Boycottons le référendum ! ! !

L'Etat français propose un référendum sur la Constitution européenne. On attend des gens qu'ils se prononcent pour, ou contre.

Mais cette consultation est-elle vraiment démocratique?

Non.

Le référendum n'est pas un mode démocratique permettant de connaître la volonté des masses. Le référendum est un mode plébiscitaire, c'est-à-dire entièrement fondé sur une lourde propagande chargée de convaincre l'opinion publique, quitte à ce qu'elle ne soit plus d'accord après avoir voté.


C'est un moyen abrutissant, réducteur, dont le résultat est joué d'avance. Ce qui serait démocratique, c'est une discussion des masses à la base, à l'appui de documents, de discussions organisées.

Mais cela ne peut naturellement pas s'organiser dans une société capitaliste, car les principes communistes sont en majorité encore étrangers aux larges masses et soumis à des forces répressives puissantes.


La manière de poser la question à propos de la constitution n'est ainsi pas démocratique. C'est un premier point qu'il faut souligner lorsqu'on est communiste, lorsque l'on veut que les masses pensent, critiquent et dirigent leur propre vie.

Mais le référendum aura lieu, et la question politique qu'il soulève ne peut pas être balayée d'un simple revers de la main. En effet, la constitution européenne liera demain les Etats, orientera les politiques nationales.

Et c'est pour cette raison qu'il est nécessaire d'avoir une ligne politique juste, servant les masses, sur le fond du traité constitutionnel.

Il est inadmissible, comme le font par exemple les anarchistes, d'éluder la question de la constitution.


C'est un idéalisme prétexte à l'oubli de la réalité telle qu'elle est, au profit d'une réalité virtuelle telle qu'on la souhaiterait. C'est le même idéalisme qui a fait que les anarchistes se sont toujours désintéressés du sort de la sécurité sociale, des services publics, de l'éducation nationale.

Tous ces acquis ont été justement permis par la résistance populaire au nazisme et à l'Etat français collaborant avec lui et l'orientation politique révolutionnaire du Parti Communiste.


Défendre les intérêts des masses, voilà la ligne, toute autre orientation est une insulte aux masses qui démocratiquement veulent plus d'éducation, plus de santé, plus d'aspects collectifs dans la société... c'est-à-dire en fin de compte le communisme.

C’est pour cette raison qu’il faut étudier les aspects du vote favorable, et ceux du vote négatif. Qu'apporterait une victoire du « oui »? Quels changements amènerait la victoire du « non »?


Le « oui » correspond à un programme: celui fourni par la constitution européenne. Ce programme consiste principalement et en toute objectivité en la fusion continue des institutions européennes.

C'est une plus grande ouverture des marchés, c'est plus de facilité pour la privatisation des entreprises publiques, une plus grande « libéralisation » du « marché » de l'emploi, une juridiction centrale plus facilement répressive car éloignée de toute pression sociale populaire, etc.


Quelles classes sociales profitent de ce « oui »?

Naturellement la bourgeoisie liée au capitalisme international, la bourgeoisie qui a intérêt à faciliter les échanges du capital et des marchandises au niveau international. La bourgeoisie impérialiste, celle des marchands d'armes par exemple, en est l'un des éléments moteurs, car elle a tout intérêt à ce que l'Europe devienne un bloc unifié capable de rivaliser avec son concurrent: l'impérialisme américain.


Il est évident que la bourgeoisie ne peut pas espérer la victoire du « oui » en présentant les choses objectivement. Elle utilise des intellectuels pour trouver d'autres raisons, « démocratiques » celles-là, pour justifier le « oui ».

La bourgeoisie fait ainsi en sorte que pour beaucoup de gens, le « oui » à la constitution consiste en un dépassement du nationalisme, du grégarisme national, du repli sur soi protectionniste.


Il ne faut pas éluder ce point. Pour beaucoup de gens l'Europe c'est l'ouverture au monde, la possibilité d'une société européenne qui empêcherait un pays membre de sombrer dans l'isolement et le fascisme.

C'est une exigence très importante pour une grande partie des masses.


Voter « oui » est perçu comme un acte d'ouverture entre les peuples, une manière démocratique de rencontrer les autres, voire de formation d'un modèle démocratique allant à l'opposé des pratiques de l'impérialisme nord-américain.

