Pour une lutte conséquente contre l'antisémitisme !

L'antisémitisme en France possède une caractéristique toute française: il est hypocrite.

Les antisémites n'en ont pas fait une brique pour cimenter une politique, ils l'ont au contraire « dépolitisé », pour que l'antisémitisme puisse s'infiltrer partout.

L'antisémitisme peut ainsi suinter de tous les pores de la société, comme un préjugé accepté – et acceptable.

Les antisémites ont développé cette position depuis l'affaire Dreyfus. Ils ont appris à contourner le clivage droite/gauche.

L'antisémite ne se dira ainsi pas raciste, il dira simplement de lui qu'il est « réaliste », dira simplement : « ces gens, ils ne sont pas comme nous. » 

Arte ou France 5 peuvent donc bien passer des documentaires sur l'extermination des personnes juives d'Europe par les nazis, cela n'atteint pas les antisémites français, car leur antisémitisme n'a pas la même forme idéologique que celui des nazis.





Prenons De Gaulle par exemple. Il a libéré la France, nous dit l'idéologie de l'Etat français. Mais a-t-il libéré les personnes françaises d'origine juive? Il n'y a pas un mot à ce sujet. Il a libéré la France, et puis c'est tout.

Si après, des personnes d'origine juive ont été massacré, cela ne peut être qu'un « détail », bien avant Le Pen. Ainsi après la seconde guerre mondiale, lorsqu'il a été question de mettre en place un système d'indemnisation des victimes de guerre, De Gaulle et ses amis ont purement et simplement prôné l'exclusion des déportés juifs des bénéficiaires des pensions de guerre.

Ce n'est que par la pression des résistants communistes qu'il leur a été finalement octroyée une allocation, et encore les Gaullistes ont-ils milité pour qu'elle s¹inscrive dans un statut différent de celui des déportés résistants.

Lorsqu'une délégation du comité pour l'édification d'un mémorial du martyr juif demanda à être reçu par De Gaulle, celui-ci refusa, sous prétexte qu'il ne recevait pas les délégations. Et pour finir, De Gaulle parlera en 1967 des Israéliens comme d'« un peuple sûr de lui et dominateur. »





Il n'y a pas de hasard. Pas plus chez De Gaulle que chez Mitterrand qui faisait déposer régulièrement chaque 11 novembre une gerbe de fleurs sur la tombe du maréchal Pétain. Ou chez Barre qui parlait après l'attentat de la rue Copernic en 1980 d'« un odieux attentat qui visait des israélites et qui a tué des Français innocents. »

La « France » avant tout, la France « éternelle », la France « innocente. »

Car c'est cela dont il s'agit: la conception de la nation. L'idéologie nationale est agressive, elle a comme but que la nation soit un bloc.

Par conséquent les personnes ne rentrant pas dans ce cadre idéal sont stigmatisés. Surtout si elles ont quelque chose en commun qui détermine plus leur identité que la nation.





Ainsi,

« En revendiquant une nationalité et une culture par-delà les frontières des pays et des classes, c'est-à-dire en définissant une communauté humaine en dehors des Etats nationaux, les communautés juives ont été une cible principale des idéologies bourgeoises nationales.

Cela a été particulièrement fort là où les Etats nationaux n'avaient pas encore atteint leur unité.

Dans la conception nazie de l'Etat capitaliste centralisé, les communautés « transnationales » juives, roms et sintis (« tziganes ») apparaissaient comme internationalistes et proches du communisme dans leurs principes communautaires.

Ce phénomène de liquidation de populations apparaissant comme des obstacles à l'unification nationale selon les principes capitalistes parce qu'elles ont conservé des traits communautaires antérieurs au capitalisme n'est pas un phénomène exceptionnel.

Il est lié aux contradictions du rapport entre féodalité et capitalisme ; il est ainsi encore d'actualité pour la majorité des peuples du monde, encore prisonniers des rapports féodaux.

