Manuel
d'économie politique
maoïste
16.Les théories
économiques de l'époque du capitalisme et de l'impérialisme
Avec le développement
du capitalisme et l'accroissement de ses contradictions, diverses
tendances, exprimant les intérêts des différentes
classes, se sont formées et développées
dans la pensée économique.
L'économie politique
bourgeoise classique.
Dans la lutte contre
le féodalisme, pour l'instauration du régime capitaliste,
la bourgeoisie a créé sa propre économie
politique qui a détrôné les conceptions économiques
des idéologues du féodalisme et a joué pendant
un certain temps un rôle progressiste.
Le mode de production
capitaliste s'est établi tout d'abord en Angleterre.
C'est là
qu'est née aussi l'économie politique bourgeoise
classique dont les représentants ont essayé de
découvrir le lien interne des phénomènes
économiques.
Déjà
son fondateur, William Petty (1623-1687), dont l'activité
remonte à la période de décomposition du
mercantilisme, a en fait défini la valeur des marchandises
comme étant la quantité relative de travail contenue
en elles, bien qu'il ait fait preuve de beaucoup d'inconséquence
dans cette question.
Les physiocrates
qui apparurent en France dans la seconde moitié du dix-huitième
siècle, pendant la période de préparation
idéologique de la révolution bourgeoise, jouèrent
un rôle important dans la formation de l'économie
politique bourgeoise.
Ce courant avait
à sa tête François Quesnay (1694-1774).
De même que les représentants de la philosophie
française "des lumières " de ce temps,
les physiocrates pensaient qu'il existait pour la société
humaine des lois naturelles, données par la nature.
La France était à l'époque un pays agricole.
Contrairement aux
mercantilistes pour qui l'argent était la seule richesse,
les physiocrates ont proclamé que la seule source de richesse
était la nature et, par suite, l'agriculture, qui fournit
à l'homme les fruits de la nature.
De là le
nom de l'école - les " physiocrates " - composé
de deux mots grecs qui signifiant " nature " et "
pouvoir. "
Au centre de la théorie des physiocrates se trouvait la
doctrine du " produit net. "
C'est ainsi que
les physiocrates appelaient l'excédent du produit sur
les dépenses engagées dans la production, - la
fraction du produit qui, en régime capitaliste, constitue
la plus-value.
Pour les physiocrates,
la richesse était une masse déterminée de
produits sous leur forme matérielle, naturelle, une masse
déterminée de valeurs d'usage.
Ils soutenaient
que le " produit net ", " don de la nature ",
naît sur la base de l'emploi du travail salarié
dans l'agriculture et l'élevage exclusivement, c'est-à-dire
dans les branches où s'opèrent les processus naturels
de croissance des plantes et des animaux; tandis que dans toutes
les autres branches, il n'y a qu'une modification de la forme
des produits fournis par l'économie rurale.
L'ouvrage le plus
important de l'école des physiocrates fut le Tableau économique
de Quesnay.
Quesnay a eu le
mérite de faire une tentative remarquable pour présenter
le processus de la reproduction capitaliste dans son ensemble,
encore qu'il n'ait pu donner une théorie scientifique
de la reproduction.
Partant du point
de vue que le " produit net " n'est créé
que dans l'économie rurale, les physiocrates exigeaient
que tous les impôts fussent payés par les propriétaires
terriens, et que l'on exemptât les industriels de toute
charge fiscale.
C'était là une manifestation évidente de
la nature de classe des physiocrates en tant qu'idéologues
de la bourgeoisie.
Les physiocrates
étaient partisans de la domination illimitée de
la propriété privée.
En affirmant que
seule la libre concurrence est conforme aux lois naturelles de
l'économie et à la nature humaine, ils opposaient
à la politique du protectionnisme celle de la liberté
du commerce; ils combattaient énergiquement les restrictions
corporatives et l'intervention de l'Etat dans la vie économique
du pays.
L'économie
politique bourgeoise classique est arrivée au point culminant
de son évolution dans les travaux de A. Smith et de D.
Ricardo.
Adam Smith (1723-1790)
a fait, comparativement aux physiocrates, un grand pas en avant
dans l'analyse scientifique du mode de production capitaliste.
Son ouvrage principal est intitulé : Recherches sur la
nature et les causes de la richesse des nations (1776).
La richesse d'un
pays réside, d'après A. Smith, dans toute la masse
des marchandises qui y sont produites.
Il a repoussé
l'idée unilatérale et, par suite, erronée
des physiocrates, selon lesquels le " produit net "
n'est créé que par le travail agricole, et il proclame
le premier que tout travail est source de valeur, quelle que
soit la branche de production où ce travail est fait.
Smith a été
l'économiste de la période manufacturière
du développement du capitalisme.
Aussi voyait-il
la base de l'augmentation de la productivité du travail
dans la division du travail.
L'aspect le plus
caractéristique de la pensée de Smith est l'interpénétration
de deux manières différentes d'aborder les phénomènes
économiques.
D'une part, il analyse
le lien interne des phénomènes en cherchant à
pénétrer la structure intrinsèque ou, selon
l'expression de Marx, la physiologie du système économique
bourgeois.
D'autre part, il
décrit les phénomènes sous la forme qu'ils
revêtent à la surface de la société
capitaliste et, par conséquent, tels qu'ils se présentent
au capitaliste praticien.
Le premier de ces
procédés est scientifique, le second ne l'est pas.
En recherchant le
lien interne des phénomènes du capitalisme, Smith
définit la valeur de la marchandise par la quantité
de travail qui a été dépensée pour
la produire; et il considère le salaire de l'ouvrier comme
une partie du produit de son travail, déterminée
par la valeur des moyens de subsistance; quant au profit et à
la rente, il les regarde comme une déduction du produit
créé par le travail de l'ouvrier.
Cependant Smith
ne développe pas ces principes avec rigueur.
La définition
de la valeur des marchandises par le travail qui s'y trouve intégré,
est confondue constamment par lui avec la définition de
la valeur des marchandises par la " valeur du travail ".
Il affirmait que
la définition de la valeur par le travail ne se rapportait
qu'à un " état primitif de la société
", par lequel il entendait l'économie marchande simple
des petits producteurs.
Mais dans le cadre
du capitalisme, la valeur de la marchandise est constituée
par les revenus : salaire, profit et rente.
Pareille affirmation traduisait l'apparence trompeuse des phénomènes
de l'économie capitaliste.
Smith estimait que
la valeur du produit social total ne comporte, elle aussi, que
les revenus - salaire, profit et rente, c'est-à-dire qu'il
faisait l'erreur d'omettre la valeur du capital constant, consommé
lors de la production de la marchandise.
Ce " dogme
de Smith " excluait toute possibilité de comprendre
le processus de reproduction sociale.
Smith a décrit
le premier la structure de classe de la société
capitaliste, en indiquant que celle-ci se décomposait
en trois classes : 1° ouvriers, 2° capitalistes et 3°
propriétaires terriens.
Mais Smith était
limité par la conception bourgeoise du monde, et ses vues
montrent combien la lutte de classes à cette époque
était peu développée; il prétendait
qu'une communauté d'intérêts règne
dans la société capitaliste, puisque chacun aspire
à son propre avantage et que, du heurt des diverses tendances,
surgit l'utilité commune.
S'élevant
résolument contre les vues théoriques et la politique
des mercantilistes, Smith défendait avec ardeur la libre
concurrence.
Dans les écrits
de David Ricardo (1772-1823), l'économie politique bourgeoise
classique a eu son couronnement.
Ricardo a vécu
à l'époque de la révolution industrielle
en Angleterre.
Son principal ouvrage,
Principes de l'économie politique et de l'impôt
parut en 1817.
Ricardo a élaboré
la théorie de la valeur-travail avec le maximum de rigueur
possible dans les limites des conceptions bourgeoises.
Après avoir
rejeté la thèse de Smith prétendant que
la valeur n'est déterminée par le travail que dans
l'" état primitif de la société ",
il a montré que la valeur créée par le travail
de l'ouvrier est la source d'où naissent le salaire, aussi
bien que le profit et la rente.
Ayant admis que
la valeur est déterminée par le travail, Ricardo
a montré l'opposition des intérêts de classes
de la société bourgeoise telle qu'elle apparaît
dans la sphère de la répartition.
