Le
social-chauvinisme
et
son avatar Jacques Jurquet.
Nous voulons ici parler d'un
phénomène important concernant le communisme en France.
Il s'agit du phénomène
de révision historique du passé afin de justifier une
position politique aujourd'hui.
Celle du social-chauvinisme,
notamment. Qui fait l'apologie de la nation française sous
prétexte de s'opposer à l'Europe libérale. Qui
est à la remorque de la « politique arabe »
de la France sous prétexte de s'opposer à
l'impérialisme nord-américain.
Pour se justifier, les
sociaux-chauvins doivent puiser dans le passé, et ainsi
justifier des positions prises dans le passé, quitte à
les trafiquer pour prouver qu'elles ont toujours été
valables.
C'est par exemple le cas avec
la mise en valeur de Jacques Jurquet et des positions
sociales-chauvines.
Ancien responsable
marxiste-léniniste des années 1960 et ainsi opposant au
« PCF » qualifié de révisionniste,
Jacques Jurquet publie aujourd'hui son autobiographie... dans une
officine du « PCF ».
Afin d'aider à la
nouvelle « virginité » révolutionnaire
d'un nouveau « PCF ».
Qui
est Jacques Jurquet ?
Jacques Jurquet est l'un des
principaux fondateurs du Parti Communiste Marxiste-Léniniste
de France, dans les années 1960.
Il a été l'un
des chefs de file des gens qui dans le Parti Communiste Français
ont refusé d'abandonner le marxisme-léninisme et
Staline, et ont défendu Mao Zedong.
Ce ne sont pas des gens qui
ont considéré que Mao Zedong a apporté des
choses nouvelles au communisme.
Jurquet a affirmé
pourtant cela autour des années 1968, pour être en phase
avec la jeunesse, mais uniquement pour mieux le rejeter, allant
jusqu'à falsifier ses propres textes, comme nous le verrons.
Naturellement aujourd'hui
Jurquet cache cela, comme il le cachait dans les années 1970.
Il cache qu'il a défendu la révolution culturelle comme
phare mondiale et expérience nouvelle et universelle.
Dans son autobiographie, il
souligne que sa motivation a été la question
internationale et le refus du PCF de se confronter aux thèses
chinoises.
En aucun cas il s'agit d'une
défense des thèses spécifiques de Mao Zedong,
comme la guerre populaire, la ligne de masse, la révolution
culturelle.
« Mais ici, il est
très important de faire une mise au point. Cette adhésion
signifiait-elle que je tenais la stratégie et la tactique du
Parti communiste chinois comme applicable universellement, et plus
spécialement en France ?
Rien ne serait plus stupide et
dogmatique que de supposer un seul instant que tel était le
fond de mon engagement.
Si je considérais comme
parfaitement valables les explications fournies sur le plan
international, opposé aux graves erreurs alors commises par
les communistes soviétiques et tous les partis du monde entier
à leur remorque, je ne pensais absolument pas que l'expérience
de la Révolution chinoise était susceptible d'être
appliquée au cas de la France et de nombreux autres pays »
(Jacques Jurquet, A
contre-courant, p.22, éditions Le Temps des Cerises, 2001)
Il écrit cela, alors
qu'après 1968 il a été obligé d'écrire
que:
« Ainsi notre
peuple, notre pays sont-ils entrés dans « l'ère
de la pensée triomphante de Mao Tsé-toung. »
Un homme nouveau est en train de naître, un homme véritablement
communiste, parce que l'influence de la grande révolution
culturelle prolétarienne chinoise a débordé les
frontières géographiques de la Chine et se répand
de façon bénéfique dans le monde entier. »
(Le Printemps révolutionnaire de 1968)
Ce qui, on le voit bien, est
très différent !
A l'opposé de Jurquet,
les étudiants ayant fondé l'UJCML et refusant le PCMLF
partent des principes maoïstes. Le titre de leur document le
plus important est significatif: « Edifions en France un
Parti communiste de l'époque de la révolution
culturelle ».
A l'opposé des gens du
PCMLF pressé pour fonder le Parti, l'UJCML s'appuyait dans ce
texte sur le principe maoïste de la ligne de masse:
« Une
centralisation trop rapide du mouvement dans son ensemble, alors
qu'il n'aurait pas enfoncé ses racines dans chaque détachement
du peuple, reviendrait à généraliser hâtivement
une expérience partielle déterminée, à
tenter de plaquer des formes d'organisation et des bribes de ligne
nées dans une petite fraction du peuple sur la lutte de
classes dans son ensemble. »
Jurquet rejetait
l'universalité de la révolution culturelle, bien que
juste après 1968 il a dû défendre le point de vue
maoïste, quitte à falsifier plus tard ces mêmes
textes.
Mais avant 1968 il ne cache
pas sa position fermement opposé à l'UJCML:
« Si nous nous
arrêtons si sérieusement sur les positions de l'UJC ml,
c'est qu'elles nous offrent aussi l'occasion de préciser
dialectiquement les nôtres.
Ainsi en va-t-il encore de la
conception du Parti, que ces militants voudraient « de
l'époque de la Révolution Culturelle » alors
que nous l'entendons quant à nous de l'époque de la
Pensée de Mao Tsé-toung, ce qui ne comporte évidemment
pas en France et en 1967 le même contenu immédiat. »
Rapport politique du
camarade Jacques Jurquet, présenté au premier congrès
du PCMLF, l'Humanité nouvelle, 8 février 1968 (n°88)
et 15 février 1968 (n°89)
« En fait la
critique fondamentale que nous faisons à l'UJC ml, c'est de
n'avoir pas rejeté de manière décisive toutes
les erreurs révisionnistes de l'U.E.C., notamment dans le
domaine des principes d'organisation.
La création
d'organisation non prolétariennes et non intégrées
dans les couches prolétariennes autrement que par des rapports
de sommet consacre une violation des principes de classe sur le plan
de l'organisation.
Une organisation exclusivement
petite-bourgeoise, même si elle prétend se ranger sur
des positions prolétariennes, reste une organisation
petite-bourgeoise.
Il n'est pas surprenant que
l'UEC, création de ce genre décidée par les
dirigeants révisionnistes du Parti Communiste Français,
aie complètement dégénéré en
tendances, groupes, fractions, côteries et se soit pratiquement
désagrégée d'année en année. Il ne
pouvait en être autrement. »
Rapport politique du
camarade Jacques Jurquet, présenté au premier congrès
du PCMLF, l'Humanité nouvelle, 8 février 1968 (n°88)
et 15 février 1968 (n°89)
« Ils entendent
développer une « ligne de masse » sur
différentes questions, en particulier en ce qui concerne le
soutien politique à apporter au peuple vietnamien et, dans de
domaine ils ont remporté quelque succès.