Il a pris et prend souvent un caractère génocidaire (liquidation des Juifs d'Espagne ; liquidation des communautés samis (« lapones ») en Europe du Nord ; liquidation des natives americans en Amérique du Nord ; liquidation des communautés indiennes en Amérique centrale et du Sud, etc.). » (Manuel d'économie politique marxiste-léniniste-maoïste).





L'antisémitisme français ne pouvait pas apparaître comme agressif comme l'antisémitisme allemand, en raison de l'idéologie officielle de l'Etat français, défenseur de « l'humanisme des Lumières. »

C'est pourquoi l'antisémitisme français ne s'affirme pas comme exterminateur, mais comme éducateur. Exactement comme la colonisation de l'Afrique était justifié par les socialistes sous des couverts de « civilisation. »





Le « Juif », c'est celui qui fait trop de bruit, qui se fait remarquer, qui a des manières « non européennes », qui est susceptible, fréquente ou habite le quartier du sentier à Paris, a de la famille en Israël, possède de l'argent et le plus souvent travaille dans le milieu commerçant, vit en vase clos avec les gens de sa « communauté. »

Le Juif vise l'argent: voilà l'adage antisémite qui est une banalité en France.

Même s'il est artiste, le « Juif » du fantasme antisémite n'a qu'un but: l'argent.

Et dans un cocktail fasciste de frustration et de patriarcat, le « Juif » s'accapare, en plus de l'argent, les « femmes. »

Bernard Henri-Lévi, personnage insignifiant de la couche des intellectuels bourgeois, focalise ainsi sur lui tous les fantasmes de ce type. Un personnage insignifiant politiquement comme Patrick Bruel subit le même sort: Le Pen ne s'est pas privé de l'appeler « Patrick Benguigui. »





Le fantasme concernant l'argent est essentiel dans l'antisémitisme. Si des Juifs ont de l'argent, c'est nécessairement qu'il s'agit d'argent souillé, d'argent plus capitaliste que capitaliste.

Ainsi Dieudonné dit-il du CRIF (Conseil Représentatif des Institutions Juives) dans les colonnes du Journal du Dimanche, que ses membres sont:

« des négriers reconvertis dans la banque, le spectacle et aujourd'hui l'action terroriste. »

Toutes les accusations sont naturellement étayées par telle ou telle pseudo recherche scientifique « démontrant le rôle des juifs »; en l'occurence l'accusation comme quoi les personnes d'origine juive se sont enrichies grâce à la traite des esclaves provient d'un ouvrage produit aux Etats-Unis par la « Nation of Islam », une organisation ouvertement antisémite.

Les ouvrages antisémites renforcent ainsi l'antisémitisme, donnant des cautions prétendument scientifiques, et fournissent une justification à l'antisémitisme : les Juifs eux-mêmes.

Ainsi, les Juifs ont eux-mêmes inventé le racisme : « Le racisme a été inventé par Abraham, "Le peuple élu", c'est le début du racisme. »

(Dieudonné, Lyon Capitale, le 23 janvier 2002)

Ce qui arrive aux personnes d'origine juive est « mérité » selon les antisémites :

« Ce n'est pas systématiquement de la faute de l'autre (...) si personne ne peut vous blairer partout où vous mettez les pieds (...). Parce qu'en gros c'est à peu près ça leur histoire -des juifs-, tu vois. Ça fait quand même 2 500 ans, où chaque fois où ils mettent les pieds quelque part, au bout de cinquante ans, ils se font dérouiller. » (Alain Soral, sur France 2, le 21 septembre 2004, en présence de Dieudonné sur le plateau)





Ce discours est également celui de Bové, le paysan tellement révolté qu'il avait empêché au Larzac que Mitterrand soit lynché par les maos: «Il faut se demander à qui profite le crime. Je dénonce tous les actes visant des lieux de culte. Mais je crois que le gouvernement israélien et ses services secrets ont intérêt à créer une certaine psychose, à faire croire qu'un climat antisémite s'est installé en France, pour mieux détourner les regards.» (Libération du 3 avril 2002)

Ainsi le combat contre le fascisme passe par le combat... contre les personnes d'origine juive, source de l'antisémitisme. L'antisémitisme? Connais pas.

