
Il doit être un grand tacticien et bon tireur. Il compensera
par l'astuce son infériorité sur le plan des armes,
des munitions et de l'équipement.
Le militaire de carrière ou le policier au service du
gouvernement disposent d'un armement moderne et de bons véhicules
; ils peuvent circuler librement, aller où ils veulent,
puisqu'ils ont pour eux l'appui du pouvoir. Le guérillero
urbain, qui ne peut compter sur toutes ces ressources, agit dans
la clandestinité. Il arrive qu'il ait déjà
été condamné ou que pèse contre lui
un décret de prison préventive ; il est, dans ce
cas, contraint de faire usage de faux papiers.
Le guérillero urbain possède toutefois un gros
avantage sur le soldat conventionnel ou sur le policier : il
défend une juste cause, celle du peuple, tandis que les
deux autres se rangent du côté de l'ennemi que le
peuple déteste.
Les armes du guérillero urbain sont inférieures
à celles de son ennemi ; mais, sur le plan moral, sa supériorité
est indiscutable.
C'est grâce à elle qu'il peut remplir ses tâches
principales qui sont d'attaquer et de survivre.
Le guérillero urbain doit, pour pouvoir lutter, prendre
à l'ennemi ses armes.
Comme celles-ci
tombent entre ses mains dans les circonstances les plus diverses,
il finit par se trouver en possession d'un armement assez varié
et pour lequel manquent les munitions correspondantes.
Le guérillero urbain ne dispose d'aucun lieu où
il puisse s'exercer au tir.
Ces difficultés, il les vaincra grâce à son
pourvoir d'imagination et à sa capacité créatrice,
qui sont indispensable s'il veut mener à bien sa tâche
de révolutionnaire.
Le guérillero urbain doit être doté d'esprit
d'initiative, d'une grande mobilité, de souplesse, du
sens de l'adaptation et de beaucoup de sang-froid, la qualité
principale étant l'esprit d'initiative, car on ne peut
pas toujours tout prévoir et le guérillero urbain
ne peut se permettre de tomber dans la perplexité ni attendre
que lui soit donné un ordre.
Il doit agir, envisager,
pour chaque problème qui se présente, la solution
correspondante, et ne pas remettre à plus trad. Il vaut
mieux agir et se tromper que ne rien faire par souci d'éviter
l'erreur.
C'est bien connu
l'humain apprend de ses erreurs. Sans esprit d'initiative, il
n'y a pas de guérilla urbaine. D'autres qualités
sont souhaitées ; il faut être bon marcheur, pouvoir
résisté à la fatigue, la faim, à
la pluie et à la chaleur ; il faut savoir se cacher et
veiller, connaître l'art du déguisement, ne jamais
craindre le danger, être capable d'agir de nuit comme de
jour, ne pas agir avec précipitation, être doté
d'une patience sans limites, garde son calme et son sang-froid
dans les pires situations, ne pas laisser la moindre trace et
ne pas de décourager.
Face aux difficultés qu'ils considèrent comme presque
insurmontables, certains guérilleros faiblissent, se désistent
ou démissionnent.
La guérilla urbaine n'est pas une affaire commerciale,
un centre d'embauche ni la représentation d'une pièce
de théâtre. On s'y engage comme on s'engage dans
la guérilla rurale. Si on manque des qualités requises,
il vaut mieux renoncer à devenir un guérillero
urbain mais vous pouvez faire parti des réseaux de soutien
et d'information.
COMMENT VIT ET
SUBSISTE LE GUERILLERO URBAIN ?
Le guérillero
urbain doit savoir-vivre au milieu du peuple et veiller à
ne se distinguer en rien du citoyen ordinaire.
Il ne peut se vêtir d'une façon qui attire l'attention.
Des vêtements excentriques et à la mode détonnent
dans les quartiers ouvriers. Il en va de même pour ceux
qui vont du nord au sud du pays et vice versa, où la façon
de s'habiller varie.
Le guérillero urbain doit vivre de travail, de son activité
professionnelle.
S'il est recherché par la police ou connu d'elle, s'il
est condamné ou fait l'objet d'une mesure de prison préventive,
il doit entrer dans la clandestinité et parfois vivre
caché.
En toutes circonstances, le guérillero urbain ne doit
parler à personnes de ses activités ; celles-ci
ne concernent que l'organisation révolutionnaire à
laquelle il appartient.
Il doit avoir une
grande capacité d'observation, être très
bien informé, en particulier sur les mouvements de l'ennemi,
être un bon enquêteur et bon connaisseur du terrain
sur lequel il agit. Étant donné qu'il lutte les
armes à la main, il ne lui est guère possible de
s'acquitter pendant longtemps de ses obligations professionnelles
courantes sans se faire repérer.
C'est alors que la tâche appelée " expropriation
" s'importe à lui avec clarté. Il devient
en effet impossible au guérillero urbain de subsister
ou de survivre sans s'engager dans la lutte pour l'expropriation.
Dans le cadre de la lutte de classe, dont l'approfondissement
est aussi inévitable que nécessaire, la lutte armée
du guérillero urbain vise deux buts :
- la liquidation physique des chefs et des subalternes des forces
armées et de la police
- L'expropriation d'armes ou de biens appartenant au gouvernement,
aux grands capitalistes, aux latifondiaires et aux impérialistes.
Les expropriations
mineures servent à l'entretien personnel du guérillero
urbain ; les autres à alimenter la révolution.
Ces deux buts n'en
excluent pas d'autres, secondaires.
Une caractéristiques fondamentales de la Révolution
brésilienne est qu'elle passe, dès le début,
par la possession de la grande bourgeoisie, de l'impérialisme,
des latifondiaires et aussi des commerçants les plus riches
et les plus puissants, liés à l'importation ou
à l'exportation.
Les attaques contre les banques, réalisées au Brésil,
ont porté préjudice à de grands capitalistes
comme Moreira Salles, à des compagnies étrangères
chargées d'assurer ces mêmes banques, à des
firmes impérialistes, aux gouvernements fédéral
et des États, jusqu'ici systématiquement "
expropriés".
Le produit de ces expropriations est destiné à
l'apprentissage et au perfectionnement technique du guérillero
urbain, à l'achat, à la fabrication et au transport
des armes et des munitions destinées au secteur rural,
à l'organisation du réseau de sécurité
des révolutionnaires, à la subsistance quotidienne
des combattants, en particulier des camarades délivrés
de la prison par d'autres compagnons armés, des blessés
ou des camarades pourchassés par la police ou les soldats
de la dictature et qui doivent vivre dans la clandestinité.
C'est sur les exploiteurs et les oppresseurs du peuple que doivent
retomber les terribles charges de la guerre révolutionnaire.
Les hommes du gouvernement, les agents de la dictature et de
l'impérialisme doivent payer de leur vie les crimes commis
contre le peuple brésilien.
Au Brésil, le nombre d'actions violentes pratiqué
est déjà très élevé. Il comporte
des mises à mort, des explosions de bombes, des captures
d'armes, d'explosifs et de munitions, des " expropriations
" de banque, des attaques contre des prisons, etc. autant
d'actes qui ne peuvent laisser de doutes sur intentions des révolutionnaires.
La mise à
mort de l'espion de la C.I.A. Charles Chandler, militaire américain
qui, après avoir passé deux ans au Viêt-nam,
vint s'infiltrer dans le mouvement étudiant brésilien,
celle de plusieurs barbouzes et de plusieurs membres de la police
militaire, prouvent que nous sommes entrés dans un état
de guerre révolutionnaire, et que cette lutte passe nécessairement
par la violence.
Le guérillero
urbain doit donc concentrer tous ses efforts sur l'extermination
des agents de la répression et l'expropriation des exploiteurs
du peuple.
LA PREPARATION
TECHNIQUE DU GUERILLERO URBAIN
Personne ne peut
devenir guérillero sans passer par une phase de préparation
technique. Elle va de l'entraînement physique à
l'enseignement de professions ou d'activités de tout genre,
mais surtout manuelles.
On ne peut acquérir
une bonne résistance physique qu'en s'entraînent.
On ne peut devenir un bon lutteur qu'en apprenant l'art de lutter.
Le guérillero
urbain apprendra donc à pratiquer les différents
types de luttes, qu'ils regardent l'attaque ou la défense
personnelle.
Outre la préparation technique, je considère comme
utiles les formes d'entraînement telles que les excursions
à pied, le camping et des séjours prolongés
en forêt, l'ascension des montagnes, la natation, le canotage,
les plongées et les chasses sous-marines, à la
manière des hommes-grenouilles, la pêche, la chasse
aux volatiles et au gibier de petite et grande taille.
Il est très important d'apprendre à conduire une
voiture, piloter un avion, gouverner une embarcation à
moteur ou à voile, d'avoir des notions de mécanique,
de radiophonie, de téléphonie, d'électricité
et même d'électronique. Il est également
important de posséder de notions de topographie, de savoir
s'orienter, calculer les distances, établir des cartes
et des plans, chronométrer, transmettre des messages,
utiliser la boussole, etc.
