Révolution démocratique nationale au moyen d’une guerre populaire prolongée

José Maria Sison

Aborder les caractéristiques spécifiques de la révolution démocratique nationale et de la guerre prolongée aux Philippines, implique d'adhérer aux principes suivants: la théorie universelle du marxisme-léninisme est intégrée aux conditions concrètes d’un pays, l’âme du marxisme est l’analyse concrète de conditions concrètes, il existe une loi du développement inégal, la dictature du prolétariat surgit dans des pays spécifiques et l’internationalisme prolétarien est précisément l’unité de tous les travailleurs de tous les pays ou en d’autres mots, dans différents pays.

1. Caractéristiques spécifiques de la guerre populaire aux Philippines

En 1975, en tant que président du Comité central du Parti Communiste des Philippines (pcp), Amado Guerrero publiait un article intitulé Caractéristiques spécifiques de la guerre populaire aux Philippines.

Cet article s’inspirait de la théorie et de la ligne stratégique prônées par Mao Zedong pour une guerre populaire prolongée et il se basait sur la pratique révolutionnaire de la Nouvelle Armée du Peuple sous contrôle absolu du pcp depuis le début de l’année 1969.

Sous forme de résumé, voici un exposé réactualisé des caractéristiques spécifiques de la guerre populaire aux Philippines, qui se déroule depuis 27 ans déjà.

1. La guerre du peuple s’aligne sur une révolution nationale démocratique d’un nouveau type. C’est une reprise de la vieille révolution démocratique de 1896 contre le colonialisme et le féodalisme. Mais cette guerre-ci appartient à un type nouveau.

Elle est menée par le prolétariat et non plus par la bourgeoisie comme dans l’ancien modèle. Elle a pour but de mener à bien la lutte révolutionnaire du peuple en vue de la libération nationale et de la démocratie, contre l’impérialisme et les classes des exploiteurs locaux.

Elle conduit par conséquent à la révolution socialiste basée sur la prise complète du pouvoir politique des mains de la dictature exercée par la classe unique des grands compradores et des propriétaires terriens.

La révolution néo-démocratique doit être menée dans les conditions actuelles semi-coloniales et semi-féodales des Philippines et dans une ère globale d’impérialisme moderne et de révolution prolétarienne.

2. Il est nécessaire de mener une guerre populaire prolongée à l’intérieur du pays.

C’est ce qu'exige la ligne de classe révolutionnaire de la classe ouvrière et de son parti révolutionnaire, le pcp.

Le principal allié, le plus fiable, du prolétariat est la paysannerie, qui est la classe la plus importante en nombre de la société philippine.

Les campagnes ne sont pas seulement un terrain favorable à la guerre de guérilla et à d’autres formes de guerre populaire.

C’est un terrain social où le prolétariat et son parti révolutionnaire doivent éveiller, organiser et mobiliser les masses paysannes dans la guerre populaire et de cette façon réaliser l’alliance de base de la classe ouvrière et de la paysannerie en tant que fondement de la révolution néo-démocratique.

3. La guerre doit être menée dans un archipel montagneux.

En plus des campagnes, nous pouvons utiliser les îles, les montagnes et les forêts pour diviser les forces de l’ennemi.

Au début, il a été très difficile de développer un parti et une armée à l’échelle de la nation à cause du caractère d'archipel du pays. Mais, finalement, nous avons réussi à développer une guerre populaire sur l’ensemble du territoire, transformant le désavantage de l’archipel en un avantage à long terme.

Selon des lignes de conduite telles que "îles principales d’abord, îles secondaires ensuite" et "direction centralisée et opérations décentralisées", le pcp et la Nouvelle Armée du Peuple (nap) ont été en mesure d’atteindre et de couvrir tous les points stratégiques dans onze îles majeures représentant 94% de la population totale du pays.

4. L’ennemi est en nombre et puissant, tandis que l’armée du peuple est petite et faible.

L’équilibre des forces ne peut changer que par étapes.

Il y a trois étapes probables de développement: défense stratégique, point mort stratégique et offensive stratégique.

En encerclant des villes à partir des campagnes, l’armée du peuple rassemble des forces armées sur une longue période de temps jusqu’au moment où elle est capable de s’emparer des positions fortes de l’ennemi en ville.

Dans l’étape actuelle de la défensive stratégique, il est possible de lancer des offensives tactiques afin de balayer les forces ennemies élément par élément et de rassembler ensuite les forces armées du peuple.

5. La crise politique et économique du système en place est chronique et va même en empirant.

La dictature fasciste du régime "américano-Marcos", qui s’est exercée de 1972 à 1986, a été une manifestation flagrante de la crise aiguë et du désespoir du système au pouvoir.

Jusqu’à ce jour, le règne ouvert de la terreur contre le peuple est toujours en place.

Les contradictions violentes parmi les factions révolutionnaires persistent à l’intérieur et à l’extérieur des forces armées réactionnaires.

L’Etat doit faire face à la résistance non seulement de la Nouvelle Armée du Peuple dirigée par le pcp, mais aussi à celle des organisations armées Moro.

La capacité du système au pouvoir de régler à l’amiable les divergences parmi les factions réactionnaires rivales et de supprimer la révolution armée, diminue de plus en plus.

Le caractère semi-féodal et agraire de l’économie s’est aggravé et s’est approfondi.

L’Etat court de plus en plus à la banqueroute, comme les montrent les déficits budgétaires, les dettes publiques locales, la vente de biens nationaux, le fardeau des taxes en hausse et l'escalade des prix des produits de première nécessité.

6. Il y a toujours une réaction armée unifiée contre la révolution armée, en dépit de la division en factions des forces armées réactionnaires. C’est dû à la domination de l’impérialisme américain, qui s’exerce à tous les niveaux: économique, politique, militaire, culturel et diplomatique.

Plus que tout autre puissance impérialiste, les Etats-Unis détiennent le contrôle de l’économie, de façon directe et par le biais d’agences multilatérales, le fmi, la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale du Commerce (omc).

Ils détiennent les leviers de commande du planning stratégique, de l’endoctrinement, de l’entraînement des officiers et de l’équipement militaire des forces armées réactionnaires.

En dépit du retrait des bases militaires américaines, les Etats-Unis continuent à bénéficier de facilités militaires aux Philippines.



Dans son partenariat avec les Etats-Unis dans la prétendue sécurité régionale, le Japon s’est beaucoup concentré sur l’agression économique par le biais d’investissements directs et d’une aide officielle au développement.

Il fournit indirectement une aide militaire aux réactionnaires philippins.

Il s’engage dans des exercices militaires communs avec les Etats-Unis, les Philippines et d’autres forces de l’Asie de l’Est.

Il a commencé à envoyer des forces expéditionnaires sous le prétexte de la sauvegarde de la paix par les Nations unies.

Il a accéléré la concentration militaire, même s’il occupe les bases militaires américaines.

Certains pays producteurs de pétrole ont aussi offert leur assistance militaire aux organisations armées Moro. Ceci a ouvert une brèche dans le monopole américain d’importations d’armes.