Cette haine est tellement forte qu'elle a contaminé des personnes aliénées par l'antisémitisme. Cette thèse a donc été celle d'une partie d'intellectuels juifs / de gauche voyant le mal dans les personnes d'origine juive, qui seraient avilies.

Bernard Lazare est trèsconnu en France comme un théoricien juif de gauche ayant analysé l'antisémitisme et soutenu Dreyfus, mais son analyse a été grandement salué par les antisémites en raison de l'explication que les Juifs étaient associaux.

Plus généralement, le courant sioniste de droite, connu sous le nom de sioniste-révisionniste et ayant eu comme fondateur Jabontinsky, s'appuie sur toute une interprétation « raciale » des personnes d'origine juive.

Le « Juif » est « différent. » Voilà la thèse. Que l'on retrouve souvent.

« C'est l'Etat d'Israël tel qu'il fonctionne depuis 1967 qui est le vecteur d'un nouvel antisémitisme. » dit ainsi tranquillement Maurice Rajsfus, responsable de Ras l'Front, donnant l'absolution aux antisémites.

C'est également la thèse de Trotsky, qui expliquait le « développement » d'un antisémitisme en URSS par le fait... que les Juifs étaient une population typiquement urbaine, que le système soviétique avait besoin de beaucoup de fonctionnaires et que donc les Juifs composaient une part grandement disproportionnée de la bureaucratie « haï par les paysans et les ouvriers. » (Thermidor et antisémitisme, février 1937)

L'antisémitisme condamne les « Juifs » à être irrémédiablement différents, socialement, culturellement, spirituellement, « racialement », etc.



Une résolution scientifique de l'antisémitisme est impossible, car les « Juifs » sont « trop différents. »

Les antisémites considèrent l'antisémitisme comme normal et ainsi que l'antisémitisme n'existe pas, tandis que les personnes s'opposant à l'antisémitisme le considère comme un simple préjugé, et donc

n'existant pas réellement.

La politique suivant la Libération explique beaucoup de choses dans ce domaine. L'antisémitisme a été expliqué comme un phénomène allemand. L'antisémitisme, c'était les Allemands. Et les Français collabos, des anomalies, qu'il fallait vite oublier dans la réconciliation nationale.





Affirmons le : la dénazification de l'Allemagne de l'ouest n'a pas eu lieu, la dépétainisation de la France non plus.

Au lendemain de la Libération, ce qui comptait c'était l'unité nationale, la « cohésion », la nature non corrompue de la république et de son idéologie, et pour les classes dominantes la déportation de 86.000 personnes d'origine juives vivant en France se diluait très bien dans les 6 millions de personnes d'origine juive assassinées par les nazis.

Cela a permis de se débarrasser de la question de l'antisémitisme, qui a donc été compris comme une anomalie, un « préjugé », aucunement comme une pièce maîtresse du fascisme.

L'antisémitisme « n'existe pas », il n'est qu'un préjugé « abstrait. »

Et s'il y a un « acte » antisémite, alors ce n'est pas un acte antisémite, mais un acte ayant une autre origine.

En France aujourd'hui s'il y a un acte antisémite, il y a forcément une « raison », valable ou pas.

De plus en plus souvent l'antisémitisme est ainsi considéré comme « excusable » sous prétexte qu'il y aurait un rapport avec la question palestinienne.

Comme si assimiler les personnes d'origine juive en France et la population israélienne n'était pas à la base elle-même une conception antisémite, celle du « juif apatride. »





Tout cela doit cesser. Il faut comprendre l'antisémitisme en tant qu'idéologie autonome. Il ne faut plus voir l'antisémitisme dans le rapport entre les personnes d'origine juive et le reste des personnes vivant en France, mais dans le rapport qu'ont les personnes vivant en France avec elles-mêmes et la société dans laquelle elles vivent.

Il faut enfin prendre en compte que l'antisémitisme n'a pas besoin des personnes d'origine juive.