Il considérait
que l'existence des classes est un phénomène éternel
dans la vie de la société.
D'après Marx,
Ricardo fait
délibérément de l'opposition des intérêts
de classes, de l'opposition entre salaire et profit, profit et
rente, le point de départ de ses recherches; il la formule
naïvement comme là loi naturelle immuable de la société
humaine.
(K. Marx : Le Capital, Livre I, t.I)
Ricardo a formulé
une loi économique importante : plus le salaire de l'ouvrier
est élevé, plus le profit du capitaliste est bas,
et inversement.
Ricardo a montré
également l'opposition entre profit et rente; mais il
se trompait en ne reconnaissant que l'existence de la rente différentielle,
qu'il associait à la prétendue " loi de la
fertilité décroissante du sol. "
Ricardo a joué
un grand rôle dans le développement de l'économie
politique.
Sa théorie
suivant laquelle la valeur n'est déterminée que
par le travail, a eu une immense portée historique.
Observant le développement
des contradictions capitalistes, certains de ses disciples en
ont déduit que, si la valeur n'est créée
que par le travail, il est nécessaire et juste que l'ouvrier,
créateur de toutes les richesses, soit aussi le maître
de toutes les richesses, de tous les produits du travail.
C'est ce que réclamaient
en Angleterre, dans la première moitié du dix-neuvième
siècle, les premiers socialistes, disciples de Ricardo.
D'antre part, la
théorie de Ricardo portait en elle les caractères
de l'étroitesse bourgeoise.
Le régime
capitaliste avec ses intérêts de classes opposés
semblait à Ricardo, comme à Smith, un régime
naturel et éternel.
Ricardo ne posait
même pas la question de l'origine historique des catégories
économiques telles que la marchandise, l'argent, le capital,
le profit, etc.
Il concevait le
capital en dehors de l'histoire, en l'identifiant aux moyens
de production.
La naissance
de l'économie politique vulgaire.
Avec le développement
du capitalisme et l'aggravation de la lutte de classes, l'économie
politique bourgeoise classique fait place à l'économie
politique vulgaire.
Marx l'appelait
vulgaire parce que ses représentants substituaient à
la connaissance scientifique des phénomènes économiques
la description de leur apparence extérieure, en se donnant
pour but de présenter le capitalisme sous un jour favorable,
d'escamoter ses contradictions.
Les économistes
vulgaires ont rejeté tout ce qui était scientifique,
et se sont emparés de tout ce qu'il y avait de non scientifique
dans les vues des économistes antérieurs (notamment
de A. Smith), - de tout ce qui était conditionné
par l'étroitesse de classe de leur horizon.
Désormais
il ne s'agit plus de savoir si tel ou tel théorème
est vrai, mais s'il est bien ou mal sonnant, agréable
ou non à la police, utile ou nuisible au capital.
La recherche désintéressée fait place au
pugilat payé, l'investigation consciencieuse à
la mauvaise conscience, aux misérables subterfuges de
l'apologétique.
(K. Marx : Le Capital, Livre I, t.I)
Dans le domaine
de la théorie de la valeur, l'économie vulgaire
a, à l'opposé de la définition de la valeur
par le temps de travail, mis en avant une série de thèses
déjà réfutées par l'école
classique bourgeoise.
Telles, par exemple
: la théorie de l'offre et de la demande, qui ignore la
valeur se trouvant à la base des prix, et substitue à
l'explication de la base même des prix des marchandises
la description des variations de ces prix; la théorie
des frais de production, qui explique les prix de certaines marchandises
à l'aide des prix d'autres marchandises, c'est-à-dire
tourne pratiquement dans un cercle vicieux ; la théorie
de l'utilité qui, s'efforçant d'expliquer la valeur
des marchandises par leur valeur d'usage, ignore volontairement
le fait que les valeurs d'usage de marchandises hétérogènes
diffèrent par la qualité et, par suite, ne sont
pas comparables au point de vue de la quantité.
L'économiste
vulgaire anglais T. R. Malthus (1706-1834) a prétendu
que la misère des masses laborieuses, inhérente
au capitalisme, était due au fait que les êtres
humains se multiplient plus rapidement que ne peuvent augmenter
les moyens d'existence fournis par la nature.
D'après lui,
la correspondance nécessaire entre le chiffre de la population
et les moyens d'existence fournis par la nature, s'établit
par la famine, la misère, les épidémies,
les guerres.
La " théorie
" barbare de Malthus a été créée
eu vue de justifier le régime social dans lequel le parasitisme
et le luxe des classes exploiteuses vont de pair avec le travail
excessif et la misère grandissante des masses laborieuses.
Pour l'économiste
vulgaire français J. B. Say (1767-1832), la source de
la valeur est constituée par les " trois facteurs
de la production " : le travail, le capital et la terre;
de là, il tire la conclusion que les possesseurs de chacun
des trois facteurs reçoivent les revenus qui leur sont
dus : l'ouvrier, le salaire; le capitaliste, le profit (ou l'intérêt);
le propriétaire terrien, la rente.
La théorie
des " trois facteurs ", qui a été largement
répandue dans l'économie politique bourgeoise,
est destinée à cacher ce fait décisif que
c'est seulement dans des conditions sociales déterminées
que le travail se transforme en travail salarié, que les
moyens de production deviennent du capital et la propriété
de la terre, la source de la rente.
Comme on le sait,
le capital et la terre ne donnent un revenu à leur propriétaire
qu'en vertu du fait que, par son travail non payé, l'ouvrier
crée la plus-value, source réelle de tous les revenus
ne provenant pas du travail dans la société capitaliste.
En prétendant
qu'en régime capitaliste il n'existerait pas de contradiction
entre la production et la consommation, Say niait la possibilité
de crises générales de surproduction.
La théorie
de Say était une grossière déformation de
la vérité, dans le but de se rendre agréable
aux classes exploiteuses.
Des inventions fantaisistes
sur l'harmonie des intérêts de classe en régime
capitaliste ont été diffusées avec le plus
grand zèle par l'économiste français F.
Bastial (1801-1850) et par l'Américain H. Carey (1793-1879).
Sous prétexte
de défendre la " liberté du travail "
bourgeoise, l'économie politique vulgaire a mené
une lutte acharnée contre les syndicats, les contrats
collectifs, les grèves ouvrières.
A partir du deuxième
quart du dix-neuvième siècle, l'économie
politique vulgaire exerce une domination sans partage dans la
science économique bourgeoise.
L'économie politique petite-bourgeoise.
Au début
du dix-neuvième siècle, apparaît en économie
politique un courant petit-bourgeois qui reflète la position
contradictoire de la petite bourgeoisie en tant que classe intermédiaire
de là société capitaliste.
L'économie
politique petite-bourgeoise a son origine dans les travaux de
l'économiste suisse S. de Sismondi (1773-1842).
Contrairement à
Smith et à Ricardo, pour qui le régime capitaliste
est l'état naturel de la société, Sismondi
a fait la critique du capitalisme, qu'il condamnait en se plaçant
sur les positions de la petite-bourgeoisie.
Sismondi idéalisait
la petite production marchande des paysans et des artisans, et
formulait des projets utopiques de perpétuation de la
petite propriété, sans se rendre compte que la
petite production marchande implique le développement
des rapports capitalistes.
Partant du fait
que les revenus des ouvriers et des petits producteurs diminuent,
Sismondi concluait faussement à la contraction inévitable
du marché au fur et à mesure du développement
du capitalisme.
Il affirmait à
tort que l'accumulation des capitaux n'est possible qu'avec l'existence
de petits producteurs et d'un marché extérieur.
En France, c'est
P. J. Proudhon (1809-1865) qui a développé les
conceptions de l'économie politique petite-bourgeoise.
Il soutenait l'idée
réactionnaire selon laquelle on pourrait guérir
toutes les plaies sociales du capitalisme par l'organisation
d'une banque qui serait spécialement chargée du
troc des produits des petits producteurs et qui consentirait
un crédit gratuit aux ouvriers.
Proudhon semait
des illusions réformistes dans les masses ouvrières,
qu'il détournait de la lutte de classes.