Mais ce vote d'espérance n'est pas réaliste. Il est totalement subjectif, car le capitalisme de la France est le même que celui des USA. La construction de l'Europe jusqu'à présent montre d'ailleurs bien qu'elle s'accompagne d'une montée en puissance du fascisme mou, de Sarkozy, Berlusconi, Haider, etc.


En fait ce vote ressemble à celui de 2002, où pour voter contre Le Pen il y a eu un vote massif pour Chirac. Là où la bourgeoisie disait: Chirac ou le chaos, elle dit cette fois: l'Europe ou le chaos.

Les masses ne doivent pas céder à ce chantage et doivent comprendre que le fascisme mou de la constitution n'amène rien de bon.


Faut-il donc voter pour le non, pour bloquer le projet des dominants?

Ce n'est pas aussi simple, car une fraction importante des dominants soutient le non. Sinon d'ailleurs il n'y aurait pas de référendum: les dominants auraient tout simplement fait comme ils voulaient, comme ils l'ont toujours fait.

Une partie de la bourgeoisie française ne croit pas en l'Europe unifiée. Elle pense que des pays comme la Grande-Bretagne, l'Italie ou l'Espagne sont des chevaux de Troie de l'impérialisme américain. Elle pense la même chose de la Turquie.


C'est pourquoi elle privilégie une Europe des nations, un partenariat privilégié de la France avec l'Allemagne et la Russie, et pas une constitution qui empêcherait l'impérialisme français de faire ce qu'il veut, notamment en Afrique.

La fraction de la bourgeoisie impérialiste qui préfère cette option soutient le non de Le Pen, De Villiers, etc. Elle s'allie aux classes moyennes, en disant à celles-ci qu'elles ont tout à perdre de l'unification européenne qui donnera le pouvoir aux grands monopoles européens, et tout à gagner à une alliance brutale avec les monopoles français.


C'est pourquoi le camp du non est à ce point hétéroclite.

Le Parti Socialiste est par exemple soumis aux contradictions auxquelles sont en proie les classes moyennes, qui veulent à la fois défendre leurs intérêts en s'alliant avec la bourgeoisie mais ont des intérêts opposés au monopoles.

Ainsi si une partie du PS dit oui, une autre dit non et Fabius ou Mélanchon se retrouve côte à côte avec le « PCF » ou le FN.


Un même symptôme de confusion se retrouve chez Lutte Ouvrière, un des représentants de l'aristocratie ouvrière (couche supérieure du prolétariat vendue à la bourgeoisie par l'intermédiaire de la caste privilégiée des délégués syndicaux).

Lutte Ouvrière dit oui à la monnaie unique, oui à l'entrée de la Turquie, mais non à la constitution... Cette contradiction n'est pas un calcul électoral mais l'expression de la contradiction des classes moyennes qui trouvent l'Europe en fin de compte progressiste mais essaient de défendre leurs intérêts contre les monopoles.


En fait la construction du bloc européen est la tragédie des classes moyennes, qui voient bien qu'il s'agit d'un bloc au service des monopoles, des trusts, mais qui souhaitent désespérément échapper à la prolétarisation et rêve comme le PS, le « PCF » ou LO, d'une « autre » Europe.

Le « PCF », dans son texte appelant à voter « non », définit d'ailleurs clairement l'ennemi comme le gouvernement de droite et le patronat.


Le capitalisme n'est pas mentionné, car le capitalisme c'est bien sûr le patronat et les capitalistes, mais aussi leurs valets, depuis les petits chefs dans les bureaux et les usines, en passant par les commerçants exploiteurs d'apprentis et de stagiaires jusqu'aux classes moyennes qui sont autant de relais du capitalisme.

Le « PCF » s'oriente par rapport aux intérêts des classes moyennes, il ne peut donc pas assumer la lutte de classe entre le prolétariat et la bourgeoisie.

Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que le « PCF » reproche à la constitution européenne d'enchaîner la défense européenne à l'OTAN, « donc aux Etats-Unis. »


Car chez les partisans du « non », l'impérialisme français est nié au profit d'un seul impérialisme américain. Pour un peu la France serait une colonie américaine.

Cela n'est pas seulement vrai pour le « PCF ». On trouve le même son de cloche à la LCR. Olivier Besancenot, porte-parole de la LCR, affirme que si le « oui » passe la « future défense européenne se fera dans le cadre de l'Otan, c'est-à-dire à la botte de George Bush junior. » Toni Negri, le théoricien italien de beaucoup d'altermondialistes, considère également l'Europe comme un rempart contre les USA.