Des connaissances de chimie, sur la combinaison des couleurs,
sur la fabrication des cachets, sur l'art d'imiter l'écriture
d'autrui et autres habiletés, font partie de la préparation
technique du guérillero urbain.
Pour pouvoir survivre
dans la société qu'il propose de détruire,
celui-ci est obliger de falsifier des documents, comme des passeports,
des permis de conduire, des cartes d'assurance maladies et divers
papiers d'identités.
En ce qui concerne les soins médicaux, il est clair que
jouent un rôle spécial et important les guérilleros
médecins, infirmiers ou pharmaciens, ainsi que ceux qui
possède des connaissances correspondantes (les premiers
soins), prescription et emploi de médicaments et notions
de chirurgie.
La partie la plus importante de la préparation technique
reste, toutefois, le maniement des armes telles que la mitraillette,
le revolver, les armes automatiques, le mortier, le bazooka,
le fusil FAL et d'autres types de carabine, s'y ajoute la connaissance
des différentes sortes de munitions et explosifs. La dynamite
est un de ces explosifs ; il importe de bien savoir s'en servir,
comme il importe de savoir utiliser les bombes incendiaires,
les grenades fumigènes, le C-4 et autres.
Il faut apprendre
à fabriquer des cocktails Molotov, des bombes, des mines,
à détruire des ponts, démonter ou détruire
des rails et des traverses de chemin de fer.
Le guérillero urbain parachèvera sa formation dans
un centre technique organisé à cet effet, mais
seulement après être passé par l'épreuve
du feu, c'est-à-dire avoir déjà combattu
contre l'ennemi.
LES ARMES DU
GUERILLERO URBAIN
Les armes du guérillero
urbain sont légères, facilement remplaçables,
en général prises à l'ennemi, achetées
ou fabriquées sur place. L'armement léger peut
être manié et transporté rapidement.
Cet armement se
distingue par son canon qui est court ; il comporte plusieurs
armes automatiques et semi-automatiques, qui augmentent considérablement
la puissance de feu du guérillero urbain, mais qui sont
difficilement contrôlables. De plus, celles-ci entraînent
une forte consommation, voire un certain gaspillage de munitions
que seule une grande précision de tir peut compenser.
L'expérience nous a montré que l'arme de base du
guérillero urbain est la mitraillette. Elle est efficace
et peut être facilement dissimulée ; elle impose
de plus le respect à l'adversaire. Il faut connaître
à fond le maniement de cette arme devenue si populaire.
La mitraillette idéale est l'INA, calibre 45. D'autres
de différents calibres, peuvent également être
utilisées mais il est moins facile de pourvoir à
leur chargement. On souhaitera donc que la base logistique industrielle
en arrive à produire un type uniforme de mitraillette
à munitions standardisées.
Chaque groupe de guérilleros doit disposer d'une mitraillette
maniée par un bon tireur.
Les autres auront
des revolvers 38, notre arme commune. L'usage du revolver 32
est permis mais nous donnons la préférence au 38,
à cause de sa force d'impact.
Les grenades à main et les grenades fumigènes peuvent
être considérées comme des armes légères,
utiles à la défensive et pour protéger la
retraite des guérilleros.
Les armes à canon long sont plus difficilement transportables
et attirent davantage l'attention. Parmi ces dernières
se rangent les FAL, les mausers, les fusils de chasses et les
Winchesters. Les fusils de chasse peuvent être efficaces
lorsqu'ils sont employés pour des tirs a faible portée
ou à bout portant, ce qui arrive surtout la nuit.
Un fusil à
air comprimé peut-être avantageusement employé
pour le tir à la cible. Des bazookas et des mortiers peuvent
être utilisés mais par des gens bien entraînés.
Les armes de fabrication artisanale sont parfois aussi efficaces
que les armes conventionnelles, ainsi que les fusils à
canon raccourci.
Les camarades qui sont armuriers jouent un rôle important.
Ils entretiennent les armes, les réparent et peuvent même
monter un atelier où ils en fabriqueront. Les ouvriers
métallurgistes, les mécaniciens et les tourneurs
sont des personnes tout indiquées pour assumer ce travail
de logistique industrielle. Ils peuvent, à partir de leurs
connaissances, aussi bien fabriquer secrètement des armes
chez eux.
On organisera aussi
des cours sur l'art de fabriquer des explosifs et l'art de saboter
; on y prévoira la possibilité de faire des expériences.
Les cocktails Molotov, L'essence, les instruments destinés
au lancement de pétards, les grenades faite au moyen de
tuyaux et de boîtes, les mines, les explosifs fabriqués
avec de la dynamite et du chlorate de potasse, le plastic, les
capsules fulminantes, etc. constituent l'arsenal du guérillero
soucieux de remplir sa mission.
Le matériel
nécessaire à la fabrication des ces engins sera
acheté ou dérobé à l'ennemi au cours
d'opérations soigneusement planifiées et exécutées.
Le guérillero veillera à ne pas garder longtemps
près de lui ce matériel susceptible de provoquer
des accidents ; il cherchera à s'en servir tout de suite.
L'introduction d'armes modernes, comme toute innovation en ce
domaine, influe directement sur les tactiques de la guérilla
urbaine. Ces tactiques changeront dès que sera généralisé
l'usage de la mitraillette standardisée. Les groupes de
guérilleros qui parviennent uniformiser leur armement
et leurs munitions acquièrent un pouvoir d'efficacité
supérieur aux autres car leur puissance de feu devient
plus grande.
LE TIR, RAISON
D'ETRE DU GUERILLERO URBAIN
La raison d'être
du guérillero urbain, son action, sa survie, tout cela
dépend de son art de tirer. Il est indispensable qu'il
s'en acquitte bien. Dans la guerre conventionnelle, le combat
se fait à distance et avec des armes à longue portée.
Dans la guérilla, c'est le contraire ; s'il ne tire pas
le premier, il risque de perdre la vie.
De plus, comme il
n'a sur lui que peu de munitions et que son groupe est réduit,
il ne peut perdre du temps ; il sera donc prompt au tir.
Un autre point sur lequel il convient d'insister jusqu'à
l'exagération, c'est que le guérillero urbain ne
peut tirer jusqu'à épuisement de ses munitions.
Il est, en effet, possible que l'ennemi ne riposte pas, précisément
parce qu'il attend que l'autre ait fait usage de toutes ses balles,
s'exposant ainsi à la capture ou à la mort.
Afin d'éviter d'être une cible facile, le combattant
ne cessera de se mouvoir, tout en tirant.
On devient un bon tireur en s'exerçant systématiquement
par les moyens les plus divers : en tirant à la cible
dans les fêtes foraines ; en tirant, chez soi, avec un
fusil à air comprimé, etc. Le bon tireur pourra
devenir un franc-tireur, c'est-à-dire un guérillero
solitaire, capable d'opérer des actions isolées.
En tant que tel, il devra pourvoir tirer à longue et courte
distance, avec des armes appropriées à l'une ou
l'autre fonction.
LES " GROUPES
DE FEU " (CELLULES)
Les guérilleros
urbains seront organisés en petits groupes. Chaque groupe,
appelé " groupe de feu " (cellule), ne peut
dépasser le nombre de 4 ou 5 personnes. Un minimum de
2 groupes (cellules), rigoureusement compartimentés et
coordonnés par 1 ou 2 personnes, s'appelle une "
équipe de feu " (réseau).
Au sein de chaque groupe (cellule) doit régner la plus
grande confiance. Celui qui tire le mieux et sait manier la mitraillette
se chargera d'assurer la protection de ses camarades au cours
des opérations. Chaque groupe planifiera et exécutera
les opérations qu'il aura décidées, gardera
des armes, discutera et corrigera les tactiques employées.
Le groupe agit de
sa propre initiative, sauf dans l'accomplissement des tâches
décidées par le commandement général
de la guérilla (cellule centrale ou comité central).
Pour donner libre cours à cet esprit initiative, on évitera
toute rigidité à l'intérieur de l'organisation.
C'est d'ailleurs pour cela que la hiérarchisation caractéristique
de la gauche traditionnelle n'existe pas chez nous.
Parmi les initiatives possibles laissées à la décision
de chaque groupe (cellule), citons : les raids contre des banques,
les enlèvements de personnes, les exécutions d'agents
notoires de la dictature ou de la réaction ou des espions
et délateurs au sein de l'organisation, toute forme de
propagande ou de guerre de nerfs. Il n'est pas nécessaire,
avant de décider de l'une de ces opérations, de
consulté le commandement général de la guérilla
(cellule centrale ou comité central). Aucun groupe ne
doit, du reste, attendre, pour agir, que lui viennent des ordres
d'en haut.
Tout citoyen désireux
de devenir guérillero peut, de lui-même, passer
à l'action et s'intégrer à notre organisation,
En procédant de la sorte, il est plus difficile de savoir
à qui doit être attribué tel ou tel coup,
l'essentiel étant qu'augmente le volume des actions réalisées.