7. Les Etats-Unis sont toujours la puissance impérialiste dominante dans le monde entier, notamment depuis l’effondrement de l’Union soviétique. Mais ils continuent à éprouver de sérieuses difficultés à infléchir leur déclin stratégique amorcé depuis 1975.

Chaque effort des Etats-Unis pour corriger ce déclin a des répercussions négatives sur ses alliés capitalistes industriels. En raison de la crise du système capitaliste mondial et du nouveau désordre mondial qui en découle, la capacité américaine de soutenir le système au pouvoir aux Philippines connaît certaines limites, spécialement si ce soutien doit se prolonger dans le temps.



Il y a un accroissement de la compétition entre les centres mondiaux du capitalisme même s’ils s’unissent pour opprimer et exploiter les peuples du monde.

A la suite de l’aggravation de l’état de l’économie et des conditions sociales, de nombreux conflits armés se développent simultanément en Asie, en Afrique et en Amérique latine, ainsi que dans les pays de l’ex-bloc soviétique.

Dans ces conditions, la capacité des Etats-Unis de prendre des mesures d’intervention et d’agression peut se dissiper et s’épuiser.



2. Construction du parti, conflits idéologiques et politiques et lutte armée

Le facteur le plus important pour mener la révolution nationale démocratique d’un nouveau type par le biais de la guerre populaire prolongée et pour accomplir les deux étapes de la révolution philippine, c’est le direction de classe du prolétariat au travers d’un parti marxiste-léniniste.

Le rétablissement du pcp sous la guidance théorique de la pensée marxiste-léniniste-maoïste, le 26 décembre 1968, a été en soi une grande victoire si nous considérons l’arrière-plan historique.

Le mouvement révolutionnaire armé dirigé par le vieux parti issu de la fusion du Parti Communiste et du Parti Socialiste avait été vaincu au début des années 50 en raison de la ligne opportuniste "de gauche" de José Lava, qui avait souhaité remporter la victoire totale en deux ans.

D’abord, en augmentant simplement les effectifs des forces militaires en provenance de camps de montagne dans des zones sans population, ensuite en organisant des soulèvements qui dépendaient de la décision de l’une ou l’autre faction politique réactionnaire.

Il joua le jeu de la clique réactionnaire dirigeante, qui venait de se voir accorder par les Etats-Unis l’équipement et l’entraînement de trente bataillons de militaires.

Avant la ligne militariste hasardeuse de Jose Lava, il y avait eu une période d’opportunisme de droite sous la direction de son frère aîné Vicente Lava qui était profondément influencé par le révisionnisme de Browder et guidé par la ligne "de la paix et de la démocratie".

Tout en se tenant à cette ligne droitière, le vieux parti fusionné avait réservé un accueil favorable au retour de l’impérialisme américain aux Philippines et à l’établissement d’une république néocoloniale, le 4 juillet 1946, et il avait transformé "l’Armée du Peuple contre le Japon" (Hukbalahap) en une fédération de vétérans.



Après la défaite du mouvement révolutionnaire armé au début des années 50, c’est Jesus Lava qui prend la direction. Il adopte une ligne opportuniste de droite.

En 1955, il essaie de liquider l’armée du peuple en l’appelant à se reconvertir en brigades d’organisation pour la lutte parlementaire et, en 1957, il tente également de liquider le vieux parti fusionné en appliquant une politique unilatérale qui consiste à dissoudre des cellules du parti et des organes de direction et à réduire l’organisation du parti à des listes de membres individuels attendant passivement "la transmission des informations" de sa part.

Avant la fin des années 50, le vieux parti issu de la fusion a pratiquement disparu.

Le secrétaire général Jesus Lava a tout simplement choisi de se cacher et il s’est détaché des masses et de ce qu’il reste de l’armée du peuple.

C’est en 1959 que les révolutionnaires prolétariens, qui visent au rétablissement du pcp, commencent à organiser des cercles d’études marxistes-léninistes indépendamment du vieux parti de fusion.

En 1961 ils réussissent à mettre sur pied la première grande action de masse anti-impérialiste depuis la défaite du mouvement révolutionnaire armé au début des années 50.

Entraîné par l’action de masse, Jesus Lava se met à la recherche des révolutionnaires prolétariens qui l’ont mise sur pied et leur propose la formation d’un comité exécutif destiné à faire revivre le vieux parti fusionné et le mouvement de masse.



Le représentant des révolutionnaires prolétariens rejoint le comité.

En temps voulu, il demande une récapitulation de l’histoire du vieux parti fusionné, l’affirmation du marxisme-léninisme contre le révisionnisme moderne centré sur l’Union soviétique, le rétablissement du Parti sur les fondations théoriques du marxisme-léninisme et la revitalisation des masses urbaines et rurales, dans le but de préparer une guerre populaire prolongée.

Les renégats révisionnistes de Lava ont adopté la ligne du révisionnisme moderne préconisée par le Parti Communiste de l’Union soviétique; ils s’opposent à la ligne de la révolution néo-démocratique prônant la guerre populaire prolongée; ils ne cessent de parler d’une vague ligne de lutte légale.

En avril 1967, les révolutionnaires prolétariens se séparent des renégats révisionnistes de Lava. Le 1er mai 1967, ils sortent une déclaration publique en appelant au rétablissement du pcp et expliquant les raison de ce choix.



Les révolutionnaires prolétariens se chargent de formuler un document rectificatif complet, intitulé Rectifier les erreurs et reconstruire le Parti et ils rédigent les bases de la Constitution du pcp ainsi que le Programme pour une Révolution démocratique populaire.

Ces deux documents deviennent les instruments de base du rétablissement du pcp le 26 décembre 1968.



Dès lors, le Parti soutient la ligne idéologique de la pensée marxiste-léniniste de Mao Zedong et adopte la ligne politique générale de la révolution nationale démocratique sous la direction du prolétariat.

Il choisit la guerre populaire prolongée comme arme contre le féodalisme domestique, le capitalisme bureaucratique et le capitalisme monopolistique étranger.



Dès le début, le pcp intègre la théorie de la pensée marxiste-léniniste-maoïste aux conditions concrètes existant aux Philippines.

Il clarifie le caractère semi-colonial et semi-féodal de la société philippine, le caractère et les forces motrices, les ennemis de classe, les tâches du moment et la perspective socialiste de la révolution.

En 1969, Amado Guerrero publie Philippine Society and Revolution (Société et révolution aux Philippines), dans lequel il développe ces questions.

Le pcp s’active sérieusement à relancer la révolution armée. Trois mois après sa réapparition, le 29 mars 1969, il fonde la Nouvelle Armée du Peuple, adopte Les Règlements et Statuts de la Nouvelle Armée du Peuple et annonce ouvertement le début de la guerre populaire.



Le mouvement de rectification s’étend à la critique et à la répudiation de la clique des gangsters Taruc-Sumulong, qui ont usurpé le commandement de ce qu’il reste de l’ancienne armée populaire.

