Interview de Laura Whitehom, Linda Evans et Susan Rosenberg
par une membre du
Queer's Unifed in Support of Political Prisoners (1991)
Q: Je suis militante. Comment se fait-il que je n'ai jamais entendu parler de vous?
LAURA: Je pense que c'est parce qu'il
y a eu une longue période pendant laquelle la "gauche" et
les mouvements progressistes n'ont pas fait d'efforts pour
lever le voile sur ce qui se passait en prison - y compris,
sans se limiter à ces catégories, les prisonnierEs politiques et les prisonnierEs de guerre.
Combien de personnes qui militent au sujet du Sida, par exemple, sont au
courant des conditions de vie épouvantables dans lesquelles les malades vivent en prison?
A part Mike Reigle du Gay Community News [hebdomadaire progressiste gay et
lesbien édité à Boston de 1974 à 1993], combien d'écrivainEs ou journalistes
appartenant à nos mouvements essaient de soutenir les lesbiennes
et gais emprisonnéEs, alors que souvent les porcs [flics, matons]
leur font la vie très dure?
En général, ce pays [les États-Unis] cherche à enfermer les prisonnierEs de façon à ce que le monde extérieur les oublie. Dans le cas des prisonnierEs politiques c'est mille fois pire, pour la bonne et simple raison que notre existence même menace le bien-être du système: le fait qu'on est là est une preuve que cette grande démocratie n'est qu'un mensonge. L'Etat ne veut pas que vous entendiez parler de nous - c'est pour ça qu'on nous traite de "terroristes" et "criminelles".
LINDA: L'Etat américain cache intentionnellement
l'existence des prisonnierEs politiques, car sa position
officielle est qu'il n'y a pas de prisonnierEs politiques
aux États-Unis.
De la même façon que l'Etat nie le caractère politique de nos actions,
il nie aussi que nous sommes issues de mouvements légitimes et populaires.
Le système carcéral isole toutE prisonnierE de sa communauté, mais l'isolement dont
nous, les prisonnierEs politiques, sommes l'objet est plus intense:
des contrôles plus rigoureux sur nos visites, des transferts
fréquents à des prisons loin de nos communautés,
la censure de notre courrier, des soi-disant "conditions de sécurité maximales",
des périodes prolongées en isolement.
Mais le mouvement qui est le nôtre a également ignoré l'existence des prisonnierEs politiques.
Je crois que ceci est surtout une conséquence du racisme : la plupart des
prisonnierEs politiques et prisonnierEs de guerre aux États-Unis sont
des NoirEs et Puerto RicainEs emprisonnéEs depuis déjà plus d'une décennie.
Malheureusement, il n'y a jamais eu beaucoup de
soutien de la part des progressistes blancHEs pour la lutte de libération des NoirEs,
pour l'indépendance de Puerto Rico et pour la souveraineté des premières nations -
alors que les prisonnierEs politiques "et prisonnierEs de guerre NoirEs/Puerto RicainEs/
Autochtones sont issuEs de ces mouvements.
Il y a aussi le fait que beaucoup de militantEs sont alléEs jusqu'à
refuser de soutenir des prisonnierEs politiques / prisonnierEs
de guerre à cause de désaccords avec nos tactiques, ou avec
les actions pour lesquelles nous sommes condamnéEs.
Ces désaccords sont d'ordre tactique et ne doivent pas occulter
le fait qu'on se bat touTEs pour la justice et le changement social.
Ce refus de soutenir les prisonnierEs politiques et prisonnierEs de guerre crée
de fausses divisions entre nous, et dans les pires des cas cela va jusqu'à
aider l'État dans sa tentative de nous isoler de nos communautés et de nos mouvements politiques.
SUSA: Les gens qui ont commencé à militer à la fin des
années 80 et dans les années 90 doivent s'approprier la résistance
ayant existé dans les années 70 et 80.
Tant qu'on laissera l'Etat et les mass médias définir ce qui est important,
les véritables leçons de nos expériences et des expériences des autres seront perdues.
Personne n'a entendu parler de nous (sauf peut-être comme comme vague souvenir d'un titre de joumal)
parce que l'Etat a une stratégie contre-révolutionnaire: il veut enterrer
les révolutionnaires qu'il a réussi à envoyer en prison.
Ça fait six ans que je suis en prison et pour plus de la moitié de
cette période, j'ai été soit en isolement soit en isolement en petit groupe;
la plupart du temps, j'ai été à des milliers de kilomètres de ma communauté et ma famille.
Ceci n'est pas différent du sort des autres 100-150 prisonnierEs politiques aux États-Unis.
En s'attaquant aux individus, on veut détruire les différents mouvements d'où ils/elles viennent ( le mouvement des NoirEs, mouvement des Puerto RicainEs, des Premières Nations et des BlancHEs qui perçoivent la nécessité d'une résistance organisée face à la répression).
Q: Avez-vous fait ce dont vous êtes accusées?
