Union Ouvrière Communiste (MLM) de Colombie
Le gouvernement népalais scelle la trahison prachandiste
juin 2008
Le 28 mai dernier, les médias bourgeois du monde entier ont
enregistré avec des transports de joie l'abolition de la monarchie
et la proclamation de la République au Népal, tout comme les
premières mesures prises par l'Assemblée Constituante ayant à sa
tête les prachandistes.
En outre, fut décidé lors de cette réunion l'institution de deux
postes, celui de Président et celui de Premier Ministre, lequel
doit prendre la tête du pouvoir exécutif.
Ils ont convenu également de fonctionner pendant deux années à
venir avec un parlement dont la tâche la plus importante est de
rédiger une nouvelle constitution.
La dispute du moment concerne la répartition des charges, dont le
plus envié est celui de Premier Ministre, qui selon ce qui se dit
restera aux mains du Parti Communiste du Népal (maoïste) et sera
possiblement attribué à Prachanda.
D'après ce qu'on en sait, l'aspiration des prachandistes est de
tenir les deux postes de Président et de Premier Ministre, et c'est
là une des pommes de discorde majeure entre les principales forces
que sont le Parti Communiste du Népal maoïste (PCN-m), le Congrès
Népalais (CN) et le Parti Communiste Unifié Marxiste Léniniste (PCN-
UML).
LES MOTIFS D'UNE JOIE PASSAGERE
Avec une immense joie, le peuple s'est répandu dans les rues pour
fêter la chute d'une monarchie qui s'était enkystée au pouvoir
depuis plus de deux siècles.
Les explosions de joie n'avaient rien
d'étonnant, le Népal étant l'un des pays classés parmi les plus
pauvres du monde, la situation des femmes et des enfants est on ne
peut plus discriminatoire et la faim pullule sur tout le
territoire, alors que les bénéfices remplissent les comptes des
riches locaux et des impérialistes, venant surtout des Etats-Unis,
d'Angleterre, d'Inde et de Chine.
L'abolition de la monarchie féodale devait nécessairement être très
bien reçue par les Népalais, mais la question en suspens est :
qu'est-ce qui est monté au pouvoir en échange de la monarchie?
Dans le même sens, la proclamation d'un Etat Fédéral démocratique
est considérée comme une avancée par rapport à la monarchie
absolutiste qui dominait sous le règne de Gyanendra; cette
transformation a rempli le peuple de joie, puisque le fait
d'abandonner ce gouvernement féodal le plus arriéré qui soit ne
pouvait qu'éveiller la joie des exploités et des opprimés.
Mais la question demeure : quel type d'Etat peut surgir de l'accord
entre des forces qui représentent des intérêts antagoniques et qui,
si elles ont en commun aujourd'hui leur opposition à la monarchie,
ont aussi vécu en bonne intelligence avec elle pendant de
nombreuses années, se sont allaités docilement à son giron, et
maintenant changent de couleur tels des caméléons pour se fondre
dans la végétation des bourreaux de la monarchie?
Cette joie parmi les masses a aussi retenti devant son glorieux
Parti, le Parti de la Révolution, le PCN(m), l'organisation qui les
a mené si haut, jusqu'à caresser le pouvoir direct des masses en
armes, cette force politique qui fut capable de défier le monde
capitaliste pour les diriger dans la lutte pour la révolution
socialiste.
Cette force triomphait dans les urnes, se proclamait
la grande gagnante des élections et devenait la force politique la
plus importante de tout le Népal. Il est compréhensible que le
peuple du Népal ait été rempli de joie.
Mais est-ce qu'elle continue d'être ce qu'elle a été jusqu'à
récemment, cette force puissante de la révolution qui jura il y a
plus de 10 ans de ne pas laisser la vie sauve au capitalisme?
Ou
alors, en quoi s'est transformé cette organisation politique qui
fait désormais partie d'un gouvernement ayant maintenu
essentiellement intactes les structures d'un Etat qui conserve la
forme d'un appareil de classe minoritaire pour dominer l'immense
majorité?
Le peuple du Népal se réjouit car il a été mis fin à la guerre, et
ce sentiment est pleinement compréhensible, car qui plus que les
masses peut aspirer à la paix entre les Hommes et rêver d'une
société basée sur la coopération et l'abandon de la violence et qui
ainsi permette le développement aussi bien collectif qu'individuel
des personnes?
La paix est toujours un désir des peuples, qui par principe et par
une douloureuse expérience, savent que ceux qui promeuvent les
guerres, ce sont les réactionnaires qui destinent des milliards
pour équiper leurs armées et se doter d'arsenaux puissants et de
technologie militaire, afin d'agrandir leur domaine.