En Russie, à la fin du XIXème siècle, c'étaient
les populistes libéraux qui prêchaient les idées
utopiques et réactionnaires de l'économie politique
petite-bourgeoise.
Les socialistes utopistes.
Avec l'apparition
et le développement de la grande industrie mécanique,
à la fin du dix-huitième siècle et au début
du dix-neuvième, les contradictions du capitalisme et
les calamités qu'il apporte aux masses laborieuses ont
pris de plus en plus de relief.
Mais la classe ouvrière
n'avait pas encore pris conscience de son rôle historique
de fossoyeur du capitalisme.
A cette époque
apparurent les grands socialistes utopistes : Henri de Saint-Simon
(1760-1825) et Charles Fourier (1772-1837) en France, Robert
Owen (1771-1858) en Angleterre, qui jouèrent un rôle
considérable dans l'histoire du développement des
idées socialistes.
Dans l'explication
qu'ils donnaient des phénomènes économiques,
les socialistes utopistes demeuraient sur le terrain des philosophes
du dix-huitième siècle, comme les représentants
de l'économie politique classique bourgeoise.
Mais, tandis que
pour ces derniers le régime capitaliste était conforme
à la nature humaine, pour les socialistes utopistes il
était contraire à la nature humaine.
Le rôle historique
des socialistes utopistes a été de faire une critique
serrée de la société bourgeoise, dont ils
flétrissaient sans merci les plaies telles que la misère
et les privations des masses populaires vouées à
un labeur pénible et exténuant, la vénalité
et la corruption des milieux riches de la société,
l'immense gaspillage des forces productives, résultat
de la concurrence, des crises, etc.
Ils ont eu une série
d'intuitions remarquables sur le caractère du régime
socialiste qu'ils opposaient au capitalisme.
Mais les socialistes
utopistes étaient loin de comprendre les véritables
voies à suivre pour arriver au socialisme.
Ignorant les lois
du développement social et des lois de la lutte des classes,
ils estimaient que les classes possédantes réaliseraient
elles-même le socialisme lorsqu'on serait parvenu à
les convaincre du bien-fondé, de l'équité
et de l'utilité de ce nouveau régime.
Les socialistes
utopistes n'avaient pas la moindre idée du rôle
historique du prolétariat.
Le socialisme utopique
ne savait ni expliquer la nature de l'esclavage salarié
en régime capitaliste, ni découvrir les lois de
son développement, ni trouver la force sociale capable
de créer la société nouvelle.
(V. Lénine : Les trois sources et les trois parties constitutives
du marxisme)
Les démocrates
révolutionnaires en Russie.
Au milieu du dix-neuvième
siècle en Russie, apparut en pleine crise du servage,
une brillante pléiade de penseurs, qui apportèrent
une importante contribution au développement de la science
économique.
A. I. Herzen (1812-1870)
a fustigé le tsarisme et le servage en Russie et appelé
le peuple à la lutte révolutionnaire contre eux.
Il a aussi critiqué
violemment le régime de l'exploitation capitaliste, instauré
en Occident.
Herzen a marqué
le début du " socialisme paysan " utopique.
Il voyait le " socialisme " dans l'émancipation
des paysans doté de terre, dans la possession communale
de la terre et dans l'idée paysanne du " droit à
la terre".
Il n'y avait rien
de vraiment socialiste dans ces opinions, mais elles traduisaient
les aspirations révolutionnaires de la paysannerie russe
en lutte pour renverser le pouvoir des propriétaires fonciers
et abolir la grande propriété féodale.
Un immense mérite
dans le développement de la science économique
appartient au grand révolutionnaire et savant russe N.
G. Tchernychevski (1828-1889).
Tchernychevski a
pris la tête de la lutte des démocrates révolutionnaires
contre le servage et l'autocratie tsariste en Russie.
Il a fait une brillante critique non seulement du servage, mais
aussi du régime capitaliste qui s'était solidement
établi à cette époque en Europe occidentale
et en Amérique du Nord.
Il a fait nettement
ressortir le caractère de classe et l'étroitesse
de l'économie politique bourgeoise classique et il a soumis
à une critique serrée les économistes vulgaires
: John Stnart Mill, Say, Malthus, etc.
Marx estimait que
Tchernychevski avait magistralement montré la faillite
de l'économie politique bourgeoise.
A l'économie
politique bourgeoise qui sert les intérêts cupides
des capitalistes, Tchernychevski a opposé " l'économie
politique des travailleurs ", dans laquelle la place prépondérante
doit être réservée au travail et aux intérêts
des travailleurs.
Par suite du faible
développement des rapports capitalistes dans la Russie
de son époque, Tchernychevski, représentant du
" socialisme paysan " utopique, n'a pas remarqué
que le développement du capitalisme et du prolétariat
créait les conditions matérielles et la force sociale
nécessaires pour réaliser le socialisme.
Cependant, par sa
conception de la nature et de la structure de classe de la société
capitaliste, du caractère du développement économique
de cette société, Tchernychevski est allé
beaucoup plus loin que les socialistes utopistes d'Europe occidentale
et a fait un grand pas sur le chemin du socialisme scientifique.
Contrairement aux
socialistes utopistes d'Occident, Tchernychevski accordait une
importance décisive à l'activité révolutionnaire
des masses laborieuses, à leur lutte pour leur émancipation
et il appelait à la révolution populaire contre
les exploiteurs.
Tchernychevski fut
un démocrate révolutionnaire combatif et conséquent.
Lénine disait
que ses uvres respiraient la lutte de classes.
La théorie
économique de Tchernychevski est le point culminant du
développement de l'économie politique avant Marx.
La révolution
accomplie par K. Marx et F. Engels en économie politique.
Vers le milieu du
XIXème siècle, le système d'économie
capitaliste est devenu dominant dans les principaux pays de l'Ouest
européen et aux Etats-Unis.
Il s'était
formé un prolétariat qui commençait à
entrer en lutte contre la bourgeoisie.
Les conditions étaient
nées pour la formation d'une conception du monde prolétarienne
d'avant-garde, le socialisme scientifique.
Karl Marx (1818-1883)
et Friedrich Engels (1820-1895) ont transformé le socialisme
d'utopie en science.
La doctrine élaborée
par Marx et Engels traduit les intérêts vitaux de
la classe ouvrière, et elle est le drapeau des masses
prolétariennes dans leur lutte pour le renversement révolutionnaire
du capitalisme, pour la victoire du socialisme.
La doctrine de Marx
naquit comme la continuation directe et immédiate des
doctrines des représentants les plus éminents de
la philosophie, de l'économie politique et du socialisme.
(V. Lénine : Les trois sources et les trois parties constitutives
du marxisme)
Le génie
de Marx, disait Lénine, consiste à avoir fourni
la réponse aux questions que la pensée progressiste
de l'humanité avait déjà posées.
Sa doctrine est
l'héritière légitime de ce que la pensée
humaine a créé de plus parfait dans le domaine
de la science de la société humaine.
En même temps,
la naissance du marxisme a marqué un tournant révolutionnaire
radical en philosophie, en économie politique, dans toutes
les sciences sociales.
Marx et Engels ont
armé la classe ouvrière d'une conception du monde
harmonieuse et complète, le matérialisme dialectique,
fondement théorique du communisme scientifique.
En étendant
le matérialisme dialectique à l'étude des
phénomènes sociaux, ils ont créé
le matérialisme historique, une des plus grandes conquêtes
de l'histoire de la pensée scientifique.
A l'étude
de la société humaine en dehors de l'histoire,
ils ont opposé la méthode historique fondée
sur une étude approfondie de la marche réelle de
son développement.
A l'idée
d'immuabilité et d'immobilité de la société
qui régnait jusque-là, ils ont substitué
une doctrine cohérente qui découvre les lois objectives
du développement social, les lois du remplacement de certaines
formes de la société par d'autres.
Marx et Engels furent
les fondateurs d'une économie politique véritablement
scientifique.
En appliquant la
méthode du matérialisme dialectique à l'étude
des rapports économiques, Marx a opéré une
révolution profonde dans l'économie politique.
C'est en abordant
l'économie politique en idéologue de la classe
ouvrière qu'il a dévoilé jusqu'au bout les
contradictions du capitalisme et créé une économie
politique prolétarienne.