Le gouvernement a-t-il menti à votre égard? Si oui, comment?
LAURA: Oui, je l'ai fait! J'ai combattu (et je combats toujours) le racisme, le
sexisme et l'impérialisme avec toutes les fibres de mon être queer, et je crois que
se battre pour a justice est un besoin.
La "version" du gouvernement de ce que j'ai fait est complètement fausse,
car ils appellent la résistance un crime.
Ça me fait penser à Jesse Helms nous traitant de "malade" -
c'est lui le malade! Côté moralité, il est nul.
L'Etat américain, un système génocidaire, désigne les actions issues de luttes
révolutionnaires comme de la "violence terroriste", et qualifie son système légal de "juste".
LINDA: Oui, je suis fière d'avoir participé à
la construction d'un mouvement clandestin de résistance
armée capable de se battre en soutien aux luttes de libération nationale,
et qui se battra pour la révolution aux États-Unis.
Bien sûr, le gouvernement a menti à notre égard, nous traitant de
"terroristes" pour faire peur à tout le monde, comme si notre but était de terroriser ou tuer les gens.
Au contraire: toutes les actions armées des vingt dernières années
ont été planifiées de manière à réduire tout risque d'atteinte à la vie humaine.
Évidemment, ceci n'est pas le cas des actions de cet Etat terroriste,
qui soutient des escadrons de la mort et des armées de mercenaires tels la
Contra à Nicaragua et l'UNITA de Savimbi en Angola, qui soutient le
génocide que l'État d' Israël mène contre les PalestinienNEs ainsi
que le système inhumain d'apartheid en Afrique du Sud, qui soutient
la violence policière quotidienne dans les communautés Noires et du Tiers Monde,
y inclus le bombardement aérien de la famille MOVE a Philadelphie en 1985,
au cours duquel 11 personnes ont été tuées et 250 autres laissées sans abri.
SUSAN: Je suis révolutionnaire depuis longtemps. C'est-à-dire que je crois
qu'on a besoin d'un changement social profond, allant jusqu'aux racines du problème.
Ce problème est inhérent au système. Donc, en collaboration avec d'autres personnes,
j'ai tenté de mener plusieurs formes de lutte pour poser une stratégie afin de gagner
notre libération et pour attaquer l'État qui représente ce système.
D'abord, j'ai agi en tant que militante pour la paix vers la fin des années 60,
ensuite comme militante politique dans les années 70, et enfin j'ai adhéré au mouvement clandestin de résistance armée qui s'est construit dans les années 80. Je suis coupable de résistance anti-impérialiste révolutionnaire.
Bien sûr le gouvernement a menti à mon égard, et à l'égard de nous toutes.
Son mensonge préféré était de dire que nous étions des terroristes, ce qui est complètement faux.
De la même façon que toute opposition à la guerre froide dans les années 50
était traitée de communiste, dans les années 80 nous nous sommes fait traiter de terroristes.
Maintenant on a des terroristes de toutes sortes, d'après les États-Unis- ce n'est que de la merde.
Je n'essaie pas d'esquiver la question.
Je crois qu'aucunE camarade révolutionnaire emprisonnéE ne va dire précisément
ce qu'il/elle a accompli ou non dans son travail révolutionnaire.
Q: Audre Lorde a dit qu'on ne peut pas
détruire la maison du maître (l'État)
avec les outils du maître (la violence). Qu'en dites-vous?
LAURA: Je crois que la violence ne se réduit pas à une seule chose, alors
je ne crois pas que c'est toujours "l'outil du maître."
Si les révolutionnaires étaient aussi méchants et se foutaient autant
de l'humanité et des vies innocentes que l'Etat américain, je serais d'accord
avec la condamnation de nos actes. Mais quand des personnes opprimées se battent
pour la liberté, en utilisant des moyens "violents" entre autres, je crois qu'on doit les soutenir.
Auriez-vous condamné des esclaves africainEs pour avoir tué leurs maîtres,
ou pour avoir lutté pour la liberté de manière violente? Pour moi, l'enjeu c'est comment se battre d'une façon efficace - et humaine - pour la libération.
En luttant, on a besoin d'être très critiques envers nous-mêmes.
Nous
devons être très conscientEs de nos façons de lutter ainsi que des raisons pour
lesquelles on lutte. Mais je crois aussi qu'on a besoin de lutter pour vaincre -
et cela veut dire lutter pour le pouvoir.
Au cours des cinq dernières années, j'ai été témoin d'une violence en gros plan,
la violence lente, brutale, sans pitié qu' est le génocide mené contre les femmes Noires.
Refuser de se battre contre cela (et je ne crois pas qu'on peut se battre
pour le pouvoir seulement par des moyens "non-violents"), selon moi, ça
serait accepter la violence de l'État sous le couvert de rejeter la violence
de la lutte révolutionnaire.
LINDA: Je ne vois pas les choses de la façon qu'Audre Lorde (ou
de la façon dont la question se pose). Je ne crois pas que c'est une question
de violence, mais de politique et de pouvoir.