Le commandement général de la guérilla (cellule
centrale ou comité central) compte sur ces groupes (cellules)
pour les envoyer remplir des missions en n'importe quel point
du pays. Lorsqu'ils sont en difficulté, il se chargera
de les aider. Notre organisation révolutionnaire est constituée
par un réseau vaste et indestructible de " groupe
de feu " (cellule). Son fonctionnement est simple et pratique
; le commandement général de la guérilla
(cellule centrale ou comité central) l'oriente ; ceux
qui le composent participent aux même coups car tout ce
qui n'est pas l'action directe ne nous intéresse pas.
LA LOGISTIQUE
DU GUERILLERO URBAIN
La logistique conventionnelle
peut s'exprimer par la formule N.C.E.M. qui veut dire:
N = Nourriture
C = Combustible
E = Équipement
M = Munitions
Le guérillero
urbain, lui, ne fait pas partie d'une armée régulière;
son organisation est intentionnellement fragmentée. Il
ne dispose pas de camions, de bases fixes et la logistique industrielle
de la guérilla urbaine est difficile à implanter.
La logistique du guérillero urbain correspondra donc à
la formule M.A.M.A.E. :
M = Motorisation
A = Argent
M = Munitions
A = Armes
E = Explosifs
La logistique révolutionnaire
comporte donc la motorisation qui est un facteur essentiel. Il
faut des chauffeurs. Ceux-ci doivent, comme les autres guérilleros,
subir un bon entraînement. D'ailleurs, tout bon guérillero
sera aussi un bon chauffeur.
Les véhicules dont il a besoin, il les " expropriera
" s'il ne dispose pas de ressources pour en acheter. Comme
pour l'achat d'armes, de munitions et d'explosif, le guérillero
prélèvera l'argent des banques.
Ces " expropriations
" sont, au départ, indispensables à notre
organisation. Il faut aussi bien dérober les armes en
vente dans les magasins que celles que portent en bandoulière
les soldats de la garde civile ou de la garde militaire. Postérieurement,
lorsqu'il s'agira de développer la force logistique, les
guérilleros tendront des embuscades à l'ennemi
afin de capturer ses armes, ses munitions et ses moyens de transport.
Sitôt dérobé, le matériel doit être
caché, même si l'ennemi cherche à riposter
ou à poursuivre les assaillants. Il importe donc qu'ils
connaissent très bien le terrain où ils agissent
et qu'ils s'annexent des guides spécialement préparés.
LA TECHNIQUE
DU GUERILLERO URBAIN
La technique est,
en gros, l'ensemble des moyens qu'utilise un homme pour exécuter
un travail. La technique du guérillero , qui concerne
aussi bien la guérilla proprement dite que la guerre psychologique,
repose sur cinq données de base :
LES CARACTERISTIQUES DE LA LUTTE DE GUERILLA
La technique employée
par le guérillero urbain présente les caractéristiques
suivantes:
- Elle est agressive ou offensive. Pour le guérillero,
dont la puissance de feu est inférieure à celle
de l'ennemi, qui ne put compter sur l'appui du pouvoir et ne
peut répondre à une attaque massive des forces
adverses, la défensive ne peut qu'être fatale. C'est
pourquoi jamais il ne cherchera à fortifier ou à
défendre une base fixe; jamais il n'attendra d'être
encerclé pour riposter.
- Elle repose sur l'attaque suivie d'une retraite immédiate,
nécessaire à la préservation des forces
de la guérilla.
- Elle vise à harceler, décourager, distraire les
forces dont l'ennemi dispose dans les villes afin de favoriser
le déclenchement et l'implantation de la guérilla
rurale dont le rôle, dans la guerre révolutionnaire,
est décisif.
LES AVANTAGES DU GUERILLEROS URBAIN SUR L'ENNEMI
La dynamique de
la guérilla urbaine aboutit à l'affrontement violent
du combattant et des forces de répression de la dictature.
Celles-ci disposent de forces supérieures à celles
du premier. Il n'en incombe pas moins au guérillero urbain
d'attaquer le premier.
Les forces militaires
et policières riposteront en mobilisant des ressources
infiniment plus grandes. Le guérillero urbain ne pourra
échapper à la persécution et à la
destruction qu'en exploitant à fond les avantages dont,
au départ, il jouit. Ce sera sa façon de compenser
sa faiblesse matérielle.
Ces avantages consistent à:
- Attaquer l'ennemi par surprise
- Mieux connaître que l'ennemi le terrain sur lequel il
combat
- Jouir d'une plus grande mobilité ou d'une plus grande
rapidité que les forces de répression
- Disposer d'un réseau d'information meilleur que celui
de l'ennemi
- Faire preuve d'une telle capacité de décision
que ses compagnons se sentent encouragés et ne puissent
même pas hésiter alors qu'en face d'eux, l'ennemi
ne saura où donner de la tête.
LA SURPRISE
La surprise est donc un élément très important
et qui permet de compenser l'infériorité du guérillero
sur le plan des armes. Contre elle, l'ennemi ne peut rien opposer;
il tombe dans la perplexité et court à sa perte.
Dans le déclenchement
de la guérilla urbaine au Brésil, l'effet de surprise
a été largement exploité. Il est fonction
de quatre données de base que l'expérience nous
fait définir comme suit:
- Nous connaissons la situation de l'ennemi que nous allons attaquer,
généralement grâce à des informations
précises et à une observation méticuleuse,
alors que lui-même ignore qu'il va être attaqué
et quelle sera la position de l'attaquants
- Nous connaissons la force de ceux que nous attaquons et eux
méconnaissent la nôtre
- Nous pouvons mieux que l'ennemi économiser et préserver
nos forces
- C'est nous qui choisissons l'heure et le lieu de l'attaque,
qui décidons de sa durée et des objectifs à
atteindre. L'ennemi en ignore tout.
LA CONNAISSANCE
DU TERRAIN
Le guérillero urbain, s'il veut que le terrain soit son
meilleur allié, doit le connaître jusque dans ses
moindres détails. Ce n'est pas qu'ainsi qu'il pourra intelligemment
faire usage de son relief, des ses talus et des ses fossés,
de ses accidents, de ses zones laissées à l'abandon,
etc.
Afin de faciliter
le tir, les opérations de retrait, et aussi de se cacher/
Les points d'étranglement tels que les impasse, les cul-de-sac,
les rues en chantier, les poste de contrôle de la police,
les zones militaires, les entrés ou sorties de tunnels,
les viaducs, les carrefours garnis d'agents de la circulation,
de sémaphores ou de toute autre signalisation, doivent
être soigneusement repérés si l'on veut éviter
des erreurs fatales.
Ce qui importe,
c'est de bien connaître les chemins par lesquels les guérilleros
passeront et les endroits où ils se cacheront, laissant
l'ennemi à la merci du lieu qu'il ignore. Familiarisé
avec les rues, les coins et les recoins des centres urbains,
connaissant bien les terrain vague, les égouts, les massifs
de verdure, les immeubles en construction, le guérillero
urbain peut semer facilement la police ou la surprendre en lui
dressant un piège ou une embuscade.
S'il connaît
le terrain, le guérillero pourra indifféremment
le parcourir à pied, à bicyclette, en automobile,
en Jeep ou en camion sans ce faire arrêter.
S'il agit au sein d'un petit groupe de combattants, il pourra
facilement le reconstituer en un endroit choisi d'avance, avant
de déclencher une nouvelle opération. C'est pour
la police un véritable casse-tête que de retrouver
ou contre-attaquer un guérillero, dans un dédale
de rues que lui seul connaît. L'expérience nous
a montré que l'idéal, pour un guérillero
urbain, est d'agir dans sa propre ville puisque c'est celle-là
qu'il connaît le mieux. Celui qui vient d'ailleurs ne peut,
avec autant de compétence que le premier, mener à
bien une opération de guérilla.
MOBILITE ET RAPIDITE
La mobilité et la rapidité du guérillero
urbain doivent être supérieures à celles
de la police. A cet effet, il veillera:
- à être motorisé ;
- à bien connaître le terrain ;
- à saboter ou entraver les communications ou les moyens
de transport de l'ennemi ;
- à s'assurer la possession d'un armement léger.
Lorsqu'il réalise des opérations qui ne durent
que quelques minutes et s'il quitte le lieu de son action au
moyen d'un véhicule à moteur, le guérillero
ne pourra échapper à ceux qui le poursuivent que
si, au préalable, il a déjà reconnu l'itinéraire.
Il n'opérera
que dans des endroits éloignés des bases logistiques
de la police afin de faciliter sa fuite.
Il devra aussi viser à entraver les communications de
l'ennemi, sa première cible étant le téléphone
dont il fera couper les fils.
Les forces de répression disposent de moyens de transport
très modernes ; il faut s'efforcer de leur faire perdre
du temps lorsqu'elles doivent traverser le centre congestionné
des grandes villes. Les embouteillages peuvent également
nous désavantager.
