Cellules Communistes
Combattantes
La
flèche et la cible
2. La
plupart des documents de votre organisation traitent danalyses
historiques, de questions stratégiques, etc., mais évoquent
très rarement et très vaguement un projet concret
de société auquel les travailleurs pourraient se
rallier.
Pouvez-vous
combler cette lacune en présentant la construction du
socialisme telle que vous la concevez précisément?
Quand nous nous
référons au socialisme ou, en finalité,
au Communisme, notre objet na rien à voir avec un
eldorado aussi idyllique quindéfini mais satisfaisant
quelque révolte existentielle ou éthique face à
la barbarie oppressive et destructrice de limpérialisme.
Nous nous référons
précisément à un projet très réaliste
dorganisation économique et sociale libératrice
rendue accessible et inévitable par la maturité
contradictoire des forces productives.
Le socialisme est
le produit dialectique historique du capitalisme, il est létape
dabandon de la logique marchande et de destruction irréversible
de la société de classe.
Le Communisme est
laboutisse­ment naturel du socialisme: la société
sans classe et sans Etat, libérée par labondance
des contingences originelles de la production matérielle
et offrant à lhumanité toute entière
le cadre nécessaire à lépanouissement
de tous les traits de son génie: des relations sociales
fraternelles, la maîtrise consciente du présent
et de lavenir, la connaissance, le progrès scientifique,
la création artistique, etc.
Seuls les idéalistes
pensent que «lesprit de la lutte» pourrait
suffire à animer la lutte.
Lengagement
et la lutte révolutionnaires sont certes créateurs
de richesses morales personnelles et collectives, ils constituent
un acte et un espace de libération, déquilibre,
de dignité et de bonheur dans la mesure où anticipant
concrètement leur objectif, ils en matérialisent
les prémices.
Mais ni lexposé
de lesprit ou des satisfactions de la lutte, ni dailleurs
celui du principe libérateur du socialisme ne peuvent
remplacer la présentation, même sommaire, du programme
de la révolution socialiste et de la dictature du prolétariat,
tel que nous pouvons le définir aujourdhui et autour
duquel nous entendons mobiliser le monde du Travail.
Le propre dun
programme concret est de correspondre à une situation
déterminée, cest-à-dire den
maîtriser pleinement les possibilités comme les
nécessités, ce qui nest bien sûr accessible
quà partir du moment où cette situation est
nettement perceptible.
Or les marxistes
ne peuvent pas plus que personne prédire quelle sera la
situation exacte dont le prolétariat héritera lorsquil
arrivera au pouvoir.
La révolution
triomphera-t-elle partout en Europe ou faudra-t-il poursuivre
la guerre révolution­naire après une victoire
locale?
Quelle intensité
et quelle durée connaîtra la guerre civile?
Comment et avec
quelle vigueur se manifestera la contre-révolution?
Lappareil
productif aura-t-il été préservé
durant toute la période insurrectionnelle ou sera-t-il
complètement ravagé? Quelle sera la situation internationale?
Etc.
On pourrait ainsi
multiplier quasi à linfini les questions aujourdhui
sans réponse, mais qui seront pourtant déterminantes
pour lorganisation du pouvoir révolutionnaire. Voilà
pourquoi le programme de la révolution socialiste tient
aujourdhui dans des principes de fond, des axes généraux
révélés par lexpérience historique,
des tendances et des orientations qui présideront nécessairement
à lorganisation et à lactivité
du pouvoir socialiste.
Avant den
venir à la présentation du programme proprement
dit, nous voulons encore faire un com­mentaire qui nous semble
important.
Souvent, lors des
discussions publiques au cours desquelles est évoqué
ce programme, beaucoup se montrent scep­tiques, le tiennent
pour utopique et irréalisable, et ils étayent leur
point de vue en soulignant les traits dominants de la conscience
sociale aujourdhui (égoïsme, individualisme,
etc).
Ce faisant, ces
per­sonnes commettent une erreur danalyse: elles opposent
létat actuel de la conscience sociale à un
projet social correspondant à une étape future
du développement de la société, précisément
à létape de la révolution socialiste.