À travers le monde, l'impérialisme se maintient au pouvoir grâce à sa
force militaire et grâce à la menace de la violence partout où les peuples
luttent pour changer le monde.
Les mouvements de libération ont le droit
d'utiliser tous les moyens disponibles pour abattre ce système qui opprime et tue.
Ça veut dire se défendre, et ça veut aussi dire mener une lutte offensive pour le pouvoir populaire
et l'autodétermination.
Mais en réduisant tout cela à une question tactique de "violence"
on occulte tous les autres aspects de la construction d'un mouvement
révolutionnaire, des choses qui sont nécessaires pour mobiliser les gens,
comme: la mise sur pied d'organisations populaires; la participation
au pouvoir des groupes opprimés (tels les femmes et les autochtones) à
l'intérieur des mouvements populaires, la construction d'un programme
révolutionnaire qui soit vraiment en mesure de combler les attentes des
gens et de les motiver le monde dans leur lutte.
Comme le dit un slogan de la révolution chinoise qui résume tout ceci:
"Il n'y a pas de révolution sans lutte de masses.
Il n'y a pas de victoire sans lutte armée."
SUSAN: J'ai toujours fait une interprétation complètement
différente de cette citation de Audre Lorde. Amusant, non?
J'ai toujours compris qu'elle faisait référence à l'électoralisme et au
changement graduel quand elle parlait des outils du maître.
Q: Pourquoi est-il important de soutenir les prisonnierEs
politiques quand on pourrait aussi soutenir les prisonnierEs
non-politiques? Ne doit-on pas s'occuper de touTEs les prisonnierEs?
LAURA: Je crois qu'on doit s'occuper de touTEs les prisonnierEs,
et je ne pense pas que c'est nous les prisonnierEs politiques qui avons mis en
avant l'idée d'une contradiction profonde entre les prisonnierEs
politiques et non-politiques aux États-Unis.
Cependant, je crois que les mouvements progressistes ont un intérêt
particulier à défendre les prisonnierEs politiques, puisque cela
fait partie de la lutte pour la survie des mouvements dont nous sommes issuEs.
Si vous combattez le racisme et l'homophobie et qu'il y a des gens condamnés à
de longues peines de prison pour avoir mené ce combat, je crois que vous faites
avancer ces luttes en soutenant ces prisonnierEs.
Je crois aussi qu'en soutenant les prisonnierEs politiques
on révèle davantage le caractère injuste et répressif du système.
Et, ce faisant, on peut soutenir touTEs les prisonnierEs.
Soutenir des prisonnierEs politiques c'est résister au contrôle que
l'Etat fait peser sur nos esprits. C'est combattre les plans étatiques
visant à nous isoler et à nous bâillonner.
C'est une façon de dire qu'on a raison de résister.
Et par expérience, je peux dire que c'est une très bonne façon
de conscientiser les gens du dehors quant aux véritables véritables
buts et au caractère pernicieux du système carcéral.
LINDA: Oui, je crois que c'est important pour notre mouvement de s'occuper de
touTEs les prisonnierEs, surtout pour le mouvement des gais et lesbiennes.
Il s'agit aussi de s'opposer aux attaques menées contre les prisonnierE gais et
lesbiennes et de soutenir touTEs les prisonnierEs atteintEs du Sida.
À cause du rôle répressif du système carcéral, soutenir touTEs les prisonnierEs
est une façon de combattre le racisme, car la plupart des prisonnierEs sont issuEs
des communautés du tiers-monde.
Les prisonnier-Es sont enferméEs au loin: loin des yeux, loin du coeur.
Le peu de droits qu'on avait gagnés à travers les luttes pour les prisonnierEs
sont en train d'être minés sinon abolis. Les prisonnierEs sont enferméEs, puis oubliéEs.
Il n'y a pas de droits humains en prison, et tant que les communautés ne s'impliqueront pas,
l'Etat accentuera ses politiques répressives et les conditions de vie empireront.
C'est surtout le cas pour les prisonnierEs séropositifVEs, puisque
d'habitude la paranoïa autour du VIH est encore plus forte en prison que
dans le reste de la société. Parce que les soins médicaux sont si affreux et
les conditions de vie si horribles que les prisonnierEs malades du Sida
meurent plus vite que les les non-prisonnierEs.
Je ne dirai donc jamais qu'on doit soutenir les prisonnierEs politiques
au détriment des prisonnierEs non-politiques. Derrière les barreaux,
nos intérêts ne sont certainement pas en contradiction.
TouTEs les prisonnierEs politiques et prisonnierEs de guerre se batten
t pour les droits de touTEs les prisonnierEs, ainsi que pour des améliorations
des conditions qui seront bénéfiques à l'ensemble des prisonnierEs.
Mais c'est aussi important de soutenir spécifiquement les prisonnierEs
politiques parce que nous représentons nos mouvements, et nous soutenir
est donc une façon de les protéger et les défendre face la répression étatique.