Marx a élaboré
sa doctrine économique au cours d'une lutte intransigeante
contre l'apologétique bourgeoise du capitalisme et la
critique petite-bourgeoise de celui-ci.
Utilisant et développant
plusieurs thèses des classiques de l'économie politique
bourgeoise - Smith et Ricardo - Marx a résolument fait
justice des conceptions anti-scientifiques et des contradictions
de leur doctrine.
La doctrine économique
de Marx dresse le bilan et fait la synthèse d'une documentation
gigantesque sur l'histoire de la société humaine
et, en particulier, sur la naissance et le développement
du capitalisme.
C'est à Marx
que l'on doit la découverte du caractère historique
transitoire du mode de production capitaliste et l'étude
des lois présidant à la naissance, au développement
et à la disparition du capitalisme.
Sur la base d'une
analyse économique pénétrante du régime
capitaliste, Marx a fait apparaître la mission historique
du prolétariat en tant que fossoyeur du capitalisme et
artisan de la société nouvelle, socialiste.
Les fondements de
la conception marxiste du monde ont été proclamés
dès le premier document-programme du communisme scientifique,
le Manifeste du Parti communiste, écrit par Marx et Engels
en 1848.
Marx a publié
les résultats de ses recherches économiques ultérieures
dans son ouvrage Contribution à la critique de l'économie
politique (1859), consacré à l'analyse de la marchandise
et de la monnaie, on trouve dans la préface un exposé
classique des principes du matérialisme historique.
L'ouvrage principal
de Marx, dont il disait à bon droit qu'il était
l'uvre de sa vie, est Le Capital, dont le premier livre
(Le Développement de la production capitaliste) fut publié
par Marx en 1867; le second livre (Le Procès de la circulation
du capital) fut édité par Engels après la
mort de Marx en 1885, et le troisième livre (Le Procès
d'ensemble de la production capitaliste) parut en 1894.
En travaillant au
Capital, Marx se proposait d'écrire un quatrième
livre, consacré à l'analyse critique de l'histoire
de l'économie politique.
Les manuscrits qu'il
a laissés furent édités après la
mort de Marx et d'Engels sous le titre Les Théories
de la plus-value.
A l'élaboration de la théorie du communisme scientifique
sont également consacrés plusieurs ouvrages classiques
d'Engels : La Situation des classes laborieuses en Angleterre
(1845), l'Anti-Dühring (1878) qui traite des questions les
plus importantes en matière de philosophie, de sciences
naturelles et de sciences sociales, L'Origine de la famille,
de la propriété privée et de l'Etat (1884),
etc.
Engels a fait des
apports fondamentaux pour la compréhension de la conscience
des individus, leur "psychologie. "
En créant
l'économie politique prolétarienne, Marx a tout
d'abord élaboré et développé de façon
conséquente la théorie de la valeur-travail.
En analysant la
marchandise et la contradiction entre sa valeur d'usage et sa
valeur d'échange, Marx a découvert que le travail
incorporé dans la marchandise revêt un double caractère.
C'est, d'une part,
le travail concret qui crée la valeur d'usage de la marchandise,
et, d'autre part, le travail abstrait qui crée sa valeur.
La découverte
du double caractère du travail a servi à Marx de
clé pour expliquer scientifiquement tous les phénomènes
du mode de production capitaliste, sur la base de la théorie
de la valeur-travail.
Marx a montré
que la valeur n'est pas une chose, mais un rapport de production
entre les hommes, recouvert d'une enveloppe matérielle,
et c'est ainsi qu'il a révélé le secret
du fétichisme de la marchandise.
Il a soumis la forme
de la valeur à l'analyse, il en a recherché l'évolution
historique depuis les germes de l'échange jusqu'à
la domination intégrale de la production marchande, ce
qui lui a permis de découvrir la nature véritable
de l'argent.
Sur la base de la
théorie de la valeur-travail, Marx a élaboré
sa théorie de la plus-value.
Il a montré
le premier qu'en régime capitaliste, ce n'est pas le travail
qui est une marchandise, mais la force de travail.
II a étudié
la valeur et la valeur d'usage de cette marchandise spécifique
et il a expliqué le caractère de l'exploitation
capitaliste.
La théorie
de la plus-value de Marx révèle jusqu'au bout la
nature du principal rapport de production du capitalisme, le
rapport entre capitaliste et ouvrier; elle met à nu les
bases les plus profondes de l'opposition de classes et de la
lutte de classes entre le prolétariat et la bourgeoisie.
Marx a non seulement
mis en lumière l'origine et la source de la plus-value,
mais il a montré comment l'exploitation capitaliste est
camouflée et estompée.
Il a étudié
la nature du salaire en tant que prix de la force de travail
qui se manifeste sous la forme modifiée de prix du travail.
Marx a fait une
analyse scientifique serrée des diverses formes que revêt
la plus-value.
Il a montré
que la plus-value se manifeste sous âne forme modifiée,
le profit; qu'elle revêt en outre la forme de rente foncière
et d'intérêt.
Et l'on a l'impression
trompeuse que le salaire est le prix du travail, que le profit
est engendré par le capital lui-même, la rente par
la terre et l'intérêt par l'argent.
Dans sa théorie
du prix de production et du profit moyen, Marx a résolu
la contradiction qui consiste en ce qu'en régime capitaliste,
les prix du marché s'écartent de la valeur.
En même temps,
il a fait ressortir la base objective de la solidarité
de la classe capitaliste dans l'exploitation des ouvriers, le
profit moyen de chaque capitaliste étant déterminé
par le degré d'exploitation non point dans une entreprise
donnée, mais dans la société capitaliste
tout entière.
Marx a mis au point
la théorie de la rente différentielle et il a,
le premier, assigné un fondement scientifique à
la rente absolue.
Il a défini
le rôle réactionnaire, parasite de la grande propriété
terrienne, la nature et les formes d'exploitation des paysans
par les propriétaires fonciers et la bourgeoisie.
Marx a le premier
découvert les lois de l'accumulation du capital, en établissant
que le développement du capitalisme, la concentration
et la centralisation du capital entraînent inévitablement
un approfondissement et une aggravation des contradictions inhérentes
à ce régime, contradictions à la base desquelles
se trouve la contradiction entre le caractère social de
la production et la forme privée, capitaliste de l'appropriation.
Marx a découvert
la loi générale de l'accumulation capitaliste qui
détermine l'accroissement de la richesse et du luxe à
un pôle de la société et l'accroissement
de la misère, de l'oppression, des tourments du travail
à l'autre pôle.
Il a montré
que le développement du capitalisme entraîne la
paupérisation relative et absolue du prolétariat,
qui creuse encore l'abîme entre le prolétariat et
la bourgeoisie, aggrave la lutte de classes entre eux.
L'analyse de la
reproduction du capital social total, faite par Marx, a une importance
considérable.
Ayant écarté
l'erreur de Smith, qui consiste à ignorer le capital constant
consommé lors de la fabrication de la marchandise, et
établi la division du produit social du point de vue de
sa valeur en trois parties (c + v + p), puis du point de vue
de sa forme matérielle en moyens de production et objets
de consommation, Marx a découvert la loi économique
générale selon laquelle, quel que soit le régime
de la société, les forces productives se développent
quand l'accroissement de la production des moyens de production
est plus rapide que celui de la production des objets de consommation.
Marx a soumis à
l'analyse les conditions de la, reproduction capitaliste simple
et élargie, les profondes contradictions de l'économie
capitaliste qui conduisent nécessairement aux crises de
surproduction.
Il a étudié
la nature des crises économiques et démontré
qu'elles étaient inévitables en régime capitaliste.
La doctrine économique
de Marx et d'Engels constitue une ample et profonde démonstration
de l'inéluctabilité de l'effondrement du capitalisme
et de la victoire de la révolution prolétarienne
instaurant la dictature de la classe ouvrière et inaugurant
une ère nouvelle, l'ère de la construction de la
société socialiste.
Entre 1870 et 1890
déjà, le marxisme avait commencé à
recevoir de plus en plus largement l'approbation de la classe
ouvrière et des intellectuels d'avant-garde des pays capitalistes.