Elles ignorent ainsi
tout le mouvement évolutif, touchant la conscience comme
le reste, qui sépare la situation actuelle de lépoque
où lapplication du programme socialiste sera à
lordre du jour.
On doit garder à
lesprit que lapplication du programme de la révolution
sociale aura lieu suite à une longue lutte de classe,
une lutte dans laquelle se seront progressivement engagées
des couches de plus en plus larges du prolétariat, une
lutte matérialisant le progrès de la conscience
de classe et donc lévolution de la conscience sociale
vers les principes socialistes et les objectifs pro­létariens.
En bref, cela signifie
que quand il sagira réellement dappliquer
le programme dédification socialiste, on en sera
nécessairement arrivé à un moment où
les forces vives du pays lauront fait leur et seront déterminées
à le réaliser jusquau bout.
Sans quoi la question
de lapplication ne se poserait même pas: la révolution
naurait pu triompher. La révolution ne se réduit
pas à un hasardeux change­ment de régime ou
à une gratuite - mais brutale -passation de pouvoir: elle
correspond à une transfor­mation du rapport de force
entre les classes, elle répond à une modification
du rapport social dans son ensemble (y compris dans le domaine
idéologique), elle constitue le couronnement de la lutte
révolutionnaire où a été forgée,
acquise et développée une conscience nouvelle.
La raison essentielle
du programme socialiste est clairement définie. Il sagit
de bâtir un système social gérant la production
de façon rationnelle pour un double objectif: optimaliser
les capacités exis­tantes dans le sens de la satisfaction
des besoins matériels de tous et de chacun et toujours
plus libérer les hommes et les femmes de la contrainte
de cette activité aliénante.
A lopposé
de lanarchie du système capitaliste basé
sur la propriété privée, le marché,
la concurrence, le gaspillage et les multiples autres tares quimpose
la recherche du profit pour le profit, le système socialiste
ordonne le travail social à partir de la propriété
collective des moyens de production, garantit leur développement
qualitatif et quantitatif dans le but dassurer un progrès
constant des conditions dexistence de la population selon
les principes de travailler tous, travailler à une fin
socialement utile, travailler moins.
Le socialisme est
lorganisation de la production et létablissement
du rapport social par lesquels les hommes et les femmes construisent,
exercent et développent pour la première fois un
pouvoir collectif sur leur réalité et leur devenir
communs.
Survolons les principaux
axes du programme dédification socialiste que lon
peut dès à présent concevoir de façon
schématique pour la phase de dictature du prolétariat
- première étape du socialisme dans notre pays.
- Saisie (sans la
moindre indemnisation) et collectivisation à travers létatisation
de toutes les entreprises industrielles et commerciales exploitant
le travail salarié.
Regroupement de
ces structures en cartels (intégration horizontale) et
en combinats (intégration verticale); réactivation
de la production, développement des capacités et
orientation des activités selon les directives du Plan.
Maintien de lencadrement
et de la maîtrise techniquement nécessaires (mais
dépossédés de leurs privilèges) pour
assurer le bon fonctionnement de loutil en conformité
avec les directives du Plan, et cela sous le contrôle absolu
des comités de base ouvriers et employés.
Création
dun ministère du Plan dont la tâche est de
faire coïncider harmonieusement, dans une dynamique de progrès
et de développement, les capacités de production
et les besoins de la société tels quils seront
synthétisés par le Parti du prolétariat
et le gouvernement révolutionnaire sur base des aspirations
populaires exprimées à travers les structures sociales
adéquates (syndicats, comités de base des entreprises,
associations de consomma­teurs, dusagers, etc., ministères,
autorités locales, etc).
Le ministère
du Plan répartit rationnellement tant les ressources disponibles
(matières premières, énergie, produits semi-finis,
etc.) que les quotas de production à honorer dans chaque
branche et chaque entreprise.
- Saisie
(sans la moindre indemnisation) et collectivisation à
travers létatisation de toutes les richesses financières
capitalistes: saisie de lensemble des avoirs des banques,
holdings, sociétés dinvestissement, bureaux
de change, com­pagnies de crédit et dassurances,
etc. Fermeture de la Bourse.
Création
dune banque et dune caisse dépargne
dEtat.