Les personnes d'origine juive composait 0,80% de la population d'Allemagne avant la prise du pouvoir des nazis, et vivaient en majorité dans les grandes villes.

Le nazisme s'est développé quand même, et est allé chercher des personnes d'origine juive à massacrer industriellement jusque dans les autres pays.

Etudions les sources de l'antisémitisme, leurs racines sociales.

L'antisémitisme : un produit idéologique de la petite-bourgeoisie et une tradition de la petite-bourgeoisie française

La petite-bourgeoisie existe historiquement dans la phase ascendante du capitalisme, par la suite elle est broyée par la crise du capitalisme, par la montée en puissance des monopoles.





L'appauvrissement des classes moyennes est un phénomène historique vu plusieurs fois, coïncidant à chaque fois avec la montée en puissance de l'accumulation du capital.

Mais la petite-bourgeoisie ne veut pas du prolétariat, elle ne veut pas du communisme, elle veut préserver ses intérêts.

Elle doit donc trouver une origine à ses problèmes qui ne remette pas en cause le capitalisme, alors que le capitalisme devient de plus en plus entre les mains des grands monopoles, son ennemi.

La petite-bourgeoisie combat alors un ennemi fantasmatique: le « Juif », à la fois bolchévik et grand capitaliste.

L'image du « Juif » comme collectivisateur et appropriateur, comme communiste et grand capitaliste, montre que l'antisémitisme puise dans une vision du monde petite-bourgeoise.

On est ainsi pas étonné de voir le grand théoricien français de la petite propriété, Proudhon, être un farouche antisémite : « Juifs, Faire un article contre cette race qui envenime tout, en se fourrant partout, sans jamais se fondre avec aucun peuple. Demander son expulsion de France, à l'exception des individus mariés avec des françaises ; abolir les synagogues, ne les admettre à aucun emploi, poursuivre enfin l'abolition de ce culte. Ce n'est pas pour rien que les chrétiens les ont appelés déicides. Le juif est l'ennemi du genre humain. Il faut renvoyer cette race en Asie, ou l'exterminer. »

Proudhon défendait le crédit à volonté, et dans son esprit petit-bourgeois les personnes d'origine juive représentent le grand capital, qui asservit les petits propriétaires, ainsi que les communistes collectivistes.

On retrouve cette vision chez l'utopiste Fourier, défenseur des petites communautés, dans son livre « Apologue du Juif Iscariote » : « J'appelle, comme le peuple, de ce nom méprisé de juif, tout trafiquant d'espèces, tout parasite improductif, vivant de la substance et du travail d'autrui. Juif, usurier, trafiquant sont pour moi synonymes. »





Ou encore chez Blanqui, qui dans le journal qu¹il fonda en 1865, Candide, écrira « le suffrage universel, c'est l'intronisation définitive des Rothschild, l'avènement des juifs. »

Pour le petit-bourgeois, le « Juif » est Lénine et Rotschild en même temps.

Ce délire a une origine : « l'avènement » de la suprématie du grand capital, que la petite-bourgeoisie veut à tout prix éviter, et cela jusqu'à l'hystérie.

Et la petite-bourgeoisie produit nécessairement tout autant du nationalisme que son frère jumeau l'antisémitisme. Il y a deux raisons essentielles à cela.

La première est que le petit-bourgeois cherche une source à ses souffrances.

Il ne peut pas accuser le capitalisme car il est capitaliste, et ne peut donc pas directement attaquer les grands monopoles, en raison du risque de révolution sociale.

Il ne peut pas non plus attaquer directement le prolétariat, car il n'a pas envie de le remplacer en tant que classe tout en bas de l'échelle. Il ne veut par conséquent pas aider le prolétariat à s'abolir en tant que classe, dans le communisme.

Une seconde raison est que le petit-bourgeois vise à tout prix l'unité de la nation, pour que le grand capital cesse de l'attaquer et choisisse une autre cible: un autre pays, c'est-à-dire le grand capital d'un autre pays.





