Manuel
d'économie politique
maoïste

5.Le capital et la plus-value.
La loi économique fondamentale du capitalisme

La base des rapports de production en régime capitaliste

Avec le passage de la manufacture à la grande industrie mécanique, le mode de production capitaliste est devenu prédominant.

Dans l'industrie, les ateliers artisanaux et les manufactures fondés sur le travail manuel, font place aux fabriques et aux usines dans lesquelles le travail s'effectue à l'aide de machines complexes.

Dans l'agriculture, de grandes exploitations capitalistes apparaissent, qui introduisent la technique agronomique relativement perfectionnée et les machines agricoles.

Une nouvelle technique est née, de nouvelles forces productives se sont formées, des rapports de production nouveaux, capitalistes, ont prévalu.

L'étude des rapports de production de la société capitaliste dans leur naissance, leur développement et leur déclin fait l'objet principal du Capital de Marx.

La propriété capitaliste des moyens de production forme la base des rapports de production dans la société bourgeoise.

La propriété capitaliste des moyens de production est la propriété privée des capitalistes, qui n'est pas le fruit du travail et qui est utilisée aux fins d'exploitation des ouvriers salariés.

Le mode de production capitaliste... consiste en ceci que les conditions matérielles de production sont attribuées aux non-travailleurs sous forme de propriété capitaliste et de propriété foncière, tandis que la masse ne possède que les conditions personnelles de production : la force de travail.
(K. Marx et F. Engels : Critique des programmes de Gotha et d'Erfurt)

La production capitaliste est fondée sur le travail salarié. Les ouvriers salariés sont libérés des liens du servage.
Mais ils sont privés des moyens de production et, sous peine de mourir de faim, ils sont obligés de vendre leur force de travail aux capitalistes.

L'exploitation du prolétariat par la bourgeoisie constitue le principal trait caractéristique du capitalisme, et le rapport entre bourgeoisie et prolétariat est le rapport de classe fondamental du régime capitaliste.

Les pays où règne le mode de production capitaliste conservent, à côté des formes capitalistes, des survivances plus ou moins importantes des formes précapitalistes d'économie.

Le " capitalisme à l'état pur " n'existe dans aucun pays.

Outre la propriété capitaliste, il y a dans les pays bourgeois la grande propriété foncière, de même que la petite propriété privée des simples producteurs - paysans et artisans - qui vivent de leur travail.

La petite production joue en régime capitaliste un rôle subalterne.

La masse des petits producteurs des villes et des campagnes est exploitée par les capitalistes et les propriétaires fonciers, possesseurs des fabriques et des usines, des banques, des entreprises commerciales et de la terre.

Le mode de production capitaliste dans son développement comprend deux phases : prémonopoliste et monopoliste.
Les lois économiques générales du capitalisme agissent à ces deux phases de son développement.

Mais le capitalisme monopoliste se distingue par toute une série de particularités essentielles, dont nous parlerons plus loin.

Passons à l'examen de la nature de l'exploitation capitaliste.

La transformation de l'argent en capital.

Tout capital commence sa carrière sous la forme d'une somme déterminée d'argent.

L'argent par lui-même n'est pas un capital.

Lorsque, par exemple, de petits producteurs indépendants échangent des marchandises, l'argent intervient comme moyen de circulation, mais non comme capital.

La formule de la circulation des marchandises est la suivante : M (marchandise) à A (argent) à M (marchandise), c'est-à-dire vente d'une marchandise pour achat d'une autre marchandise.
L'argent devient capital quand il est employé aux fins d'exploitation du travail d'autrui.

La formule générale du capital est

A à M à A,

c'est-à-dire acheter pour vendre aux fins d'enrichissement.

La formule M à A à M signifie qu'une valeur d'usage est échangée contre une autre : le producteur livre la marchandise dont il n'a pas besoin et reçoit en échange une autre marchandise dont il a besoin pour sa consommation.

La valeur d'usage est le but de la circulation.

Inversement, avec la formule A à M à A, les points de départ et d'arrivée du mouvement coïncident : au départ le capitaliste avait de l'argent, et il en a au terme de l'opération.

Le mouvement du capital serait inutile si, à la fin de l'opération, le capitaliste avait la même somme d'argent qu'au début.

Tout le sens de son activité est qu'à la suite de l'opération il se trouve avoir une plus grande somme d'argent qu'auparavant.

Le but de la circulation est l'augmentation de la valeur.

La formule générale du capital dans sa forme intégrale est donc celle-ci :

A à M à A'

où A' désigne la somme d'argent accrue.

Le capital avancé, c'est-à-dire le capital mis en circulation, retourne à son possesseur avec un certain excédent.
D'où vient l'excédent du capital ?

Les économistes bourgeois, soucieux de masquer la vraie source de l'enrichissement des capitalistes, affirment fréquemment que ce surplus provient de la circulation des marchandises.

Affirmation gratuite !

En effet, si l'on fait l'échange de marchandises et d'argent d'égale valeur, c'est-à-dire d'équivalents, aucun des possesseurs de marchandises ne peut tirer de la circulation une valeur plus grande que celle qui est incorporée dans sa marchandise.

Et si les vendeurs réussissent à vendre leurs marchandises à un prix plus élevé que leur valeur, par exemple de 10%, ils doivent, en devenant acheteurs, payer aux vendeurs en sus de la valeur les mêmes 10%.

Ainsi, ce que les possesseurs de marchandises gagnent comme vendeurs, ils le perdent comme acheteurs.

Or, en réalité, toute la classe des capitalistes bénéficie d'un accroissement de capital.

Il est évident que le possesseur d'argent, devenu capitaliste, doit trouver sur le marché une marchandise dont la consommation crée une valeur, et une valeur supérieure à celle qu'elle possède elle-même.

En d'autres termes, le possesseur d'argent doit trouver sur le marché une marchandise dont la valeur d'usage posséderait elle-même la faculté d'être source de valeur.

Cette marchandise est la force de travail.

La force de travail en tant que marchandise. La valeur et la valeur d'usage de la marchandise force de travail.

La force de travail, l'ensemble des facultés physiques et morales dont l'homme dispose et qu'il met en action lorsqu'il produit des biens matériels, quelle que soit la forme de la société, est un élément indispensable de la production.

Mais c'est seulement en régime capitaliste que la force de travail devient marchandise.

Le capitalisme est la production marchande au plus haut degré de son développement, quand la force de travail elle-même devient marchandise.

Avec la transformation de la force de travail en marchandise, la production marchande prend un caractère universel.

La production capitaliste est fondée sur le travail salarié, et l'embauchage de l'ouvrier par le capitaliste n'est autre chose qu'une opération de vente-achat de la marchandise force de travail : l'ouvrier vend sa force de travail, le capitaliste l'achète.

En embauchant un ouvrier, le capitaliste reçoit sa force de travail dont il dispose sans réserve.

Il l'utilise dans le processus de production capitaliste, dans lequel s'opère l'accroissement du capital.

De même que toute autre marchandise, la force de travail est vendue à un prix déterminé, à la base duquel se trouve la valeur de cette marchandise.

Quelle est cette valeur ?

Pour que l'ouvrier conserve sa capacité de travail, il doit satisfaire ses besoins en nourriture, vêtements, chaussures, logement.

Satisfaire les besoins vitaux, c'est reconstituer l'énergie vitale dépensée par l'ouvrier : l'énergie des muscles, des nerfs, du cerveau; c'est reconstituer sa capacité de travail.

En outre, le capital a besoin d'un afflux incessant de force de travail; l'ouvrier doit donc avoir la possibilité non seulement de s'entretenir lui-même, mais d'entretenir aussi sa famille.

Par là se trouve assurée la reproduction, c'est-à-dire le renouvellement constant de la force de travail.

Enfin, le capital a besoin non seulement d'ouvriers non spécialisés, mais aussi d'ouvriers qualifiés sachant manier les machines complexes; or, acquérir une qualification comporte certaines dépenses de travail pour l'apprentissage.