Un grand rôle
dans la diffusion des idées du marxisme, à cette
époque, fut joué par Paul Lafargue (1842-1911)
en France, Wilhelm Liebknecht (1826-1900) et August Bebel (1840-1913)
en Allemagne, Georges Plékhanov (1856-1918) en Russie,
Dmitri Blagoïev (1855-1924) en Bulgarie et par d'autres
personnalités marquantes du mouvement ouvrier des différents
pays.
Le déclin de la science économique bourgeoise.
L'économie politique bourgeoise contemporaine.
Depuis que le marxisme
a fait son apparition sur la scène historique, la tâche
fondamentale et décisive des économistes bourgeois
devint la " réfutation " du marxisme, toutes
les variétés possibles et imaginables de philosophie
idéaliste et de sociologie subjective servent de base
méthodologique aux différentes écoles et
tendances de l'économie politique bourgeoise.
En Allemagne, au
milieu du XIXème siècle, apparaît ce qu'on
appelle l'école historique de l'économie politique
(V. Roscher, B. Hildebrand, etc.).
Les tenants de cette
école niaient ouvertement l'existence de lois économiques
du développement de la société et substituaient
à l'investigation scientifique la description de faits
historiques épars.
La négation
des lois économiques leur servait à justifier l'arbitraire
réactionnaire, la servilité devant l'Etat bureaucratique
et militaire, qu'ils exaltaient systématiquement.
Les représentants
les plus récents de l'école historique, avec G.
Schmoller à leur tête, constituèrent ce qu'on
appelle la tendance historico-éthique ou historico-juridique.
Le trait caractéristique
de cette tendance est qu'elle substitue à la recherche
économique des considérations idéalistes
réactionnaires sur les objectifs moraux, les normes juridiques,
etc.
Certains économistes
de l'école historique (Hildebrand) ont formé en
1872 avec d'autres économistes bourgeois (Adolf Wagner,
L. Brentano, W. Sombart) ce qu'on a appelé " l'Union
de politique sociale " pour " prêcher du haut
de la chaire " des réformes sociales en vue de prévenir
la fin du régime capitaliste.
Tout en continuant
les traditions de leurs prédécesseurs, les représentants
de cette tendance, appelée ironiquement " socialisme
de la chaire ", se firent les valets de l'Etat militariste
allemand.
Certains d'entre
eux qualifiaient de " morceau de socialisme " chaque
mesure de cet Etat.
Les socialistes
de la chaire exaltaient la politique réactionnaire de
Bismarck et l'aidaient à tromper la classe ouvrière.
Au cours des dernières
décennies du dix-neuvième siècle, au fur
et à mesure que les idées du marxisme se propageaient,
la bourgeoisie a eu besoin, pour les combattre, de recourir à
de nouveaux moyens idéologiques.
On vit alors apparaître
sur la scène l'école autrichienne.
L'appellation de cette école est liée au fait que
ses principaux représentants - K. Menger, F. Wieser et
E. Boehm-Bawerk - étaient professeurs dans des universités
autrichiennes.
Contrairement à
l'orientation historique, les tenants de l'école autrichienne
reconnaissait pour la forme la nécessité d'étudier
les lois économiques, mais, pour présenter le régime
capitaliste sous un jour plus favorable et en assumer la défense,
ils reportèrent la recherche de ces lois, de la sphère
des rapports sociaux dans le domaine psychologique subjectif,
c'est-à-dire qu'ils suivirent la voie de l'idéalisme.
En ce qui concerne
la théorie de la valeur, l'école autrichienne émit
le principe dit de " l'utilité marginale. "
Conformément
à ce principe, la valeur de la marchandise est déterminée
non pas simplement par son utilité, ainsi que l'affirmaient
auparavant certains économistes vulgaires, mais par son
utilité marginale, c'est-à-dire par l'appréciation
subjective de l'utilité d'une unité de marchandise
qui satisfait un des besoins les moins essentiels de l'individu.
En réalité,
cette théorie n'explique rien.
Il est tout à
fait évident, par exemple, que l'estimation subjective
d'un kilogramme de pain est foncièrement différente
chez un bourgeois rassasié et chez un chômeur affamé;
mais cependant tous deux paient le pain le même prix.
A la théorie
de la plus-value de Marx, les économistes de l'école
autrichienne opposent telle ou telle variété de
la " théorie de la productivité du capital
", qui n'est qu'une forme rénovée de la théorie
vulgaire des " trois facteurs de la production. "
Le passage à
l'impérialisme et l'aggravation extrême qui en résulte
pour les contradictions sociales et la lutte des classes, déterminèrent
la dégradation ultérieure de l'économie
politique bourgeoise.
Après la
victoire de la révolution socialiste en Russie et en Chine,
qui ont donné un démenti aux affirmations des idéologues
de la bourgeoisie sur le caractère éternel du régime
capitaliste, de nombreux économistes bourgeois commencèrent
à considérer comme une de leurs tâches principales
le recours à la calomnie pour déformer la nature
du régime soviétique, pour cacher aux travailleurs
des pays capitalistes la vérité sur les réalisations
historiques du pays du socialisme.
Après la
transformation de ces pays par la clique révisionniste
ayant détruit le socialisme dans ces pays, les idéologues
bourgeois ont continué leur assaut contre la valeur des
expériences socialistes.
En commentant des
catégories du capitalisme comme la valeur, le prix, le
salaire, le profit, la rente, les économistes bourgeois
contemporains se placent généralement sur les positions
de la tendance psychologique subjective, dont une des variétés
est l'école autrichienne examinée plus haut; ils
reprennent sur tous les tons la vieille théorie vulgaire
des trois facteurs de la production.
L'économiste
anglais Alfred Marshall (1842-1924) a essayé de concilier
de façon éclectique les trois théories vulgaires
différentes de la valeur : celle de l'offre et de la demande,
de l'utilité marginale et celle des frais de production.
L'économiste
américain John B. Clark (1847-1938), tout en prêchant
l'idée mensongère de " l'harmonie des intérêts
" des différentes classes de la société
bourgeoise, a formulé la théorie de la "
productivité optima ", qui n'est en réalité
qu'une tentative originale pour associer la veille théorie
vulgaire de la " productivité du capital " à
la théorie vulgaire de " l'utilité marginale
" de l'école autrichienne.
Le profit, d'après
Clark, serait la rémunération du travail de l'entrepreneur;
les classes laborieuses, elles, ne créeraient qu'une faible
part de la richesse et la recevraient intégralement.
En fait l'économie
politique bourgeoise de nos jours constitue une arme idéologique
de l'oligarchie financière dont la majorité des
représentants joue directement et ouvertement le rôle
de défenseurs de la réaction et de l'agression
impérialistes.
Les apologistes
des monopoles font hypocritement passer pour un " capitalisme
organisé " la soumission de l'Etat impérialiste
à l'oligarchie financière, la large utilisation
par celle-ci de l'appareil d'Etat pour satisfaire son intérêt
cupide et augmenter les profits des monopoles.
Dans les premières
décennies du vingtième siècle, en Allemagne,
s'est répandue ce qu'on a appelé la tendance sociale
ou l'école organique sociale d'économie politique
(A. Amman, R. Stolzmann, O. Spann et autres).
Contrairement à
l'école autrichienne qui aborde les phénomènes
économiques d'un point de vue psychologique et subjectif,
les représentants de la tendance sociale donnaient une
interprétation des rapports sociaux des hommes, mais ils
les considéraient de façon idéaliste, comme
des formes juridiques dénuées de tout contenu matériel.
Les économistes
de la tendance sociale affirmaient que la vie sociale serait
régie par des normes juridiques et éthiques.
Ils camouflaient la ferveur qu'ils vouaient aux monopoles capitalistes
par des considérations démagogiques sur le "bien-être
général " et la nécessité de
subordonner la " partie", c'est-à-dire les niasses
laborieuses, au " tout ", c'est-à-dire à
l'Etat impérialiste.
Ils exaltaient l'activité
des capitalistes, en proclamant qu'elle servait la société.
Dans leur forme
la plus réactionnaire, ces idées ont servi d'arme
idéologique au fascisme en Allemagne et dans d'autres
pays bourgeois.