Pour le mouvement, nous soutenir c'est sauvegarder notre participation et nos contributions et contrarier les plans étatiques visant à nous isoler, nous réprimer et détruire notre identité politique.
SUSAN: Toute personne en prison a besoin de façon
urgente d'être soutenue, et tant que la population carcérale augmentera et
que la répression s'intensifiera, les prisons resteront des lieux
de confrontation sociale.
Pour que les prisons deviennent un front de la lutte sociale,
il faut bâtir une mentalité de combat contre la déshumanisation et la
criminalisation qui sont les buts du système carcéral.
C'est important de soutenir les prisonnierEs politiques parce qu'on est en prison
pour avoir lutté pour des buts explicitement sociaux/ politiques / progressistes.
Nous priver de liberté n'est pas sans conséquence pour votre liberté.
Si on peut violer nos droits, alors on peut violer les vôtres.
Il n'y a aucune contradiction entre les prisonnierEs politiques et sociaux.
Q: Le fait d'être lesbienne joue quel rôle dans votre travail?
LAURA: Ça joue le même rôle que ça joue dans ma vie -
c'est une partie fondamentale de moi, de la façon dont je vois les choses,
c'est une partie de ma personnalité.
Parce que je suis lesbienne, le combat contre l'homophobie
et le sexisme a une importance particulière pour moi.
Le fait que je sois lesbienne m'amène à m'inquiéter davantage
de l'oppression subie par les autres qui vivent sous l'impérialisme.
Donc, je pense que parce que je suis lesbienne je suis une meilleure anti-impérialiste-
ça fait que je me bats plus fort.
C'est très difficile d'être lesbienne en prison, mais le fait de m'être
affichée me donne beaucoup de force. J'avoue que je suis très fière
chaque fois que je lis quelque chose au sujet des luttes menées par les queers en dehors des murs.
LINDA: Être lesbienne a toujours été une partie importante
des raisons pour lesquelles je suis devenue révolutionnaire -
même avant que je sache à quel point c'était important pour moi!
Je ne sépare pas mon identité lesbienne des autres parties de ma vie,
y compris ma vie politique. Parce que je vis l'oppression en
tant que lesbienne et en tant que femme, je suis résolue à
gagner la libération pour les femmes, pour des lesbiennes,
pour toute personne vivant l'oppression.
Ça fait que je suis d'autant plus prête à courir des risques et à
me battre, car j'ai une vision de la société dans laquelle je
veux vivre, de la société que je veux pour les générations futures:
une société où ces oppressions n'existeront plus.
Je crois que le fait d'être lesbienne m'a beaucoup aidé à reconnaître
l'importance de la solidarité et de l'aide mutuelle entre les
différentes luttes des oppriméEs, malgré le sexisme,
l'hétérosexisme et le racisme qui, trop souvent, nuisent à de telles alliances.
Je crois vraiment qu'on a un ennemi commun, c'est-à-dire le système impérialiste, et
qu'on a besoin de se soutenir les unEs les autres dans toutes les différentes formes
de lutte qu'on mène contre cet ennemi.
Il faut bâtir nos alliances de telle façon que l'on en arrive à respecter l'intégrité
de nos différents mouvements.
SUSAN: Eh bien, le fait d'être lesbienne, je le porte profondément en moi,
je ne peux pas le séparer du reste de mon être - donc pour moi la question
n'est pas quel rôle cela joue dans mon travail mais plutôt à quel point je suis ouvertement
lesbienne en prison et dans mon travail de résistance. Ça dépend des circonstances.
Récemment je me suis affichée, car dans la situation actuelle
j'ai choisi de m'identifier davantage comme lesbienne.
Ce choix résulte en partie de ma conviction qu'en tant que personnes
gaies on a besoin de perspectives et de stratégies plus révolutionnaires
si on veut que notre mouvement parvienne à relier la destruction de
l'oppression sexuelle et des autres formes d'oppression.
L'autre raison pour laquelle je me sens obligée de ne pas cacher
ma sexualité est que les femmes les plus importantes et les plus
solides dans la communauté prisonnière ici sont les lesbiennes butch.
Ce sont les butches qui souffrent le plus pour leurs choix /
existences en prison. Ça me semblait être le seul choix correct -
pour Pete, Cowboy, Juju, Slimie et toutes les autres soeurs.
Pour terminer, le fait que Laura et Linda se soient affichées comme
lesbiennes dès le début du Resistance Conspiracy Case a été une
épreuve importante pour elles, puis pour nous toutes, à la fois
personnelle et politique.
À travers leurs luttes, elles ont créé un contexte
d'amour et de solidarité dans lequel j'ai pu m'afficher comme lesbienne moi aussi.
Q: Comment avez-vous lutté contre le sexisme
et l'hétérosexisme dans les groupes avec lesquels vous avez travaillé?