Nous veillerons
donc nous assurer une position favorable, en adoptant les moyens
suivants:
- La simulation d'une panne ou le barrage d'une route, que d'autres
compagnons assumeront, en utilisant des véhicules dont
les plaques seront fausses ;
- L'obstruction du chemin au moyen de troncs d'arbres, de pierres,
de fausses plaques de signalisation, de trous ou par tout autre
moyen efficace et astucieux ;
- La pose de mines de fabrication artisanale aux endroits par
où devra passer la police et l'incendie de ses moyens
de transport avec de l'essence ou des cocktails Molotov ;
- Le mitraillage, surtout dans le but de faire éclater.
les pneus des véhicules de la police. Le rôle du
guérillero urbain est d'attaquer puis aussitôt de
battre en retraite ; c'est ainsi que, doté d'un armement
léger, il peut mettre en échec l'ennemi lourdement
et fortement armé. Sans un armement léger, on ne
peut jouir d'une grande mobilité.
Les guérilleros
pourront toujours être motorisés si la police les
attaque à cheval. De l'intérieur de leur voiture,
ils pourront facilement tirer contre ces attaquants. Le grand
désavantage de la cavalerie est qu'elle offre aux guérilleros
deux cibles: le cheval et son cavalier.
L'utilisation par les forces do répression de l'hélicoptère
n'offre guère d'avantages ; il sera difficile à
ceux qui l'occupent de tirer de si haut et impossible de se poser
sur la voie publique. Volant à basse altitude, il pourra
facilement être atteint par le tir des guérilleros.
L'INFORMATION
Les chances qu'a le gouvernement de découvrir et de décimer
les guérilleros diminuent fortement dans la mesure où,
au milieu de la population, se multiplient les ennemis de la
dictature.
Ceux-ci, en effet,
nous informeront sur les activités de la police et des
agents gouvernementaux qu'ils ne renseigneront jamais sur nos
propres activités. Pour les embarrasser, ils chercheront
plutôt à leur donner de fausses informations. De
toute façon, les sources do renseignements du guérillero
urbain sont potentiellement plus grandes que celles de la police.
Celle-ci se sait
observée par la population, mais elle ignore qui se rend
complice du guérillero et dans la mesure où elle
commet des injustices et fait violence à des citoyens,
elle favorise cette complicité entre le peuple et les
guérilleros.
Même si les informations nous proviennent que d'une très
petite fraction de la population, elles constituent pour nous
une arme précieuse. Elles ne nous dispensent cependant
pas de créer notre propre service de renseignements, et
d'organiser ce réseau d'intelligences.
Des informations sûres données au guérillero
signifient que des coups également sûrs pourront
être portés contre le système de la dictature.
Afin de s'opposer plus efficacement à nous, l'ennemi stimulera
la délation, et s'infiltrera en nous envoyant ses espions.
Les traîtres et les délateurs, aussitôt qu'ils
seront connus, devront être dénoncés auprès
de la population. Dans la mesure où le gouvernement se
rendra impopulaire, celle-ci se chargera de les châtier.
En attendant, dès
qu'ils les connaîtront, les guérilleros devront
procéder à leur élimination physique, ce
que la population ne manquera pas d'approuver et ce qui diminuera
considérablement l'infiltration et l'espionnage de l'ennemi.
Cette lutte, on la complétera en organisant un service
de contre-espionnage.
C'est en vivant au milieu de la population, en prêtant
attention à tous les types de conversations et de relations
humaines, non sans dissimuler avec un maximum d'astuce sa curiosité,
que le guérillero complétera son information. Celle-ci
concernera tout ce qui peut se passer sur les lieux de travail,
dans les écoles et facultés, dans les quartiers
où habitent les combattants, qu'il s'agisse des opinions
ou de l'état d'esprit des gens, de leurs voyages, de leurs
affaires, de leurs fréquentations, de tout ce qui les
occupe.
Le guérillero urbain ne se déplace jamais sans
avoir toujours à l'esprit la préoccupation de mettre
au point un éventuel plan d'opération. Il n'y a
pas d'interruption dans la vie du combattant ; il doit toujours
être en éveil et enrichir sa mémoire do tout
ce qui peut lui être utile dans 1'immédiat comme
pour le futur.
Il lira attentivement
les journaux et s'intéressera aux autres moyens de communication,
il enquêtera, ne cessera de transmettre à ses compagnons
tout ce qui attire son attention ; c'est là tout ce qui
constitue 1'immense réseau d'informations donnant au guérillero
urbain un net avantage.
L'ESPRIT DE DECISION
Un manque d'esprit de décision annule aussitôt les
avantages que nous venons d'énumérer. S'il n'est
pas sûr de lui, le guérillero risque d'échouer,
pour bien p1anifiée qu'ait été son action.
Cette capacité de décision doit être maintenue
jusqu'au bout, sans quoi une opération bien commencée
peut, par la suite, se retourner contre lui, car l'ennemi profitera
de sa panique ou de son hésitation pour 1'anéantir.
Il n'existe pas d'opérations faciles.
Elles doivent être
exécutées avec le même soin et par des hommes
soigneusement choisis, précisément en fonction
de leur esprit de décision. C'est au cours de la période
de préparation que 1'on verra dans quelle mesure les candidats
à la guérilla en sont dotés.
Ceux qui, au cours
de ces périodes, arrivent en retard aux rendez-vous, confondent
facilement les hommes, ne les trouvent pas, oublient l'une ou
l'autre chose, n'observent pas les normes élémentaires
du travail, se révèlent être des gens peu
décidés et susceptibles de porter préjudice
à la lutte - il vaut mieux les écarter. Être
décidé, cela signifie exécuter avec une
détermination, une audace et une fermeté incroyables
un plan tracé. Un seul indécis peut perdre tout
un groupe.
LES OBJECTIFS VISES PAR LE GUERILLERO
Les objectifs que
visent les attaques déclenchées par les guérilleros
urbains sont, au Brésil, les suivants:
- Ébranler le polygone de sustentation de l'État
et de la domination nord-américaine. Ce polygone est constitués
par le triangle Rio-Sao Paulo-Belo Horizonte, triangle dont la
base correspond à 1'axe Rio-Sao Paulo. C'est là
que se situe le gigantesque complexe industriel, financier, économique,
politique, culturel et militaire du pays, c'est à dire
le centre de décision national
- Affaiblir le système de sécurité de la
dictature en forçant 1'ennemi à mobiliser ses troupes
pour la défense de cette base de sustentation, sans qu'il
sache jamais quand, où, comment il sera attaqué
;
- Attaquer de toutes parts, avec beaucoup de petits groupes armés,
bien compartimentés et même sans éléments
de liaison, afin de disperser les forces gouvernementales. Plutôt
que de donner à la dictature 1'occasion de concentrer
son appareil de répression en lui opposant une armée
compacte, on se présentera avec une organisation très
fragmentée sur tout le territoire national ;
- Donner des preuves de combativité, de détermination,
de persévérance et de fermeté afin d'entraîner
tous les mécontents à suivre notre exemple, à
employer, comme nous, les tactiques de la guérilla urbaine.
En procédant
ainsi, la dictature devra envoyer des soldats garder les banques,
les industries, les magasins d'armes, les casernes, les prisons,
les bâtiments de l'administration, les stations de radio
et de télévision, les firmes nord-américaines,
les gazomètres, les raffineries de pétrole, les
bateaux, les avions, les ports, les aéroports, les hôpitaux,
les ambassades, les entrepôts d'alimentation, les résidences
des ministres, des généraux et des autres personnalités
du régime, les commissariats de police, etc.
- Augmenter graduellement les troubles par le déclenchement
d'une série interminable d'actions imprévisibles,
forçant ainsi le pouvoir maintenir le gros de ses troupes
dans les villes, ce qui affaiblit la répression dans les
campagnes ;
- Obliger l'armée et la police, ses commandants, ses chefs
et leurs subordonnés à quitter le confort et la
tranquillité des casernes et de la routine et les maintenir
dans un état d'alarme et de tension nerveuse permanentes,
on les attirer sur des pistes qui ne mènent nulle part
;
- Éviter la lutte ouverte et les combats décisifs,
en se limitant à des attaques-surprise, rapides comme
l'éclair ;
- Assurer au guérillero urbain une très grande
liberté de mouvement et d'action, pour qu'il puisse maintenir
une cadence soutenue dans l'emploi de la violence, aider ainsi
au déclenchement de la guérilla rurale et, postérieurement,
à la formation de l'armée révolutionnaire
de libération nationale.
LES MODES D'ACTION DU GUERILLERO
Pour atteindre les
objectifs énumérés ci-dessus, le guérillero
urbain est obligé de recourir à des modes d'action
les plus diversifiés possible, mais non pas arbitrairement
choisis.
Certaines de ces actions sont simples ; d'autres, plus complexes.
Aussi le guérillero
qui débute devra-t-il suivre cette échelle allant
du simple au compliqué. Avant d'entreprendre une mission,
il doit considérer les moyens et les personnes dont il
dispose pour l'accomplir. Il ne s'assurera la collaboration que
de gens techniquement préparés. Ces précautions
une fois prises, il pourra envisager les modes d'action suivants:
- L'attaque
- L'incursion ou invasion d'un lieu
- L'occupation d'un lieu
- Les embuscades
- Le combat tactique de rue
- La grève ou toute interruption de travail
- La désertion, le détournement ou 1' " expropriation
" d'armes, de munitions et d'explosifs
- La libération de prisonniers.