Les lignes de conduite criminelles sont condamnées, les tactiques rebelles hasardeuses critiquées et récusées.



Le Parti oeuvre à élever le degré de conscience idéologique et politique des anciens cadres et des combattants rouges à un niveau supérieur à ce qu’il était.

Il parvient à attirer dans la nap une bonne partie des anciens de l’armée populaire. Leur base de masse d’environ 80.000 paysans devient la base initiale de masse rurale du pcp et de la nap.

La nap commence sa guerre avec quelque 60 combattants et 36 armes à feu.



En déclenchant la révolution nationale démocratique, le pcp poursuit la ligne de classe révolutionnaire du prolétariat. Le prolétariat est la classe dirigeante de la révolution et il a le pcp comme parti d’avant-garde.

Il doit s’associer à la paysannerie, qui est son allié principal et le plus fiable, avec le pcp qui bâtit la nap et le mouvement paysan.

L’alliance de base entre travailleurs et paysans est le fondement de la révolution démocratique populaire.



La petite-bourgeoisie urbaine peut être acquise à la cause en tant que force révolutionnaire de base supplémentaire et la bourgeoisie nationale peut elle aussi constituer une force positive de plus. Toutefois, il convient d’exercer sa vigilance à l’encontre de ses aspects négatifs.

Il y a moyen de tirer un bon parti des contradictions qui règnent à l’intérieur des classes exploiteuses de base que sont les compradores et les propriétaires terriens.

Par conséquent, les constituants de la clique la plus réactionnaire au pouvoir, qui est la plus soumise à l’impérialisme, peuvent être isolés et abattus les uns après les autres jusqu’à ce que tout le système du pouvoir puisse être détruit.



A la campagne, le pcp applique la ligne antiféodale dans le cadre de la révolution néodémocratique.

Il s’appuie surtout sur les paysans pauvres et les travailleurs agricoles, s’attire les bonnes grâces des paysans moyens, neutralise les riches et tire son avantage des scissions qui divisent les propriétaires pour mieux les isoler et les battre.



Depuis son rétablissement, le pcp a adopté la ligne politico-stratégique de la guerre populaire prolongée afin de réaliser la révolution démocratique nationale.

Comme on l’a fait remarquer plus haut, cela signifie encercler les villes à partir de la campagne et étoffer ses forces armées pendant une longue période jusqu’à ce que l’armée populaire soit capable de s’emparer des villes.



A ses débuts, la nap est encore modeste et faible, de sorte qu’elle adopte une stratégie défensive contre un ennemi bien supérieur en nombre et bien plus puissant et qui, lui, suit une stratégie offensive.

Cependant, elle peut lancer et remporter des offensives tactiques en pratiquant la guérilla. Elle peut y arriver par un dur travail de masse destiné à gagner la participation et le soutien du peuple et en se lançant uniquement dans des batailles qu’elle peut gagner.

Ce faisant, elle peut accumuler une force politique et militaire pendant une très longue période.



Lorsqu’on entreprend une révolution armée, il faut tenir compte de trois composantes essentielles: la lutte révolutionnaire armée, la réforme agraire et la mise sur pied d’une base de masse.

On réalise la réforme agraire en ne perdant pas de vue qu’elle est la composante principale de la révolution démocratique, parce que c’est elle qui résout le problème de la plus grande partie de la population, composée de paysans.

Construire une base de masse englobe la formation des organisations de masse des paysans, des travailleurs s’il y en a, des jeunes, des femmes, des activistes culturels et des enfants, ainsi que la mise sur pied des organes locaux de pouvoir politique.



La lutte révolutionnaire armée du pcp est la principale forme de lutte parce qu’elle répond à la question primordiale de la révolution qui est la prise du pouvoir.

C’est la principale méthode pour écraser la machinerie bureaucratico-militaire de l’Etat contre-révolutionnaire. Mais les formes légales de lutte sont importantes et indispensables même si elles sont secondaires dans la mesure où elles ne constituent pas des moyens directs de prendre le pouvoir politique.

Il est possible pour une forme diluée de parti ou de coalition de gauche de gagner gros lors d’élections bourgeoises, mais ce type de parti peut être balayé par les réactionnaires à tout moment, comme ce fut le cas en Indonésie ou au Chili; il peut également être contraint de devenir réactionnaire ou d’agir hors de sa logique lorsque les forces de la révolution armée et de la contre-révolution entreront en action.



Les révolutionnaires prolétariens du pcp ont toujours reconnu le rôle et la valeur propres du mouvement démocratique légal et ils ont été responsables de la mise sur pied des organisations de masse anti-impérialistes et antiféodales légales depuis le début des années 60.

Pour mettre un terme à l’effet paralysant de la défaite du début des années 50, ils ont conscientisé, organisé et mobilisé les travailleurs, les paysans, la jeunesse, les femmes et les autres secteurs patriotiques et progressistes de la société, avec l’intention de poser les fondations du rétablissement du Parti et de stimuler la reprise de la révolution armée.

Les révolutionnaires prolétariens ont étudié avec beaucoup de zèle la théorie marxiste-léniniste de l’Etat et de la révolution au cours de réunions clandestines de cellules, même s’ils ont développé un mouvement de masse démocratique légale.



De 1961 à 1968, le mouvement de masse démocratique légale a habilité le parti nouvellement rétabli à s’enraciner profondément parmi les masses et ce, à l’échelle de la toute la nation.

Depuis 1969, le pcp a coordonné le mouvement de masse démocratique légale basé dans les villes et le mouvement révolutionnaire armé basé dans les campagnes.

Le développement de chacun de ces deux mouvements a contribué au développement de l’autre.

Les travailleurs et les jeunes ayant de l’instruction sont allés dans les campagnes pour servir dans l’armée du peuple.

Ils ont été indispensables pour renforcer les forces révolutionnaires dans les campagnes. L’existence de l’armée du peuple a prouvé aux gens des villes et de l’ensemble du pays qu’ils disposaient bien de l’instrument avec lequel ils pourraient combattre et défaire l’ennemi.



A côté de la lutte révolutionnaire armée, le peuple s’est servi du front uni comme d’une arme redoutable contre l’ennemi.

Il s’agit d’un front uni destiné avant tout à la lutte armée et, accessoirement, à la lutte légale ou parlementaire.

Le Front National Démocratique est le front uni formel pour la lutte armée.

En même temps, il y a les alliances légales. Le front uni est la politique adoptée par le pcp pour poursuivre sa ligne révolutionnaire de classe à l’intérieur et à l’extérieur des organisations du front uni formel.



3. Développement de la révolution armée aux Philippines



Dans les grandes lignes, le développement des forces révolutionnaires peut être divisé en trois périodes.

La première, qui s’étend de 1968 à 1979, peut être décrite comme la période où l’on a posé les fondations de la révolution armée.

La seconde période, de 1980 à 1991, peut être considérée comme une période de progressions prudentes des forces révolutionnaires et d’un travail de sape mené contre ces mêmes forces par l’opportunisme de "gauche" ou de droite.