LAURA: Surtout en dénonçant ces attitudes lorsque je trouvais
que quelqu'un agissait de façon sexiste ou hétérosexiste, et en me battant
pour que la libération des femmes et des gais et lesbiennes soient comprises,
pas seulement sur le papier mais aussi en tant que buts réels.
Les moments les plus tristes pour moi ont été quand les groupes avec lesquels
je militais ne le faisaient pas. Je crois que c'est très important de pouvoir
lutter pour plusieurs choses sans créer une hiérarchie ou une liste exclusive de priorités.
J'entends maintenir ma participation dans des groupes dont l'objectif
est, pour ne donner que des exemples, l'antiracisme ou le soutien à la
Palestine ou à Puerto Rico, parce que ces choses font autant partie
de ma libération que les luttes pour la libération des femmes et des lesbiennes.
Et je ne vais pas exiger que ma libération fasse toujours partie du programme.
Mais je ne nierai jamais mon identité et mon droit au respect.
Non plus que l'aspect urgent et totalement légitime des luttes de libération lesbiennes, gaies et des femmes.
SUSAN: Ces dernières années, je suis devenue de plus en plus féministe.
C'est-à-dire que je crois qu'au niveau idéologique et potitique on se doit
de porter attention à la position des femmes, aux structures sociales et à la
façon dont la domination masculine définit la place des femmes.
Je ne crois pas que dans le passé je me sois assez battue contre
l'assujettissement des femmes et des personnes gaies.
J'ai subordonné ma condition de femme indépendante au besoin
de lutter contre des formes politiques et sociales d'oppression.
Par exemple: en ce moment, au Nicaragua, les militantes du FSLN
font un bilan de leurs pratiques dans la lutte anti-sexiste,
et certaines d'entre elles se sont auto-critiquées pour avoir
subordonné la lutte des femmes au "bien commun plus important".
Ce que ça donne finalement, c'est que dans la nouvelle
société non-révolutionnaire on retourne en arrière,
avec des nouvelles restrictions sur l'accès à l'avortement
et les contraceptifs, et il n'y a pas encore assez de
conscience politique chez les femmes pour surmonter cela.
Je pense que subordonner la lutte des femmes et des personnes gaies c'est une grave erreur.
Q: Quel lien faites-vous entre le mouvement pour les droits des gais
et lesbiennes, qui est surtout composé de blancHEs issues de la classe moyenne,
et les luttes des autres personnes oppriméEs?
Comment notre mouvement peut-il inclure ces autres luttes?
LAURA: Je crois que si on ne rejoint pas les autres oppriméEs, le mouvement
surtout composé de blancHEs issuEs de la classe moyenne risque de n'avoir aucun
rapport avec le vrai changement de la société.
Ce pays a une longue histoire de récupération des révoltes de privilégiés.
Une fois ces révoltes récupérées, les choses ne restent pas comme avant mais empirent.
Mieux : à mon avis, on ne peut pas être entièrement humain si on ne se bat
pas pour toutes et tous les oppriméEs. Sinon, notre lutte reste aussi
individualiste et raciste que les rapports sociaux actuels.
Dans ces conditions, ça ne vaudrait même pas la peine de lutter.
A mon avis, le mouvement queer doit de communiquer avec les autres
mouvements et communautés, pour trouver des stratégies communes et
pour créer des moyens de s'entraider.
Je crois qu'il faut qu'on communique avec des groupes de
luttes de libération nationale avant d'établir notre programme et stratégies -
par exemple, quelles sont les revendications qu'on peut formuler dans notre
lutte contre le Sida susceptibles d'aider les autres communautés qui luttent contre le Sida?
C'est difficile, mais c'est nécessaire.
C'est vrai que notre mouvement a déjà tiré des leçons de ce qu'ont vécu les autres mouvements -
souvent sans même le savoir ou le reconnaître.
Surtout en ce qui concerne les stratégies et les concepts développés
(à quel prix!) par la lutte de libération noire.
Ce n'est pas par hasard que ceux et celles qui ont pris la direction de Stonewall
étaient des gais et lesbiennes du tiers monde. Donc, je crois qu'il faut
reconnaître qu'on n'a pas besoin "d'inclure" les autres, mais plutôt de
lutter à leurs côtés, d'apprendre d'eux/elles, de s'allier avec eux/elles.
Il faut qu'on les soutienne.
Et il faut qu'on se batte pour eux/elles,
parce qu'au moment où on aura accepté les divisions ou ignoré la nécessité du combat
antiraciste, à ce moment-là on aura perdu.
LINDA: Je ne pense pas qu'on puisse attendre pour combattre le sexisme,
l'homophobie ou le racisme, parce que ces oppressions/discriminations entravent
ou même démobilisent des personnes puis des groupes qui pourraient participer à la lutte.
Si on ne veut pas reproduire la même oppression qui nous écoeure tant, on
ne peut pas tolérer le racisme, le sexisme ou l'hétérosexisme dans notre mouvement
ou chez nos alliéEs.