- La mise à mort.
- L'enlèvement
- Le sabotage
- Le terrorisme
- La propagande armée
- La guerre des nerfs.
L'ATTAQUE
Certains raids doivent être réalisés de jour,
par exemple quand il s'agit d'attaquer un fourgon postal ; d'autres,
la nuit, lorsque c'est plus avantageux pour le guérillero.
L'idéal serait que toutes les attaques aient lieu la nuit
; cela augmente l'effet de surprise et favorise la fuite.
On distingue les attaques contre des objectifs fixes, tels que
les banques, les maisons de commerce, les casernes, les prisons,
les stations de radio etc., des attaques contre des objectifs
mobiles comme les voitures, les camions, les trains, les embarcations,
les avions, etc. S'il s'avère difficile de détruire
ces objectifs en mouvement, on cherchera à les arrêter,
par exemple en dressant des barrages sur les routes, en tendant
des embuscades.
Les véhicules lourds, les trains, les bateaux ancrés
dans les ports, les avions peuvent être attaqués
et leurs conducteurs ou pilotes maîtrisés par les
guérilleros qui les dévieront de leur itinéraire.
Les raids contre des banques sont les modes d'action les plus
populaires. Au Brésil, ils sont largement pratiqués
; nous en avons fait un peu comme un examen d'entrée dans
l'apprentissage de la technique de la guerre révolutionnaire.
Au cours de ces attaques, on peut faire usage de techniques variées:
enfermer le personnel de la banque dans les toilettes on le faire
asseoir sur le sol, immobiliser les soldats charges do la garder,
leur prendre leurs armes, tandis qu'on forcera le gérant
à ouvrir le coffre-fort.
On peut, pour égarer
la police, se déguiser ; et, dans la fuite, on tirera
dans les pneus des véhicules qui chercheraient à
prendre en chasse les guérilleros.
Le fait d'y installer
des sonneries d'alarme ou d'autres moyens électroniques
destins à avertir la police n'empêche pas le guérillero
de poursuivre ses opérations. Il emploiera, lui aussi,
des moyens nouveaux, fera usage d'une puissance de feu croissante,
sera entouré d'un plus grand nombre de compagnons et préparera
l'attaque jusque dans les moindres détails.
Dans ce genre d'expropriations, les révolutionnaires souffrent
d'une double concurrence:
- celle des bandits ;
- celle des contre-révolutionnaires de droite.
Ceci constitue un facteur de confusion pour la population. Le
guérillero cherchera dès lors à l'éclairer
sur le sens politique de son action, de deux façons:
- Il refusera de se comporter comme un bandit, c'est-à-dire
d'abuser de la violence et de s'approprier de l'argent et des
objets personnels des clients qui se trouveraient dans la banque.
- Il joindra, à l'expropriation, des actes de propagande,
en écrivant sur les murs des slogans stigmatisant les
classes dominantes et l'impérialisme, répandra
des tracts, divulguera des circulaires énonçant
les fins politiques qu'il poursuit.
LES INCURSIONS
ET LES INVASIONS
Les incursions et les invasions sont des attaques-éclairs
pratiquées contre des bâtiments situés dans
les quartiers périphériques et même dans
le centre des villes. Certaines incursions auront un double but
exproprier, exercer des représailles, délivrer
des camarades prisonniers, détruire la logistique de l'ennemi
et aussi le forcer à se déplacer, l'entraîner
loin de ses bases.
Certaines incursions auront pour objectif l'appréhension
de documents ou de papiers secrets prouvant la corruption, les
malversations, le trafic d'influence, les transactions criminelles
passées avec des Nord-Américains dont sont coupables
les hommes du gouvernement.
LES OCCUPATIONS
DE LIEU
Un groupe de guérilleros urbains peut attaquer un lieu,
s'y installer et résister à l'ennemi pendant un
certain temps, afin de réaliser un acte de propagande.
Les occupations
d'école ou de fabrique on d'une station de radio sont
particulièrement importantes car elles ont une très
grande répercussion. Mais comme le danger de perdre des
hommes et du matériel est plus grand, on veillera à
préparer soigneusement la retraite. De toute façon,
plus on est rapide dans l'accomplissement de l'opération
de propagande projetée, mieux ça vaut.
LES EMBUSCADES
Les embuscades sont des attaques réalisées par
surprise. Elles consistent à attirer l'ennemi dans un
piège, par exemple en lui adressant un faux appel au secours.
Le but des embuscades est de punir l'ennemi de mort ou de lui
prendre ses armes.
Le guérillero franc-tireur peut facilement dresser des
embuscades car il lui est aisé, puisqu'il est seul, de
se cacher. Il peut se dissimuler sur les toits, à l'intérieur
de certaines constructions, dans la nature.
LES COMBATS TACTIQUES
DE RUE
Par les combats tactiques de rue, les guérilleros visent
à s'allier la participation des masses contre l'ennemi.
Au cours de l'année 1968, les étudiants brésiliens
ont réussi à réaliser d'excellentes opérations
tactiques, en lançant des milliers de manifestants dans
les rues à sens unique et à l'encontre des voitures,
en utilisant des lance-pierres et des billes de verre qu'ils
répandaient entre les pattes des chevaux de la police
montée.
À part cela,
on peut dresser des barricades, dépaver les chaussées,
lancer, du haut des immeubles et des gratte-ciel, des bouteilles,
des briques et autres projectiles.
Il faut aussi savoir répondre aux attaques de l'ennemi.
Lorsque la police avance, armée de boucliers, il faut
se scinder en deux groupes, l'un attaquant par-devant et l'autre
par-derrière, l'un se retirant quand l'autre lance ses
projectiles.
Lorsque les forces ennemies détachent un groupe de soldats
ou de policiers pour encercler un ou plusieurs de nos camarades,
nous devons, à notre tour, détacher un groupe plus
important pour encercler ceux qui les encerclent.
Lorsque l'ennemi encercle des écoles, des usines, des
lieux de rassemblement de la population, les guérilleros
urbains ne doivent jamais ni se rendre ni se laisser surprendre.
Dans ce but, ils
auront soin, avant de pénétrer dans un de ces endroits,
d'en étudier au préalable les issues possibles,
les moyens de briser l'encerclement, et déterminer les
points stratégiques et les chemins par où devront
nécessairement passer les véhicules de la police.
Ensuite, ils choisiront leurs propres points stratégiques,
à partir desquels ils affronteront l'ennemi. Les chemins
par où doivent passer les véhicules de la police
seront minés.
Les guérilleros n'organiseront aucune réunion,
assemblé ou occupation en des lieux dépourvus de
bonnes possibilités de fuite.
C'est de cette façon que s'articule l'action des guérilleros
urbains avec les mouvements de masses. Les guérilleros
ont alors pour tâche d'encadrer, d'appuyer et de défendre
les manifestations de masses.
Contre ceux qui
veulent assaillir les manifestants, ils tireront, incendieront
les véhicules, séquestreront leurs occupants ou
les fusilleront, en particulier les barbouzes et les chefs des
polices parallèles qui, pour ne pas attirer l'attention,
s'amènent dans des voitures particulières munies
de fausses plaques.
Une autre de leurs missions est d'orienter les manifestants et
de faciliter leur fuite. Ils seront, d'autre part, aidés
par les francs-tireurs qui leur donneront la meilleure couverture
possible.
LES INTERRUPTIONS
DE TRAVAIL
La grève intéresse avant tout ceux qui étudient
ou ceux qui travaillent. Comme elle constitue pour les exploités
un moyen de pression très redouté, l'ennemi cherchera
à l'empêcher ou à la briser en multipliant,
s'il le faut, sa puissance de feu. Il cherchera à frapper
les grévistes, à les arrêter ou même
à les tuer.
Dans l'organisation des grèves, les guérilleros
doivent donc procéder sans laisser le moindre indice pouvant
mener à l'identification des responsables. Ils prépareront
ces grèves, avec des petits groupes et dans le plus grand
secret. Ils se muniront d'armes, d'explosifs, de cocktails Molotov
et de bombes de fabrication artisanale afin de pouvoir affronter
l'ennemi.
Et pour que celui-ci
soit gravement atteint, on aura aussi mis au point un plan de
sabotage que l'on exécutera au bon moment. Les interruptions
de travail ou d'étude, pour brèves qu'elles soient,
n'en inquiètent pas moins l'ennemi.
Il suffit, en effet,
que surgissent, de différents points d'un lieu, des groupes
troublant le rythme de vie quotidien et opérant comme
un mouvement de flux et de reflux, pour créer une agitation
qui est, elle aussi, une opération do guérilla.
Au cours de ces interruptions de travail, les guérilleros
pourront occuper le local qui les intéresse afin d'y faire
des prisonniers, d'emmener des personnes en otages, particulièrement
des agents notoires de l'ennemi, afin de les échanger
contre des grévistes détenus.