Aussi les frais de production et de reproduction de la force de travail comprennent-ils un minimum de dépenses pour la formation des générations montantes de la classe ouvrière.

Il ressort de tout cela que la valeur de la marchandise force de travail est égale à la valeur des moyens de subsistance nécessaires à l'entretien de l'ouvrier et de sa famille.

Cette marchandise, de même que toute autre, possède une valeur.

Comment la détermine-t-on ?
Par le temps de travail nécessaire à sa production.

(K. Marx : Le Capital, livre I, t. I)

Avec le développement historique de la société se modifient le niveau des besoins habituels de l'ouvrier, mais aussi les moyens de satisfaire ces besoins.

Dans les différents pays, le niveau des besoins usuels de l'ouvrier n'est pas le même.

Les particularités de l'évolution historique suivie par un pays donné, ainsi que celles des conditions dans lesquelles s'est formée la classe des ouvriers salariés, déterminent sous bien des rapports le caractère de ses besoins.

Les conditions climatiques et autres exercent également une certaine influence sur les besoins de l'ouvrier en nourriture, en vêtements, en logement.

La valeur de la force de travail renferme non seulement la valeur des objets de consommation nécessaires à la restauration des forces physiques de l'homme, mais aussi les frais que comporte la satisfaction des besoins culturels de l'ouvrier et de sa famille, tels qu'ils résultent des conditions sociales dans lesquelles vivent et sont élevés les ouvriers (éducation des enfants, achat de journaux, de livres, cinéma, théâtre, etc.).

Les capitalistes cherchent toujours et partout à ramener les conditions matérielles et culturelles de vie de la classe ouvrière au niveau le plus bas.

Pour lancer une affaire, le capitaliste commence par acheter tout ce qui est nécessaire à la production : bâtiments, machines, équipement, matières premières, combustible.

Ensuite, il embauche la main-d'œuvre et le processus de production commence à l'entreprise.

Dès que la marchandise est prête, le capitaliste la vend.
La valeur de la marchandise produite renferme, premièrement, la valeur des moyens de production dépensés: matières premières traitées, énergie, une partie déterminée de la valeur des bâtiments, des machines et des outils; en second lieu, la valeur nouvelle créée par le travail des ouvriers de l'entreprise.

Qu'est-ce que cette nouvelle valeur ?

Le mode de production capitaliste suppose un niveau relativement élevé de la productivité du travail, tel que l'ouvrier, pour créer une valeur égale à celle de sa force de travail, n'a besoin que d'une partie de la journée de travail.

Admettons qu'une heure de travail moyen simple crée une valeur égale à un euro, et que la valeur journalière de la force de travail soit égale à six euros.

Alors, pour compenser la valeur journalière de sa force de travail, l'ouvrier doit travailler pendant 6 heures.

Mais le capitaliste ayant acheté la force de travail pour toute la journée fait travailler le prolétaire non pas 6 heures, mais pendant une journée de travail entière qui comporte, par exemple, 12 heures.

Pendant ces 12 heures, l'ouvrier crée une valeur égale à 12 euros, cependant que sa force de travail ne vaut que 6 euros.
Nous voyons maintenant en quoi consiste la valeur d'usage spécifique de la marchandise force de travail pour l'acheteur de cette marchandise, le capitaliste.

La valeur d'usage de la marchandise force de travail est sa propriété d'être une source de valeur, d'une valeur plus grande qu'elle n'en possède elle-même.

La production de la plus-value est la loi économique fondamentale du capitalisme.

La valeur de la force de travail et la valeur créée dans le processus de sa consommation sont deux grandeurs différentes.

La différence entre ces deux grandeurs est la condition préalable nécessaire de l'exploitation capitaliste.

Dans notre exemple, le capitaliste, en dépensant 6 euros pour embaucher un ouvrier, reçoit une valeur créée par le travail de l'ouvrier, égale à 12 euros.

Le capitaliste récupère le capital qu'il a d'abord avancé avec une augmentation ou un excédent égal à 6 euros.

Cet excédent constitue la plus-value.

La plus-value est la valeur créée par le travail de l'ouvrier salarié en plus de la valeur de sa force de travail, et que le capitaliste s'approprie gratuitement.

Ainsi, la plus-value est le fruit du travail non payé de l'ouvrier.

La journée de travail dans l'entreprise capitaliste comporte deux parties : le temps de travail nécessaire et le temps de travail supplémentaire; le travail de l'ouvrier salarié se décompose en travail nécessaire et surtravail.

Pendant le temps de travail nécessaire, l'ouvrier reproduit la valeur de sa force de travail, et pendant le temps de surtravail, il crée la plus-value.

Le travail de l'ouvrier en régime capitaliste est processus de consommation par le capitaliste de la marchandise force de travail, c'est-à-dire processus pendant lequel le capitaliste soutire à l'ouvrier la plus-value.

Le processus de travail en régime capitaliste est caractérisé par deux particularités fondamentales.

Premièrement, l'ouvrier travaille sous le contrôle du capitaliste à qui appartient le travail de l'ouvrier.

En second lieu, au capitaliste appartient non seulement le travail de l'ouvrier, mais aussi le produit de ce travail.

Ces particularités du processus de travail font du travail de l'ouvrier salarié un dur et odieux fardeau.

Le but immédiat de la production capitaliste est la production de la plus-value.

En conséquence, seul un travail créateur de plus-value est considéré comme travail productif en régime capitaliste.
Si donc l'ouvrier ne crée pas de plus-value, son travail est un travail improductif, inutile pour le capitaliste.

Contrairement aux anciennes formes d'exploitation - esclavagiste et féodale - l'exploitation capitaliste se présente sous une forme déguisée.

Lorsque l'ouvrier salarié vend sa force de travail au capitaliste, cette transaction apparaît au premier abord comme une transaction habituelle entre possesseurs de marchandises, comme un échange ordinaire d'une marchandise contre de l'argent, effectué en accord avec la loi de la valeur.

Mais la transaction vente-achat de la force de travail n'est qu'une forme extérieure derrière laquelle se cachent l'exploitation de l'ouvrier par le capitaliste, l'appropriation par l'entrepreneur, sans aucun équivalent, du travail non payé de l'ouvrier.

En dénonçant le travail salarié comme un système d'esclavage salarié, Marx a constaté que si l'esclave romain était chargé de fers, l'ouvrier salarié est attaché à son maître par des fils invisibles.

Ce maître, c'est la classe des capitalistes dans son ensemble.
La plus-value créée par le travail non payé des ouvriers salariés constitue la source commune des revenus, non acquis par le travail, des différents groupes de la bourgeoisie : industriels, commerçants, banquiers, ainsi que de la classe des propriétaires fonciers.

La production de la plus-value est la loi économique fondamentale du capitalisme.

En définissant le capitalisme, Marx disait :

Fabriquer de la plus-value, telle est la loi absolue de ce mode de production.
(K. Marx : Le Capital, livre I, t. III)

Les traits essentiels de cette loi consistent dans la production sans cesse croissante de plus-value, et dans l'appropriation de celle-ci par les capitalistes sur la base de la propriété privée des moyens de production et grâce à l'intensification de l'exploitation du travail salarié et à l'élargissement de la production.

La loi économique fondamentale exprime l'essence même des rapports de production capitalistes; elle est la loi du mouvement du capitalisme; elle détermine le caractère inévitable de l'accroissement et de l'aggravation de ses contradictions.

Le capital n'a pas inventé le surtravail.

Partout où la société est composée d'exploiteurs et d'exploités, la classe dominante soutire du surtravail aux classes exploitées.

Mais contrairement au maître d'esclaves et au seigneur féodal, qui, par suite du régime d'économie naturelle qui régnait alors, consacraient la plus grande partie des produits du surtravail des esclaves et des serfs à la satisfaction immédiate de leurs besoins et de leurs caprices, le capitaliste convertit en argent tout le produit du surtravail des ouvriers salariés.

Le capitaliste consacre une partie de cet argent à l'achat d'objets de consommation et d'objets de luxe; l'autre partie de cet argent, il la met de nouveau en œuvre à titre de capital additionnel qui produit une nouvelle plus-value.