Mais, pour nous, quelle ligne
de masse peut donc exister si nous ne commençons d'abord par
implanter une organisation, un Parti prolétarien, Parti de
classe, seul capable de diriger des organisations de masse dans
lesquelles les plus larges couches laborieuses viennent se regrouper
autour et sous la direction de la classe ouvrière.
En dehors d'une direction
prolétarienne des masses, de quelle « ligne de
masse » peut-il donc être question ? »
Rapport politique du
camarade Jacques Jurquet, présenté au premier congrès
du PCMLF, l'Humanité nouvelle, 8 février 1968 (n°88)
et 15 février 1968 (n°89)
Il le rappelle également
dans son autobiographie:
« Je considérais
que l'essor des groupes gauchistes était la conséquence
directe du vide laissé par le Parti communiste français
dans des secteurs entiers où il aurait pu et dû être
présent. La faillite du révisionnisme moderne
s'affirmait chaque jour davantage. » (A contre-courant,
p.147)
La révolution
culturelle, Jurquet n'en veut pas et ne la considère pas comme
changeant le cours du temps.
Pour lui l'histoire s'arrêtait
avant, comme le montre son point de vue sur la principale cible de la
révolution culturelle, Deng Xiao Ping:
« Par delà
ses désaccords avec Mao, l'ex-secrétaire général
du Parti communiste chinois restait à nos yeux un ancien de la
longue marche. » (A contre-courant, p.176)
Pour Jurquet les choses
restent immuables, il n'y a pas avancée ou recul de la
révolution. La Chine est socialiste, et puis c'est tout.
La révolution
culturelle n'aura été qu'un aléa de l'histoire
chinoise.
L'une de ses principales
cibles était donc les étudiants de l'UJCML et plus tard
la Gauche Prolétarienne, accusés de vouloir tirer des
leçons pour la France de la révolution culturelle.
Jacques
Jurquet, le PCF, le PCMLF.
Il y a quelque chose de
déconcertant à voir que celui qui se voulait le
responsable du premier « concurrent » du
« PCF » publie aujourd'hui son autobiographie
dans une maison d'édition très proche du « PCF. »
Pourquoi cela ? Et pourquoi
les rapports cordiaux existant aujourd'hui entre Jacques Jurquet et
des responsables de l'opposition de gauche interne au PCF ?
Un « PCF »
que Jurquet préserve dans son autobiographie de toute attaque
trop véhémente. Il rappelle qu'il a tenté un
rapprochement avec le « PCF », quitte à
ce que le PCMLF abandonne son statut de « Parti de la
classe ouvrière »:
« Aux injures des
membres de leur Comité central nous devions riposter par des
arguments, par des critiques, sans nous départir du calme
indispensable seul susceptible de nous faire écouter.
Pour ces raisons je rédigeai
une « Lettre fraternelle adressé aux militants de
base, sympathisants et électeurs du parti communiste français,
à tous les travailleurs qui (croyaient) encore à des
changements possibles par la voie pacifiques des urnes.
Je soumis mon texte au Bureau
politique clandestin de mon organisation, et le fis signer par « des
militants qui (avaient) fondé en décembre 1967 le parti
communiste marxiste-léniniste de France interdit le 12 juin
1968. » (A contre-courant, p.158)
Aux membres de l'UJCML Jurquet
exigeait qu'ils abandonnent leur position gauchiste pour rejoindre
« le seul vrai parti communiste », mais tel
n'était pas sa position vis-à-vis des membres du
« PCF » !
Un « PCF »
qui reste, au final de l'autobiographie de Jurquet, « le »
Parti.
Car la tentative de construire
le PCMLF a échoué, il le dit lui-même.
La faute ?
Non pas au PCMLF, à sa
pratique ou sa théorie. Non, la faute en revient à...
la réalité elle-même.
« Sans doute les
temps n'étaient pas encore venus pour la réussite d'une
telle entreprise de redressement des partis communistes dans le monde
et en France tout particulièrement. » (A
contre-courant, p.103)
Voilà pourquoi
l'autobiographie paraît dans une maison d'édition liée
au « PCF » !
Afin que Jurquet vienne
apporter une légitimité « marxiste-léniniste »
au conglomérat que doit être le nouveau « PCF »
!
Jurquet affirmant qu'il
n'était pas possible d'avoir un parti révolutionnaire
dans les années 1970, affirmant que les Chinois ont expliqué
cette thèse et qu'il faut laisser passer le temps, rejetant
les partisans de Mao comme « gauchistes »,
voilà ce dont les sociaux-chauvins ont besoin !
Ce dont ils ont besoin, c'est
d'un Jurquet, figure historique fournissant un bagage théorique,
disant:
« Je comprenais que
le gouvernement conservateur de la France demeurait un ennemi de
classe des travailleurs, mais j'admettais qu'il lui arrivait de
s'opposer aux deux super-grands en différentes circonstances
précises.
La France réactionnaire
n'avait-elle pas reconnu la République populaire de Chine et
le général De Gaulle lui-même n'avait-il pas dû
accorder l'indépendance à l'Algérie, certes sous
la pression irrésistible de la guerre révolutionnaire
de libération nationale soutenue au prix de sacrifices
immenses par le peuple de l'ancienne colonie ? » (A
contre-courant, p.176)
Le
social-chauvinisme justifié par la théorie des trois
mondes.
Dans les années 1970
Jurquet défendait la Chine, le « PCF »
l'URSS. Mais l'URSS n'existant plus, pourquoi ne pas reprendre les
thèses chinoises justifiant une position chauvine, contre les
Etats-Unis d'Amérique par exemple ?
Les nouveaux révisionnistes
ne s'en privent pas.
Comme par exemple la
Fédération Nationale des Associations pour la
Renaissance Communiste devenu le Pôle de Renaissance
Communiste en France.
Le pôle se veut
républicain, assume les couleurs bleu blanc rouge, est ouvert
à tous... ou presque : « Ne sont pas admis les
membres de partis ne se réclamant pas du communisme ainsi que
les membres de groupes gauchistes. »
Parmi ses objectifs :
« Défendre les conquêtes sociales et
démocratiques au premier rang desquelles la souveraineté
nationale qui doit être restaurée contre le patronat et
les gouvernements qui le servent quelle que soit leur étiquette
(...), le rassemblement populaire contre l'Europe supranationale
voulue par le grand capital. »
« Le combat pour
les revendications immédiates inscrites dans la perspective du
socialisme en France et dans chaque pays a une dimension
anti-impérialiste mondiale et européenne. »
Les valeurs du pôle sont
le monde du travail, la république, la laïcité et
la paix. A cela s'ajoute la « nation. »
Il va de soi qu'avec de tels
critères on ne saurait parler de communistes. De toutes
manières le pôle ajoutant la révolution française
à ses références, il se situe déjà
en dehors du terrain du marxisme.