Ces grèves peuvent éga1ement favoriser la préparation
d'embuscades dans le but de liquider physiquement les policiers
les plus sanguinaires et les responsables des tortures infligées
aux patriotes.
LES DESERTIONS
ET LES DETOURNEMENTS OU "EXPROPRIATIONS " D'ARMES,
DE MUNITIONS ET D'EXPLOSIFS
Les détournements d'armes sont pratiqués dans les
casernes, sur les bateaux, dans les hôpitaux militaires,
etc. Le guérillero urbain, qui est aussi soldat, caporal,
sergent, sous-officier ou officier de l'armée, désertera
au bon moment, emportant avec lui le plus d'armes possibles,
les plus modernes, et des munitions qu'il mettra au service de
la révolution.
Un de ces " bons moments " se présente quand
le soldat est appelé à quitter sa garnison pour
aller combattre ses camarades guérilleros ; il lui sera
alors plus facile de leur remettre ses armes, les véhicules
qu'il conduit ou l'avion qu'il pilote.
Ce moyen d'approvisionnement offre un grand avantage c'est avec
les moyens de transport du gouvernement en place que, sans qu'ils
se donnent beaucoup de peine, les guérilleros sont pourvus
d'armes et de munitions.
Les camarades qui sont militaires seront, de toute façon,
attentifs à choisir d'autres occasions d'aider ainsi les
révolutionnaires.
Si ceux qui les
commandent sont mous, versent dans le bureaucratisme, s'acquittent
mal de leurs tâches, ils ne feront rien pour y remédier
; ils se contenteront d'en aviser 1'organisation révolutionnaire
à laquelle ils sont liés et prépareront,
seuls ou avec d'autres compagnons, leur désertion, non
sans veiller à emporter tout ce qu'ils peuvent.
Les incursions de guérilleros à l'intérieur
des casernes et autres bâtiments militaires, réalisées
dans le but de dérober des armes, pourront être
préparées avec la collaboration des camarades soldats.
S'il n'est vraiment pas possible de déserter en emportant
des armes, ces camarades devront alors se vouer au sabotage faire
exploser ou incendier des dépôts d'armes, d'explosifs
et de munitions. Toutes ces activités affaiblissent et
découragent fortement l'ennemi.
Les guérilleros captureront encore des armes en saisissant
celles que portent les sentinelles ou toute personne remplissant
une mission de surveillance ou de répression. On procédera
par la violence ou par la surprise et l'astuce. Lorsqu'on désarme
un ennemi, il faut toujours le fouiller afin de savoir s'il ne
possède pas une autre arme cachée dont il pourrait
se servir contre celui qui l'assaille.
Dans la mesure où se multiplie le nombre de patriotes
décidés à passer à l'action, ces
captures d'armes se font de plus en plus nécessaires.
Souvent, le guérillero commencera à lutter avec
une arme qu'il aura achetée ou dérobée ;
ensuite il lui faudra agir avec audace et esprit de décision
; notre force est celle de nos armes.
Lors des attaques contre des banques, on saisira aussi systématiquement
les armes des soldats de la garde civile charges de les protéger
ainsi que celles des gérants ou des trésoriers.
Enfin, on pourra s'armer aux frais des commissariats de police,
des magasins spécialisés dans la vente de ces objets
et des fabriques d'armes, en opérant contre eux des raids.
On dérobera aussi les explosifs dont on se sert dans les
carrières.
LA LIBERATION
DES PRISONNIERS
Certaines actions à main armée sont destinés
à délivrer des guérilleros sous les verrous.
Tout révolutionnaire court le risque d'être, un
jour, arrêté et condamné à de nombreuses
années de détention. Son combat n'en sera pas pour
autant terminé ; l'expérience de la prison sera
un enrichissement et, en prison toujours, il devra continuer
la lutte.
Il cherchera d'abord à bien connaître le lieu de
sa détention avant de pouvoir s'échapper rapidement
et facilement, lorsque des camarades armés viendront le
libérer.
Aucune prison, qu'elle
soit située dans une île du littoral, en ville ou
à la campagne, ne peut être considérée
comme inexpugnable, face à l'astuce et à la puissance
de feu des révolutionnaires.
Le guérillero en liberté cherchera, lui, à
connaître les établissements pénitentiaires
de 1'ennemi car il sait qu'y croupissent beaucoup de ses frères
d'armes. C'est du travail du guérillero en liberté
et du guéri1lero emprisonné que dépend le
salut des prisonniers.
Les opérations pouvant y conduire sont les suivantes:
- Les mutineries à l'intérieur des maisons de correction,
des colonies pénitencières, dans les îles
réservées aux détenus, sur les navires-prisons
;
- Les attaques partant de l'extérieur ;
- Les attaques contre les trains et les véhicules de transport
des prisonniers ;
- Les embuscades dressées contre les soldats ou les policiers
chargés de les escorter.
LA MISE A MORT
Seront punis de mort des gens comme les espions américains,
les agents de la dictature, les tortionnaires, les personnalités
fascistes du gouvernement coupables de crimes et de poursuites
contre les patriotes, les délateurs et les informateurs
de la police. Ceux qui, de leur propre gré, se rendent
à la police pour dénoncer des militants, fournir
des renseignements, aider les enquêteurs, s'ils tombent
sur des guérilleros, ceux-ci devront les abattre.
Ces mises à mort sont des actions secrètes ; n'y
participe que le plus petit nombre possible de guérilleros.
Très souvent, un simple franc-tireur, patient et inconnu,
qui agit dans la plus rigoureuse clandestinité et avec
le plus grand sang-froid, pourra s'acquitter de cette tâche.
L'ENLEVEMENT
On pourra kidnapper et détenir dans un endroit secret
un agent de la police, un espion nord-américain, une personnalité
politique ou un ennemi notoire et dangereux du mouvement révolutionnaire.
On ne libérera la personne enlevée que quand les
conditions formulées par les ravisseurs auront été
remplies : la remise en liberté de révolutionnaires
emprisonnés ou la suspension des tortures appliquées
dans les geôles du gouvernement.
L'enlèvement de personnalités connues pour leurs
activités artistiques, sportives ou autres, mais qui ne
manifestent pas d'opinion politique, peut constituer une forme
de propagande favorable aux révolutionnaires mais cet
enlèvement ne se fera que dans des circonstances très
spéciales et de telle sorte que le peuple l'accepte avec
sympathie.
L'enlèvement de personnalités américaines
résidant au Brésil ou y venant en visite constitue
une forme importante de protestation contre la pénétration
de l'impérialisme des États-Unis dans notre pays.
LE SABOTAGE
Le but des sabotages est de détruire. Peu de personnes,
parfois une seule, peuvent réaliser ces opérations.
Quand un guérillero envisage de saboter, il le fait d'abord
seul.
Postérieurement, il agira avec d'autres personnes de telle
sorte que se généralise, parmi le peuple, cette
pratique.
Un sabotage bien fait exige étude, planification et parfaite
exécution.
Les formes les plus
caractéristiques du sabotage sont le dynamitage, l'incendie
et le minage. Un peu de sable, la moindre fuite de combustible,
une lubrification mal faite, un boulon mal vissé, un court-circuit,
des pièces de bois ou de fer mal agencées peuvent
causer des désastres irréparables.
En sabotant, on cherchera à affaiblir, détériorer
ou même anéantir les appoints vitaux de l'ennemi
tels que :
- L'économie du pays, en s'attaquant en particulier au
réseau commercial interne et externe, aux secteurs cambiste,
bancaire et fiscal ;
- La production agricole et industrielle ;
- Le système des transports et communications ;
- Le système de répression militaire et policier,
surtout leurs établissements et leurs dépôts
;
- Les firmes et les biens des Nord-Américains établis
dans le pays.
Pour les opérations
de sabotage industriel, les éléments les mieux
placés sont les ouvriers. Ceux-ci connaissent en effet
comme personne les fabriques dans lesquelles ils travaillent,
les machines ou les pièces dont la destruction peut paralyser
tout le processus de production.
Dans les attaques contre les moyens de transport, il faut veiller
à ne pas provoquer la mort des voyageurs, surtout en ce
qui concerne les trains de banlieue et ceux qui parcourent de
longues distances, puisque ceux qui les prennent sont des gens
du peuple.
D'ailleurs, c'est
avant tout les services de communication utilisés à
des fins militaires qu'il faut détruire. Faire dérailler
les wagons d'un train chargé de combustible signifie atteindre
l'ennemi dans ce qui, pour lui, est vital. Il en va de même
pour le dynamitage des ponts et chemin de fer, car il lui faudra
des mois pour réparer les dommages causés. Les
file des lignes télégraphiques et téléphoniques
pourront être systématiquement coupés et
les centres de transmission détruits.
Les oléoducs,
les stocks de combustible, les réserves de munitions,
les arsenaux, les casernes, les moyens de transport de la police
et de l'armée doivent être systématiquement
sabotés.
Le volume des actes de sabotage contre les firmes et les biens
nord-américains doit être égal, sinon supérieur,
à celui des actes pratiquée contre des objectifs
nationaux.