Aussi le capital manifeste-t-il, selon l'expression de Marx, une voracité de loup pour le surtravail.

La course à la plus-value est le principal moteur du développement des forces productives en régime capitaliste.
Aucune des formes antérieures de régime d'exploitation - ni l'esclavage ni la féodalité - ne possédait un tel stimulant du progrès technique.

Lénine a appelé la théorie de la plus-value la pierre angulaire de la théorie économique de Marx.

En révélant dans sa théorie de la plus-value l'essence de l'exploitation capitaliste, Marx a porté un coup mortel à l'économie politique bourgeoise et à ses affirmations sur l'harmonie des intérêts des classes en régime capitaliste et il a donné à la classe ouvrière une arme spirituelle pour renverser le capitalisme.

Le capital en tant que rapport social de production. Le capital constant et le capital variable.

Les économistes bourgeois appellent capital tout instrument de travail, tout moyen de production, à commencer par la pierre et le bâton de l'homme primitif.

Cette définition du capital a pour but d'estomper l'essence de l'exploitation de l'ouvrier par le capitaliste, de présenter le capital comme une condition éternelle et immuable de l'existence de toute société humaine.

En réalité, la pierre et le bâton servaient d'outil de travail à l'homme primitif, mais n'étaient point du capital.

Ne sont pas non plus du capital les instruments et les matières premières de l'artisan, le matériel, les semences et les bêtes de trait du paysan qui exploite son terrain sur la base de son travail personnel.

Les moyens de production ne deviennent du capital qu'à une phase déterminée du développement historique, lorsqu'ils sont propriété privée du capitaliste et servent de moyen d'exploitation du travail salarié.

Avec la liquidation du régime capitaliste les moyens de production deviennent propriété sociale et ils cessent d'être du capital. Ainsi le capital n'est pas une chose, mais un rapport social de production qui a un caractère historique transitoire.

Le capital est une valeur qui - par l'exploitation des ouvriers salariés - rapporte la plus-value.

Selon Marx, le capital est

du travail mort, qui, semblable au vampire, ne s'anime qu'en suçant le travail vivant, et sa vie est d'autant plus allègre qu'il en pompe davantage.
(K. Marx : Le Capital, livre I, t. I)

Le capital incarne le rapport de production entre la classe des capitalistes et la classe ouvrière, rapport qui consiste en ce que les capitalistes, en tant que possesseurs des moyens et des conditions de production, exploitent les ouvriers salariés qui créent pour eux la plus-value.

Ce rapport de production, comme d'ailleurs tous les autres rapports de production de la société capitaliste, prend la forme d'un rapport entre objets et apparaît comme la propriété de ces objets (moyens de production) de procurer un revenu au capitaliste.

C'est en cela que consiste le caractère fétiche du capital : avec le mode de production capitaliste se crée une apparence trompeuse, selon laquelle les moyens de production (ou une certaine somme d'argent avec laquelle on peut acheter les moyens de production) possèdent par eux-mêmes la faculté miraculeuse de procurer à leur possesseur un revenu régulier ne provenant pas du travail.

Les différentes parties du capital ne jouent pas le même rôle dans le processus de production de la plus-value.

L'entrepreneur dépense une certaine partie du capital pour construire les bâtiments d'une fabrique, acquérir de l'équipement et des machines, acheter les matières premières, l'énergie, les matériaux accessoires.

La valeur de cette partie du capital est transférée à la marchandise nouvellement produite à mesure que les moyens de production sont consommés ou usés au cours du travail.

La partie du capital, qui existe sous forme de valeur des moyens de production, ne change pas de grandeur en cours de production; aussi porte-t-elle le nom de capital constant.
L'entrepreneur consacre l'autre partie du capital à l'achat de la force de travail, à l'embauchage des ouvriers.

En échange de cette partie du capital dépensé, l'entrepreneur, le processus de production terminé, reçoit une nouvelle valeur créée par les ouvriers dans son entreprise.

Cette nouvelle valeur, on l'a vu, est supérieure à celle de la force de travail achetée par le capitaliste.

C'est ainsi que la partie du capital, dépensée pour l'embauchage d'ouvriers, change de grandeur au cours de la
production : elle augmente à la suite de la création par les ouvriers d'une plus-value que la capitaliste accapare.
La partie du capital qui est consacrée à l'achat de la force de travail (c'est-à-dire à l'embauchage d'ouvriers) et qui augmente en cours de production, s'appelle capital variable.

On désigne le capital constant par la lettre c, et le capital variable par la lettre v.

La division du capital en partie constante et partie variable a été établie pour la première fois par Marx.

Cette division a mis en lumière le rôle particulier du capital variable destiné à l'achat de la force de travail.

L'exploitation des ouvriers salariés par les capitalistes constitue la source véritable de la plus-value.

La découverte du double caractère du travail incarné dans la marchandise, a été la clef qui a permis à Marx d'établir la distinction entre le capital constant et le capital variable, et de dégager l'essence de l'exploitation capitaliste.

Marx a montré que l'ouvrier par son travail crée, produit la valeur des moyens de production dépensés, et comme travail abstrait, en tant que dépense de la force de travail en général, le travail de ce même ouvrier crée une nouvelle valeur.

Ces deux aspects du processus du travail se distinguent de façon très marquée.

Par exemple, en doublant la productivité du travail dans sa branche, le fileur transmet au produit, pendant une journée de travail, une valeur de moyens de production deux fois plus grande (puisqu'il traite deux fois plus de coton) ; pour ce qui est de la nouvelle valeur, il en créera autant qu'auparavant.


Le taux de la plus-value.

Le degré d'exploitation de l'ouvrier par le capitaliste trouve son expression dans le taux de la plus-value.

Le taux de la plus-value est le rapport exprimé en pourcentage de la plus-value au capital variable.

Le taux de la plus-value montre dans quelle proportion le travail dépensé par les ouvriers se divise en travail nécessaire et en surtravail; autrement dit, quelle est la partie de la journée de travail que le prolétaire dépense pour compenser la valeur de sa force de travail et quelle partie de la journée il travaille gratuitement pour le capitaliste.

On désigne la plus-value par la lettre p et le taux de la plus-value par p'= P/v.

Si l'on prend comme exemple :
p' = P/v = 6 euros / 6 euros = 100%

Le taux de la plus-value est ici égal à 100% ; cela veut dire que dans le cas présent le travail de l'ouvrier est divisé pour moitié en travail nécessaire et en surtravail.

Avec le développement du capitalisme s'élève le taux de la plus-value, ce qui marque l'élévation du degré d'exploitation du prolétariat par la bourgeoisie.

La masse de plus-value s'accroît encore plus rapidement, du fait qu'augmente le nombre des ouvriers salariés exploités par le capital.

Deux moyens d'augmentation du degré d'exploitation du travail par le capital.
La plus-value absolue et la plus-value relative.

Tout capitaliste, afin d'accroître la plus-value, cherche par tous les moyens à augmenter la part du surtravail qu'il extorque à l'ouvrier.

L'augmentation de la plus-value se réalise par deux moyens principaux.

Prenons à titre d'exemple une journée de travail de 12 heures, dont 6 heures forment le travail nécessaire et 6 heures le sur-travail.

Représentons cette journée de travail sous la forme d'une ligne dont chaque division est égale à une heure.

Journée de travail = 12 heures
Temps de travail nécessaire = 6 heures
Temps de surtravail = 6 heures

Le premier moyen d'augmenter le degré d'exploitation de l'ouvrier consiste pour le capitaliste à augmenter la plus-value qu'il reçoit, en allongeant la journée de travail, par exemple, de 2 heures.

Alors la journée de travail se présentera comme suit :

Journée de travail =14 heures

Temps de travail nécessaire = 6 heures

Temps de surtravail = 8 heures

La durée du surtravail a augmenté par suite de l'allongement absolu de la journée de travail dans son ensemble, tandis que le temps de travail nécessaire est resté invariable.