Et la période actuelle, depuis 1992, peut être présentée comme une période où l’on rectifie les erreurs et où l’on reconstruit les forces révolutionnaires.

Au cours de la période de 1968 à 1979, les principales réalisations ont été les suivantes: la reconstruction idéologique, politique et organisationnelle du pcp selon la ligne de la pensée marxiste-léniniste-maoïste; le déploiement de cadres aux points stratégiques dans la plupart des régions du pays afin de mener à bien la lutte armée et de mettre sur pied les autres composantes qui font partie intégrante de la guerre du peuple; le développement du mouvement de masse urbain, culminant en 1969-72 juste avant la déclaration de la loi martiale; le développement des forces souterraines urbaines et le développement de fronts de guérilla, avec les sections de combat comme centres de gravité.



Des coups du sort terribles sont imputables à la dictature fasciste de Marcos à partir de 1972.

Les organes central et régionaux du Parti et la nap ont été sévèrement touchés à plusieurs reprises et à différentes époques. Mais l’ennemi n’est jamais parvenu à détruire complètement le moindre organe central ou régional important ni aucun Parti régional. Il y a eu des erreurs grossières et d’autres de moindre importance, ainsi que des défauts à différents niveaux du Parti et de la nap et ce à différentes époques.

Mais ces erreurs ont été pour la plupart critiquées et rectifiées. Le Parti, la nap et d’autres forces révolutionnaires ont grandi d’année en année, spécialement après avoir appris à tenir le coup et à surmonter les campagnes meurtrières de suppression lancées par la dictature fasciste.

Au cours de la période s’étendant entre 1982 et 1991, les principales réalisations ont été l’augmentation rapide du nombre de membres du Parti et des combattants rouges de la nap, l’intensification de la guerre du peuple jusqu’à un certain point, la consolidation du Parti régional et des organisations armées, la mise en place de plus de 60 fronts de guérilla, la renaissance du mouvement de masse démocratique légal, spécialement après l’assassinat d’Aquino, de 1983 à 1986, de nombreux efforts réels et constants afin de miner, d’isoler et de renverser la dictature fasciste de Marcos et un développement accru des forces démocratiques légales jusqu’à un certain point.



Ces réalisations sont dues à la forte éducation marxiste-léniniste dispensée partout par le pcp dans la période 1968-1979, à la persévérance des révolutionnaires prolétariens et des combattants rouges dans la poursuite de principes, à l’application correcte des principes de base, de la ligne et de la politique du pcp et à l’aggravation rapide de la crise du système au pouvoir, à cause des difficultés de la dictature fasciste de Marcos à obtenir davantage d’emprunts de la part de l’étranger.

La haine populaire à l’égard du régime fasciste s’était généralisée et atteignait des sommets.

Une scission s’était même développée parmi les réactionnaires partisans de Marcos.

Finalement, après l’assassinat d’Aquino, les Etats-Unis ont tout simplement décidé d’écarter Marcos du pouvoir.



Cette période s’est également caractérisée par le subjectivisme et l’opportunisme qui a miné le développement des forces révolutionnaires.

La direction centrale du Parti avait négligé le travail idéologique mentionné dans la pensée marxiste-léniniste-maoïste; elle était influencée par les courants de pensée petits-bourgeois et par le révisionnisme moderne; et elle était obsédée par le souci de remettre en question la ligne idéologique, politique et organisationnelle bien établie du Parti, ainsi que par l’idée de vouloir remporter la victoire sur le plan national en excitant l’armée du peuple et les masses et en brûlant les étapes dans le développement de la guerre du peuple.



Afin d’adapter leur désir ardent d’une victoire à l’échelle de la nation, les opportunistes avaient mis l’accent sur leur interprétation subjective et erronée de la société philippine qu’ils ne considéraient plus comme un pays semi-féodal et agricole mais comme un pays industrialisé et urbanisé par la dictature fasciste de Marcos.

C’est ce qui a servi de base de départ à un opportunisme à la fois de "gauche" et de droite qui, en général, a sapé la ligne stratégique de la guerre du peuple prolongée.

En dépit des faits concrets, les subjectivistes et les opportunistes ont persisté à vouloir saluer chez Marcos le grand architecte de l’industrialisation et de l’urbanisation des Philippines.



La dictature fasciste avait en fait aggravé et approfondi le caractère semi-féodal et agraire de l’économie par sa politique dissipée d’emprunts à l’étranger au profit des opérations bureaucratiques des grands compradores et des propriétaires terriens.

Les industries lourdes et de base n’avaient pas été implantées pour faire cesser la dépendance de l’importation d’équipement et d’autres produits finis de l’étranger.

Les ressources s’en allaient dans une consommation accélérée tributaire de l’importation, la production des matières premières était destinée à l’exportation, à la mise en place des infrastructures, à entretenir la corruption parmi la bureaucratie et à développer l’armée.

La population totale de la métropole manillaise et des villes de province ne constituait que 21% de la population nationale entre 1980 et 1990 et aujourd’hui encore, de nombreuses villes de province n’ont que de petits districts commerciaux et pas du tout de districts industriels.



La direction centrale n’accordait que peu de crédit à la guerre populaire, mais prônait vivement la ligne opportuniste de "gauche" de "contre-offensive stratégique" en tant que troisième et dernier stade de la défensive stratégique.

Involontairement, elle encourageait le type le plus destructif d’opportunisme de "gauche", celui qui surestimait les insurrections urbaines en tant que facteur prédominant dans la révolution armée et qui considérait la nap uniquement comme une force militaire.

Les opportunistes de droite considéraient le front uni dans les villes comme l’avant-garde et ne reconnaissaient pas le rôle dirigeant du prolétariat et du pcp; ils considéraient la lutte légale comme la principale forme de lutte.

Tant les opportunistes de "gauche" que ceux de droite surestimaient des mouvements de libération nationale tels que ceux qui en étaient toujours au stade anticolonialiste ou antiraciste ou ceux qui n’étaient plus que des fronts dirigés par les petits-bourgeois contre le despotisme.

Ils pensaient qu’ils étaient supérieurs à la révolution philippine ou même aux révolutions bolchevique et chinoise.



Les opportunistes de "gauche" qui poursuivaient la ligne de "stratégie de contre-offensive", de l’insurrection urbaine et de l’aventurisme militaire, avaient causé les pires dégâts aux forces révolutionnaires.

Ils prônaient la régularisation et la formation prématurées d’unités militaires trop importantes aux dépens du travail de masse et de l’organisation solide des masses.



Lorsqu’on les contrecarra et qu’ils échouèrent, ils taxèrent leurs camarades, activistes individuels et certains alliés, d'informateurs ennemis.

Ils les rendirent responsables de l’échec de la ligne incorrecte et ils infligèrent plus de dégâts encore aux forces révolutionnaires par leur hystérie et la chasse sanglante aux sorcières qu’ils organisèrent à Kampanyang Ahos (Campagne de l’Ail) en 1985-86.

Ils dénigrèrent la nécessité du travail de masse et le principe de l’auto-assistance. Ils désiraient ardemment obtenir de l’aide militaire et financière de l’étranger en pensant que c’était le facteur décisif de la victoire.