Mais est-ce que la paix qui a été décrétée au Népal reflète
réellement le dépassement des problèmes essentiels qui ont généré
la guerre révolutionnaire?
Plus encore, l'Armée Populaire de Libération a été démantelée au
profit d'une armée au service de ce nouvel Etat, une armée appelée
à protéger les institutions actuelles, composée de l'union des
combattants des deux armées, et surtout une armée qui se fortifiera
au détriment de l'armement général du peuple : pourra-t-on compter
sur celle-ci pour atteindre les buts révolutionnaires des Népalais?
Et au fond, peut-on dire qu'une paix véritable a été gagnée, ou
bien n'est-ce qu'une illusion momentanée?
Ainsi donc, les événements au Népal éveillent ces inquiétudes et
considérations, ainsi que beaucoup d'autres.
Ce qui est en train de
se passer au Népal est d'une telle ampleur que le mouvement
communiste international se trouve plongé dans une profonde
division quant aux interprétations, et nombreuses en sont les
nuances.
LA LUTTE DE LIGNES SE DEVELOPPE
Pour certains le processus népalais est une forme de développement
de la révolution prolétarienne, qu'ils soutiennent aveuglément par
leurs déclarations; ils ont donné depuis le début l'adoubement au
chemin pris par les dirigeants du PCN(m).
En vérité, cela a été
fait sans beaucoup d'analyse sérieuse de la situation, mais plutôt
par une attitude de "respect" pour un processus dirigé par
une organisation qui jouissait de la reconnaissance mondiale de
tous les communistes.
Le PCN(m) fut depuis son surgissement en 1994 une organisation qui
s'est placée à l'avant-garde de la révolution prolétarienne
mondiale, ce qui lui a valu la haine de tous les impérialistes et
en même temps l'affection, l'amitié et le respect des ouvriers et
révolutionnaires du monde.
Cette histoire, ces antécédents ont brouillé le regard de quelques
organisations et groupes qui, faute de mener l'analyse sérieuse des
événements et des nouvelles positions du PCN(m), ont maintenu leur
soutien aveugle face à ce qui est en train d'arriver.
D'autres ont maintenu un silence complice. Certaines organisations
qui jadis défendaient en première ligne la guerre populaire au
Népal ont retiré de leur propagande, de façon irresponsable, toute
évaluation publique à ce sujet.
Ils ont caché leur tête comme des autruches, sans se rendre compte
que les ouvriers et révolutionnaires du monde les observent
attentivement et s'aperçoivent de leur manque de capacité
théorique, de leur irresponsabilité politique et de leur immense
degré de libéralisme.
Ce sont des organisations qui ne se sont
jamais senties sérieusement responsables de ce qui se passe dans le
mouvement communiste international ou dans le mouvement ouvrier.
Certains d'entre eux sont des groupuscules qui ne produisent pas
une seule idée intéressante pour les masses, ou bien parce qu'ils
sont incapables d'utiliser la science du marxisme pour analyser la
réalité actuelle, ou bien parce qu'ils ne comprennent pas qu'une
des tâches les plus importantes des communistes consiste
précisément à être le chef politique et idéologique de la classe
ouvrière, ce qui implique d'être les porteurs de la science, de la
connaissance, de l'analyse, des orientations tactiques et
stratégiques.
Leur silence ou leur incapacité de prendre parti pour l'une ou
l'autre position ouvertement et courageusement, ils les retournent
en se tapissant dans silence de la clandestinité, ou en se
réduisant à délivrer leurs arguments pauvres et insipides par le
biais des fameux forums internet, où ils apparaissent couverts sous
des noms de forumers « rouges ».
Il n'est pas question ici de nous opposer à ce type de discussions,
qui sont en réalité de petites batailles de guérilla entre
combattants de diverses tendances, par contre ce qui est tout à
fait condamnable, c'est que ceux qui se proclament avant-garde de
la révolution prétendent affronter les travaux théoriques profonds
et sensés - comme ceux de la revue Négation de la négation n°3 - au
moyen de leurs argument pauvres, superficiels et évasifs tenus sur
ces forums, sans aucun travail sérieux qui puisse les soutenir.
Une autre nuance, très proche du cas précédent, est représentée par
les nouveaux agnostiques, qui mettent tout en doute et sont
incapables d'analyser à la lumière du marxisme-léninisme-maoïsme la
profondeur de la trahison envers la révolution qui a incubé au
Népal.
Leurs postures sont indécises, ils n'établissent aucune
position définie, considérant qu'il est impossible de qualifier ce
qui a lieu au Népal, qu'il faut attendre et voir ce que donneront
les événements au Népal.
Au mieux, ils arrivent à donner quelques
petits avertissements de prudence à ce propos.