Bien sûr, c'est diffcile et ça prend du temps de développer
des dynamiques vraiment différentes de celles qu'on trouve dans la société établie.
Donc, je ne crois pas que les mouvements gais / lesbiennes puissent, ni doivent,
"inclure" d'autres luttes. Des gais et lesbiennes blancHEs et de classe moyenne ne
sont pas à même de déterminer les exigences des autres mouvements et communautés.
Je pense plutôt qu'en soutenant les luttes contre les autres formes d'oppression
ce mouvement peut devenir plus fort, plus révolutionnaire, et moins égoïste s'il
soutient davantage la libération et l'autodétermination de tout oppriméE.
SUSAN: C'est une question complexe. Je ne peux offrir qu'une tentative de
réponse, car je crois que les prisonnierEs qui, à cause de leur condition de prisonnierE
n'ont jamais participé à un mouvement, ont une compréhension limitée des dynamiques des
mouvements dans le monde extérieur. Le mouvement gay tel qu'il existe aujourd'hui
est réapparu alors que j'étais déjà en prison, donc je n'ai pas participé à son développement.
Sans pratique basée sur une analyse anti-impérialiste des origines de l'oppression des gaiEs,
je pense que le mouvement gay est voué à être
déconnecté des autres oppriméEs.
Autrement dit, un mouvement qui est
dirigé par des hommes blancs de classe moyenne - même s'ils sont opprimés à cause
de leur identité / orientation sexuelle - et qui ne partage pas le pouvoir avec
les hommes et femmes du tiers monde, qui ne fait pas sien leurs exigences, ne peut
pas être autre chose que réformiste.
Lutter pour les droits des gaiEs à l'exclusion des droits humains et démocratiques
de touTEs ceux et celles qui sont oppriméEs, surtout ceux et celles qui souffrent
de l'oppression nationale, ça donne des luttes diviséEs au lieu d'une opposition radicale unifiée.
Q: Qu'est-ce qui vous a amené à participer à la lutte armée?
LAURA: J'ai commencé à soutenir la lutte armée dans les années soixante,
quand je me suis rendue compte que, si on le laissait faire, l'Etat continuerait à
tuer des gens du tiers monde. Le meurtre de Fred Hampton (cadre du Black
Panther Party en Illinois) par les porcs de Chicago en collaboration avec
le FBI m'avait bouleversée, pas seulement parce que c'était un attentat,
pas seulement parce qu'ils essayaient de couvrir ce qu'ils avaient fait,
mais parce que ça m'a fait comprendre que les États-Unis n'allaient jamais
reconnaître les droits humains des nations opprimées.
C'est pour ça que le gouvernement était obligé de tuer Fred [Hampton],
Malcolm X puis tant d'autres dirigeants.
Je haïssais déjà l'Etat depuis des années, mais ce fut en
soutenant les luttes des vietnamienNEs, des premières nations,
des noirEs et des Puerto RicainEs, que j'ai compris que ces
nations luttaient pour leur liberté, et que ces luttes avaient un côté armé.
Je voyais que c'était ainsi qu'on pouvait combattre et espérer vaincre.
Dès que j'ai commencé à soutenir le droit des nations du tiers monde
à utiliser la lutte armée pour défendre leur droit à l'autodétermination,
j'ai pris conscience que moi aussi je devais être prête à utiliser
différentes formes de lutte dans les combats qui étaient les miens.
Je pense que c'est surtout grâce à la vision que j'ai d'un monde juste,
humain et créatif, et de la merveille que cela serait d'y vivre
un jour, que je me suis sentie poussée à accepter la lutte
armée comme un élément nécessaire de la bataille pour une société nouvelle.
LINDA: Au début de mon militantisme, j'étais une pacifiste. Dans ma vie, je
n'avais jamais vécu de vraie violence et, naïve que j'étais, j'espérais
que les changements que je préconisais pourraient s'obtenir sans violence.
Puis là, à ma première grande manifestation, la police m'avait matraquée
et avait lancé des gaz lacrymogènes dans la foule.
J'étais donc confrontée
au fait que ce système conserve son pouvoir en utilisant la violence à tous
les niveaux: la brutalité envers des manifestantEs, le génocide
contre des colonies internes, les guerres contre des colonies à l'étranger,
la guerre contre le peuple vietnamien.
J'étais devenue une militante à une époque qui
était caractérisée par des victoires et par le
développement des luttes de libération nationale partout dans le monde, y compris à
l'intérieur des États-Unis.
Le peuple vietnamien et les NoirEs qui luttaient pour
leur libération m'ont beaucoup inspirés.
Mes modèles étaient
les combattantes vietnamiennes et les femmes dans le mouvement de libération des NoirEs,
parce qu'elles étaient engagées dans le combat jusqu'à la victoire.
J'étais inspirée par leur courage, par leur engagement, par leur
volonté de prendre toutes sortes de risques dans la lutte pour leur
liberté et par le fait qu'à travers la lutte elles s'étaient émancipées.