Ils échouèrent donc en raison de ce révisionnisme moderne qu’ils dissimulaient derrière une apparence de "gauche" et du fait qu’ils avaient rêvé d’une victoire militaire rapide.



Déjà en 1985, lors du Plénum du Comité Central du PCP, ceux qui prônaient l’insurrection urbaine et le militarisme avaient exigé la suppression de la ligne stratégique de la guerre populaire prolongée, et ils avaient été déboutés à l’aide d’une citation extraite des documents de fondation du Parti.

Leur porte-parole passa ouvertement en 1986 d’un opportunisme de "gauche" à un opportunisme de droite en épousant le réformisme qui allait servir de prélude à l’insurrection et en prétendant stupidement que le boycott électoral de 1986 était la plus grosse gaffe de toute l’histoire du Parti.

En fin de compte, il apparut qu’il était un agent de l’ennemi.

Les opportunistes de droite s’appuyaient sur des sections du Parti cantonnées dans les villes et des organisations de masse où le Parti et les dirigeants de masse provenaient pour la plupart de la petite-bourgeoisie urbaine et continuaient à vivre selon un style typiquement petit-bourgeois. Ils propageaient l’influence réformiste petite-bourgeoise en ayant recours aux ong financées par l’étranger.

Chaque fois qu’ils se faisaient débouter après avoir proposé leurs idées opportunistes de droite, ils se retiraient et ne tenaient quasiment pas compte de la ligne idéologique et politique du Parti.

Après la chute de Marcos en 1986, ils ont commencé à encenser le régime d’Aquino en tant que régime démocratique et à évacuer son caractère de grand-compradore et de propriétaire terrien ainsi que la poursuite des campagnes militaires dirigées contre le peuple et visant à la liquidation des communistes.

Ils fustigeaient le Parti et la nap pour avoir continué à suivre la ligne politique générale de révolution néo-démocratique par la guerre populaire prolongée.



Au début de 1988, les principaux opportunistes de "gauche" étaient déjà démoralisés par l’échec retentissant de leur ligne incorrecte et ils commencèrent à glisser massivement et au grand jour vers un révisionnisme et un réformisme très marqués; ils rejoignirent les tenants de l’opportunisme de droite depuis toujours.

Les pires éléments parmi les opportunistes de droite et les anciens opportunistes de "gauche" devinrent les instruments conscients des services de renseignements américains et philippins ainsi que des agences spécialisées dans la guerre psychologique qui préparaient la scission du mouvement révolutionnaire à partir de l’intérieur, un procédé qui fait partie de cette stratégie que les Américains avaient baptisée lic (Low-Intensity Conflict ou conflit de faible intensité).



Une fois confirmé l’échec de l’insurrection à partir des villes (ils ne sont de toute façon jamais parvenus à déclencher le moindre soulèvement armé en zone urbaine), tous les opportunistes qui avaient cru que la révolution philippine pouvait être gagnée uniquement au moyen d’une insurrection urbaine ou par le biais du réformisme, se sont mis d’accord pour déclarer que le chemin de la victoire était offert par le réformisme, en attendant que l’insurrection urbaine soit envisageable.

Ils ont intensifié leurs activités conspiratrices afin de liquider la direction prolétarienne de la révolution et la tendance favorable à la guerre populaire prolongée.

Avec frénésie, ils ont tenté d’anéantir le pcp à l’intérieur du front national uni et de détruire par la même occasion ce même front uni.

Ils ont usurpé l’autorité et partout où ils le pouvaient, ils ont pris des décisions arbitraires en violation du centralisme démocratique.



De 1989 à 1991, ils se sont fait l’écho de l’offensive impérialiste idéologique et politique, suite aux troubles politiques qui avaient éclaté dans 80 villes de Chine et à l’effondrement des régimes révisionnistes dans les pays du bloc soviétique.

Ils cataloguaient erronément les régimes révisionnistes comme étant socialistes et célébraient leur désintégration et leur ruine comme une marque de la futilité du socialisme.

Ils taxaient de stalinisme les régimes antistaliniens des renégats révisionnistes et des partisans du retour au capitalisme.

En collaboration avec des groupes petits-bourgeois anticommunistes de longue date et avec les réactionnaires du gouvernement, les académies et les mass médias, ils vantaient stupidement la supériorité et l’invincibilité de la globalisation impérialiste, de la démocratie bourgeoise et du pluralisme bourgeois sur le marxisme-léninisme et le socialisme.



Mais les opportunistes contre-révolutionnaires étaient loin d’être en mesure de détruire complètement les fondations révolutionnaires du Parti, entre 1980 et 1991.

Ils étaient limités en nombre bien qu’ils aient été à même d’exercer une influence disproportionnée.

Cependant, les révolutionnaires prolétariens n’avaient jamais cessé d’adhérer à la ligne révolutionnaire établie par les documents de base du pcp et certains documents ultérieurs tels que Nos tâches urgentes et les Caractéristiques spécifiques de la guerre du peuple aux Philippines.

Ils étaient très critiques et extrêmement vigilants au sujet de la ligne répandue par les opportunistes révolutionnaires.

Au fil des années, il ne cessa d’y avoir de fortes exigences en faveur d’une rectification.

En 1988, cette exigence s’ést intensifiée suite à la dégénérescence flagrante à la fois des opportunistes de "gauche" et de droite, suite également au déclin visible de la base de masse, à la passivité et à la difficulté de soutenir les unités trop vite élargies de la nap et au caractère destructeur et arbitraire des sanglantes chasses aux sorcières.

En 1991, les révolutionnaires prolétariens étaient prêts à lancer un mouvement de rectification totale et en profondeur.



La période actuelle a commencé lorsque le Comité central du pcp a lancé ce mouvement de rectification et qu’il a publié le document intitulé Réaffirmer nos principes de base et rectifier les erreurs.

Tout en s’en tenant aux principes de base du marxisme-léninisme, le Comité central a identifié, critiqué et répudié les erreurs et les faiblesses principales en partant des évaluations des faits et des recommandations accumulées depuis la base pendant un certain nombre d’années.

Des contre-mesures ont été adoptées contre les opportunistes contre-révolutionnaires et les tâches de reconstruction ont été élaborées.



Le document de rectification contient dix points:

  1. l’adhésion à la théorie du marxisme-léninisme,
  2. la répudiation du révisionnisme moderne,
  3. l’analyse de classe de la société philippine comme étant semi-féodale et semi-coloniale,
  4. la ligne générale de la révolution néo-démocratique,
  5. le rôle prépondérant de la classe laborieuse à travers le pcp,
  6. la ligne stratégique de la guerre populaire prolongée,
  7. la ligne de classe révolutionnaire au sein du front uni,
  8. le principe organisationnel du centralisme démocratique,
  9. la perspective socialiste et
  10. l’internationalisme prolétarien.

Le mouvement de rectification a été mené à bien en tant que mouvement de base pour l’éducation idéologique et politique et méthode constructive permettant de réaliser toutes les tâches idéologiques, politiques et organisationnelles du Parti.