L'exemple le plus typique et le plus honteux de cela est l'attitude
du service d'information d'Un Monde à Gagner qui a publié deux
documents pardonnant l'existence de ce processus qu'ils considèrent
comme un changement révolutionnaire encore dirigé par les
communistes.
Ils font une critique peureuse, glissante, et d'interprétation
imprécise car en ne prodiguant que des avertissements, ils se
laissent une porte entrouverte pour s'en sortir les mains propres
en cas d'échec des prachandistes. C'est à dire qu'il gardent, en
joueurs de poker avisés, un as dans leur manche.
Cette position est la matérialisation de ce que Lénine a appelé le
« marais », une position de centre qui se protège de façon à s'en
sortir, quels que soient les résultats. C'est une position
extrêmement
dangereuse qui a été adoptée par beaucoup d'organisations
politiques dans le monde.
En ce sens, nous devons attirer l'attention sur la position
préoccupante adoptée par le Parti Communiste d'Inde (maoïste) dans
ses dernières déclarations, l'une d'entre elle étant directement
signée par Azad, le porte-parole de cette organisation.
Les camarades sont en train d'incliner dangereusement vers la
position du marais, puisque malgré l'évolution des événements,
lesquels ont confirmé les avertissements qu'ils avaient
opportunément prodigués au sujet du possible démantèlement de la
guerre populaire, les camarades en restent là : seulement des
avertissements! Le document dont nous disposons est à l'heure
actuelle seulement en anglais, nous le publierons en espagnol dès
que possible.
Dans leur document, ils voient comme possible l'avancée de la
révolution sous les nouvelles conditions et ne font qu'avertir
du danger que celles-ci ne se transforment en une nouvelle
frustration pour le peuple, au cas où les prachandistes ne lancent
pas avec force la mobilisation révolutionnaire des masses.
Leur posture hésitante au sujet de la nécessité de dénoncer
ouvertement les prachandistes comme traîtres les a empêché de jouer
le rôle historique qu'ils auraient pu avoir dans la direction
internationale de cette grande bataille contre le révisionnisme, et
ce qui a contribué à cela fut leur profonde erreur de placer au-
dessus de cette lutte l'intérêt de maintenir l'unité du MRI
[mouvement révolutionnaire internationaliste].
Cette unité a déjà volé en éclats, il serait beaucoup plus
conséquent de reconnaître ce fait et de l'affronter.
Leur position est la répétition de la grave erreur commise par les
communistes de Chine au milieu du siècle passé, lorsqu'ils
fermèrent la porte pendant des années à la lutte contre le
révisionnisme khrouchtchévien, alors que celui ci faisait le fier
dans le monde entier.
Cette erreur, reconnue plus tard par les Chinois eux-mêmes, est une
expérience de grande valeur dont doivent s'abreuver les camarades
de l'Inde pour être capables de tenir la position qui leur revient
dans cette bataille.
Enfin, la dernière position, celle de ceux qui ont osé qualifier
les événements au Népal comme ce qu'ils sont en réalité : une
trahison à la révolution.
Cette position a exposé clairement les
éléments qui suffisent pour démontrer que le chemin pris par les
prachandistes n'a rien à voir avec une révolution basée sur le
pouvoir direct des masses armées et avec la classe ouvrière comme
avant-garde.
C'est la position des révolutionnaires qui ont pris la réalité
comme centre et la science comme instrument pour l'analyser, et qui
se sont fondés sur l'expérience historique du mouvement communiste
international, de façon à trouver une réponse aux interrogations
soulevées par les derniers événements.
Avec certitude, on peut affirmer que ce qui a remplacé la monarchie
est une gouvernement démocratico-bourgeois, un système que Mao
Zedong lui-même et avec lui tous les léninistes ont déjà condamné
comme caduc à l'époque de l'impérialisme.
Et rien d'autre ne peut résulter de la prétention de faire un
gouvernement et un Etat au-dessus des contradictions de classe.
Cette vaine banalité d'un Etat basé sur la collaboration est de
l'opportunisme le plus pur et le plus vulgaire, déjà condamné et
battu en brèche par les communistes.
Il n'y a pas besoin d'attendre pour savoir que la révolution a été
trahie, il n'y a pas de hasard à ce que les prachandistes siègent
aujourd'hui en compagnie des réactionnaires du faux parti
communiste de Chine et signent des engagements aussi misérables que
celui de respecter leur domination impériale sur le Tibet, allant
jusqu'à s'engager à interdire toute protestation des Tibétains à
Katmandou.
Leur rôle, désormais, est celui de bourreaux des masses, et cela,
ils ne peuvent pas le changer par de simples déclarations
démocrato-gogo.
Désormais, c'est avec les impérialistes que leur engagement est
pris, et la disparition du rideau de fumée qu'ils ont tendu
n'est qu'une question de temps.
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