Mais cet allongement du travail effectué peut également passer par une baisse apparente du temps de travail, qui masque un accroissement fondamental de la productivité.

Cette réduction du temps de travail apporte également plus de flexibilité dans la gestion de la main d'œuvre.

Les 35 heures en France ont été ainsi d'une grande aide pour les monopoles, en permettant à leurs usines de fabrication, à leurs prestataires et leurs sous-traitants de répondre de manière la plus souple possible aux exigences de la production capitaliste.

La plus-value produite par la prolongation du travail effectué s'appelle plus-value absolue.

Le second moyen d'augmenter le degré d'exploitation de l'ouvrier consiste, sans modifier la durée générale de la journée de travail, à augmenter la plus-value que reçoit le capitaliste en réduisant le temps de travail nécessaire.

L'augmentation de la productivité du travail dans les branches fabriquant les objets de consommation pour les ouvriers, et aussi dans celles qui fournissent les instruments et les matériaux pour la production des objets de consommation, aboutit à réduire le temps de travail nécessaire à leur production.

Il en résulte que la valeur des moyens de subsistance des ouvriers diminue et la valeur de la force de travail décroît en conséquence.

Si auparavant on dépensait 6 heures pour la production des moyens de subsistance de l'ouvrier, maintenant on ne dépense, par exemple, que 4 heures.

La journée de travail se présente alors comme suit :

Journée de travail = 12 heures

Temps de travail nécessaire = 4 heures

Temps de surtravail = 8 heures

La longueur de la journée de travail reste invariable, mais la durée de surtravail augmente du fait que le rapport s'est modifié entre le temps de travail nécessaire et le temps de surtravail.

La plus-value résultant, par suite de l'augmentation de la productivité du travail, de la diminution du temps du travail nécessaire et de l'augmentation correspondante du temps de surtravail s'appelle plus-value relative.

Ces deux moyens d'augmenter la plus-value renforcent l'exploitation du travail salarié par le capital.

Ils en même temps jouent un rôle différent aux différentes phases du développement historique du capitalisme.

Dans les premières phases du développement du capitalisme, alors que la technique était rudimentaire et avançait relativement lentement, l'augmentation de la plus-value absolue avait une importance primordiale.

Le capital à la poursuite de la plus-value réalisa une révolution radicale dans les méthodes de production, la révolution industrielle, qui donna le jour à la grande industrie mécanique.

La coopération capitaliste simple, la manufacture et l'industrie mécanique représentent des degrés successifs de l'élévation de la productivité du travail par le capital.

Dans la période du machinisme, alors que la technique hautement développée permet d'accroître rapidement la productivité du travail, les capitalistes s'attachent à élever considérablement le degré d'exploitation des ouvriers, avant tout par l'augmentation de la plus-value relative.

En même temps, ils cherchent comme par le passé à prolonger au maximum la journée de travail et surtout à intensifier encore le travail.

L'intensification du travail des ouvriers a pour le capitaliste la même importance que l'allongement de la journée du travail : l'allongement de la journée de travail de 10 à 11 heures ou l'augmentation d'un dixième de l'intensité du travail lui fournit le même résultat.


La plus-value extra.

La course à la plus-value extra joue un grand rôle dans le développement du capitalisme.

Elle s'obtient dans les cas où certains capitalistes introduisent chez eux des machines et des méthodes de production plus perfectionnées que celles qui sont employées dans la plupart des entreprises de la même branche d'industrie.

C'est ainsi que tel capitaliste obtient dans son entreprise une plus haute productivité du travail par rapport au niveau moyen existant dans une branche d'industrie donnée.

Dès lors, la valeur individuelle de la marchandise produite dans l'entreprise de ce capitaliste se trouve être inférieure à la valeur sociale de cette même marchandise.

Mais comme le prix de la marchandise est déterminé par sa valeur sociale, ce capitaliste reçoit un taux de plus-value supérieur au taux ordinaire.

Prenons l'exemple suivant.

Admettons que, dans une manufacture de tabac, un ouvrier produise 1.000 cigarettes à l'heure et travaille 12 heures, dont 6 lui servent à créer une valeur égale à celle de sa force de travail.

Si l'on introduit dans la manufacture une machine doublant la productivité du travail, l'ouvrier, tout en continuant à travailler 12 heures, ne produit plus 12.000, mais 24.000 cigarettes.

Le salaire de l'ouvrier est compensé par une partie de la valeur nouvellement créée, incarnée (déduction faite de la valeur de la part transférée du capital constant) dans 6.000 cigarettes, c'est-à-dire dans le produit de 3 heures.

Au fabricant revient l'autre partie de la valeur nouvellement créée, incarnée (déduction faite de la valeur de In part transférée du capital constant) dans 18.000 cigarettes, c'est-à-dire dans le produit de 9 heures.

Ainsi, le temps de travail nécessaire est réduit et le temps de surtravall de l'ouvrier est allongé en conséquence.

L'ouvrier compense la valeur de sa force de travail, non plus en 6 heures, mais en 3 heures; son surtravail passe de 6 heures à 9 heures.

Le taux de la plus-value a triplé.

La plus-value extra est l'excédent de plus-value que reçoivent, en plus du taux ordinaire, les capitalistes en abaissant la valeur individuelle des marchandises produites dans leurs entreprises.

L'obtention de la plus-value extra ne constitue, dans chaque entreprise, qu'un phénomène passager.

Tôt ou tard, la plupart des entrepreneurs de la même branche d'industrie introduisent chez eux des machines nouvelles; quiconque ne possède pas un capital suffisant pour cela finit par se ruiner dans cette concurrence.

Résultat : le temps socialement nécessaire à la production d'une marchandise donnée diminue, la valeur de la marchandise baisse, et le capitaliste qui a appliqué avant les autres les perfectionnements techniques, cesse de recevoir une plus-value extra.

Cependant, en disparaissant dans une entreprise, la plus-value extra apparaît dans une autre où sont introduites des machines nouvelles encore plus perfectionnées.

Chaque capitaliste ne vise qu'à s'enrichir personnellement.
Cependant l'action dispersée des différents entrepreneurs a pour résultat le progrès technique, le développement des forces productives de la société capitaliste.

En même temps, la course à la plus-value incite chaque capitaliste à protéger ses réalisations techniques contre ses concurrents, elle engendre le secret sur le plan commercial et technique.

Il apparaît ainsi que le capitalisme pose des limites au développement des forces productives. Les forces productives, en régime capitaliste, se développent sous une forme contradictoire.

Les capitalistes ne font usage de nouvelles machines que si leur emploi donne lieu à un accroissement de la plus-value.

L'introduction de nouvelles machines sert de base à l'élévation systématique du degré d'exploitation du prolétariat, à rallongement de la journée de travail et à l'intensification du travail; le progrès technique se réalise au prix d'infinis sacrifices et privations de nombreuses générations de la classe ouvrière.

Ainsi le capitalisme traite avec une rapacité extrême la principale force productive de la société : la classe ouvrière, les masses laborieuses.


La structure de classe de la société capitaliste.
L'Etat bourgeois.

Ce qui caractérisait les modes de production esclavagiste et féodal, c'était la division de la société en différentes classes et castes, division qui lui donnait une structure hiérarchique complexe.

L'époque bourgeoise a simplifié les antagonismes de classes et substitué aux diverses formes de privilèges héréditaires et de dépendance personnelle le pouvoir impersonnel de l'argent, le despotisme illimité du capital.

Avec le mode de production capitaliste, la société se scinde de plus en plus en deux grands camps ennemis, en deux classes opposées : la bourgeoisie et le prolétariat.

La bourgeoisie est la classe qui possède les moyens de production et les utilise pour exploiter le travail salarié.

Elle est la classe dominante de la société capitaliste.

Le prolétariat est la classe des ouvriers salariés, dépourvus de moyens de production et obligés, par suite, de vendre leur force de travail aux capitalistes.

Sur la base de la production mécanique le capital a entièrement mis sous sa coupe le travail salarié.

Pour la classe des travailleurs la condition prolétarienne est devenue son lot pour la vie.