Au sein de ce mouvement de rectification réside le respect de la relation dialectique entre le Comité central et les organes et organisations inférieurs du Parti et entre la rectification et la réalisation des tâches constructives.



Pendant tout le temps qu’ils se sont opposés à ce mouvement, les opportunistes contre-révolutionnaires se sont clairement manifestés comme des agents de la bourgeoisie au sein du Parti dans le passé.

Les agences de renseignements américaines et philippines ont également prouvé qu’elles orchestraient les pires des renégats et les groupes anticommunistes petits-bourgeois (y compris les trotskistes, les gorbatchéviens, les "démocrates populaires", les "sociaux-démocrates", les "libéraux", les "socialistes populaires" et l’ancien groupe révisionniste de Lava) et qu’elles les utilisaient comme des pions importants de la guerre psychologique dans la stratégie de lic contre le peuple et le mouvement révolutionnaire armé.



Le mouvement de rectification à différents niveaux et dans chaque secteur d’activités constitue l’étude vivante du marxisme-léninisme-maoïsme.

A la suite de quoi, le Parti s’est revitalisé et s’est renforcé idéologiquement et politiquement, ainsi que sur le plan organisationnel.

Le développement le plus important consiste à forger l’unité révolutionnaire des cadres du Parti et des membres des forces d’avant-garde de la révolution en haussant le niveau de leur conscience révolutionnaire et de leur militantisme.



Critique et autocritique ont été encouragées et développées à partir de la critique et du désaveu des erreurs et faiblesses principales du passé et de leurs influences toujours présentes sur l’évaluation et l’estimation du travail des cadres et membres loyaux du Parti et ce afin de clarifier les tâches et d'obtenir des résultats meilleurs et plus probants.

On a également mis sur pied des programmes d’étude de la théorie et de la pratique de la révolution à trois niveaux (basique, intermédiaire et avancé).

Des publications marxistes-léninistes commencent à être diffusées largement.



Il y eut une prise de conscience plus aiguë du caractère de la société philippine et du besoin de mener à bien la révolution sous la direction du Parti. La ligne de classe révolutionnaire dans la lutte anti-impérialiste et antiféodale doit être vigoureusement poursuivie.

La nap a été réorientée, réentraînée et redéployée afin de mener à bien une guerre de guérilla intensive et extensive sur une base de masse qui ne cesse de s’élargir et de gagner en profondeur.



La force totale des combattants de la nap équipés d’armes automatiques se chiffre à plusieurs régiments.

A ceux-ci s’ajoutent la milice populaire et les unités d’autodéfense dont les membres se comptent par dizaines de milliers au moins.

La base de masse se chiffre à plusieurs millions.

Il y a un grand nombre de fronts de guérilla couvrant d’importants secteurs de la plupart des provinces des Philippines ou de centaines de municipalités.

Un front de guérilla typique dispose d’un effectif total d’une compagnie avec, à son centre, une section, déployée sur un certain rayon et, dans un rayon plus étendu, les autres sections réparties en un certain nombre de pelotons, divisés eux-mêmes en équipes armées de propagande destinées au travail de masse sur une plus large échelle.



Le développement des pelotons en centres de gravité des fronts de la guérilla à l’échelle nationale a été saboté au début des années 80 par la décision prématurée des opportunistes de "gauche" de former des compagnies et des bataillons en tant qu’unités absolument concentrées.

Aujourd'hui la progression s’oriente vers le développement de la base de masse et vers la mise sur pied d’un vaste réseau de forces armées à l’échelle nationale.



Maintenant, en de très nombreux endroits des Philippines, la nap est en mesure de lancer des offensives tactiques dont l’ampleur va d’une petite équipe à une compagnie tout entière.

La réapparition éventuelle des compagnies comme centres de gravité à l’intérieur des régions ou des fronts fusionnés de guérilla sera le résultat de la guerre de guérilla extensive et intensive sur une base de masse qui se développe et s’intensifie sans cesse.



Le travail d’extension s’accomplit par le biais d’enquêtes sociales, d’un travail de contact, de la formation de groupes et de comités d’organisation des gens, de réunions politiques et de la convocation du comité organisateur du barrio en tant qu’organe local préliminaire du pouvoir politique. Des zones précédemment perdues à cause des erreurs opportunistes et des campagnes ennemies de suppression sont sur le point d’être reconquises pour de bon.



Le travail de consolidation est accompli de la manière suivante:

  1. Les organisations de masse constituées de paysans pauvres et d’ouvriers agricoles, d’autres types de travailleurs, pêcheurs, jeunes, femmes, activistes culturels et enfants sont formées.
  2. Les comités révolutionnaires du barrio sont établis en tant qu’organes réguliers du pouvoir politique assistés par les organisations de masse, de l’éducation publique, de la réforme agraire, de la production, des finances, de l’autodéfense, de la santé et des problèmes sanitaires, des activités culturelles et de règlement des litiges.
  3. Des branches locales du Parti sont établies en effectuant le recrutement parmi les rangs des activistes avancés.

Différentes campagnes de masse sont menées au bénéfice du peuple. Mais la plus importante, c’est celle de la réforme agraire. Le programme minimal de réforme agraire, par la réduction des fermages, l’élimination des prêts usuraires, l’augmentation des salaires agricoles, l’amélioration des prix des produits fermiers et l’augmentation de la production agricole, ainsi que par d’autres tâches annexes, doit être réalisé sur une vaste échelle.

On a l’intention de confisquer les terres des propriétaires despotiques. La terre doit être restituée aux minorités ethniques et aux colons pauvres en la reprenant aux accapareurs de terres.



Le mouvement de masse légal, tant dans les zones urbaines que rurales, a également été redynamisé et il lance fréquemment des actions de protestation de masse à une échelle nationale sur certains problèmes brûlants.

Il y a les organisations de masse et les alliances de travailleurs, de paysans, de pêcheurs, les minorités ethniques, les jeunes, les femmes, les pauvres des villes, les enseignants, les activistes religieux progressistes, les artistes et les écrivains, les hommes de science et les technologistes, les hommes d’affaires de petite et moyenne envergure, etc.



Le principe et la pratique du centralisme démocratique ont été renforcés dans le pcp, la nap et les organisations de masse.

Il y a une augmentation sensible des membres du Parti et des combattants rouges en provenance du mouvement révolutionnaire de masse revitalisé.

Les organisations du Parti dans les zones rurales et urbaines s’entraident les unes les autres afin de faire progresser la cause de la révolution.

Un nombre croissant de travailleurs et de jeunes politisés s’en vont à la campagne pour servir dans l’armée du peuple.

Dans les zones situées au-dehors de la région de la capitale nationale, des organes centraux et régionaux du Parti sont étroitement reliés à des unités de l’armée du peuple, donnant des conseils à leurs commandements et partageant les bonnes et les mauvaises fortunes avec les combattants rouges et la masse du peuple.