La démarche du pôle
est sociale-chauvine, elle vise à donner à la France le
même statut que celui des pays opprimés.
Cette position rejoint celle
de Beaulieu.
Beaulieu était comme
Jurquet un des premiers marxistes-léninistes. Il avait fondé
le Centre Marxiste-Léniniste de France et appelé à
soutenir De Gaulle par « anti-impérialisme »
; aujourd'hui on le retrouve proche du « PCF. »
Rien d'étonnant.
Cette position rejoint
également celle de Jurquet.
Qui lui justifie cela par la
« théorie des trois mondes » prôné
par les Chinois.
Cette théorie est de
Deng Xiao Ping, qui a tenté de la faire passer pour venant de
Mao Zedong elle-même.
Mais cette théorie est
anti-dialectique. Elle divise le monde en trois, et pas en deux.
Car comme le dit Mao Zedong:
« Un se divise en deux, voilà
un phénomène universel, et c'est la dialectique. »
Que dit la théorie des
trois mondes ?
Elle affirme qu'il y a un
premier monde formé des superpuissances (Etats-Unis d'Amérique
et URSS), un second monde forme de pays capitalistes (pays d'Europe,
Canada, Japon), et le tiers-monde.
Cette théorie est là
pour justifier l'alliance de la Chine de Deng Xiao Ping aux
puissances impérialistes comme la France.
Jurquet cite dans son
autobiographie une de ces excuses chinoises :
« Camarades,
faites-nous confiance !
Actuellement nos forces
demeurent insuffisantes pour que nous puissions aider efficacement
tous les peuples du Tiers monde à se libérer
définitivement de la domination impérialiste,
actuellement nous ne sommes pas encore en état d'aider les
prolétariats et les peuples du monde entier à réaliser
vigoureusement leurs révolutions. Mais faites-nous
confiance...
Nous allons accumuler toutes
les forces nécessaires pour que demain la Chine socialiste
soit une puissance où le peuple aura vaincu la pauvreté... »
(A contre-courant, p.341)
Il va de soi qu'une telle
affirmation n'a rien à voir avec l'internationalisme
prolétarien.
On ne s'étonne pas du
délire productiviste de Jurquet :
« Nous souhaitons
que la Chine devienne une très grande puissance toujours
socialiste. » (A contre-courant, p.366)
Un communiste qui appelle à
la formation d'une très grande puissance !
Mais voyons en quoi la théorie
des trois mondes est théoriquement anti-léniniste.
La conception léniniste
de la question nationale se fonde sur le fait qu'en premier lieu, à
l'ère de l'impérialisme, il existe une contradiction
irréductible entre nations oppresseurs et nations opprimées.
Dans l'analyse de Deng Xiao
Ping, le tiers-monde est victime d'une oppression venant de deux
centres différents: le premier monde, et le second monde.
Quelle est alors la différence qualitative essentielle entre
le « premier monde » et le « second monde
» ?
Le léninisme nous
répond : aucune, c'est la même sorte d'impérialisme
qui est à l'œuvre, à des degrés
quantitatifs divers: c'est la loi du développement inégal.
Les contradictions entre «
premier monde » et « second monde » ne sont rien
d'autres que des contradictions inter-impérialistes, donc à
l'intérieur d'un seul et unique monde : le monde des
impérialismes.
À moins que le «
premier monde » n'exploite aussi le « deuxième
monde » ? Thèse curieuse dont les conséquences
pratiques sont lourdes... Qui avait par exemple déjà
été franchie par Mussolini avec sa théorie de
l'Italie comme « nation prolétaire. »
Et que les sociaux-chauvins
n'hésitent pas à franchir, aujourd'hui comme hier.
Par exemple avec tout le
discours du PCMLF des années 1970 sur la nécessaire
alliance avec la bourgeoisie pour sauver la nation française
de l'URSS et du « PCF ».
Dans L'Humanité Rouge
du 1er mai 1975, Jacques Jurquet et Henri Jour publient un article
intitulé « Vive le 1er Mai 1975 » où
l'on peut ainsi lire :
« Incapables
désormais de s'opposer victorieusement à la formidable
poussée du tiers monde, force principale et motrice des
changements internationaux en cours, ces deux superpuissances
[Etats-Unis d'Amérique et URSS] font de l'Europe l'enjeu
principal de leur affrontement, dans leurs volontés
respectives de s'approprier ses richesses stratégiques,
économiques, technologiques, etc. »
« Cette question
brûlante est posée aujourd'hui à tous les peuples
d'Europe occidentale: à qui va profiter la crise générale
du vieux capitalisme ? Au social-impérialisme russe qui
dispose partout d'ores et déjà de "cinquième
colonne" subversives ou aux prolétariat et masses
populaires des pays intéressés ? »
« D'autre part,
dans nos pays européens, en France en particulier, les forces
ouvrières, même dirigées par leurs partis
marxistes-léninistes, sont-elles en mesure de s'opposer,
seules, aux deux superpuissances ? Et plus spécialement à
la plus dangereuse et la plus agressive, le social-impérialisme
russe ? »
« Le léninisme
et la pensée Mao Tsé-toung enseignent la nécessité
de compromis tactiques, c'est à dire temporaires.
C'est en ce sens, et compte
tenu des riches expériences du mouvement révolutionnaire
prolétarien, que les marxistes-léninistes de France,
pour réaliser dans l'opposition et l'action contre les menées
des deux superpuissances et de leurs agents dans notre pays, oeuvrent
à la constitution d'un front uni, partie intégrante du
"Front uni mondial" qui regroupe le tiers monde et le
second monde où nous vivons. »
« Il serait tout
aussi pernicieux soit de ne lutter que pour l'objectif central du
moment, l'indépendance nationale, soit de ne lutter que pour
l'objectif final de la révolution prolétarienne en
n'impulsant que les luttes de classe.
Ces deux luttes restent
indissociables, se conditionnent mutuellement, se renforcent
réciproquement. »
« Voilà
pourquoi, en ce premier mai 1975, les marxistes-léninistes
appellent la classe ouvrière et le peuple de France à
se préparer en prévision d'une guerre imminente, à
se mobiliser idéologiquement et matériellement pour
résister à l'agression étrangère, sous
quelque forme qu'elle se précise, militaire ou économique,
extérieure ou intérieure. »
« Voilà
pourquoi en ce premier mai 1975, retentirons les justes mots d'ordre
lancés par l'Humanité Rouge:
-Pour les revendications
ouvrières, paysannes et populaires.
-Pour l'alliance loyale de
la France avec le tiers monde.