Le petit-bourgeois produit donc de l'idéologie, des cibles. Elle tente de mobiliser des couches entières de la population pour la défense de ses intérêts.

C'est exactement pour cette raison que les grands monopoles utilisent le fascisme: le fascisme permet d'utiliser les petits-bourgeois comme main d'oeuvre pour attaquer les masses physiquement (SA, bandes fascistes, etc.) et de reprendre l'idéologie antisémite pour lancer de grandes mobilisations populaires, d'autant plus nécessaire que le fascisme est miliariste et partisan des guerres.

Le petit-bourgeois, c'est le partisan de « l'ordre. » C'est la France des pavillons, de la petite propriété privée, de De Gaulle, de la télévision et des flics.

Il faut également remarquer un phénomène nouveau existant depuis les années 1950, celles de la pseudo décolonisation.

Les Etats nationaux qui se sont formés ne sont que formellement indépendants, en pratique sont au pouvoir des bourgeoisies vendues à l'impérialisme, ou des petites-bourgeoisies tentant de traficoter avec l'impérialisme (Mustafa Kémal, Fidel Castro, Chavez, Saddam Hussein, Peron, Milosevic, Khomeiny, etc.).





Ces Etats nationaux ont besoin d'une idéologie qui ne soit ni communiste, ni directement capitaliste. C'est le baasisme national socialiste, le panarabisme, le nationalisme panaméricain, le panafricanisme, l'islamisme, etc.

Ces idéologies s'entrecroisent le plus souvent, car les petites-bourgeoisies des différents pays se fournissent les unes les autres en idéologies frelatées.

Ainsi, si l'on prend Tito, le grand partisan de la petite propriété appelé autogestion. On retrouve l'un de ses défenseurs et fervent soutien, le théoricien trotskyste de l'autogestion Pablo comme conseiller du président Ben Bella, représentant de la petite-bourgeoisie algérienne.

Et on retrouvera Ben Bella, qui se définissait comme « nassériste » (de l'Egyptien Nasser théoricien du nationalisme arabe) en exil en Suisse, près de son ami François Genoud, ancien nazi et grand financier du FLN algérien, précisément soutenu par les réseaux de Pablo...





Parmi ces réseaux petits-bourgeois, particulièrement prompts à voir des sionistes partout et à en faire l'ennemi numéro un, on retrouve naturellement la petite-bourgeoisie iranienne.

Le numéro deux de l'ambassade d'Iran à Paris a ainsi par exemple remis une très importante somme d'argent à deux éditions d'extrême-droite connues pour leur soutien à l'antisémitisme et le négationnisme (Le Canard enchaîné, 5 août 1987).

Et la Syrie n'a jamais caché qu'elle hébergeait d'anciens nazis.

Ce délire va jusqu'en Malaisie, le Premier ministre malaisien Mahathir Mohamad affirmant lors d'une réunion au 10ème sommet de l'OCI (Organisation de la Conférence Islamique) en Octobre 2003 que « les Européens ont tué 6 millions de Juifs sur 12. Mais aujourd'hui, les Juifs dirigent le monde par procuration. Ils obtiennent que les autres se battent et meurent pour eux (...). Ils ont survécu à 2000 ans de pogroms sans frapper en retour mais en réfléchissant.

Ils ont inventé et réussi à promouvoir le socialisme, le communisme, les droits de l'homme et la démocratie, pour que leur persécution apparaisse comme négative, pour qu'ils jouissent des mêmes droits que les autres (...).

Avec ça, ils ont maintenant pris le contrôle des pays les plus puissants et sont devenus une puissance mondiale. »

Ce qui n'empêchera pas ce même premier ministre de prôner le dialogue des Palestiniens avec Israël, car malgré son discours idéologique il ne peut pas dépasser ses limites de classe prônant justement le refus de la lutte de classe.

Ce qui n'empêchera pas non plus le ministre malaisien des Affaires étrangères de parler de malentendu au sujet de ces propos, tout en précisant que "ceci est la réalité, les Juifs sont très puissants".