Les conditions dont nous disposons pour la poursuite de la révolution néodémocratique au moyen de la guerre populaire prolongée sont exceptionnellement favorables.

La crise socio-économique chronique du système semi-colonial et semi-féodal au pouvoir dégénère rapidement. Le léchage de bottes honteux, la corruption et la brutalité des capitalistes bureaucratiques dirigés par le général Ramos sont un outrage incessant à la grande majorité du peuple.

La faillite du pays s'accentue de jour en jour.

Les déficits commerciaux et budgétaires augmentent. Le fardeau de la dette extérieure et les paiements des services de la dette augmentent.

L’Etat est forcé d’augmenter rapidement la dette locale, de vendre ses biens sous le slogan néolibéral de privatisation, d’augmenter le fardeau des taxes et de faire grimper les prix des produits de base.



Les larges masses du peuple sont profondément mécontentes et reconnaissent la justesse de la cause révolutionnaire.

Le système au pouvoir est fissuré par les contradictions sévères régnant parmi les factions réactionnaires.

Les forces réactionnaires armées restent divisées en factions et leurs officiers, tant militaires que policiers, se conduisent de plus en plus brutalement au cours de leurs campagnes contre-révolutionnaires de suppression aussi bien que lors de leurs opérations en tant que syndicats du crime.

Les organisations armées Moro ont intensifié leur lutte armée et attirent un certain nombre de militaires ennemis.

Suite à la revitalisation des forces révolutionnaires et à l’expansion et à la consolidation de la base de masse, la nap peut se développer et intensifier la lutte révolutionnaire armée sous la direction du Parti.

4. Signification de la guerre populaire aux Philippines

La guerre du peuple aux Philippines revêt aujourd’hui une signification spéciale pour le prolétariat et les peuples du monde.

Elle soutient résolument la direction de la classe ouvrière.

Elle met en pratique la théorie marxiste-léniniste de l’Etat et de la révolution, elle persévère dans la résistance révolutionnaire armée à l’impérialisme et à la réaction et répond à l’espoir nourri par la classe ouvrière de remplir sa mission historique d'abattre le capitalisme et de construire le socialisme, dans le contexte d'un monde devenu exsangue à cause de l’hégémonie apparemment insurmontable de l’impérialisme américain ainsi que des conséquences terribles de la trahison du révisionnisme et du néocolonialisme.



Voici donc une guerre populaire qui constitue un brillant exemple de marche en avant entreprise lors de la période de la guerre froide et qui a fait route jusqu’à la nouvelle période de désordre planétaire sous le joug de l’impérialisme.

Elle est inspirée par l’internationalisme prolétarien et pourtant elle procède en comptant sur elle-même comme auparavant et contribue comme elle peut à la résurgence du mouvement anti-impérialiste et socialiste.

Les forces révolutionnaires aux Philippines ont été testées au combat et sont maintenant adaptées aux conditions de la lutte révolutionnaire.

Leur optimisme révolutionnaire émerge des ténèbres du capitalisme impérialiste. Il se base scientifiquement sur la critique de l’impérialisme en tant que stade ultime et suprême du capitalisme.

Pendant presque trente ans, la guerre populaire aux Philippines a résisté et survécu à une série de régimes réactionnaires, parmi lesquels une dictature fasciste sans déguisement de quatorze années et une série d’interventions en tous genres de la part de la première puissance impérialiste.

Elle a opposé un cinglant démenti aux souhaits et aux calomnies des régimes et partis révisionnistes et de leurs laquais.

Elle a pris le pas sur divers courants erronés d’opportunisme de "gauche" et de droite.

L’unité révolutionnaire, la volonté de combattre et les capacités des forces révolutionnaires et populaires sont plus fortes que jamais suite au mouvement de rectification.



Depuis la fin des guerres triomphales de libération nationale en Indochine en 1975, la guerre populaire aux Philippines a prouvé qu’elle était l’une des révolutions armées les plus significatives en termes de direction marxiste-léniniste, du fait de sa préférence sans ambiguïté pour une révolution en deux phases et de sa persévérance dans la lutte révolutionnaire.

Mais depuis 1975, les mass médias bourgeois et même les forces progressives à l’étranger ont consacré davantage d’attention aux conflits armés dans lesquels les deux superpuissances de la guerre froide ont été directement impliquées, là où l’ampleur des combats était plus spectaculaire, où les ressources en pétrole constituaient un enjeu pour les impérialistes, là où l’on infligeait toujours aux populations des formes de plus en plus arriérées d’oppression, comme le colonialisme et le racisme et où le despotisme avait été renversé, mais où le front "avant-gardiste" petit-bourgeois de libération était défié par une contre-révolution armée.



La guerre du peuple aux Philippines a survécu aux régimes révisionnistes et aux partis et mouvements dépendant de tels régimes et elle continue à grandir en force et en progrès.

Elle joue un rôle phare qui consiste à démontrer au prolétariat et aux peuples du monde qu’il est possible et nécessaire pour des révolutionnaires prolétariens de mener une révolution armée aux fins de poursuivre la mission historique du prolétariat, c’est-à-dire abattre l’impérialisme et construire le socialisme.



L’impérialisme américain a connu un échec pénible en déclenchant un prétendu programme lic contre les forces révolutionnaires aux Philippines.

Cette stratégie combine des campagnes militaires directes d’élimination et l’usage d’équipes spéciales d’opération, de forces paramilitaires, d’escadrons de la mort, de cultes religieux armés, de renégats et de scissionnistes ainsi que de groupes petits-bourgeois anticommunistes qui prétendent être progressistes mais ne sont en fait que des agents spéciaux des Etats-Unis et des réactionnaires locaux.



Le succès des forces révolutionnaires philippines contre la stratégie lic mise en application par les Etats-Unis est significatif, comparé aux succès remportés ailleur par cette même stratégie.

Vous vous rappellerez que l’une des réussites majeures de l’impérialisme américain au cours des années 80 contre l’Union soviétique et les régimes dépendant des Soviétiques a été l’utilisation de cette stratégie en pratiquant une guerre du peuple à l’envers.

Ils s'agissait d'utiliser une base de masse anticommuniste, religieuse ou tribale, pour mener une guerre de guérilla contre les régimes anti-américains et pro-soviétiques tels que ceux de l’Angola, du Mozambique, de l’Ethiopie, de l’Afghanistan et du Nicaragua.

Ce procédé a fait saigner l’Union soviétique à profusion et, combiné à des facteurs comme la rapacité de la bourgeoisie monopolistique soviétique, la course aux armements et la compression des exportations du pétrole soviétique, il a aggravé la crise soviétique.



Le détournement par les impérialistes et les réactionnaires de la stratégie et des tactiques de la guerre du peuple avait été suggéré pour la première fois par le président américain Kennedy dans sa doctrine de la guerre de contre-guérilla, mais avait été éclipsé pendant des années en raison de l’échec des Américains dans leur guerre d’agression au Vietnam jusqu'à ce que l’administration Reagan mette de nouveau en exergue la stratégie lic au cours des années 80.