LE TERRORISME
Nous entendons par terrorisme le recours aux attentats à
la bombe. Ne pourront s'y livrer que ceux qui ont acquis une
bonne connaissance technique dans la fabrication des explosifs
et qui seront dotés du plus grand sang-froid. Parfois,
on inclura dans les actes de terrorisme la destruction de vies
humaines et l'incendie d'installations nord-américaines
ou de certaines plantations.
Si l'on envisage de piller des stocks de produits alimentaires,
il faut veiller à ce que la population puisse en profiter,
surtout dans les moments et aux endroits où sévissent
la faim ou la cherté de la vie. Le guérillero sera
toujours disponible à l'égard du terrorisme révolutionnaire.
LA PROPAGANDE
ARMEE
L'ensemble des actes perpétrés par les guérilleros
urbains, et chaque action à main armée en particulier,
constituent le travail de propagande armée.
Les " mass
media " d'aujourd'hui, par le simple fait de divulguer ce
que font les révolutionnaires, sont d'importants instruments
de propagande. Leur existence ne dispense cependant pas les militants
d'organiser leur propre presse clandestine, de posséder
leurs propres imprimante qu'ils auront " expropriées
" s'ils n'ont pas de quoi les acheter.
Car il faut publier
et répandre, parmi le peuple, des journaux clandestins,
des manifestes et des tracts dénonçant les méfaits
de la dictature ou favorisant l'agitation. L'existence de cette
presse sert, par ailleurs, à rallier de nombreuses personnes
à notre cause.
Les camarades qui ont l'esprit inventif fabriqueront des catapultes
destinées au lancement de ces tracts et manifestes. On
cherchera encore à faire passer sur les antennes des stations
de radio des messages révolutionnaires enregistrés
sur bandes.
On écrira
aussi des slogans sur les murs et à des endroits difficilement
accessibles. On enverra aussi des lettres de menaces, de propagande,
ou bien visant à expliquer le sens de notre lutte à
certaines personnalités qui chercheront à les divulguer
pour impressionner la population.
Comme on ne ralliera jamais tous les citoyens, on peut populariser
le slogan suivant " Que celui qui ne veut rein faire pour
la révolution ne fasse non plus rien contre elle. "
LA GUERRE DES
NERFS
La guerre des nerfs ou guerre psychologique est une technique
de lutte basée sur l'utilisation directe ou indirecte
des media ou du " téléphone arabe ".
Son but est de démoraliser le gouvernement. On y arrive
en divulgant des informations fausses, contradictoires, en semant
le trouble, le doute et l'incertitude parmi les agents du régime.
Dans la guerre psychologique, le gouvernement se trouve en position
de faiblesse, aussi censure-t-il les moyens de communication.
Cette censure se retourne contre lui, car il se rend impopulaire
; il lui faut par ailleurs exercer une surveillance sans relâche,
ce qui mobilise beaucoup d'énergie.
Les moyens de la
guerre des nerfs sont les suivants:
- Le té1éphone et l'envoi de lettres. Par ces moyens,
on informera la police sur la prétendue localisation de
bombes à retardement, sur des projets d'enlèvement
ou d'assassinat de certaines personnalités, ce qui obligera
les forces de répression à se mobiliser pour rien,
à perdre du temps, à douter de tout ;
- Livrer à la police de faux plans d'attaque ;
- Répandre des rumeurs sans fondement ;
- Exploiter systématiquement la corruption, les erreurs
et les méfaits de certains gouvernants, les forçant
ainsi à se justifier ou à démentir les bruits
répandus par les moyens de communication qu'ils ont eux-mêmes
censurés. En informant les ambassades étrangères,
l'O.N.U., la nonciature apostolique, les commissions internationales
de juristes et des droits de l'homme, les associations chargées
de défendre la liberté de la presse, sur la violence
et les tortures exercées par les agents de la dictature.
LES METHODES QU'IL FAUT SUIVRE
Le citoyen qui veut
devenir guérillero ne pourra agir que s'il domine parfaitement
les méthodes qu'il faut suivre. Les hors-la-loi commettent
souvent sur ce point des erreurs graves et qui les perdent.
Les patriotes auront
donc soin d'user d'une technique révolutionnaire et non
pas d'emprunter celle des bandits. C'est en fonction de la méthode
employée qu'on saura si c'est bien un guérillero
qui a commis tel ou tel acte. Les méthodes qu'il faut
suivre sont constituées par l'usage ou l'application des
éléments suivants:
- L'enquête et le service d'informations.
- L'observation qu'il convient de combiner avec ce qui précède
pour voir s'il y a correspondance avec les renseignements cueillis.
- L'exploration du terrain.
- La reconnaissance et le chronométrage des itinéraires.
- La planification.
- La motorisation.
- La sélection du personnel et son renouvellement.
- La sélection basée sur les capacités de
tir.
- La simulation de l'action projetée en guise de répétition.
- L'exécution.
- La protection des exécutants.
- La retraite.
- L'enlèvement ou le transport des blessés, en
évitant de le faire à bord de véhicules
où se trouvent des enfants. Le mieux est d'emporter, à
pied, les blessés, en empruntant des chemins assez étroits
pour que l'ennemi ne puisse passer avec ses moyens de locomotion.
- Le brouillage des pistes.
L'AIDE AUX BLESSES
Au cours des opérations
de guérilla urbaine, il peut arriver qu'un des compagnons
soit victime d'un accident ou soit blessé par la police.
Si, dans le " groupe de feu ", se trouve quelqu'un
qui est secouriste, il lui donnera les premiers soins.
En ce sens, il faudra veiller à ce que des cours de secourisme
soient organisés à l'intention des combattants.
Le rôle des guérilleros médecins, étudiants
en médecine, infirmiers, pharmaciens, est important. Ceux-ci
pourront rédiger un petit manuel de secourisme à
l'intention de leurs camarades.
En aucun cas le guérillero blessé ne devra être
abandonné sur le lieu du combat.
Lorsqu'il préparera une opération, le groupe devra
s'assurer un appoint médical. Il utilisera, par exemple,
une petite infirmerie mobile montée à l'intérieur
d'une automobile, ou il placera à un endroit proche du
lieu de l'opération, un camarade muni d'une trousse pour
les soins.
L'idéal serait
de disposer d'une clinique propre à l'organisation mais
cela coûterait si cher qu'on ne pourrait guère l'envisager
qu'en " expropriant " du matériel nécessaire
à son équipement. En attendant, il faudra bien
recourir aux cliniques légales, non sans faire usage des
armes pour forcer les médecins à soigner nos blessés.
Au cas où
nous aurions besoin d'acheter du sang ou du plasma sanguin dans
des " banques de sang ", il ne faudra jamais donner
les adresses où sont hébergés les blessés
ni celles des personnes chargées de s'en occuper. Ces
adresses ne seront, du reste, connues que du très petit
groupe chargé du transport et du traitement des blessés.
Les linges, bandages, mouchoirs, etc. tachés de sang,
les médicaments et tout autre objet ayant servi aux soins
seront obligatoirement retirés des maisons par où
sont passes les blessés.
LA SECURITE DU GUERILLERO
Le guérillero
urbain est sans cesse exposé à la dénonciation
ou à la découverte par la police. Pour y parer,
il doit s'entourer d'assez de garanties touchant sa cachette,
sa personne et celle de ses camarades. Nos pires ennemis sont,
en effet, les espions infiltrés dans nos rangs. On punira
de mort ceux qui seront découverts, ainsi que les déserteurs
qui se mettraient à renseigner la police sur ce qu'ils
savent. Le meilleur moyen d'empêcher cette infiltration
est la prudence et la sévérité que l'on
observera dans le recrutement.
On ne permettra pas non plus que tous les militants se connaissent
ou qu'ils soient au courant de tout. Chacun ne saura que ce qui
est nécessaire à l'accomplissement de sa mission.
La lutte que nous menons est dure; c'est une lutte de classe
et, comme telle, c'est une question de vie ou de mort, lorsque
les classes qui s'affrontent sont antagoniques.
Par manque de vigilance, un guérillero peut avoir l'imprudence
de révéler son adresse ou tout indication également
secrète à un ennemi de classe. C'est là
chose inadmissible.
Les annotations
dans la marge des pages de journal, les documents oubliés,
les cartes de visite, les lettres et les billets sont des indice
que la police ne négligera pas. L'usage d'un carnet d'adresses,
de papiers portant des numéros de téléphone,
des noms, des indication biographiques, des cartes et des plans,
doit être aboli. Les lieux de rendez-vous seront retenus
de mémoire. Celui qui transgressera ces normes sera averti
par le premier camarade qui s'en rendra compte; s'il persévère
dans l'erreur, on cessera de travailler avec lui.
Les mesures de sécurité à prendre pourront
varier en fonction des mouvements de l'ennemi. Cela suppose,
évidemment, que l'on soit bien renseigné, que le
service d'information fonctionne normalement. Il sera dès
lors utile de lire les journaux, en particulier la page qui rapporte
les activités de la police.