Le fascisme allemand
a utilisé les éléments les plus réactionnaires
de l'économie politique vulgaire allemande, son chauvinisme
extrême, son culte de l'Etat bourgeois, sa propagande en
faveur de la conquête de terres étrangères
et de la " paix sociale " à l'intérieur
de l'Allemagne.
Ennemis jurés
du socialisme et de l'humanité progressiste, les fascistes
allemands eurent recours à la démagogie anticapitaliste
et se revendiquaient hypocritement du socialisme.
Les fascistes italiens
et allemands prêchaient la théorie réactionnaire
de " l'Etat corporatif ", selon laquelle le capitalisme,
les classes et les contradictions des classes auraient été
liquidés dans les pays fascistes.
Les économistes
fascistes justifiaient la conquête et le pillage des terres
d'autrui par l'Allemagne hitlérienne, à l'aide
de la " théorie des races " et de la "
théorie de l'espace vital. "
Conformément
à ces " théories ", les Allemands auraient
été la " race supérieure " et
tontes les autres nations des nations " inférieures
", et la " race des seigneurs " aurait eu le droit
de s'emparer par la force des terres des autres peuples, des
peuples " inférieurs ", et d'étendre
sa domination au monde entier.
L'expérience
de l'histoire a montré nettement tonte l'absurdité
et l'inanité des plans hitlériens délirants
de conquête de la domination mondiale.
Au cours de la crise
générale du capitalisme, où le problème
des marchés a pris une acuité sans précédent,
où les crises économiques se sont multipliées
et aggravées, où le chômage massif est devenu
permanent, des théories diverses ont cherché à
faire croire à la possibilité d'assurer le "
plein emploi ", de supprimer l'anarchie de la production
et les crises tout en conservant le régime capitaliste.
La théorie
que l'économiste anglais J. M. Keynes (1883-1946) a exposée
dans un ouvrage intitulé : Théorie générale
de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie (1936)
a eu une large diffusion parmi les économistes bourgeois.
Tout en estompant
les causes réelles du chômage massif permanent et
des crises en régime capitaliste, Keynes s'applique à
démontrer que ces " déficiences " de
la société bourgeoise sont dues non pas à
la nature du capitalisme, mais à la mentalité des
hommes.
Keynes affirme que
le chômage résulte de la demande insuffisante en
objets de consommation personnelle et industrielle.
L'insuffisance de
la demande en objets de consommation personnelle serait due à
la tendance inhérente aux hommes à épargner
une partie de leur revenu, et la demande insuffisante pour les
objets de consommation industrielle au relâchement de l'intérêt
des capitalistes pour le placement de leurs capitaux dans les
différentes branches de l'économie par suite de
l'abaissement général de la " rentabilité
du capital. "
Pour augmenter l'emploi
de la population, affirme Keynes, il est nécessaire d'accroître
les investissements, ce pour quoi l'Etat doit, d'une part, assurer
une plus grande rentabilité aux capitaux en diminuant
le salaire réel de l'ouvrier, moyennant l'inflation et
l'abaissement du taux d'intérêt pour les prêts,
et, d'autre part, effectuer de grands investissements sur le
compte du budget.
Pour élargir
la demande en objets de consommation, Keynes recommande l'accroissement
de la consommation parasite et du gaspillage des classes régnantes,
l'augmentation des dépenses consacrées à
des fins militaires et des autres dépenses improductives
de l'Etat.
La théorie
de Keynes n'est pas fondée.
L'insuffisance de
la demande en objets de consommation est due non point à
une mythique " tendance des hommes à l'épargne
", mais à l'appauvrissement des travailleurs.
Les mesures proposées
par Keynes soi-disant pour assurer le plein emploi de la population
- inflation, augmentation des dépenses improductives pour
la préparation et la conduite des guerres - conduisent
en réalité à un nouvel abaissement du niveau
de vie des travailleurs, à la contraction du marché
et à l'extension du chômage.
La théorie
de Keynes est largement utilisée aujourd'hui sous une
forme ou sous une autre par les économistes bourgeois,
ainsi que par les " socialistes " et " sociaux-démocrates
" des pays capitalistes.
L'économie
politique bourgeoise contemporaine des Etats-Unis est caractérisée
par la théorie qui recommande l'accroissement du budget
de l'Etat et de la dette publique comme moyen de remédier
aux vices du capitalisme.
Estimant que les
possibilités de développement ultérieur
du capitalisme par les seules forces économiques spontanées
sont très restreintes, l'économiste américain
A. Hansen démontre la nécessité pour l'Etat
de " diriger " l'économie capitaliste en stimulant
les placements de capitaux moyennant de fortes commandes de l'Etat.
Selon la théorie
de Hansen et de plusieurs autres économistes bourgeois
américains, les dépenses de l'Etat doivent servir
de " régulateur de l'emploi " : pendant la crise
et la dépression, le gouvernement doit augmenter ses dépenses
et, pendant l'inflation, les réduire.
Partant de là,
ils réclament l'extension de la pratique des commandes
d'Etat, de la création d'entreprises au compte du Trésor,
de l'achat de matières stratégiques sur une grande
échelle, de l'extension de l'armée et de l'appareil
gouvernemental.
En fait, toutes
ces formes de dépenses de l'Etat, liées à
la militarisation de l'économie et à la course
aux armements, contribuent largement à assurer des profits
maximums aux monopoles.
Depuis la deuxième
guerre mondiale, les économistes bourgeois américains
font une vaste propagande en faveur de la militarisation de l'économie
comme panacée des crises économiques de surproduction.
D'après ce
qu'ils affirment, une demande de matériel de guerre accrue
assurerait un développement ininterrompu de la production.
Cette théorie
apologétique est démentie par la réalité
car, en fin de compte, tout juste capable de retarder pour peu
de temps l'arrivée d'une crise de surproduction, la militarisation
de l'économie approfondit inévitablement la contradiction
entre l'accroissement des possibilités de production et
la réduction de la demande solvable de la population,
contradiction qui conduit aux crises économiques.
Certains économistes
bourgeois des Etats-Unis et de Grande-Bretagne se prononcent
pour " le libre jeu des forces économiques ",
par lequel ils entendent en fait la liberté illimitée
pour les monopoles d'exploiter les ouvriers et de dépouiller
les consommateurs.
Ces économistes
proclament hypocritement que l'activité des syndicats
en faveur des ouvriers est une violation de la "liberté
économique " et ils exaltent la législation
anti-ouvrière réactionnaire des Etats impérialistes.
De même que
les champions de l'économie " dirigée "
par l'Etat bourgeois, les défenseurs du " libre jeu
des forces économiques " traduisent les intérêts
des différents groupes de l'oligarchie financière,
qui cherche à s'assurer le profit maximum en intensifiant
l'exploitation des masses laborieuses à l'intérieur
du pays ainsi qu'en développant l'agression impérialiste
sur le plan international.
Une série
d'économistes bourgeois s'efforcent, par des élucubrations
antiscientifiques sur la " valeur inégale "
des différentes " races " et nations, sur la
mission civilisatrice des races et nations " supérieures
" à l'égard des races et nations "inférieures
", etc., de justifier la politique agressive de mainmise
des puissances impérialistes sur les terres d'autrui,
d'asservissement et de pillage des autres peuples.
Ce sont les représentants
les plus réactionnaires de l'économie politique
bourgeoise des Etats-Unis qui à cet égard, font
le plus de zèle : suivant les traces des fascistes allemands,
ils répandent l'idée barbare de la " supériorité
" des nations parlant l'anglais sur tous les autres peuples
et s'appliquent à justifier par tous les moyens les plans
délirants de domination des Etats-Unis dans le monde.
L'impérialisme
français joue lui la carte " démocratique
", des " droits de l'Homme ", afin de se présenter
comme un impérialisme " à visage humain ".
Tous les moyens
idéologiques sont employées à cet effet
: mise en avant de la supériorité " culturelle
", " démocratique ", " religieuse
", " sociale ", " humaniste ", culturelle
etc. A chaque occasion, ils vantent avec zèle " le
mode de vie américain ", " la démocratie
", etc.
Les impérialistes
européens mettent en avant une idéologie chauvine
prétendument opposée à l'impérialisme
américain.
Le capitalisme français ou allemand serait différent
de celui des USA; il serait " social ", " démocratique
", fondé sur le partenariat social, etc.