-Pour l'indépendance
nationale contre les superpuissances. »
L'alliance loyale avec la
bourgeoisie, sous des prétextes d'impératifs nationaux.
Voilà la théorie
de Deng Xiao Ping en Chine. Voilà la position de Jurquet en
France.
Voilà ce qu'a prôné
le « PCF » et la CGT défenseurs acharnés
de l'indépendance énergétique et de l'armement,
en alliance avec le social-impérialisme russe, le PCMLF
préférant les Chinois.
Voilà aujourd'hui la
position de sociaux-chauvins gravitant autour de la gauche du « PCF »
en général, partisane d'un nationalisme agressif sous
les prétextes de la « souveraineté
nationale. »
Pour
Jurquet la Chine est socialiste, comme Cuba l'est pour les
révisionnistes en général.
L'Etat chinois d'aujourd'hui,
qui se revendique haut et fort de Deng Xiao Ping, affirme que Mao
Zedong a fait plein d'erreurs, rectifiées grâce à
Deng Xiao Ping et sa théorie de « l'économie
socialiste de marché. »
La révolution
culturelle est considérée comme une chose négative,
toutes les conquêtes des masses à ce moment-là
ont été renversé au nom de l'efficience du
capitalisme.
Partant de là Jurquet
ne peut pas dire qu'il se revendique de Mao et qu'il considère
aujourd'hui la Chine comme étant encore socialiste.
Pourtant, il le fait.
Le « Parti
Communiste de Chine » reconnaît l'économie
non publique comme essentielle, a « libéré »
les prix, donné une grande autonomie aux entreprises dans
tous les domaines, « libéré » les
marchés et les commerces.
La Chine ne se revendique pas
des idées de Mao, ni de sa pratique. Elle l'utilise comme
icône nationale, comme icône de l'indépendance
nationale.
Elle rejette tous les
principes communistes. Aujourd'hui, les capitalistes se précipitent
en Chine, du monde entier, pour investir dans un pays où les
grèves sont réprimées dans une très
grande violence.
De cela, Jacques Jurquet n'en
a cure, car lui aussi se sert de Mao comme prétexte au
social-chauvinisme.
Il reprend à son compte
les arguments avancés par le « Parti Communiste de
Chine »:
« Je m'intéresse
beaucoup à la politique actuelle du Parti Communiste Chinois.
Ici on la présente comme capitaliste -la bourgeoisie de tous
les pays ne peut pas accepter de reconnaître que l'essor de la
Chine s'effectue sous la direction du PCC, alors elle dit "
c'est le capitalisme ! "- mais c'est une manière de
contester ses résultats spectaculaires.
Le premier rôle de la
chine reste de sortir de la précarité des centaines de
millions de chinois(e)s. Le socialisme doit-il perpétuer la
pauvreté ou la combattre ? Bien sûr que non. »
(Interview aux Éditions Prolétariennes,
novembre 2004)
Cette position de Jurquet sur
la Chine excuse tout et n'importe quoi. Cette position
« tiers-mondiste » est la même que ceux
qui soutiennent Cuba, ou encore pour d'autres la Corée du
Nord.
Elle est une répétition
du concept opportuniste d' « Etat ouvrier dégénéré »
des trotskystes, un justificatif pour ne pas exiger le meilleur du
socialisme.
Qui
se réclame de Mao doit se confronter à Mao.
Jacques Jurquet a été
l'un des principaux dirigeants d'une organisation, le PCMLF.
Celle-ci est devenue
social-démocrate. Il n'y a pas eu de scission révolutionnaire.
Ce phénomène s'est passé au début des
années 1980 sans qu'il n'y ait eu aucun événement
en son sein.
Comment est-ce possible ? Dans
l'interview aux Éditions Prolétariennes, Jurquet
dit simplement qu'il y avait trop de petits-bourgeois qui avaient été
intégré dans le parti, et que les autres dirigeants
avaient magouillé.
C'est une excuse d'écolier.
C'est pas moi, c'est lui !
Non seulement, comme dans son
autobiographie, il n'y aucune autocritique à ce sujet, mais en
plus la social-démocratisation du PCMLF est unilatéralement
attribué à quelques voyous et pervers ayant saboté
le parti.
Il va de soi qu'un
matérialiste ne peut accepter une considération aussi
simpliste. Mao Zedong nous a enseigné que :
« La dialectique
matérialiste a combattu énergiquement la théorie
métaphysique de la cause externe, de l'impulsion extérieure,
propre au matérialisme mécaniste et à
l'évolutionnisme vulgaire. »
« De deux armées
aux prises, l'une est victorieuse, l'autre est défaite : cela
est déterminé par des causes internes. La victoire est
due soit à la puissance de l'armée, soit à la
justesse de vue de son commandement ; la défaite tient soit à
la faiblesse de l'armée, soit aux erreurs commises par son
commandement ; c'est par l'intermédiaire des causes internes
que les causes externes produisent leur effet. »
Chez Jurquet au contraire,
tout ce qui est arrivé au PCMLF a joué contre lui. Les
choses n'ont qu'un aspect: un aspect purement et simplement négatif.
Comme par exemple la
clandestinité, suite à mai-juin 68. Un révolutionnaire
qui se plaint de la répression ! On aura tout vu.
« Nous eûmes
la surprise de constater que quatre autres formations étaient
visées par les décrets de dissolution, dont la nôtre,
le PCMLF. Nous étions interloqués parce que nous étions
mieux placés que quiconque pour savoir que nous n'étions
pas une organisation factieuse armée. » (A
contre-courant, p.107)
Mais il est vrai que Jurquet
était contre. Il ne le dit pas dans son autobiographie, mais
il est l'auteur d'une lettre au gouvernement expliquant que le PCMLF
ne visait pas à l'insurrection !
Voici un extrait de sa lettre
de soumission à Alain Poher, président de la république
intérimaire, qui date de mai 1969, une année après
l'interdiction:
« À ce sujet
je suis en mesure de mettre le gouvernement au défi de révéler
que mon Parti ou quelque militant issu de ses rangs ont pu justifier
l'intervention de la justice tant en ce qui concerne la sécurité
intérieure que la sécurité extérieure de
la France.
L'organe central du PCMLF n'a
subi aucune saisie. Les nombreuses interpellations et perquisitions
opérées à l'encontre des locaux et des militants
du PCMLF le lendemain de son interdiction n'ont pas permis une seule
inculpation de nature à être maintenue par décision
du pouvoir judiciaire. »
Voilà donc un dirigeant
révolutionnaire qui explique que son parti révolutionnaire
ne mène pas d'action révolutionnaire. On comprend qu'il
ait dû faire une autocritique après cette initiative, en
février 1970, à propos de cette « déplorable
lettre », « concession grave à une ligne
opportuniste de droite ».