En fait pour résumer on peut dire que l'idéologie des Etats nationaux c'est celle du complot.

Le petit-bourgeois, incapable de voir que les masses font l'histoire, fantasme sur une multitude de complots.

Milosevic le yougoslave fantasmait sur des complots, Hoxha faisait de même en Albanie, etc.

Bien entendu des complots existaient réellement : les impérialistes tentaient de soutenir plutôt telle fraction des partisans de Milosevic plutôt qu'une autre.

Mais chez le petit-bourgeois le complot est une vision du monde. L'histoire du monde est, pour le petit-bourgeois, l'histoire des complots.

Le petit-bourgeois ne veut pas de remous, il ne veut pas que le monde soit instable. Tout ce qui met son existence en péril en tant que classe est à proscrire.





Le petit-bourgeois veut le calme, il veut tout sauf la tempête, quitte à lui-même prendre les devants et exterminer ce qui le menace.

Et en attendant le fascisme, la crise capitaliste et les monopoles se renforçant chaque jour, le petit-bourgeois sent chaque jour plus le danger, qu'il interprète comme une menace floue, invisible.

C'est la base de l'imaginaire du complot, et d'ailleurs, le plus souvent ce sont les « Juifs » qui en sont à l'origine: les « Juifs » auraient été au courant de l'attaque contre le world trade center et n'y seraient pas allé, le Mossad est derrière chaque attentat, les USA sont à la solde d'Israël (au lieu du contraire comme il se doit pour toute personne un tant soit peu sérieuse), les « juifs » contrôlent tous les médias, les « juifs » organisent un complot communiste, les « juifs » sont les plus grands capitalistes, il y avait des « juifs » parmi les nazis comme par exemple Eichmann, l'holocauste est une « invention juive » ou bien n'est qu'un prétexte à une extorsion de fonds, etc. etc.





Et plus la crise capitaliste avance, plus la crise impérialiste avance, et plus les théories sur les complots pullulent, deviennent de plus en plus hystériques, de plus en plus délirantes, se tordant de plus en plus dans des contradictions qui sont celles, toutes réelles par contre, de la petite-bourgeoisie en prise avec le grand capital avec comme conséquence la prolétarisation tant redoutée.

Rien d'étonnant ainsi à ce que Thierry Meyssan du réseau voltaire, auteur du livre L'effroyable imposture concernant le 11 septembre, se voit accusé de fréquenter des antisémites et des nationalistes justement adeptes eux-aussi du thème du complot.

L'extrême-droite a toujours su s'allier des gens de gauche anti-communiste prêts à participer à la croisade contre les comploteurs.

Toute l'histoire du négationnisme en France le prouve par ailleurs.

Lorsque Paul Rassinier, l'un des tout premiers négationnistes, publie Passage de la ligne, le Bulletin intérieur du Parti socialiste SFIO de juin 1949 affirme tranquillement que Paul Rassinier s'est « attaché à démontrer (...) que les horreurs dont [les camps] ont été le théâtre sont autant le fait des communistes que les SS » (cité dans Valérie Igounet, Histoire du négationnisme en France, éditions du Seuil).

En 1951 l'ouvrage négationniste Le Mensonge d'Ulysse de Paul Rassinier est vendu à l'entrée de la fête du journal Le Libertaire, hebdomadaire de la Fédération Anarchiste, qui recense également l'ouvrage.





Mais d'autres ont pu être recruté sur la même thématique du complot.