Alors, en soutenant ces luttes de libération nationales, j'en suis venue à soutenir
le droit des peuples opprimés à se battre pour leur libération par tous les moyens.
Malcolm X, Che Guevara et Ho Chi Minh m'ont beaucoup influencée.
Mais ce qui m'avait poussée à participer dans la lutte armée c'était la colère que je
ressentais suite aux descentes policières contre les maisons et bureaux du Black Panther
Party à travers les États-Unis, surtout le meurtre de Fred Hampton et Mark Clark
par la police de Chicago.
Dans tant de villes, il y avait un tel niveau de terrorisme policier contre la communauté
noire que ça m'a fait comprendre que dès qu'un mouvement commence à menacer la
stabilité du statu quo, l'État fait tout son possible pour le détruire.
Dans ces conditions, pour qu'un mouvement et une perspective révolutionnaire puissent survivre,
il fallait que nous nous défendions les unEs et les autres.
Nous devions nous préparer à affronter pour de vrai le pouvoir répressif de l'État,
pour qu'un jour on puisse le lui enlever.
Ce pouvoir de l'État, de ceux/celles qui l'utilisent pour opprimer, rendons-le au peuple.
Je sais que ceci peut sembler très idéaliste, mais c'est une lutte qui a été victorieuse
dans plusieurs pays du monde.
Je croyais (et je crois toujours!) que l'impérialisme américain était
l'ennemi principal de toutes les peuples du monde, et
je voulais me battre au côté des oppriméEs afin de construire
un monde meilleur pour tous et toutes.
C'était à l'époque où Che Guevara lançait son appel à faire
naître "deux, trois, plusieurs Vietnams", et je savais
que le gouvernement des États-Unis comptait sur la
tranquillité de sa population pour pouvoir intervenir à travers le monde.
C'est une des raisons pour lesquelles la lutte
pour la libération des noirEs, et celle des blancHEs
solidaires des luttes de libération nationale, étaient
considérées comme une grande menace.
C'est en partie la raison pour
laquelle la répression dirigée contre ces mouvements était si brutale et si
efficace, c'est pourquoi l'État a fait autant d'efforts pour diviser
les militantEs blancHEs dans ces luttes.
SUSAN: C'était surtout la guerre que le FBI et le gouvernement
américain menaient contre le mouvement de libération des noirEs qui m'a fait
voir la nécessité de l'autodéfense.
Le défi posé à ceux et celles d'entre nous qui étaient solidaires avec les
organisations nationalistes noires révolutionnaires était de soutenir
l'autodétermination et de se battre à leurs côtés.
L'autre aspect qui m'avait poussée à me joindre au mouvement
clandestin de résistance aimée était la considération du génocide
qu'a été la guerre chimique contre le peuple noir et Puerto Ricain
dans le quartier South Bronx à New York. En tant que travailleuse
en santé communautaire et qu'acupunctrice, j'ai été témoin de notre
incapacité àcontrer cette peste.
Q: Que faites-vous de votre temps?
LAURA: Je passe mes journées à me battre pour des meilleures conditions de
vie, contre le système carcéral qui nous opprime (un besoin quotidien!),
à faire mon travail légal et politique, à communiquer avec le monde extérieur
par téléphone et par lettre, à causer avec les autres prisonnières (et à travailler
avec elles pour faire face aux questions légales, de santé, etc.), à me réunir avec
mes coaccuséEs, à m'informer du sort d'Alan (il se bat, enchaîné à son lit
dans l'unité d'oncologie de l'hôpital général de Washington DC, contre un
cancer potentiellement mortel).
Je passe beaucoup de temps à parler avec les détenues du problème du Sida -
d'après une estimation, entre 40% et 50% des femmes ici sont séropositives, or
il n'y a aucun programme, aucun travail d'éducation, aucun soutien affectif pour ces femmes.
Comme mes autres camarades, je passe beaucoup de temps à éduquer et à aider ces femmes.
LINDA: Je travaille et j'essaie de me maintenir en forme.
SUSAN: Comme je suis acupunctrice et consciencieuse, je suis devenue militante /
conseillère sur le Sida. Ceci n'est pas reconnu par la prison, mais je passe
les trois quarts de mon temps à conseiller des femmes qui sont séropositives.
Le reste du temps je fais mes autres travaux, puis je parle aux autres.
On passe beaucoup de temps enfermées dans nos cellules.
À cause de la surpopulation et du manque de programmes, la direction nous tient
enfermées pendant de longues périodes.
Q: Comment vous y prenez-vous avec
les privilèges raciaux que vous avez en tant que personnes blanches?
LAURA: J'essaie de rester alerte et consciente de ce fait; je me bats
contre le racisme et je prépare le terrain pour ce combat;
j'essaie de partager mes connaissances avec les autres.
Faire de l'éducation sur le Sida est une voie, parce que le mouvement gai
et lesbien a des connaissances qui
font cruellement défaut aux autres détenues - et ce manque d'information
fait que des femmes continuent à contracter le VIH à tous les jours. C'est un crime.