La situation économique du prolétariat en fait la classe la plus révolutionnaire.

Bourgeoisie et prolétariat sont les classes fondamentales de la société capitaliste.

Tant qu'existe le mode de production capitaliste, ces deux classes sont indissolublement liées entre elles : la bourgeoisie ne peut exister et s'enrichir sans exploiter les ouvriers salariés; les prolétaires ne peuvent vivre sans se louer aux capitalistes.

En même temps, la bourgeoisie et le prolétariat sont des classes antagonistes, dont les intérêts s'opposent et sont irréductiblement hostiles.

Le capitalisme, en se développant, approfondit l'abîme entre la minorité exploiteuse et les masses exploitées.

A côté de la bourgeoisie et du prolétariat en régime capitaliste existent la classe des propriétaires fonciers et celle des paysans.

Ces classes sont des survivances du régime féodal antérieur, mais elles ont pris un caractère sensiblement différent, en rapport avec les conditions du capitalisme.

Les propriétaires fonciers en régime capitaliste sont la classe des grands propriétaires terriens, qui, d'ordinaire, louent leurs terres à des fermiers capitalistes ou à de petits paysans producteurs, ou bien qui pratiquent sur la propriété qui leur appartient la grande production capitaliste à l'aide de travail salarié.

La paysannerie est la classe des petits producteurs possédant leur propre exploitation, fondée sur la propriété privée des moyens de production, sur une technique arriérée et le travail manuel.

La paysannerie constitue dans les pays bourgeois une partie importante de la population.

La masse essentielle de la paysannerie, exploitée sans merci par les propriétaires fonciers, les paysans riches, les marchands et les usuriers, court à sa ruine.

Dans le processus de sa différenciation, la paysannerie dégage constamment de son sein, d'une part, des masses de prolétaires, et de l'autre, des paysans enrichis, des capitalistes.

L'Etat bourgeois qui, à la suite de la révolution bourgeoise, est venu remplacer l'Etat féodal, est par son caractère de classe, entre les mains des capitalistes, un instrument d'asservissement et d'oppression de la classe ouvrière et de la paysannerie.

L'Etat bourgeois protège la propriété privée capitaliste des moyens de production, garantit l'exploitation des travailleurs et réprime leur lutte contre le régime capitaliste.

Comme les intérêts de la classe capitaliste s'opposent foncièrement à ceux de l'immense majorité de la population, la bourgeoisie est obligée de cacher par tous les moyens le caractère de classe de son Etat.

Elle s'efforce de le présenter comme un Etat de " démocratie pure ", soi-disant au-dessus des classes et appartenant au peuple tout entier.

Mais en fait la " liberté " bourgeoise est la liberté pour le capital d'exploiter le travail d'autrui; l'" égalité " bourgeoise est une apparence qui masque l'inégalité de fait entre l'exploiteur et l'exploité, entre l'homme rassasié et l'affamé, entre les propriétaires des moyens de production et la masses des prolétaires qui ne possèdent que leur force de travail.

L'Etat bourgeois réprime les masses populaires à l'aide de son appareil administratif, de sa police, de son armée, de ses tribunaux, de ses prisons, de ses camps de concentration, et d'autres moyens de coercition.

L'action idéologique à l'aide de laquelle la bourgeoisie maintient sa domination est le complément indispensable de ces moyens de coercition.

Cela comprend la presse bourgeoise, la radio, le cinéma, la science et l'art bourgeois, les Eglises, l'école, etc.

Le communiste italien Antonio Gramsci a souligné l'importance du combat contre l'hégémonie idéologique de la bourgeoisie.

Dans ce domaine, l'école, dans sa fonction éducative positive, et les tribunaux, dans leur fonction éducative négative, sont des secteurs d'activité étatique essentiels ; mais, en fait, il y a une multitude d'autres initiatives et activités soi-disant privées qui tendent au même but, et qui composent l'appareil de l'hégémonie politique et culturelle des classes dominantes.

L'Etat bourgeois est le comité exécutif de la classe des capitalistes.

Les constitutions bourgeoises ont pour but de renforcer le régime social, agréable et avantageux pour les classes possédantes.

L'Etat bourgeois déclare sacré et inviolable le fondement du régime capitaliste, la propriété privée des moyens de production.

Les formes de l'Etat bourgeois sont très variées, mais leur essence est la même : dans tous ces Etats, la dictature est exercée par la bourgeoisie qui essaie par tous les moyens de conserver et de fortifier le régime d'exploitation du travail salarié par le capital.

A mesure que se développe la grande production capitaliste, augmentent les effectifs du prolétariat qui prend conscience de plus en plus de ses intérêts de classe, progresse politiquement et s'organise pour la lutte contre la bourgeoisie.

Le prolétariat est la classe de travailleurs, liée à la forme d'avant-garde de l'économie, la grande production.

Etant donné le rôle économique qu'il joue dans la grande production, le prolétariat est seul capable d'être le guide de toutes les masses travailleuses et exploitées.
(V. Lénine : L'Etat et la révolution)

Le prolétariat industriel qui est la classe la plus révolutionnaire, la plus avancée de la société capitaliste, est appelé à réunir autour de lui les masses travailleuses de la paysannerie, toutes les couches exploitées de la population et de les mener à l'assaut du capitalisme.

 

L'ACCUMULATION DU CAPITAL
ET LA PAUPERISATION
DU PROLETARIAT.

La production et la reproduction.

Pour vivre et se développer, la société doit produire des biens matériels.

Elle ne peut en arrêter la production, comme elle ne peut s'arrêter de consommer.

De jour en jour, d'une année à l'autre, les hommes consomment des aliments, usent vêtements et chaussures, mais en même temps des quantités nouvelles d'aliments, de vêtements, de chaussures et d'autres produits sont fabriquées par le travail de l'homme.

Les machines s'usent peu à peu, les locomotives vieillissent tôt ou tard, mais dans les entreprises on fabrique de nouvelles machines-outils, de nouvelles locomotives.

Quelle que soit la structure des rapports sociaux, le processus de production doit constamment se renouveler.
Ce renouvellement incessant, cette répétition ininterrompue du processus de production porte le nom de reproduction.

Considéré, non sous son aspect isolé, mais dans le cours de sa rénovation incessante, tout procès de production sociale est donc en même temps procès de reproduction.
(K. Marx : Le Capital, Livre I, t. II)

Les conditions de la production sont aussi celles de la reproduction.

Si la production revêt la forme capitaliste, la reproduction revêt la même forme.

Le processus de reproduction consiste non seulement en ce que les hommes fabriquent des quantités toujours nouvelles de produits pour remplacer et au-delà les produits consommés, mais aussi en ce que, dans la société, les rapports de production correspondants se renouvellent sans cesse.

Il faut distinguer deux types de reproduction : la reproduction simple et la reproduction élargie.

La reproduction simple est la répétition du processus de production dans ses proportions précédentes, les produits nouvellement fabriqués ne faisant que compenser la dépense des moyens de production et des objets de consommation individuelle.

La reproduction élargie est la répétition du processus de production dans des proportions plus étendues, la société ne se bornant pas à compenser les biens matériels consommés, mais produisant, en plus, un supplément de moyens de production et d'objets de consommation.

Avant l'apparition du capitalisme, les forces productives se développaient avec beaucoup de lenteur.

Le volume de la production sociale ne s'est guère modifié d'une année à l'autre, d'une décennie à l'autre.

Avec le capitalisme, l'état ancien d'immobilisme relatif et de stagnation de la production sociale a fait place à un développement beaucoup plus rapide des forces productives.
La reproduction élargie, interrompue par des crises économiques, au cours desquelles il y a une baisse de la production, est caractéristique du mode de production capitaliste.

La reproduction capitaliste simple.

Avec la reproduction capitaliste simple, le processus de production se renouvelle sans changer de volume; la plus-value est entièrement dépensée par le capitaliste pour sa consommation personnelle.

L'analyse de la reproduction simple suffit déjà pour approfondir l'étude de certains traits essentiels du capitalisme.