Annulation de toutes
les dettes contractées par les entreprises, structures
et institutions du pays auprès de qui que ce soit (mais
remboursement de la petite épargne); annulation de toutes
les dettes contractées par des particuliers ou par des
pays du tiers-monde auprès des entreprises, structures
et institutions financières nationales (mais maintien
des dettes des capitalistes étrangers).
Saisie des grandes
fortunes.
- Salarisation
de toute lactivité laborieuse sous lorganisation
et le contrôle de lEtat; fixation des barêmes
à lintérieur dune marge ne pouvant
excéder lécart du simple au triple.
Limitation de lhéritage
aux valeurs dusage personnel ou familial.
Transfert de toute
la force de travail gaspillée aujourdhui dans des
activités parasitaires ou nui­sibles (automobile,
secteur financier, publicité, luxe, etc.) vers des secteurs
socialement utiles (production de biens nécessaires, enseignement,
services publics, etc.) ce qui, combiné à sa distribution
équi­table, permet une réduction formidable
du temps de travail. Réduction constante de la division
entre travail manuel et travail intellectuel.
- Nationalisation
du sol et centralisation des exploitations agricoles avec lindustrie
agro-alimentaire afin de constituer des combinats puissants et
modernes garantissant à tous une alimentation saine et
suffisante. Orientation et planification de lactivité
laborieuse dans le but de liquider à terme la division
entre la ville et la campagne (conditions de vie et de travail,
infrastructures sociales, culturelles, etc).
- Large
développement et gratuité progressive de tous les
services publics: santé, enseignement, culture, communications,
transports, etc.
Même chose
pour la distribution de leau, du gaz et de lélectricité.
Suppression de la
propriété locative: les maisons et appartements
appartiennent à ceux qui les habitent; instauration de
mesures permettant lattribution à chacun dun
logement décent et conforme aux besoins familiaux, de
travail, de santé, etc.
Attribution de la
gestion et de la protection du patrimoine immobilier aux autorités
locales sous le contrôle des comités de quartier.
Mise en chantier
de programmes de rénovation et de construction dans le
cadre dun urbanisme compris comme science de lharmonie
entre lhomme et son environnement. Restauration, extension
et perfectionnement dun réseau de transports en
commun (trains, trams, métro, bus, etc.) couvrant tout
le pays et permettant rapidement labandon du transport
automobile non utilitaire.
Et en règle
générale, prise en compte dans tous les domaines
(construction, transports, etc.) des impératifs de respect
de lenvironnement.
- Fusion
des divers réseaux denseignement en un seul placé
sous lautorité exclusive de lEtat; transformation
des programmes et des méthodes pédagogiques dans
le sens dun élargissement de lhorizon culturel,
de lépanouissement et de la responsabilisation sociale
selon les lumières de la science et les principes de la
morale communiste; ouverture de tout le système éducatif
à la réalité sociale et notamment à
la production. Vaste développement des structures et activités
culturelles pour tous et stimulation de la création aux
dépens de la consommation; abolition de la propriété
privée en matière de patrimoine et création
intellectuels et artistiques.
- Application
générale dune politique de santé basée
sur lhygiène et la salubrité du cadre de
vie, la prévention systématique et la responsabilisation
des personnes et des collectivités (réorganisation
en ce sens de la recherche scientifique et de la production pharmaceutique).
Développement de lactivité sportive comprise
comme méthode et expression dharmonie physique,
ludique et sociale (suppression du professionnalisme).
- Liquidation
de la monarchie et annulation de la constitution et du droit
bourgeois; instauration dune constitution et dune
législation socialistes fondées dans la reconnaissance
du travail socialement utile comme droit et devoir pour tous,
dans le droit des travailleurs à lintégrité
et à la dignité (cest-à-dire jouir
pleinement de leur existence hors de toute exploitation et oppression),
dans le droit pour tous à la santé, à léducation,
à la culture, etc.
Constitution et
législation fondées aussi dans la reconnaissance
du Parti du prolétariat comme guide dans le processus
historique libérateur de construction du socialisme et
de marche vers le Communisme. Suppression du système parlementaire
démocrate bourgeois et édification du pouvoir socialiste
basé sur la fusion du législatif et de lexécutif,
sur le principe électif direct des responsables, sur leur
responsabilité personnelle quant à leur travail
et sur leur révocabilité permanente.