Ce qui n'empêchera pas
Jurquet de conserver ses positions dirigeantes.
Mais revenons-en à la
clandestinité forcée du PCMLF. Soulignons une dernière
fois que cette clandestinité ne fut pas un choix:
« Il n'y eut aucun
désaccord sur la question du passage à la
clandestinité. Il nous était imposé, et nous ne
le choisîmes pas du tout de notre plein gré. »
(A contre-courant, p.112)
« La clandestinité
ne favorise en rien l'unité d'une organisation quelle qu'elle
soit. » (A contre-courant, p.134)
La clandestinité
est-elle une mauvaise chose, à première vue, pour un
révolutionnaire ?
Indubitablement oui. Elle ne
facilite ni l'agitation, ni la propagande.
Mais une mauvaise chose ne
peut-elle pas se transformer en une bonne chose ? Il va de soi que
oui.
« Nous devons apprendre
à examiner les problèmes sous tous leurs aspects, à
voir non seulement la face mais aussi le revers des choses et des
phénomènes.
Dans des conditions
déterminées, quelque chose de mauvais peut produire de
bons résultats. » (Mao Zedong).
Quelles seraient ces «
bons résultats » ?
Le passage à la
clandestinité a eu comme conséquence le départ
d'éléments instables du parti, un gain d'expérience
pour ses militants, et, dialectiquement, son renforcement potentiel.
Mais la tradition du « PCF »,
ce sont les membres encartés. On veut adhérer, il
suffit de prendre sa carte et de payer sa cotisation. De vendre le
journal au marché le dimanche matin et d'aller parfois aux
réunions.
Encore aujourd'hui c'est la
méthode d'organisation de la gauche du « PCF »,
de l'ex coordination communiste, etc.
Le Parti communiste n'est pas
compris comme une organisation de combat. La clandestinité,
c'est pour eux l'exception mythique: la Résistance.
Pourtant le passage à
la clandestinité est à attendre pour tout parti
révolutionnaire, il faut y être prêt, et, si
possible, anticiper sur la contre-révolution et prendre ses
responsabilités.
C'est ce qu'enseignent aussi
bien la révolution russe que la révolution chinoise.
Comme d'ailleurs n'importe quelle expérience révolutionnaire
dans le monde.
Il n'est pas possible de jouer
la carte du « nous sommes des vieux qui avons été
dans la résistance » et de pleurer devant les
matraques du ministère de l'intérieur de l'époque
!
Comment
Jurquet analyse-t-il l'échec du PCMLF ?
Une des autres raisons
invoquée par Jurquet au sujet de la décadence du PCMLF
est « l'entrée trop massive d'éléments
petits-bourgeois après 1968 ».
Cela est sans doute vrai, mais
cela change quoi ? A partir du moment où l'idéologie
est prolétarienne, des gens que l'on accepte dans le Parti
peuvent bien avoir une origine de classe petite-bourgeoise.
Etre maoïste, c'est
considérer que tout se transforme, sauf les capitalistes et
les fascistes. L'idéologie révolutionnaire peut et doit
transformer les éléments d'origine petite-bourgeoise,
les prolétariser.
Devant des éléments
petits-bourgeois qui mettent une certaine bonne volonté à
vouloir entrer dans un parti et à servir le peuple, on se doit
de les débarrasser de leurs travers petits-bourgeois, dans
leur intérêt propre, dans l'intérêt du
parti, dans l'intérêt du peuple, dans l'intérêt
de la révolution.
Rappelons qu'à l'époque
du PCMLF, à l'UJCML (Union des Jeunesses Communistes
Marxistes-Léninistes) puis à la GP (Gauche
Prolétarienne), des étudiantEs de grandes écoles,
issuEs de la petite-bourgeoisie, allaient s'établir à
l'usine, appliquaient fermement une ligne de masse correcte, étaient
parmi les masses « comme des poissons dans l'eau.»
Alors il n'y a pas « d'origine
petite-bourgeoise » qui tienne. Ce qui compte c'est la
nature de la ligne, pas l'origine lointaine des militants
révolutionnaires professionnels.
La vérité c'est
que Jurquet passant sous silence les erreurs, l'incompétence,
l'incapacité de l'idéologie du PCMLF à
transformer les personnes décidant de le rejoindre.
C'est une méthode
dogmatique, qui ne vise pas à la transformation
révolutionnaire mais au bureaucratisme dirigiste.
Juquet rejette également
en bloc la faute sur ses camarades qui ont négocié avec
les mitterrandiens en 1981.
Comme si ses camarades étaient
à l'extérieur du PCMLF. Comme si leurs erreurs
n'étaient pas les erreurs du PCMLF.
Comme si les négociations
en question étaient la cause, et non un symptôme, de la
social-démocratisation du PCMLF.
Comme si le PCMLF avait changé
du jour au lendemain de grand parti révolutionnaire à
une association philo-social-démocrate !
Comme si d'ailleurs ce n'était
pas les dominants chinois qui avaient pris contact avec le Parti
Socialiste et qui poussaient le PCMLF en ce sens.
Comme si leur attitude n'avait
pas pour origine l'attitude du PCMLF.
Cela montre que Jurquet n'a
rien compris des luttes pouvant exister au sein d'un Parti, qu'il ne
vaut rien en politique.
Et on peut légitimement
se demander comment le PCMLF expliquait la dégénérescence
révisionniste et social-impérialiste du PCUS (Parti
Communiste d'Union Soviétique) dès la mort de Staline
et principalement après le XXe Congrès en 1956.
Si l'on applique la grille de
lecture que donne Jurquet dans l'analyse de la social-démocratisation
de son parti pour étudier le révisionnisme soviétique,
on pourrait conclure que Staline était blanc comme neige, que
tout est parti d'un complot trotskyste en accord avec la CIA (ce qui
est d'ailleurs la thèse défendue par beaucoup des
« marxistes-léninistes » liés
d'une manière ou d'une autre au « PCF »)
ou que des extra-terrestres auraient débarqué au
Kremlin et imposé par la force une idéologie
anticommuniste au service du grand démon américain.
Bref, même la critique
matérialiste dialectique de l'URSS par le Parti Communiste de
Chine n'est pas assimilée, donc pas appliquée à
la situation concrète de feu le PCMLF.
Dans les faits, la
social-démocratisation du PCMLF provient du PCMLF même,
totalement révisionniste.
Il ne suffit certainement pas
de dire comme Jurquet le fait dans un interview de novembre 2004:
« Éditions
Prolétariennes - Que t'inspires, aujourd'hui, le PCMLF
d'hier ?
Jacques Jurquet - Je pense que
la situation de classe en France n'était pas mûre. Le
Parti réviso pouvait illusionner encore beaucoup de camarades.