Les monopoles n'auraient
pas autant de pouvoir qu'aux USA, la presse serait encore "
démocratique ", l'appareil d'Etat indépendant,
la culture encore vraiment humaniste et critique etc.
Cette méthode
avait déjà été employée à
grande échelle par les fascistes allemands.
Afin de préparer
une nouvelle guerre mondiale, les publications bourgeoises diffusent
également largement la théorie depuis longtemps
réfutée de Malthus.
Le malthusianisme
contemporain a ceci de caractéristique qu'il allie les
idées réactionnaires de Malthus à la théorie
raciste.
Ils réclament
une réduction sensible de la population, notamment dans
les pays coloniaux et dépendants dont les peuples mènent
une lutte de libération contre l'impérialisme.
Les USA ont ainsi
mis en avant des politiques anti-natalistes fondées sur
la mise en avant de la religion et la lutte contre la libération
sexuelle et la libération de la femme.
Ils mettent également
en place des plans de génocide par les stérilisations
massives de populations, comme à Puerto-Rico ou au Pérou.
La vie montre l'entière
inconsistance des constructions théoriques de l'économie
politique bourgeoise contemporaine, son rôle servile à
l'égard du capital monopoliste, son incapacité
de donner une analyse scientifique et une solution positive des
problèmes économiques de l'époque actuelle.
La critique petite bourgeoise de l'impérialisme.
Contrairement à
Sismondi qui voyait dans le système de la libre concurrence
la source première de tous les maux du capitalisme, une
grande partie des économistes petits-bourgeois de l'époque
de l'impérialisme vantent le capitalisme de l'époque
de la libre concurrence qu'ils représentent comme le meilleur
régime économique de la société.
Ils dirigent le
feu de leur critique, non contre le capitalisme en général,
mais seulement contre la domination illimitée des monopoles
capitalistes, dans l'arbitraire desquels ils voient le principal
danger qui menace la " liberté économique
", l'"initiative privée ", etc.
Parfois ces critiques
prennent des formes " critiques. "
Mais les mouvements " alter-mondialistes " ne remettent
pas en cause le capitalisme, qu'ils entendent seulement "
aménager ", " encadrer ".
Dans les ouvrages
des critiques petits-bourgeois de l'impérialisme se trouve
rassemblée une riche collection de faits qui dénoncent
la pratique de rapine des monopoles.
" Le Monde
Diplomatique " est l'exemple le plus éloquent de
démocratisme petit-bourgeois, " critique " du
capitalisme mais censurant et niant l'existence des mouvements
de libération nationale et du communisme.
La critique petite-bourgeoise
de l'impérialisme sème l'illusion que l'on pourrait
éliminer les " abus " des monopoles et consolider
les positions des petites et moyennes entreprises à l'aide
d'une législation " anti-trust ", de toutes
espèces de mesures en vue d'encourager les petites entreprises
et de combattre les machinations spéculatives des requins
de la finance.
Pour la critique
petite-bourgeoise l'exploitation n'a lieu que dans le "
tiers-monde " ou dans les MacDonalds des pays capitalistes.
Les critiques ne
visent pas le capitalisme mais des symboles caricaturaux : Bill
Gates, Nike, Mac Donalds, Coca Cola, etc.
Elle défend culturellement des " niches ", qui
en fait sont totalement intégrées à la sphère
capitaliste mais ont une apparence alternative.
Le système
alternative Linux a ainsi une apparence contestataire en s'opposant
au monopole de Microsoft; en pratique la Bourse de New York utilise
le système Linux, organisé par IBM.
Le principe des
" logiciels libres " s'oppose à la volonté
des monopoles de s'approprier l'ensemble de la production intellectuelle
dans l'informatique, mais en pratique il n'est que l'expression
de la volonté des petites et moyennes entreprises d'"
innover ", de rester " indépendantes ",
" créatives " etc.
Les " alternatifs
" critiquent le capitalisme pour son "immobilisme",
pour brimer la capacité des individus à exprimer
leur liberté, leur créativité, etc.
Ces critiques ne
sont rien d'autres qu'une adaptation moderne de la critique petite-bourgeoise
des monopoles.
Les économistes
petits-bourgeois sèment des illusions en affirmant que,
dans les conditions du capitalisme, on peut sauver de la ruine
les petits producteurs de marchandises, paysans et artisans,
et améliorer radicalement la situation des ouvriers eu
développant les coopératives de consommateurs,
d'agriculteurs, d'artisans, d'internautes, etc.
Les défenseurs
du monde " libre " ne posent à aucun moment
la rémunération des producteurs intellectuels,
des artistes.
Ils mettent en avant la consommation, mais n'accordent aucune
valeur à la question de la valeur du travail et ne proposent
jamais de plan d'organisation sociale autre que des " coopératives
" associés, ce qui n'est qu'un retour au capitalisme
pré-monopoliste.
Ils défendent
les politiques " anti-trust " des USA et de l'Europe,
alors que ces politiques ne sont qu'un soutien à la concurrence
et au capitalisme.
L'idéal petit-bourgeois
de l'alter-mondialisme est ainsi ignoré par les masses
populaires vivant chaque jour concrétement le capitalisme.
Les théories
économiques des opportunistes de la seconde Internationale
et de la social-démocratie.
Les tentatives sans
nombre de la science bourgeoise pour "anéantir "
le marxisme n'ont nullement ébranlé ses positions.
Aussi la lutte contre le marxisme s'est-elle poursuivie sous
le couvert d'" améliorations " et d'" interprétations
" de la théorie de Marx.
La dialectique de
l'histoire est telle que la victoire du marxisme en matière
de théorie oblige ses ennemis à se déguiser
en marxistes.
(V. Lénine : Les destinées historiques de la doctrine
de K. Marx)
Les révisionnistes
ont essayé d'adapter l'économie politique prolétarienne
aux intérêts de la bourgeoisie.
Les dix dernières années du dix-neuvième
siècle ont vu entrer en scène le révisionnisme,
dont le principal représentant a été le
social-démocrate allemand Ed. Bernstein.
Les révisionnistes
sont partis en guerre contre l'enseignement de Marx et d'Engels
sur l'inéluctabilité du renversement révolutionnaire
du capitalisme et de l'établissement de la dictature du
prolétariat.
Ils ont soumis à
une révision complète tous les aspects de la théorie
économique révolutionnaire de Marx.
Les révisionnistes ont proposé de combiner la théorie
marxiste de la valeur-travail avec la théorie de l'utilité
marginale, mais, en réalité, ils lui substituaient
cette dernière.
Ils ont interprété
la théorie marxiste de la plus-value dans le sens d'une
" condamnation morale " de l'exploitation capitaliste.
Retranchés
derrière de prétendues " données nouvelles
" sur le développement du capitalisme, les révisionnistes
ont proclamé " périmée " la théorie
marxiste de la victoire de la grande production sur la petite,
de la paupérisation du prolétariat dans la société
capitaliste, de l'irréductibilité et de l'aggravation
des contradictions de classes, de l'inéluctabilité
des crises économiques de surproduction en régime
capitaliste.
Ils appelaient les
ouvriers à renoncer à la lutte révolutionnaire
pour la suppression du régime capitaliste et à
se contenter de la lutte pour leurs intérêts économiques
immédiats.
Les opportunistes
de la seconde Internationale, K. Kautsky (1854-1938), R. Hilferding
(1877-1941), et d'autres encore, ont adopté une forme
plus subtile de falsification du marxisme.
Au début
de leur activité, ils étaient des marxistes, qui
collaboraient à la diffusion de la théorie marxiste.
Sous ce rapport,
il faut mentionner les travaux de K. Kautsky tels que La Doctrine
économique de Karl Marx, La Question agraire et plusieurs
autres, ainsi que l'ouvrage d'Hilferding, Le Capital financier
(1910) qui, malgré des erreurs, a joué un rôle
positif déterminé dans l'étude scientifique
de la phase contemporaine du développement du capitalisme.
Cependant, par la
suite, K. Kautsky et R. Hilferding sont passés en fait
sur les positions des adversaires du marxisme révolutionnaire,
tout en continuant pendant un certain temps à faire figure
d'" orthodoxes ", c'est-à-dire de disciples
fidèles de Marx et d'Engels.