LINDA: J'essaie de faire partager les ressources et les connaissances auxquelles
j'ai eu accès à cause de la couleur de ma peau aux autres prisonnières avec qui je vis.
Je mets mes connaissances au service de nos intérêts.
Ceci prend plusieurs formes: lutter en tant que prisonnière pour des
programmes d'éducation et de soutien au sujet du Sida, aider les femmes qui ont des problèmes
juridiques, faire pression pour que leurs droits soient respectés.
Quand j'étais incarcérée en Louisiane, on a pu gagner un procès intenté par une prisonnière.
Nous voulions obliger la prison à donner des lunettes et de fausses
dents aux femmes (tout ce que les dentistes de prison font c'est
enlever les dents, et la plupart des prisons ne les remplacent pas).
Un des conflits auquel je fais face est celui qui oppose d'un côté les
besoins immédiats et les crises dont je suis témoin en tant
que conseillère / militante / revendicatrice, et d'un autre côté la nécessité de toujours pousser
la prison à nous donner les services et programmes auxquels on a droit (l'éducation, les soins
médicaux, activités physiques, des conseils de santé médicale et en matière de Sida).
SUSAN: Eh bien je lutte contre le racisme avec tous les moyens à ma disposition.
J'ai appris à être patiente, à me taire, à vraiment écouter la personne qui
me parle, et à porter attention à ce qu'elle dit.
Q: Quelles observations ou quels conseils avez-vous à donner
aux militantEs gais, lesbiennes,
aux militants contre le Sida,
alors qu'on commence à faire face à la surveillance, au harcèlement et aux abus policiers?
LAURA: Résistez. Ne reculez pas.
Créez des moyens de fonctionner clandestinement pour éviter
que l'État ne sache tout que vous faites.
Soyez solidaires, pour que lorsque l'unE d'entre vous soit cibléE par
l'État, elle/il ait des moyens de résister - et
sa résistance nous aidera touTEs.
Ne donnez jamais d'information à l'Etat -même lorsque vous croyez qu'il s'agit de broutilles.
Quand l'État tente de vous diviser en désignant certains groupes comme "légitimes" et
d'autres comme "non-légitimes", ne vous laissez pas faire: résistez-y! Notre force réside dans l'unité.
Soutenez les autres mouvements et individus qui sont aussi pointéEs du doigt par l'État.
Quand l'État traite quelqu'un de "terroriste", "violent", "fou", ou autre, pensez-y avant
d'y croire. Résistez. Résistez. Résistez.
LINDA: Restez calme. Développez une conscience de clandestinité.
Ayez assez de respect de votre travail pour ne pas vous confier à l'ennemi
(par exemple, en utilisant des téléphones qui pourraient être mis sur écoute).
Ne sous-estimez pas le pouvoir ni la cruauté de l'État, et ne croyez pas que les
privilèges que vous avez en tant que personnes blanches vous protégeront de la répression.
Prenez conscience des leçons à tirer de la répression dont d'autres groupes ont déjà souffert -
non pas pour vous faire peur ni pour vous démobiliser, mais plutôt pour vous donner
les moyens de vous protéger et de défendre vos projets.
Il faut se rappeler que nous travaillons pour l'avenir, pas seulement pour le présent.
II faut toujours essayer d'élargir notre perspective. Sachez que les réformes ne sont rien que des concessions temporaires, elles ne sont pas permanentes et elles ne résolvent pas les problèmes de fond.
SUSAN: Étudiez les autres mouvements d'ici et de part le monde, examinez les méthodes que
l'État utilise, pour trouver des tactiques avec lesquelles vous pouvez continuer à fonctionner.
C'est très important si on essaie de bâtir un
mouvement, de savoir que dès qu'il devient menaçant pour l'État, celui-ci tente de le détruire.
Q: Quel est votre position au sujet des danseuses dans les bars pour femmes?
LAURA: Amène-moi dans un bar et on aura une discussion amusante à ce sujet, d'accord?
LINDA: Amène-moi à un bar et je te le dirai!
SUSAN: Je crois que tout ce qui traite les femme en objets sexuels
(et non pas comme des êtres sexuels) est anti-femme.
Même dans un environnement sans hommes.
Être lesbienne est subversif parce que, pour une femme,
aimer une autre femme est un crime contre l'État,
contre la moralité bourgeoise et patriarcale de cette société -
mais tout ce qui est subversif n'est pas libérateur.
Même si je n'ai appris rien d'autre, j'ai appris
que la libération commence avec soi-même - l'objectification /
les stéréotypes sexuels / la misogynie ne nous détruisent pas seulement dans la société,
ils détruisent nos propres coeurs. Je n'ai aucun désir de vivre
dans une société qui fait la promotion de telles choses.
Cela dit, je crois que c'est à nous seules d'en finir avec le patriarcat -
il ne peut pas être aboli par les lois de l'État.
|
|