»
Là encore, Jurquet
s'obstine à nier les faits : ici, c'est la faute de la «
situation de classe en France » ou du PCF révisionniste.
Aucune autocritique, une
simple affirmation de prétendus « conditions
objectives ».
Après mai-juin 1968 une
telle affirmation est une malhonnêteté, visant à
nier qu'en France la révolution est possible et nécessaire.
Si une situation n'était
pas mûre à l'époque, c'était bien la
situation subjective des révolutionnaires en France, qui ont
été incapables de mener une politique cohérente
au sein d'un parti communiste cohérent.
De même, le PCF était
de fait perçu par de larges franges des masses ouvrières
comme un parti de type social-fasciste en 1968, et en tout cas comme
un parti réformiste, social-traître : en témoignent
les chiffres électoraux du PCF, le turnover des adhérents
du PCF, la désyndicalisation.
Tout cela suivait les
retournements historiques du parti révisionniste, comme les
trahisons du PCF et de la CGT en 1968, le programme uni de la gauche
en 1972, l'officialisation du renoncement au communisme, etc.
jusqu'au score de Robert Hue au premier tour des dernières
élections présidentielles.
Si Jurquet avait raison,
aujourd'hui le PCMLF serait un très grand parti ! Mais cela
n'est pas le cas, car si le « Parti réviso »
pouvait illusionner quelqu'un, c'est bien les gens comme Jurquet qui
refusait de considérer que le « PCF »
c'était le passé !
«
Si on veut attraper des rats, mieux vaut ne pas être très
regardant sur la couleur du chat. » Deng Xiao Ping.
La vérité c'est
que Jurquet n'a rien compris à Mao Zedong. Dans ce même
interview de novembre 2004, il dit:
« Les enseignements
de Mao Zedong sont valables stratégiquement et tactiquement
pour tous les peuples du Tiers-Monde. Mais on ne peut pas les
appliquer de la même façon aux pays capitaliste
développés. Il y a des enseignements universels,
d'autres seulement pour le Tiers-Monde.
Exemple : révolution
prolétarienne avec pour force principale les paysans pauvres
et autres petits paysans. Cela ne peut être le cas en France. »
Jurquet nous parle de «
révolution prolétarienne avec pour force principale les
paysans pauvres et autres petits paysans », comme si c'était
effectivement ce qui avait été mené en Chine par
le PC de Chine.
Or une révolution
prolétarienne est prolétarienne, pas paysanne. Ce dont
parle Jurquet c'est de la révolution de nouvelle démocratie.
La révolution
prolétarienne est la révolution dans un pays
capitaliste, où la contradiction principale repose entre le
prolétariat et la bourgeoisie.
La révolution de
nouvelle démocratie, c'est la révolution dans un pays
dominé par l'impérialisme et vivant ainsi une situation
féodale dans les campagnes.
La révolution est alors
démocratique, s'opposant aux grands propriétaires
terriens des campagnes et aux capitalistes bureaucratiques vendus à
l'impérialisme.
C'est une révolution
agraire guidée par le Parti de la classe ouvrière. Mais
ce n'est pas encore une révolution prolétarienne, car
la révolution de nouvelle démocratie se transforme en
révolution socialiste: c'est ce qu'on appelle la révolution
ininterrompue.
C'est un apport majeur, aussi
bien théorique que pratique, de Mao.
En assimilant révolution
de nouvelle démocratie et révolution prolétarienne,
Jurquet fait une erreur qui correspond à l'interprétation
trotskyste des thèses de Mao.
Et s'il fait cette
assimilation c'est pour justifier un tiers-mondisme et éviter
qu'on ne demande à la Chine des comptes sur son «
socialisme ».
De la même manière,
Jurquet rejette Mao et l'histoire du socialisme en Chine. Il fait de
Mao une icône, et considère que l'histoire s'arrête
en 1976, à la mort de celui-ci. Pour lui les luttes de classe
en Chine socialiste n'ont pas continué.
Pour lui la révolution
culturelle n'existe pas, le marxisme-léninisme-maoïsme
n'existe pas, ni les guerres populaires au Pérou et au Népal.
« Éditions
Prolétariennes - Différentes organisations se
revendiquant du maoïsme luttent les armes à la main, que
ce soit au (Pérou, Népal), que peux-tu dire de ces
luttes ?
Jacques Jurquet - Ce sont des
pays du Tiers-Monde. Je soutiens par principe toutes ces luttes dont
j'ignore les détails. » (interview de novembre 2004)
Pourquoi cela ? Parce que
Jurquet n'y croit plus. Il a bradé l'idéologie. Pour
lui, comme pour tous les marxistes-léninistes, tout viendra...
spontanément:
« Éditions
Prolétariennes - La situation de la classe ouvrière,
des salariés plus généralement est
catastrophique, tant dans son existence quotidienne que du point de
vue de ses organisations (politiques et syndicales), comment vois-tu
l'avenir politique ?
Jacques Jurquet - Ce sont
seules les masses qui, un jour futur, imposeront des changements. De
nouvelles structures organisationnelles syndicales et politiques
naîtrons avec de nouveaux cadres militants issus de ces luttes.
C'est la pratique qui décidera du succès. La théorie
ne sortira qu'ensuite, de la pratique. » (interview de
novembre 2004)
« Un jour futur »,
c'est loin, très loin de la révolution prolétarienne
comme objectif stratégique.
Jurquet parle là dans
une optique réformiste de gauche, il nous apprend les bases du
spontanéisme économiste anti-léniniste : «
La théorie ne sortira qu'ensuite, de la pratique.»
Il remet en cause les bases
mêmes de l'organisation léniniste du parti
révolutionnaire : c'est précisément parce que la
théorie est là que les luttes pratiques peuvent aboutir
dans une perspective révolutionnaire, et non suiviste,
trade-unioniste, réformiste.
Jurquet, c'est l'absence de
politique, le refus de la prise de décision ferme, fondée
sur l'idéologie.
Comme par exemple concernant
la Palestine:
« A plusieurs
reprises, j'avais été sollicité par les courants
les plus activistes comme le FPLP du Docteur Georges Habache ou le
FDLP de Nayef Hawatmeh, qui désiraient que nous les
soutenions. Mais j'avais toujours opposé à leurs
démarches notre volonté de non-ingérence dans
les affaires intérieures de leur peuple. Je m'en tenais
strictement au soutien de leur position commune exprimée par
le Conseil national du Fatah, dont le représentant reconnu
n'était autre que Yasser Arafat. » (A
contre-courant, p.151)
Comme par exemple dans le
refus de mettre sur un même plan Khrouchtchev et ses
représentants italien Togliatti et français Thorez:
« Éditions
Prolétariennes - Le révisionnisme des
Khrouchtchev/Thorez/Togliatti était-il un phénomène
compris à la base et de quelle manière ?