Dans le processus de reproduction capitaliste se renouvellent sans cesse non seulement les produits du travail, mais aussi les rapports d'exploitation capitalistes.

D'une part, dans le cours de la reproduction se crée constamment la richesse qui appartient au capitaliste et qu'il utilise pour s'approprier la plus-value.

Au terme de chaque processus de production, l'entrepreneur se retrouve en possession d'un capital qui lui permet de s'enrichir par l'exploitation des ouvriers.
D'autre part, l'ouvrier demeure à l'issue du processus de production un prolétaire non possédant; il est donc obligé, pour ne pas mourir de faim, de vendre sans cesse sa force de travail au capitaliste.

La reproduction de la force de travail salariée demeure la condition nécessaire de la reproduction du capital.

Le procès de production capitaliste reproduit donc de lui-même la séparation entre travailleur et conditions de travail. Il reproduit et éternise par cela même les conditions qui forcent l'ouvrier à se vendre pour vivre et mettent le capitaliste en état de l'acheter pour s'enrichir.
(K. Marx : Le Capital, livre I, t. III)

Ainsi, dans le processus de production, le rapport capitaliste fondamental se renouvelle constamment : le capitaliste d'un côté, l'ouvrier salarié de l'autre.

L'ouvrier, avant même d'aliéner sa force de travail à tel ou tel entrepreneur, appartient déjà au capitaliste collectif, c'est-à-dire à la classe des capitalistes dans son ensemble.

Lorsque le prolétaire change de lieu de travail, il ne fait que changer d'exploiteur.

L'ouvrier est sa vie durant enchaîné au char du capital.

Si l'on considère un processus de production isolé, il semble à première vue qu'en achetant la force de travail, le capitaliste prélève sur ses propres fonds une somme d'argent pour l'avancer à l'ouvrier, puisque, à la date du paiement du salaire, le capitaliste peut ne pas avoir eu le temps de vendre la marchandise fabriquée par l'ouvrier dans une période donnée (par exemple en un mois).

Mais si l'on prend la vente et l'achat de la force de travail non pas isolément, mais comme un élément de la reproduction, comme un rapport sans cesse répété, alors apparaît en pleine lumière le véritable caractère de cette transaction.

Premièrement, alors que l'ouvrier par son travail crée, dans une période donnée, une nouvelle valeur renfermant la plus-value, le produit fabriqué par l'ouvrier dans la période précédente, est réalisé sur le marché et se convertit en argent.

Il apparaît donc clairement que le capitaliste paye au prolétaire le salaire non pas sur ses propres fonds, mais sur la valeur créée par le travail des ouvriers dans la période précédente de production (par exemple, pendant le mois précédent).

Selon l'expression de Marx, la classe des capitalistes agit suivant la vieille recette du conquérant : elle achète la marchandise des vaincus avec leur propre argent, avec l'argent dont elle les a dépouillés.

En second lieu, contrairement aux autres marchandises, la force de travail n'est payée par le capitaliste qu'après que l'ouvrier a fourni un travail déterminé.

Il se trouve donc que ce n'est pas le capitaliste qui avance au prolétaire; c'est au contraire, le prolétaire qui avance au capitaliste.

Aussi bien, les entrepreneurs s'efforcent-ils de payer les salaires aux dates les plus espacées possible (par exemple, une fois par mois), afin de prolonger les délais du crédit gratuit que les ouvriers leur ont consenti.

La classe des capitalistes verse constamment aux ouvriers de l'argent, sous forme de salaire, pour leur permettre d'acheter les moyens de subsistance, c'est-à-dire une certaine partie du produit créé par le travail des ouvriers et que les exploiteurs se sont appropriés.

Cet argent, les ouvriers le restituent aussi régulièrement aux capitalistes, en acquérant avec lui les moyens de subsistance produits par la classe ouvrière elle-même.

L'analyse des rapports capitalistes dans le cours de la reproduction fait apparaître la source véritable du salaire, mais aussi celle de tout capital.

Admettons que le capital avancé par l'entrepreneur - 100.000 euros - rapporte une plus-value de 10.000 euros par an, et que cette somme soit entièrement dépensée par le capitaliste pour sa consommation individuelle.

Si l'entrepreneur ne s'appropriait pas le travail non payé de l'ouvrier, son capital se trouverait au bout de dix ans entièrement englouti. Il n'en est pas ainsi parce que la somme de 100.000 euros dépensée par le capitaliste pour sa consommation personnelle, se renouvelle entièrement durant les délais indiqués grâce à la plus-value créée par le travail non payé des ouvriers.

Par conséquent, quelle que soit la source initiale du capital, celui-ci, dans le cours même de la reproduction simple, devient, au bout d'une période déterminée, de la valeur créée par le travail des ouvriers et accaparée gratuitement par le capitaliste.

C'est là la preuve de l'absurdité des affirmations des économistes bourgeois, selon lesquels le capital serait une richesse gagnée par le propre travail de l'entrepreneur.

La reproduction simple fait partie intégrante, elle est un élément de la reproduction élargie.

Les rapports d'exploitation, inhérents à la reproduction simple, sont encore plus accusés dans le cadre de la reproduction capitaliste élargie.

La reproduction capitaliste élargie.
L'accumulation du capital.

Avec la reproduction élargie, une partie de la plus-value est consacrée par le capitaliste à l'accroissement de la production: achat de moyens de production supplémentaires et embauche d'un supplément de main-d'œuvre.

Par conséquent, une partie de la plus-value est ajoutée au capital précédent, elle est accumulée.

L'accumulation du capital est l'adjonction d'une partie de la plus-value au capital ou sa conversion en capital.
La plus-value constitue donc la source de l'accumulation.

C'est par l'exploitation de la classe ouvrière que le capital grandit et, qu'en même temps, les rapports de production capitalistes se reproduisent sur une base élargie.

L'élément moteur de l'accumulation pour l'entrepreneur capitaliste, c'est avant tout la course à l'augmentation de la plus-value.

Avec le mode de production capitaliste, la soif d'enrichissement ne connaît point de bornes.

Avec l'élargissement de la production augmente la masse de plus-value que s'approprie le capitaliste, et, par suite, aussi la partie de la plus-value destinée à satisfaire les besoins individuels et les caprices des capitalistes.

D'un autre côté les capitalistes obtiennent la possibilité, grâce à l'accroissement de la plus-value, d'élargir de plus en plus la production, d'exploiter une quantité de plus en plus grande d'ouvriers et de s'approprier une masse sans cesse croissante de plus-value.

Un autre élément moteur de l'accumulation est la concurrence acharnée, qui place les grands capitalistes en meilleure position et leur permet d'écraser les petits.

La concurrence oblige chaque capitaliste, sous peine de faillite, à améliorer son outillage, à élargir sa production. Arrêter le progrès technique, l'élargissement de la production, c'est rester en arrière, et les retardataires se font battre par leurs concurrents.

La concurrence oblige donc chaque capitaliste à augmenter son capital, et il ne peut le faire que par l'accumulation constante d'une partie de la plus-value.
L'accumulation du capital est la source de la reproduction élargie.

La composition organique du capital. La concentration et la centralisation du capital.

Au cours de l'accumulation capitaliste, la masse générale du capital augmente et ses différentes parties subissent des changements inégaux, d'où résulte un changement de la structure du capital.

En accumulant la plus-value et en élargissant son entreprise, le capitaliste introduit généralement de nouvelles machines et des perfectionnements techniques, qui lui assureront une augmentation de ses bénéfices.

Le progrès technique marque un accroissement plus rapide de la partie du capital qui existe sous forme de moyens de production : machines, bâtiments, matières premières, etc..., c'est-à-dire du capital constant.

Au contraire, la partie du capital dépensée à l'achat de force de travail, c'est-à-dire de capital variable, s'accroît avec beaucoup plus de lenteur.

Le rapport entre capital constant et capital variable, considéré comme rapport entre la masse des moyens de production et la force de travail vivante, est appelé composition organique du capital.