Exclusion de tout
privilège lié à la fonction dirigeante.
Privation des droits
civiques pour tous les anciens capitalistes, hauts cadres économiques,
politiques, judiciaires, etc. et pour tous les contre-révolutionnaires.
Rééducation par le travail forcé de tous
les parasites bourgeois et autres éléments anti-sociaux.
- Démantèlement
complet de ce quil restera (après la guerre civile!)
des ministères et appareils ayant assuré et défendu
la domination de la bourgeoisie (Justice, Intérieur, Défense
Nationale, gen­darmerie et polices, etc.) et traduction de
leurs responsables devant les tribunaux révolutionnaires.
Création
des structures de pouvoir populaire: tri­bunaux, milice prolétarienne,
etc. Bouleversement et réorientation totale des ministères
techniques (Santé, Communications, Travaux Publics, etc.),
cest-à-dire limogeage des anciens responsables,
abandon des orientations socialement inutiles ou nuisibles, mise
en place dun encadrement professionnellement compétent
et politiquement éprouvé dans la lutte révolutionnaire
afin dassurer le succès des directives du nouveau
régime.
Démantèlement
des trusts médiatiques et de la presse bourgeoise; création
dinstruments de communication, dinformation et de
débat gérés soit par le Parti ou lÉtat
soit par les associations et comités de base (entreprises,
quartiers, syndicats, professions, etc).
- Développement
de la vie associative. Encouragement de toutes les manifestations
struc­turant lharmonie de la collectivité, soutien
concret de lÉtat (et collaboration active du Parti)
à tous les organismes ou associations permettant le contrôle
direct des citoyens sur la vie publique (associations de quartier,
de consommateurs, dentreprise, dusa­gers, etc.)
ou lépanouissement de la vie sociale (associations
sportives, culturelles, etc). Appel à linitiative
des masses dans tous les domaines et responsabilisation de chacun
vis-à-vis du bien commun.
- Séparation
intégrale de lÉglise et de lÉtat.
Confiscation des biens de lÉglise et du clergé
qui ne sont pas directement utiles au culte (le patrimoine immobilier
appartient à IÉtat qui le loue), limitation
des revenus des églises aux contributions volontaires
des fidèles et alignement du salaire des ecclésiastiques
au plus bas.
Liberté de
culte et de murs garantis, à lexception des
pratiques contraires à la légalité socialiste
(et notamment celles portant atteinte à légalité
des sexes, à la protection de lenfance, etc). Interdiction
de toute immixtion des églises dans la vie politique et
ouverture de vastes campagnes déducation populaire
sous la direction du Parti et de lÉtat afin dextirper
à tout jamais les tares idéologiques héritées
des anciens régimes: idéalisme philosophique, obscurantisme
religieux, superstition, racisme, sexisme, individualisme, chauvinisme,
etc. (interdiction des jeux dargent, de la prostitution,
des sectes, etc).
- Démantèlement
de lactuel ministère des Affaires Étrangères,
rupture avec toutes les structures et alliances internationales
économiques, politiques ou militaires de limpérialisme.
Affirmation intangible
dun authentique internationalisme prolétarien comme
principe directeur de la politique extérieure: soutien
franc et massif à lexpansion du mouvement révolutionnaire
partout dans le monde (et cela, dans la mesure du possible, jusquà
lintervention directe aux côtés des peuples
dont les Partis en exprimeraient le souhait; inscription du Parti
dans la nouvelle Internationale Communiste - si ce nest
déjà fait), établissement de relations égalitaires
et harmonieuses avec les jeunes états progressistes libérés
de limpérialisme et développement de rapports
économiques considérant lintérêt
mutuel.
Mise à la
disposition des pays moins industrialisés et techniquement
démunis de toutes nos connaissances et découvertes
scientifiques, de tout le savoir-faire dont nous disposons, sans
la moindre contrepartie, à titre de contribution au progrès
général de lhumanité.
Développement
de la coopération en fonction des besoins exprimés
par les peuples et, dune façon générale,
application dune politique extérieure concrétisant
des relations généreuses et fraternelles avec les
peuples du monde entier.
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