Jacques Jurquet - Je ne
confond pas le révisionnisme de Khrouchtchev avec ceux de
Thorez et Togliatti. Voici dans l'ordre : le plus révisionniste
et traître fut Khrouchtchev, puis Togliatti, le moins réviso
fut Thorez. Il refusa la diffusion en France du rapport Khrouchtchev
contre Staline pendant deux ans. » (interview de novembre
2004)
Dans le refus du PCMLF
d'assumer une position internationale:
« Éditions
Prolétariennes - Dans le monde, des groupes se détachaient
des PC officiels, existaient-ils des contacts entre ces groupes et la
volonté de reconstruire une nouvelle Internationale ?
Jacques Jurquet - Oui,
contacts peu fréquents, à Tirana oui, jamais à
Pékin ou exceptionnellement avec par exemple les Indonésiens.
Seuls les gauchistes -déjà
les trotskistes puis les " maoïstes "- parlaient d'une
nouvelle internationale. » (interview de novembre 2004)
Dans son refus de défendre
fermement Staline:
« Pour ma part, en
1998, après avoir étudié de nombreux ouvrages
relatifs à l'oeuvre de Staline, je ne me sens pas encore en
mesure de qualifier comme positif ou négatif le résultat
de son bilan, mais je m'élève contre les assertions
mensongères et partisanes qui ne reposent sur aucune base
sérieuse et n'ont d'autre raison qu'un anticommunisme
intégriste. » (A contre-courant p.243)
« Je sais que des
purges et des exécutions capitales ont frappé des
innocents, je sais aussi qu'une campagne baptisée
anti-cosmopolite après 1946 a favorisé un grave
déchaînement antisémite en URSS. » (A
contre-courant p.244)
Ce refus de prendre position,
on le retrouve chez les zélateurs de Jurquet. Etudions cette
question.
Les
zélateurs de Jurquet.
Les Éditions
Prolétariennes sont une association fondée en 1996,
tournant principalement autour de leur site internet, et qui
s'évertuent depuis à gommer la différence entre
marxisme-léninisme et marxisme-léninisme-maoïsme,
comme elles le disent elles-mêmes:
« Nous rappelons
qu'à la mesure de nos moyens et notamment de notre site
internet, nous essayons en tant qu'Editions Prolétariennes, de
faire connaître la lutte du Parti Communiste du Pérou et
de briser le mur de désinformations, de silence fait autour de
la répression dont sont victimes les communistes
révolutionnaires péruviens et le président
Gonzalo.
Les Editions Prolétariennes
poursuivent leur combat pour l'unification des communistes M-L, des
maoïstes car ce qui nuit aujourd'hui, notamment dans cette
action internationaliste, reste l'éparpillement de toutes les
forces communistes se revendiquant du marxisme-léninisme, du
maoïsme. » (Déclaration des Editions
Prolétariennes à la conférence internationale du
27 septembre 2003 pour la défense de la vie du Président
Gonzalo)
Tout est dans la virgule entre
marxisme-léninisme et maoïsme. Ce n'est sans doute pas
pour rien qu'un membre des Éditions Prolétariennes
va sur les forums internet trotskystes pour expliquer que ce qu'on
appelle les « maoïstes », ce sont en fait
les marxistes-léninistes !
Ni que les mots mis en
exergues sont « Ni révisionnisme ni gauchisme, une
seule voie: le marxisme-léninisme ! » car pour les
Éditions Prolétariennes, l'ennemi est à
gauche....
Les Éditions
Prolétariennes ont essayé de s'allier à
diverses formations « marxistes-léninistes »,
principalement anti maoïstes, sans succès.
Alors, comme les Éditions
Prolétariennes sont le dernier défenseur des
révisionnistes dans le combat les opposant aux maoïstes,
elles ont ressorti les vieilles lunes. Ce sont les Éditions
Prolétariennes qui font de Jurquet une figure utilisable
par les révisionnistes.
Les Éditions
Prolétariennes mettent ainsi en ligne... les sommaires des
revues du PCMLF et du PCRML, sa scission.
Le but des Éditions
Prolétariennes est de fournir un « passé »
glorieux, une histoire au courant révisionniste moderne.
On comprend mieux avec tout
cela que les Éditions Prolétariennes aient
refusé qu'on leur donne tous les textes en ligne de l'UJCML,
de la Gauche Prolétarienne et également ceux de la
fondation du PCMLF et tous ses tracts de 1968.
Les Éditions
Prolétariennes ne font pas de l'histoire pour faire de
l'histoire, les Éditions Prolétariennes
n'archivent pas pour présenter une documentation. Ce qu'elles
veulent, c'est avoir un bagage pour se vendre de manière
opportuniste.
Sinon les Éditions
Prolétariennes auraient accepté de faire un site
avec les documents de tous les « ML », dans la
perspective de l'unité dont elles parlent tant !
Voilà la politique de
l'opportunisme qui parle d'unité mais la refuse dès
qu'il y a quelque chose de concret, pour des raisons idéologiques
révisionnistes.
Jurquet leur rend
naturellement bien, dans l'interview accordé en novembre 2004
aux Éditions Prolétariennes il dit :
« Éditions
Prolétariennes - Aujourd'hui, plusieurs groupes se
revendiquent du marxisme-léninisme, te sens-tu politiquement
proche de l'un de ces groupes ? Pourquoi ?
Jacques Jurquet - Evidemment
je suis plus que proche avec les Editions Prolétariennes, dont
les responsables ont bien compris l'histoire du PCMLF, mais je n'ai
que peu de confiance dans tous ces petits groupes bavards et souvent
sectaires. Où participent-ils aux luttes de classes ? dans
quelles entreprises ?
Éditions
Prolétariennes - Un de ces groupes pourrait-il figurer le
PCMLF de demain ou du moins le Parti dont a besoin la classe ouvrière
?
Jacques Jurquet - Je ne crois
pas que ce soit mûr pour le moment. Mais à terme les
Editions Prolétariennes me paraissent les plus aptes pour
l'avenir. »
Les Éditions
Prolétariennes représentent la dernière
fraction des gens prétendant défendre Mao Zedong, mais
le rejetant en fait. Elles se sont démasquées en
prenant Jurquet comme drapeau.
Jurquet
le révisionniste: la falsification de ses propres documents.
Suite à mai 1968
Jacques Jurquet publiait un document intitulé « Printemps
révolutionnaire de 1968 ».
Il fut réédité
avec d'autres textes de lui en 1976 sous le titre de « Arracher
la classe ouvrière au révisionnisme. »
Et là, tout
naturellement, les passages faisant référence de
manière positive universelle à la Révolution
Culturelle ou à la pensée de Mao Zedong ont été
censuré.