S'opposant en paroles
- et encore de façon peu conséquente - à
certaines affirmations des révisionnistes, ces opportunistes
vidaient de sa substance révolutionnaire le marxisme,
qu'ils essayaient de transformer en un dogme stérile.
Ils rejetaient la
théorie de la dictature du prolétariat, qui constitue
l'âme du marxisme, niaient la paupérisation absolue
de la classe ouvrière et prétendaient que les crises
finissent par disparaître en régime capitaliste.
Cachant par tous
les moyens les contradictions profondes du capitalisme monopoliste,
K. Kautsky traitait l'impérialisme seulement comme une
forme particulière de politique, comme la tendance des
pays industriels hautement évolués à se
soumettre les régions agricoles.
Cette théorie
semait l'illusion que la politique de conquête ne découle
pas de la nature du capitalisme monopoliste.
Au cours de la première
guerre mondiale, Kautsky a lancé la théorie anti-marxiste
de l'ultra-impérialisme, qui prétend que l'on peut,
à l'époque de l'impérialisme, par voie d'entente
entre capitalistes des différents pays, créer une
économie mondiale organisée et éliminer
ainsi l'anarchie de la production et les guerres.
Ce qui est caractéristique
de cette théorie réactionnaire, c'est la coupure
entre l'économique et le politique et la méconnaissance
de la loi du développement inégal des pays capitalistes
à l'époque de l'impérialisme.
La théorie
de l'" ultra-impérialisme " présentait
l'impérialisme sous un jour favorable et désarmait
la classe ouvrière au profit de la bourgeoisie, en créant
l'illusion d'un développement pacifique et sans crises
du capitalisme.
C'est à ce
même but que devait servir la " théorie des
forces productives ", théorie vulgaire que prêchait
Kautsky, et suivant laquelle le socialisme serait le résultat
mécanique du développement des forces productives
de la société, sans lutte de classes ni révolution.
Au lendemain de
la grande Révolution socialiste d'Octobre, Kautsky est
entré en lutte ouverte contre la première dictature
du prolétariat du monde et a appelé à l'intervention
contre la République des Soviets.
Dans son ouvrage
Le Capital financier, R. Hilferding voilait déjà
le rôle déterminant des monopoles dans le capitalisme
contemporain et l'aggravation de ses contradictions; il a méconnu
les traits essentiels de l'impérialisme : le parasitisme
et le pourrissement du capitalisme, le partage du monde et la
lutte pour un nouveau partage.
Pendant les années
de stabilisation provisoire et partielle du capitalisme qui suivirent
la première guerre mondiale, Hilferding prétendit,
à la suite des économistes bourgeois, que s'était
ouverte l'ère du " capitalisme organisé "
où, grâce à l'activité des monopoles,
disparaissent la concurrence, l'anarchie de la production, les
crises et où commence à dominer une organisation
harmonieuse et consciente.
De là, les
chefs réactionnaires de la social-démocratie ont
tiré la conclusion que les trusts et les cartels "
évoluent " pacifiquement vers l'économie socialiste
planifiée, qu'il ne reste plus à la classe ouvrière
qu'à aider les hommes des trusts et les banquiers à
organiser l'économie, et qu'alors le capitalisme actuel
" s'intégrera " progressivement dans le socialisme
sans lutte aucune, ni révolution.
Ainsi, chez Kautsky,
Hilferding et les autres théoriciens réformistes
de la social-démocratie, la présentation de l'impérialisme
sous un jour favorable est inséparable du thème
de " l'intégration pacifique du capitalisme dans
le socialisme ", qu'ils prêchent pour détourner
la classe ouvrière de la lutte révolutionnaire
pour le socialisme, et subordonner le mouvement ouvrier aux intérêts
de la bourgeoisie impérialiste.
C'est à ce
but que devait servir, en particulier, la théorie apologétique
de la " démocratie économique ", diffusée
par certains leaders socialistes de droite dans l'entre- deux-guerres.
Selon cette théorie,
en assumant le rôle de représentants syndicaux dans
les directions d'usine et dans d'autres organismes, les ouvriers
prendraient part sur un pied d'égalité à
la gestion des affaires et deviendraient peu à peu les
maîtres de la production.
Par leur politique
de trahison des intérêts de la classe ouvrière,
les social-démocrates de la seconde Internationale ont
frayé la route au fascisme en Allemagne et dans plusieurs
autres pays.
La théorie
du " socialisme coopératif ", fondée
sur l'illusion que, dans le cadre de la domination du capital,
la diffusion des formes coopératives conduirait au socialisme,
est une variété de la théorie réformiste
de l'intégration pacifique du capitalisme dans le socialisme.
En prêchant
les théories apologétiques de " l'impérialisme
pur", du " capitalisme organisé " ou "
néo-capitalisme ", etc., les réformistes s'évertuent
à escamoter les contradictions sans cesse aggravées
du capitalisme monopoliste.
En niant la loi
du développement inégal du capitalisme à
l'époque de l'impérialisme, ils cherchent à
verser dans la conscience de la classe ouvrière le poison
du doute sur la possibilité de la victoire du socialisme
dans un seul pays.
Après la
deuxième guerre mondiale, on vit les chefs réformistes
des travaillistes anglais, les chefs socialistes en France, en
Italie, en Allemagne occidentale, en Autriche et en d'autres
pays (L. Blum, E. Renner, etc.), se poser en défenseurs
du capitalisme.
Les " socialistes
" défendent les monopoles, prêchent la paix
de classe entre les ouvriers et la bourgeoisie, ils soutiennent
activement la politique réactionnaire de l'impérialisme
à l'intérieur et sa politique agressive à
l'extérieur.
Pour concilier les
travailleurs avec l'impérialisme, inculquer à la
classe ouvrière la foi en la possibilité de voir
s'améliorer sa situation misérable tout en maintenant
le régime capitaliste, les théoriciens socialistes
ont inventé la théorie du "socialisme démocratique
", qui est une variété de la théorie
de " l'intégration pacifique du capitalisme dans
le socialisme " ou vice-versa.
Le socialisme "
à la suédoise " ou la social-démocratie
autrichienne ont ainsi anesthésié les luttes de
classes pendant des décennies, prétextant la hausse
du niveau de vie dans la période de développement
de l'impérialisme.
La social-démocratie
suédoise prétend qu'il n'y a plus de classes en
Suède; en Autriche les classes sont affirmées comme
étant alliée : l'aigle national tient un marteau
et une faucille se libérant de chaînes et est coiffée
d'une tour, symbole de la bourgeoisie.
Toute nationalisation
est qualifiée de " progrès démocratique
", comme celles des socialistes en France après 1981;
la social-démocratie déclare que l'Etat est une
organisation au-dessus des classes, et que toute entreprise,
propriété de cet Etat, est une entreprise "
socialiste ".
Mais en réalité,
la nationalisation est une mesure bourgeoise, qui ne modifie
pas la nature économique des entreprises nationalisées
en tant qu'entreprises capitalistes.
Les nationalisations
ne visent qu'à renforcer le capitalisme; les nationalisations
cèdent plus tard la place aux privatisations.
Les détenteurs
des entreprises nationalisées, précédemment
déficitaires, se voient accorder une large compensation
et un revenu élevé garanti, tandis qu'on oblige
les ouvriers occupés dans les industries nationalisées
à fournir un effort encore plus intense, pour un salaire
maintenu à un bas niveau.
La théorie
du " socialisme démocratique " n'est qu'un paravent
pour cacher l'oppression grandissante des masses laborieuses
par le capitalisme monopoliste d'Etat, degré supérieur
de la domination exercée par l'oligarchie financière.
Tout en prêchant
la " paix sociale " dans la société capitaliste,
les chefs des partis socialistes de droite aident activement
la bourgeoisie à mener une grande offensive contre le
niveau de vie des masses laborieuses, à réprimer
le mouvement ouvrier dans les métropoles et le mouvement
de libération nationale dans les colonies et les pays
dépendants.
Pour ce qui est
de l'interprétation et de l'appréciation de tous
les principaux phénomènes économiques de
l'époque actuelle, ils suivent d'ordinaire les économistes
bourgeois.
|