Prenons, par exemple, un capital de 100.000 euros réparti en 80.000 euros de bâtiments, machines, matières premières, etc., et 20.000 euros de salaires.

Alors la composition organique du capital est égale à 80 c / 20 v, ou 4 / 1.

Dans les différentes branches de l'industrie et dans les différentes entreprises d'une même industrie, la composition organique du capital est inégale : elle est plus élevée là où il y a par ouvrier une quantité plus grande de machines complexes et coûteuses, de matières premières transformées; elle est inférieure là où prévaut le travail vivant, où par ouvrier il y a moins de machines et de matières premières qui coûtent relativement moins cher.

Avec l'accumulation du capital, la composition organique du capital augmente : la part du capital variable diminue, celle du capital constant augmente.

Dans le cours de la reproduction capitaliste les capitaux augmentent de volume du fait de la concentration et de la centralisation du capital.

On appelle concentration du capital l'accroissement du capital par l'accumulation de la plus-value créée dans une entreprise donnée.

Le capitaliste, en investissant dans l'entreprise une partie de la plus-value qu'il s'est appropriée, devient possesseur d'un capital sans cesse accru.

On appelle centralisation du capital l'accroissement du capital par la fusion de plusieurs capitaux en un seul capital plus important.

Avec la concurrence, le gros capital ruine et absorbe les petites et les moyennes entreprises, moins importantes, qui ne résistent pas à la compétition.

En accaparant à vil prix les entreprises d'un concurrent ruiné ou en les liant à la sienne d'une manière ou d'une autre (par exemple, par endettement), le gros fabricant augmente les capitaux qu'il détient.

La fusion de nombreux capitaux en un seul se fait également par l'organisation de sociétés en commandite, de sociétés par actions, etc.

La concentration et la centralisation du capital rassemblent entre les mains d'un nombre restreint de personnes d'immenses richesses.

L'accroissement des capitaux ouvre de larges possibilités à la concentration de la production dans de grandes entreprises.

La grande production a des avantages décisifs sur la petite.

Les grandes entreprises peuvent introduire des machines et des perfectionnements techniques, pratiquer largement la division et la spécialisation du travail, ce qui n'est pas à la portée des petites entreprises.

De ce fait, la fabrication des produits revient moins cher aux grandes entreprises qu'aux petites.

La concurrence entraîne de gros frais et de grandes pertes.
Une grande entreprise peut supporter ces pertes pour, ensuite, les compenser largement, tandis que les petites entreprises et souvent aussi les moyennes se ruinent.

Les grands capitalistes reçoivent des crédits avec beaucoup plus de facilité et à des conditions plus favorables; or, le crédit est une des armes les plus importantes dans la concurrence.

Tous ces avantages permettent à des entreprises toujours plus importantes, puissamment équipées, de prendre le premier rang dans les pays capitalistes, tandis qu'une multitude de petites et moyennes entreprises se ruinent et disparaissent.

Grâce à la concentration et à la centralisation du capital, une minorité de capitalistes, possesseurs de fortunes énormes, préside aux destinées de dizaines et de centaines de milliers d'ouvriers.

Dans l'agriculture, la concentration capitaliste aboutit à ce que la terre et d'autres moyens de production se concentrent de plus en plus dans les mains des gros propriétaires, tandis que les larges couches des petits et moyens paysans, privés de terre, de matériel et d'attelage sont asservis par le capital (voir le passage suivant sur les rapports sociaux dans l'agriculture).

Des masses de paysans et d'artisans se ruinent et deviennent des prolétaires.

Ainsi donc, la concentration et la centralisation du capital ont pour effet d'aggraver les contradictions de classes, d'approfondir l'abîme entre la minorité bourgeoise, exploiteuse, et la majorité non possédante, exploitée, de la société.

En même temps, par suite de la concentration de la production, les grandes entreprises capitalistes et les centres industriels rassemblent des masses toujours plus grandes du prolétariat.

Cela facilite le rassemblement et l'organisation des ouvriers pour la lutte contre le capital.

L'armée industrielle de réserve.

L'accroissement de la production en régime capitaliste, comme on l'a déjà dit, s'accompagne d'une augmentation de la composition organique du capital.

La demande de main-d'œuvre est déterminée par la grandeur, non du capital tout entier, mais seulement de sa partie variable.

Or, la partie variable du capital, avec le progrès technique, diminue relativement par rapport au capital constant.

Aussi, avec l'accumulation du capital et le progrès de sa composition organique, la demande de main-d'œuvre se réduit-elle relativement, encore que les effectifs d'ensemble du prolétariat augmentent en même temps que le capitalisme se développe.

Il en résulte qu'une masse importante d'ouvriers ne peut trouver à s'employer.

Une partie de la population ouvrière se trouve être " en surnombre " ; il se produit ce qu'on appelle une surpopulation relative.

Cette surpopulation est relative, parce qu'une partie de la force de travail ne s'avère en surnombre que par rapport aux besoins d'accumulation du capital.

Ainsi, dans la société bourgeoise, au fur et à mesure qu'augmenté la richesse sociale, une partie de la classe ouvrière est vouée à un travail toujours plus dur et excessif, tandis que l'autre partie est condamnée à un chômage forcé.

Il faut distinguer les formes essentielles suivantes de surpopulation relative.

La surpopulation flottante est constituée par les ouvriers qui perdent leur travail pour un certain temps par suite de la réduction de la production, de l'emploi de nouvelles machines, de la fermeture d'entreprises.

Avec l'élargissement de la production, une partie de ces chômeurs trouve à s'employer, de même qu'une partie des nouveaux ouvriers de la jeune génération.

Le nombre total des ouvriers employés augmente, mais dans une proportion sans cesse décroissante par rapport à l'échelle de la production.

La surpopulation latente est constituée par les petits producteurs ruinés, et avant tout par les paysans pauvres et les ouvriers agricoles qui ne sont occupés dans l'agriculture que pendant une faible partie de l'année, ne trouvent pas à s'employer dans l'industrie et traînent une misérable existence, en vivotant tant bien que mal à la campagne.

Contrairement à ce qui se passe dans l'industrie, le progrès technique dans l'agriculture entraîne une diminution absolue de la demande de main-d'œuvre.

La surpopulation stagnante est constituée par les groupes nombreux de gens qui ont perdu leur emploi permanent, et dont les occupations irrégulières sont payées bien au-dessous du niveau habituel du salaire.

Ce sont de larges couches de travailleurs occupés dans la sphère du travail capitaliste à domicile, et aussi ceux qui vivent d'un travail occasionnel.

Enfin, la couche inférieure de la surpopulation relative est constituée par les gens qui ont été depuis longtemps éliminés de la production, sans aucun espoir de retour, et qui vivent d'un gagne-pain de hasard.

Une partie de ces gens est réduite à la mendicité.
Les ouvriers éliminés de la production forment l'armée industrielle de réserve, l'armée des chômeurs.

Cette armée est un attribut nécessaire de l'économie capitaliste, sans lequel elle ne peut ni exister, ni se développer.

Dans les périodes d'essor industriel, quand l'élargissement rapide de la production s'impose, une quantité suffisante de chômeurs se trouve à la disposition des entrepreneurs.

L'élargissement de la production a pour effet de réduire momentanément le chômage.

Mais ensuite une crise de surproduction arrive et, de nouveau, des masses importantes d'ouvriers sont jetées à la rue et vont grossir l'armée de réserve des chômeurs.
L'existence de cette armée permet aux capitalistes de renforcer l'exploitation des ouvriers.

Les chômeurs sont contraints d'accepter les plus dures conditions de travail.

Le chômage crée une situation instable pour les ouvriers employés dans la production, et réduit considérablement le niveau de vie de la classe ouvrière tout entière.

Voilà pourquoi les capitalistes n'ont pas intérêt à voir supprimer l'armée industrielle de réserve, qui pèse sur le marché du travail et assure au capitaliste une main-d'œuvre à bon marché.

Avec le développement du mode de production capitaliste l'armée des chômeurs, diminuant dans les périodes d'essor de la production et augmentant pendant les crises, dans l'ensemble s'accroît.