Roger Garaudy, le théoricien du « PCF » contre les maos, est par exemple allé jusqu'au bout de son anticommunisme en embrassant les religions, et tout en étant encore officiellement de gauche, peut affirmer : « 95% des médias occidentaux (sont) contrôlés par les sionistes » (Le Monde, 18 février 1998)

Il n'est pas étonnant que suivant l'antisémitisme catholique français l'abbé Pierre ait soutenu Garaudy. Pour l'antisémitisme catholique français, les personnes d'origine juive c'est l'ancien testament:

« Tout a commencé, pour moi dans le choc horrible qui m'a saisi lorsqu'après des années d'études théologiques, reprenant pour mon compte un peu d'études bibliques, j'ai découvert le livre de Josué. Déjà un trouble très grave m'avait saisi en voyant, peu avant, Moïse apportant les " Tables de la loi " qui enfin disaient : " Tu ne tueras pas ", voyant le Veau d'or, ordonner le massacre de 3 000 gens de son peuple. Mais avec Josué je découvrais (certes contés des siècles après l'événement), comment se réalisa une véritable "Shoah " sur toute vie existant sur la " Terre promise ". » (Lettre à Garaudy, 15 avril 1996).





L'antisémitisme est une idéologie allant de pair avec le délire sur le complot.

Le négationnisme n'est qu'un avatar de l'antisémitisme, cela se voit dès le début de cette théorie quand on sait que pour les négationnistes la Shoah a été un complot fait par les communistes polonais, puis par les « Juifs ».

Selon Rassinier « Il ne faut, en effet, pas oublier que c'est pour se procurer les fonds nécessaires à l'édification de l'Etat d'Israël (indemnisations allemandes proportionnées au nombre de victimes juives) que le mensonge a été commis. » (Paul Rassinier, Le drame des juifs européens, éditions la vieille taupe, 1964).

La rationalité de l'antisémitisme, ce qui le fait tenir, c'est le fait qu'il prétende expliquer ce qui n'est apparemment pas « explicable. »





La fonction de l'antisémitisme répond ainsi à un besoin essentiel de la petite-bourgeoisie.

Antisémitisme et fascisme

L'antisémitisme ne serait pas une idéologie ayant une si grande importance si il n'était pas capable d'amener la mobilisation des masses.

L'antisémitisme est largement utilisé par les réactionnaires pour se prétendre révolutionnaire; en fait dans le système de valeurs de l'antisémitisme, le « Juif » est synonyme de la finance.

La finance internationale est apatride, elle est toute-puissante et prend le contrôle de tous les pays, etc.

Il n'est pas étonnant aujourd'hui de voir les classes moyennes fantasmer sur l'Europe de Bruxelles et d'associer à ces délires un discours nationaliste, social-chauvin.

On comprend maintenant pourquoi les fascistes allemands s'appelaient nationaux-socialistes : ils opposaient le « travail allemand » au « libéralisme juif ».





On comprend également pourquoi l'idéologie nazie amenait à l'extermination des personnes d'origine juive : l'extermination devait sauver le capitalisme de son élément abstrait.

Cet élément « abstrait », polluant le capitalisme et produisant la lutte de classe, pour les nazis, ce sont les « Juifs. »

Là où les communistes disent que l'aliénation provient de la coupure entre travail manuel et travail intellectuel, villes et campagnes, production et consommation, les nazis mobilisent dans une voie de garage les masses en prétendant guérir les maux de la société en liquidant la « source du mal. »

Le communisme parle de classes, le fascisme parle de races.

Là où le communisme dit : les valeurs sociales sont de plus en plus décadentes car la bourgeoisie est réactionnaire, le fascisme dit : il y a un élément abstrait qui pollue les valeurs.

Là où le communisme dit : les travailleurs sont mal à l'aise car ils produisent des biens mais ceux-ci deviennent des marchandises et leur échappent, le fascisme dit : ce mal à l'aise provient d'un problème dans la communauté.

Là où le communisme dit: il faut s'approprier les marchandises et que tout soit à tout le monde, le fascisme dit : « il faut écraser la finance » pour très vite expliquer que la finance, ce sont les « Juifs. »

L'idéologie fasciste peut alors écraser tous les droits individuels, car la communauté prime. Il faut que tous les éléments de la communauté travaillent, répondent aux besoins de l'accumulation capitaliste.





Pour comprendre le fascisme il faut comprendre que les individus ne sont pas définis statiquement, ni sociologiquement par leur classe, mais par leur classe et le rapport de celle-ci avec les autres classes.