On retrouve d'ailleurs les gens du « PCF », les altermondialistes dans leur version social-démocrate et les trotskystes (LCR) dans la fondation Copernic, qui rassemble les partisans du non.

La fondation Copernic explique que la constitution est mauvaise car elle empêchera l'application d'une politique keynésienne, c'est-à-dire la relance de la consommation en appuyant les classes moyennes.


A quoi en sont réduits ces gens? A nous servir la soupe réchauffée qu'ils avaient eux-mêmes déjà proposés... à l'occasion de la candidature de Mitterrand en 1981.

C'est de nouveau le coup du : aujourd'hui on ne peut rien mais demain peut-être, dans d'autres conditions...

Cette attitude est inadmissible, elle désarme les masses, qui sont condamnées à voter « non » pour le simple espoir d'éventuellement avoir demain un gouvernement « de gauche. »


Naturellement la gauche du « PCF » ne vaut pas mieux. Elle est peut-être même moins hypocrite. Elle veut défendre les salariés mais aussi... les travailleurs indépendants !

Il n'est donc pas étonnant que cette gauche du « PCF » affirme qu'avec la Constitution « c'est l'assassinat de la France et de la République », surtout quand on sait qu'elle réclamait elle-même depuis longtemps ce référendum.

La vérité c'est que chez les partisans du « non », les intérêts des classes moyennes petites-bourgeoises dirigent toute l'orientation politique.


Le discours nationaliste, dans le climat actuel d'antisémitisme et de racisme massif en France, traverse ainsi tout le discours du « non », avec des concepts comme la république, la souveraineté nationale, bref tout le bric à brac de ceux qui voudraient bien être des Napoléon, des De Gaulle ou des Pétain.

Alors que faire? Est-il possible de soutenir le « non » populiste et plébéien dominé par l'idéologie de la frange droitière des classes moyennes ?

Non, cela n'est pas possible. Paradoxalement nous avons déjà un exemple historique. En 1992 Lutte Ouvrière avait appelé à boycotter le référendum concernant Maastricht au nom d'un refus du nationalisme.


Cette organisation s'était faite durement critiquée et a abandonné ce principe, cédant à la pression de la petite-bourgeoisie.

Pourtant il aurait fallu continuer dans cette voie, et l'attirance des masses pour le nationalisme aurait pu être brisé. C'est en ouvrant une voie révolutionnaire que les masses peuvent s'engouffrer dans autre chose que le fascisme.


Les communistes authentiques considèrent que la révolution est possible et nécessaire. Lors de la révolution en France le prolétariat en armes rompra avec les fatras meurtriers que sont l'OTAN, l'Union Européenne et toutes les autres organisations communes aux bourgeoisies impérialistes.

En attendant les pays impérialistes dont la France feront leurs alliances que le non ou le oui l'emporte. Ce référendum bidon ne vise qu'à jeter les éléments avancés des masses à la remorque de l'idéologie paneuropéenne ou de sa variante nationale-populiste.


Les masses sont les otages de se référendum, comme elles l'ont été lors du second tour des présidentielles d’avril 2002. Si les conditions politiques ne sont pas les mêmes, l’absence de choix est identique.

Une absence de choix qui vise à rendre complice du système d'une manière ou d'une autre. Ou à sombrer dans le désespoir de n'avoir à choisir qu'entre la peste et le choléra.

Ceux et celles qui ont voté Chirac dans l'espoir de s'opposer au fascisme doivent ainsi être bien déçus. Le racisme ne cesse de grandir, allant jusqu'à s'attaquer à des filles mineures dans les écoles sous des prétextes de « civilisation occidentale supérieure. » L'antisémitisme se banalise. La répression policière ne cesse de s'élargir, le flicage des vies de s'approfondir en profitant des dernières technologies.


Il ne s'agit donc pas seulement de boycotter le référendum. Il s'agit de le boycotter en proposant une alternative qui échappe à la confusion d'un « oui » et d'un « non » mélangeant « droite » et « gauche. »


Cette alternative, c'est la défense intransigeante des intérêts des masses et la mise en valeur de l'arme qui les sert dans la pratique: l'idéologie communiste.

Non au piège du référendum. Le pouvoir au peuple !

Pour le PCMLM, février 2005.