Le succès de l’impérialisme américain à cet égard ne doit pas décourager mais pousser les forces révolutionnaires à adopter la ligne stratégique de guerre populaire prolongée, là où elles le pouvaient.

Une vraie et juste guerre du peuple, correctement et courageusement menée, peut toujours vaincre une fausse guerre du peuple.



Le caractère politique et social de la guerre du peuple aux Philippines est clairement révolutionnaire par rapport aux conflits armés plus nombreux qui font actuellement rage en Asie, en Afrique et en Amérique latine et dans les pays anciennement dirigés par les révisionnistes et qui sont privés du rôle directeur actif de tout parti marxiste-léniniste.

Je me réfère à la plupart des conflits armés qui se poursuivent en Afrique, dans les Balkans, en Asie Centrale, au Moyen-Orient et en Asie du Sud.

Ce sont généralement les conséquences de rivalités exacerbées entre les diverses forces réactionnaires d’Etats-clients néocoloniaux, placés sous une pression sévère depuis la crise générale du capitalisme.



Dans l’absence de tout parti marxiste-léniniste, les forces réactionnaires ont tout le champ libre pour cracher les slogans du nationalisme bourgeois, du fascisme, du racisme, de l’ethnocentrisme et de la religion.

Les conditions de crise peuvent être avantageusement utilisées par les partis marxistes-léninistes.

Mais il faut tout d’abord que de tels partis se créent et survivent à une longue période préalable de domination ou d’influence révisionniste parmi le prolétariat et le peuple.

Dans l’ancienne Union soviétique, où il est possible de retrouver l’héritage de Lénine et de Staline, les gens qui se réclament du marxisme-léninisme ne font pas encore mine, apparemment, de vouloir développer un mouvement révolutionnaire armé, même si toutes sortes de réactionnaires (nationalistes bourgeois et fondamentalistes religieux) de même que les syndicats du crime ont nettement pris les devants pour s’armer eux-mêmes et pour asseoir leur influence au sein de l’ancienne Armée rouge.



Le crise de surproduction du système capitaliste mondial tyrannise les pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine et les pays anciennement dirigés par les révisionnistes, spécialement grâce aux méthodes du capitalisme financier et du néocolonialisme. Il apparaît donc que le nouveau désordre mondial est beaucoup plus intense et effréné dans ces parties du monde.

Ici, les conditions appellent littéralement une révolution armée sous la direction des partis révolutionnaires du prolétariat.



A la racine de l’actuelle crise mondiale de surproduction, il y a la contradiction entre le caractère social extrêmement élevé des moyens de production et la rapacité féroce mise en oeuvre pour assurer la mainmise privée.

On assiste à une concentration rapide encore jamais vue ainsi qu’à une centralisation du capital au sein de supermonopoles par le biais de l’adoption de technologies encore plus performantes et de l’abus de capitaux financiers. Au contraire de ses slogans néolibéraux à propos de "big business et peu de gouvernement" et de "marché libre", la bourgeoisie monopolistique utilise vicieusement le pouvoir d’Etat pour accaparer les ressources publiques, écraser les salaires et restreindre les programmes sociaux.



Pour réaliser des profits et attirer des actionnaires, les supermonopoles gagnants massacrent les emplois, réduisent la masse salariale et éliminent les firmes qu’ils ont vaincues au cours de la compétition.

Involontairement, elles sapent leurs propres marchés nationaux et étrangers et créent ainsi les conditions du malaise social.

Elles haussent leurs taux de productivité et de rentabilité même si ceux de leurs économies nationales tout entières stagnent ou en réalité décroissent.



Certaines conditions objectives dans les pays capitalistes avancés engendrent une résistance du prolétariat et du peuple contre le capitalisme monopolistique.

Du même coup, elles donnent une impulsion à la compétition entre les pays impérialistes qui sont nationalement et régionalement occupés à consolider leurs marchés.

Mais il existe aussi certaines conditions objectives qui continuent à empêcher le mouvement révolutionnaire du prolétariat et des peuples à resurgir dans les pays impérialistes.

Dans leurs propres pays, les impérialistes sont encore plus forts que partout ailleurs pour supprimer, contrôler et décevoir le prolétariat et les populations.

Ils utilisent également l’aristocratie ouvrière, répandent largement les idées et modes de vie petits-bourgeois et ceux du révisionnisme classique et moderne afin de bloquer la voie au prolétariat révolutionnaire.



Il se passera un certain temps avant que des mouvements de masse révolutionnaires puissants puissent émerger à nouveau dans les pays capitalistes industriels avancés.

On assiste déjà à des débuts de soulèvements de masse.

Dans l’intervalle, les partis révolutionnaires du prolétariat doivent persévérer dans leur travail idéologique, politique et organisationnel, ils doivent mobiliser le prolétariat, les jeunes et les femmes et prêter attention au rapport dialectique entre les luttes révolutionnaires dans les pays impérialistes et celles des autres pays.



Compétition économique et rivalités politiques parmi les pays impérialistes vont bon train.

Mais pour l’instant, le danger d’une guerre mondiale n’est pas encore visible pour la simple raison que ces pays sont toujours à même de s’unir de façon profitable contre le prolétariat et les peuples.

Dans l'avenir, cependant, les conditions menant à une guerre interimpérialiste vont s’intensifier de façon visible.

Nous ne devrions pas perdre de vue que la fin de la guerre froide a débouché sur le début des guerres économiques parmi les centres mondiaux du capitalisme (malgré l’Organisation du Commerce Mondial) et des guerres sanglantes sur le continent européen, comme celles qui ont fait rage dans l’ancienne Yougoslavie et dans l’ancienne Union soviétique: l’otan a même été en mesure d’utiliser sa puissance de feu au cours de la guerre civile en Bosnie.



De même que les nations et les peuples opprimés combattent pour la révolution nationale et sociale, la lutte de classes entre le prolétariat et la bourgeoisie peut également se durcir dans les pays capitalistes industriels et spécialement dans les plus faibles.

La crise générale du capitalisme peut toujours devenir plus intense que maintenant et déboucher sur des guerres locales dans des pays moins capitalistes.

Les puissances impérialistes débordent d’arrogance, sont engagées dans l’expansionnisme et sont susceptibles d’être empêtrées de différents côtés à la fois et d’une tout autre façon que celle à laquelle elles sont habituées lorsqu’elles utilisent le nom des Nations unies et qu’elles jacassent sur "le maintien de la paix", "les droits de l’homme" et "l’aide humanitaire" afin de pouvoir intervenir de différentes manières au cours de diverses guerres locales.



Dans l’intervalle, les quelques révolutions armées menées par le prolétariat en Asie, en Afrique et en Amérique latine jouent le rôle de pionniers révolutionnaires au sein d’une nouvelle période de crise sans précédent et de désordre encore plus grand, apparue après la fin de la guerre froide entre les deux superpuissances.

Elles maintiennent bien haut les espoirs du prolétariat mondial et des peuples dans la résurgence du mouvement anti-impérialiste et socialiste révolutionnaire.



Mai 1996