Ou comme Marx l'a formulé dans les Thèses sur Feuerbach : « L'essence de l'homme n'est pas une abstraction inhérente à l'individu isolé. Dans sa réalité, elle est l'ensemble des rapports sociaux. »

Cela est très important pour comprendre le sens de l'antisémitisme dans l'idéologie fasciste. Car dans la conception antisémite la personne d'origine juive est un parasite.

Pour l'antisémite, les personnes d'origine juive ne peuvent pas être des prolétaires, ou des SDF. Elles sont forcément des membres de la très haute bourgeoisie, celle de la finance, qui est invisible, que l'on ne rencontre jamais.

Le « Juif » est invisible, sauf lorsqu'il répond à une image raciste précise : le Juif riche, le Juif avec une kippa. Mais le « Juif » de tous les jours n'existe pas, il est invisible.





Le slogan antisémite français « Deauville, Sentier, territoires occupés » reprend ce concept : le « Juif » est ailleurs.

Le fascisme mobilise d'autant plus s'il peut le faire contre un ennemi invisible, abstrait : la lutte contre le complot a une image hyper révolutionnaire.

Pour combattre le fascisme et l'antisémitisme, il faut donc être sur la base de l'internationalisme prolétarien.

« Honte au tsarisme maudit qui torturait et persécutait les juifs. Honte à ceux qui sèment la haine contre les juifs, à ceux qui sèment la haine contre les autres nations. Vivent la confiance fraternelle et l'alliance de combat entre les ouvriers de toutes les nations dans la lutte pour le renversement du capital.» (Lénine, à propos des pogromes antijuif)





L'internationalisme prolétarien signifie non pas abandonner les droits nationaux mais les reconnaître et les subordonner à la question sociale. C'est pourquoi l'Union Soviétique de Staline avait reconnu la population juive comme « minorité nationale. »

L'aspect secondaire ­ l'identité nationale ­ est reconnue et placée à côté de l'aspect principal : le statut de citoyen soviétique.

La lutte contre le fascisme nécessite des exigences démocratiques, même si les communistes sont les seuls à pouvoir diriger ces exigences.

La lutte contre l'antisémitisme est une lutte démocratique, mais elle ne peut être dirigée que par les révolutionnaires, car si la fraternité a été développé par la bourgeoisie contre le féodalisme, elle ne pourra être appliqué réellement tant que subsistera le capitalisme.

Le capitalisme, c'est la concurrence, et en même temps la nécessité pour les classes dominantes de maintenir la cohésion sociale.

On ne peut pas comprendre l'antisémitisme ni lutter contre lui sans voir la signification du nationalisme, du syndicalisme corporatiste, de l'idéologie fasciste.





Le fascisme, c'est le retour aux formes barbares de l'humanité, où des petits groupes d'êtres humains se rassemblaient et s'affrontaient les uns les autres, chaque groupe étant guidé par un chef sorti du lot pour être le plus « fort ».

La force était systématiquement utilisé pour résoudre les « problèmes » de l'organisation sociale, et la destruction totale était une pratique courante.

Cette expérience historique a laissé des traces profondes, en tant que culture patriarcale dominante.

« Le chauvinisme national et racial est une survivance des murs misanthropiques propres à la période du cannibalisme. L'antisémitisme, comme forme extrême du chauvinisme racial, est la survivance la plus dangereuse du cannibalisme. » (Staline : réponse à une question télégraphique de

l'Agence juive d'Amérique sur l'antisémitisme, 12 janvier 1931)

Ainsi, on ne peut pas comprendre l'antisémitisme sans combattre la nation et le patriarcat.

L'antisémitisme va toujours de pair avec une idéologie nationaliste et un culte de la pratique violente, patriarcale.





La violence révolutionnaire contre l'antisémitisme doit donc en même temps s'appuyer sur l'internationalisme (contre la nation) mais aussi unir les pratiques des hommes et des femmes, afin d'arracher les dernières racines de l'antisémitisme et du racisme en général.

Pour le PCMLM, mai 2005.