La surpopulation relative dans les pays coloniaux et semi-coloniaux d'Orient atteint des proportions énormes.
Avec le développement du capitalisme, le chômage partiel prend des proportions toujours plus étendues : l'ouvrier ne travaille alors qu'une partie de la journée ou de la semaine.

Le chômage est un véritable fléau pour la classe ouvrière.

Les ouvriers n'ont pas de quoi vivre, si ce n'est de la vente de leur force de travail.

Renvoyés de l'entreprise, ils sont menacés de mourir de faim, de perdre leur logement.

Les économistes bourgeois tentent de justifier le chômage en régime capitaliste en invoquant des lois éternelles de la nature.
C'est à ce but que servent les inventions pseudo-scientifiques de Malthus, économiste réactionnaire anglais de la fin du dix-huitième - début du dix-neuvième siècles.

D'après la " loi de population ", inventée par Malthus, depuis l'origine de la société humaine la population se multiplierait suivant les termes d'une progression géométrique (comme 1, 2, 4, 8, etc.), et les moyens d'existence, tant donné le caractère limité des richesses naturelles, augmenteraient suivant les termes d'une progression arithmétique (comme 1, 2, 3, 4, etc.).

C'est là, d'après Malthus, la cause première du surplus de population, de la famine et de la misère des masses populaires.

Le prolétariat, d'après Malthus, peut se libérer de la misère et de la famine, non pas par l'abolition du régime capitaliste, mais en s'abstenant du mariage et en réduisant artificiellement les naissances.

Malthus considérait comme autant de bienfaits les guerres et les épidémies qui diminuent la population laborieuse.

La théorie de Malthus est foncièrement réactionnaire.

Elle permet à la bourgeoisie de justifier les tares incurables du capitalisme.

Les inventions de Malthus n'ont rien de commun avec la réalité.

Les moyens techniques puissants dont l'humanité dispose sont à même d'augmenter la quantité des moyens d'existence à des rythmes que l'accroissement même le plus rapide de la population est incapable d'égaler.

Le seul obstacle est le régime capitaliste, qui est la cause véritable de la misère des masses.

Marx a découvert la loi capitaliste de la population, selon laquelle dans la société bourgeoise, l'accumulation du capital fait qu'une partie de la population ouvrière devient inévitablement superflue, est éliminée de la production et vouée aux affres de la misère et de la faim.

La loi capitaliste de la population a été engendrée par les rapports de production de la société bourgeoise.


La loi générale de l'accumulation capitaliste. La paupérisation relative et absolue du prolétariat.

Le développement du capitalisme a pour résultat qu'avec l'accumulation du capital, à un pôle de la société bourgeoise d'immenses richesses se concentrent, le luxe et le parasitisme, le gaspillage et l'oisiveté des classes exploiteuses augmentent; tandis qu'à l'autre pôle de la société s'intensifie de plus en plus le joug, l'exploitation, s'accroissent le chômage et la misère de ceux dont le travail crée toutes les richesses.

L'armée industrielle de réserve est d'autant plus nombreuse que la richesse sociale, le capital en fonction, l'étendue et l'énergie de son accroissement, donc aussi la masse absolue du prolétariat et la force productive de son travail, sont plus considérables...

La grandeur relative de l'armée industrielle de réserve s'accroît donc en même temps que les ressorts de la richesse.

Mais plus cette armée de réserve grossit, comparativement à l'armée active du travail, plus grossit la surpopulation consolidée, excédent de population, dont la misère est inversement proportionnelle aux tourments de son travail...

Voilà la loi absolue, générale, de l'accumulation capitaliste.
(K. Marx : Le Capital, livre I, t. III)

La loi générale de l'accumulation capitaliste est l'expression concrète du fonctionnement de la loi économique fondamentale du capitalisme, la loi de la plus-value.

La course à la plus-value aboutit à l'accumulation des richesses entre les mains des classes exploiteuses et à l'augmentation de l'appauvrissement et de l'oppression des classes non possédantes.

Le développement du capitalisme s'accompagne de la paupérisation relative et absolue du prolétariat.

La paupérisation relative du prolétariat consiste en ce que dans la société bourgeoise la part de la classe ouvrière dans le montant global du revenu national décroît sans cesse, alors que la part des classes exploiteuses est en progression constante.

Malgré l'accroissement absolu de la richesse sociale, la part des revenus de la classe ouvrière diminue rapidement.
La paupérisation absolue du prolétariat consiste dans l'abaissement pur et simple de son niveau de vie.

L'ouvrier se paupérise de façon absolue, c'est-à-dire qu'il devient véritablement plus pauvre qu'auparavant; force lui est de vivre encore plus mal, de se nourrir plus chichement, d'être plus souvent sous-alimenté, de s'entasser dans les caves et les greniers...
La richesse croît dans la société capitaliste avec une rapidité invraisemblable, parallèlement à la paupérisation des masses ouvrières.
(V. Lénine : La paupérisation dans la société capitaliste)

Pour enjoliver la réalité capitaliste, l'économie politique bourgeoise s'efforce de nier la paupérisation absolue du prolétariat.
Les faits cependant attestent qu'en régime capitaliste le niveau de vie de la classe ouvrière est en baisse constante. Cela se manifeste sous bien des formes.

La paupérisation absolue du prolétariat se traduit par la baisse du salaire réel.

Comme on l'a déjà dit, la hausse des prix des objets de consommation courante, l'augmentation des loyers et des impôts entraînent la diminution constante du salaire réel des ouvriers.

La paupérisation absolue du prolétariat se manifeste par l'ampleur et la durée accrues du chômage.
Elle se manifeste dans l'intensification et dans l'aggravation des conditions de travail, qui aboutissent au vieillissement rapide de l'ouvrier, à la perte de sa capacité de travail, à sa transformation en invalide.

L'intensification du travail et l'absence de mesures nécessaires à la protection du travail multiplient les accidents et les cas de mutilation.

La paupérisation absolue du prolétariat se manifeste dans de plus mauvaises conditions d'alimentation et de logement des travailleurs, ce qui a pour effet de ruiner la santé et d'abréger la vie des travailleurs.

La voie du développement du capitalisme est celle de l'appauvrissement et de la sous-alimentation pour l'immense majorité des travailleurs.

En régime bourgeois, l'essor des forces productives n'apporte pas aux masses laborieuses un allègement de leur situation, mais une aggravation de leur misère et de leurs privations.

La contradiction fondamentale du mode de production capitaliste.

A mesure qu'il se développe, le capitalisme associe de plus en plus étroitement le travail d'une multitude d'hommes.

La division sociale du travail s'étend.

Des branches d'industrie autrefois plus ou moins indépendantes se transforment en une série de productions réciproquement liées et dépendantes les unes des autres.

Les relations économiques se resserrent entre entreprises, régions, pays entiers.

Le capitalisme crée la grande production aussi bien dans l'industrie que dans l'agriculture.
Le progrès des forces productives engendre des instruments et des méthodes de production qui exigent le travail en commun de centaines et de milliers d'ouvriers.
La concentration de la production s'accroît.

II se produit ainsi une socialisation capitaliste du travail, une socialisation de la production.

Mais la socialisation de la production progresse dans l'intérêt d'un petit nombre d'entrepreneurs privés, soucieux d'augmenter leurs profits.

Le produit du travail social de millions d'hommes devient la propriété privée des capitalistes.

Par conséquent, une contradiction profonde est inhérente au régime capitaliste : la production revêt un caractère social, alors que la propriété des moyens de production demeure propriété capitaliste privée, incompatible avec le caractère social du processus de production.

La contradiction entre le caractère social du processus de production et la forme capitaliste privée d'appropriation des résultats de la production est la contradiction fondamentale du mode de production capitaliste; cette contradiction va s'aggravant à mesure que le capitalisme se développe.

Elle se manifeste par une anarchie accrue de la production capitaliste, par l'accentuation des antagonismes de classe entre le prolétariat et toutes les masses laborieuses d'une part et la bourgeoisie de l'autre.