Le passage « La
Chine bénéficie d'un régime socialiste protégé
par la dictature du prolétariat et par la pensée
invincible de son guide et libérateur, le président Mao
Tsé-toung » se voit ainsi enlever « et
par la pensée invincible de son guide et libérateur, le
président Mao Tsé-toung. »
Jurquet parle de la révolution
culturelle et de son influence, mais souligne à chaque fois
que c'est un cas à part, qui n'est pas transposable, et
surtout qui doit être dépassé, même en
Chine.
Ainsi dans le passage:
« Qu'ainsi la
pensée de Mao Tse-toung, rendue encore plus puissante par la
grande révolution culturelle prolétarienne chinoise, se
soit concrètement exprimée en France, à quelques
quinze mille kilomètres de la République populaire de
Chine, ne doit pas manquer de témoigner de son invincibilité,
de sa portée universelle, de sa valeur historique. »
Jurquet a par la suite enlevé
« de son invincibilité », car il
soutient en Chine les partisans du capitalisme qui veulent ranger la
révolution culturelle dans les oubliettes de l'histoire.
Alors que pour les maoïstes
la révolution culturelle est un apport énorme à
la compréhension du communisme.
Dans ce même
raisonnement révisionniste, Jurquet fait du passage:
« Pour ceux qui
connaissent, soit par la lecture d'articles et de reportages, soit
par l'expérience vécue lors de voyages en Chine, le
déroulement et les péripéties de la grande
révolution culturelle prolétarienne, apparaît
sans hésitation un lien entre la grande tempête
révolutionnaire estudiantine en France et l'exemple chinois »
le passage suivant:
« Pour ceux qui
connaissent, soit par la lecture d'articles et de reportages, soit
par l'expérience vécue lors de voyages en Chine, le
déroulement et les péripéties de la grande
révolution culturelle prolétarienne, apparaît une
similitude certaine entre la grande tempête révolutionnaire
estudiantine en France et l'exemple chinois. »
Le passage:
« Un fait est
assuré cependant: la volonté révolutionnaire des
masses étudiantes françaises trouve sa source dans
l'exemple chinois »
devient:
« Un fait est
assuré cependant: la volonté révolutionnaire des
masses étudiantes françaises s'est apparenté à
l'exemple chinois. »
Ou encore, « Cet
homme, c'est le militant communiste de l'époque de la pensée
de Mao Tsé-toung ! » devient: « Cet
homme, c'est le militant communiste ! »
Des passages entiers sont
censurés, comme celui-ci:
« Ainsi notre
peuple, notre pays sont-ils entrés dans « l'ère
de la pensée triomphante de Mao Tsé-toung. »
Un homme nouveau est en train de naître, un homme véritablement
communiste, parce que l'influence de la grande révolution
culturelle prolétarienne chinoise a débordé les
frontières géographiques de la Chine et se répand
de façon bénéfique dans le monde entier.
La révolutionnarisation
de l'homme substituera l'altruisme, le dévouement au bien
public, à l'égoïsme, le sens de l'intérêt
collectif à l'individualisme, elle préparera cette
société supérieure qui n'a rien à voir
avec les stimulants matériels, mais tout ce qu'il y a de
meilleur dans chaque individu, le Communisme.
Mais pour aider
concrètement à la marche en avant du peuple français
vers ces sommets révolutionnaires, où flottent les
drapeaux rouges de la révolution politique, de la révolution
économique et de la révolution culturelle, il est
indispensable qu'il dispose d'un Parti communiste authentique, qui
fonde son action révolutionnaire et prolétarienne sur
les principes du marxisme-léninisme et la pensée de Mao
Tsé-toung. »
On est loin de Deng Xiao Ping
et de son apologie des stimulants matériels, et de ses chats
qui peuvent être noirs ou blancs du moment qu'ils attrapent des
souris !
Le pire est que dans la
première version, Jurquet allait jusqu'à se la jouer
maoïste en disant:
« La révolution
culturelle est et sera de plus en plus urgente et indispensable dans
les pays capitalistes bénéficiant d'économies
sur-développées, spécialement lorsque aura été
conquis le pouvoir par le renversement de la bourgeoisie. »
Ce qui devient après la
censure:
« La révolution
culturelle est et sera de plus en plus urgente et indispensable dans
les pays anciennement capitalistes bénéficiant
d'économies sur-développées lorsque aura été
conquis le pouvoir par le renversement de la bourgeoisie. »
Ainsi, dans la nouvelle
version du texte de Jurquet, la pensée Mao Zedong est défendue
comme un événement notable mais n'est pas considérée
comme un saut qualitatif.
Par contre, naturellement, des
passages ont été rajouté, naturellement dirigés
contre les « gauchistes », comme par exemple
des phrases du type: « en dépit de certains excès
gauchistes de caractère dogmatique. »
Tout cela montre bien le sens
de la démarche de Jurquet.
Démasquons
les révisionnistes dans la pratique !
L'ensemble de l'extrême-gauche
qui refuse l'internationalisme prolétarien va voter non à
la constitution européenne.
Comme les trotskystes
partisans de la république, ou les sociaux-chauvins soi-disant
« communistes » qui n'ont qu'une idée
fixe: la nation.
Tous les révisionnistes
s'activent autour de de « non » au référendum.
Nous avons vu que Jurquet
était le cheval de Troie des révisionnistes. Un Jacques
Jurquet qui, comme tous les autres, considère qu'il peut se
faire passer pour un communiste de France et dire :
« Mon hostilité
fondamentale visait en premier lieu les Etats-Unis. » (A
contre-courant, p.176)
La vérité, c'est
que notre ennemi est dans notre propre pays. Notre ennemi, c'est
notre bourgeoisie !
Il faut donc combattre le
révisionnisme en théorie en démasquant les idées
erronées pour pouvoir avancer, et en pratique en prônant
le boycott d'un référendum sur la constitution
européenne.
Pourquoi ? Car tous les
sociaux-chauvins font en faire le point de départ de campagnes
brutalement nationalistes.
Ce référendum
n'est de toute façon qu'une face, puisque les dominants feront
en sorte que l'unification européenne passe dans tous les cas.
C'est pourquoi notre position est la suivante:
Contre les illusions
démocratiques bourgeoises sur une possible victoire du «
non » qui ait un sens, contre le discours social-chauvin qui va
s'orchestrer dans la campagne sur le référendum.
Contre la nation et le
patriarcat, contre l'Europe qui n'est qu'un concept géographique
utilisé par les impérialistes pour des manoeuvres
racistes et guerrières.
Pour l'internationalisme
prolétarien et parce que ce sont les masses qui font
l'histoire: contre l'Etat, pour les comités populaires, pour
le boycott du référendum !
Pour
le PCMLM, janvier 2005.
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