En cas d'arrestation, le guérillero ne pourra rien révéler
qui puisse nuire à l'organisation, causer l'arrestation
d'autres camarades ou la découverte des dépôts
d'armes et de munitions.
LES SEPT ERREURS
DU GUERILLERO URBAIN
Quand bien même
le guérillero urbain suivrait rigoureusement les normes
de sécurité, il n'en resterait pas moins sujet
à l'erreur. Il n'y a pas de guérillero parfait
; on peut tout juste s'efforcer de diminuer la marge de ces erreurs.
Nous en voyons sept
que nous chercherons à combattre:
- L'inexpérience, qui fait que l'on juge l'ennemi stupide,
que l'on sous-estime ses capacités, que l'on trouve les
choses faciles à faire et, de ce fait, qu'on laisse des
traces qui peuvent être fatales. Cette même inexpérience
peut conduire le guérillero à surestimer les forces
adverses. Son assurance, son esprit de décision, son audace,
s'en ressentiront ; il en sera plus facilement intimidé.
- La vantardise, qui fait que l'on propage aux quatre vents ses
faits d'armes.
- La surestimation de la lutte urbaine. Ceux qui se laissent
enivrer par les actes de guérilla dans les villes risquent
de ne pas se préoccuper beaucoup du déclenchement
de la guérilla rurale. Ils finissent par considérer
la guérilla urbaine comme décisive et par y consacrer
toutes les forces de 1'organisation. La ville est susceptible
d'être l'objet d'un encerclement stratégique, que
nous ne pourrons éviter ou rompre que lorsque sera déclencher
la guérilla rurale. Tant que celle-ci n'aura pas surgi,
l'ennemi pourra toujours nous porter des coups graves.
- La disproportion dans l'action par rapport à l'infrastructure
logistique existante.
- La précipitation en vertu de laquelle on perd patience,
on s'énerve et on passe à l'action au risque de
subir les plus grosses pertes.
- La témérité, qui fait que l'on attaque
l'ennemi à un moment où celui-ci se fait particulièrement
agressif.
- L'improvisation.
L'APPUI DE LA
POPULATION
Le guérillero
urbain cherchera toujours à situer son action dans un
sens favorable aux intérêts du peuple, afin d'obtenir
son appui.
Là où
apparaîtront l'ineptie et la corruption du gouvernement,
le guérillero urbain devra montrer que c'est cela qu'il
combat.
Ainsi, une des exigences
les plus lourdes du gouvernement actuel concerne la perception
d'impôts très élevés. Le guérillero
s'attachera dès lors à attaquer le système
fiscal de la dictature, à entraver, avec tout le poids
de la violence révolutionnaire, son fonctionnement.
Il n'épargnera
pas les hommes et les institutions du régime responsables
de la hausse du coût de la vie, les riches commerçants
brésiliens et strangers, les grands propriétaires,
tous ceux qui, grâce à la cherté de la vie,
aux mauvais salaires et à l'augmentation des loyers, font
de fabuleux bénéfices.
L'insistance que met le guérillero à intercéder
en faveur du peuple est la meilleure manière d'obtenir
son appui. À partir du moment où une bonne partie
des citoyens commence à prendre au sérieux son
action, la victoire lui est assurée.
Le gouvernement
ne pourra plus qu'intensifier la répression, ce qui rendra
la vie des citoyens plus insupportable. Les foyers seront violés,
des battues de police organisées, des innocents arrêtés,
des voies de communication fermées.
La terreur policière
s'installera, les assassinats politiques se multiplieront ; ce
sera la persécution politique massive.
La population refusera
de collaborer avec les autorités qui ne pourront plus,
pour vaincre les difficultés, que recourir à la
liquidation physique des opposants.
La situation politique
du pays se transformera en situation militaire et les "
gorilles " passeront pour être les responsables de
toutes les violences, des erreurs et des calamités qui
pèsent sur le peuple.
Lorsqu'ils verront
qu'en conséquence du développement de la guerre
révolutionnaire, les militaires de la dictature roulent
vers l'abîme, les éternels temporisateurs des classes
dominantes et les opportunistes de droite, partisans de la lutte
pacifique, supplieront les " gorilles " d'entamer le
processus de "redémocratisation ", de réformer
la constitution, etc. afin de tromper les masses et d'affaiblir
l'impact de la révolution. D'ores et déjà,
cependant, aux yeux du peuple, les élections ne seront
plus qu'une farce.
Et cette farce,
le guérillero urbain doit la combattre en redoublant de
violence et d'agressivité. En agissant ainsi, on empêchera
la réouverture du Congrès, la réorganisation
des partis, celui du gouvernement et celui de l'opposition tolérée,
qui dépendent du bon plaisir de la dictature et dont les
représentants sont comme les marionnettes d'un même
guignol.
C'est de cette façon que les guérilleros gagneront
l'appui des masses, renverseront la dictature et secoueront le
joug nord-américain. À partir de la rébellion
dans les villes, on arrivera vite à déclencher
la guérilla rurale dont la préparation dépend
de la lutte urbaine.
LA GUERILLA URBAINE,
ECOLE DE FORMATION DU GUERILLERO
La révolution
est un phénomène social qui dépend des armes
et des fonds. Ceux-ci existent dans le pays ; il suffit d'avoir
des hommes pour s'en emparer. Ces hommes devront, pour leur part,
être dotés de deux exigences révolutionnaires
fondamentales:
- Une forte motivation politique
- Une bonne préparation technique.
On les trouvera dans l'immense contingent des ennemis de la dictature
militaire et de l'impérialisme des États-Unis.
Il en arrive presque quotidiennement qui sont désireux
de s'intégrer dans la guérilla urbaine.
C'est ce qui explique
que chaque fois que la réaction annonce la liquidation
d'un groupe de révolutionnaires, celui-ci renaît
de ses cendres.
Les hommes les mieux
entraînés, les plus riches d'expérience tant
sur le plan de la guérilla urbaine que sur celui de la
guérilla rurale, constituent l'épine dorsale de
la guerre révolutionnaire et le point de départ
de la future armée de libération nationale.
Ce noyau central,
dont les membres n'ont rien à voir avec les bureaucrates
et les opportunistes des lourds appareils politiques, les radoteurs
et les signataires de motions, n'hésite pas à participer
aux actions révolutionnaires. Il est armée d'une
discipline solide, d'une vue tactique et stratégique à
long terme, de la théorie marxiste, du léninisme
et du castro-guévarisme appliqués aux conditions
concrètes de la réalité brésilienne.
De ce groupe se détacheront les hommes et les femmes d'excellente
formation politico-militaire qui, après la victoire de
la révolution, auront pour tâche de construire la
nouvelle société brésilienne.
Ces hommes et ces
femmes se recruteront parmi les ouvriers, les étudiants,
les intellectuels, les prêtres et les religieux révolutionnaires,
les paysans qui affluent vers les villes, attirés par
le besoin de trouver du travail et qui, politisés et entraîné,
retourneront dans les campagnes. Et c'est dans la guérilla
urbaine que se forgera l'alliance armée de ces différents
groupes.
Les ouvriers connaissent
bien le secteur industriel des villes qu'il s'agit d'attaquer.
Les paysans connaissent d'instinct la terre, sont astucieux et
peuvent admirablement communiquer avec la multitude des humiliés.
Ils organisent les
points d'appui nécessaires à la lutte dans les
campagnes, aménagent les cachettes pour les hommes, les
armes et les munitions, constituent des réserves alimentaires
à partir de la culture des céréales, s'occupent
du bétail qui nourrira les guérilleros, forment
des guides et organisent les services d'information.
Les étudiants, dont le tranchant est bien connu, renversent
à souhait les tabous pacifistes et opportunistes, acquièrent
en peu de temps une bonne formation politique, technique et militaire.
Et comme ils n'ont
pas grand-chose à faire, une fois qu'ils ont été
expulsés des écoles où ils étudiaient,
ils peuvent se consacrer entièrement à la révolution.
Les intellectuels jouent un rôle fondamental dans la lutte
contre l'arbitraire, l'injustice sociale et l'inhumanité
de la dictature. Jouissant d'un grand prestige et d'un grand
pouvoir de communication, ils entretiennent la flamme révolutionnaire.
La participation
d'intellectuels et d'artistes à la guérilla urbaine
est un des plus beaux acquis de la Révolution brésilienne.
L'adhésion
de pasteurs de diverses confessions et de religieux est importante
sur le plan de la communication avec le peuple et, en particulier,
avec les ouvriers, les paysans et les femmes du pays. Certaines
de nos concitoyennes, intégrées dans la guérilla
urbaine, ont fait preuve d'une combativité et d'une ténacité
extraordinaires, en particulier au cours d'attaque contre des
banques et des casernes et, aussi, en prison.
La guérilla urbaine est une excellente école de
formation. Qu'ils soient chauffeurs, messagers, tireurs d'élite,
informateurs, propagandistes ou saboteurs, les guérilleros
luttent, souffrent, et courent ensemble les mêmes risques.
Ils affrontent ensemble les épreuves de sélection.
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