Cellules Communistes
Combattantes
La
flèche et la cible
22. Quelles
sont les luttes sociales ou politiques qui se développent
actuellement en Belgique?
Quen
est-il du mouvement militant contre la guerre, le militarisme,
le nucléaire?
Quelles sont
les luttes que vous jugez centrales?
Les mobilisations
anti-nucléaires restent très limitées et
marginales depuis de nombreuses années.
En fait ce domaine
a été récupéré et institutionnalisé
par les grandes organisations comme Greenpeace, le parti Ecolo,
etc.
Ces derniers temps
lextrême-gauche révisionniste et opportuniste
anime une mobilisation démocrate petite-bourgeoise en
réponse aux succès électoraux de lextrême-droite
(Vlaams Blok, F.N., etc).
Si lon fait
abstraction des luttes sociales ou politiques relevant directement
ou indirectement de léconomique (luttes contre laustérité,
les restructurations, le démantèlement des services
publics, etc.), seules les luttes contre le militarisme ont récemment
engendré de véritables mobilisations populaires.
Le refus de linstallation
de missiles atomiques US à Florennes a fait descendre
dans la rue jusquà 400.000 manifestants en octobre
1983.
Mais quand on sait
dautre part que les bombes atomiques des chasseurs-bombardiers
F-16 de Kleine-Brogel nont jamais inquiété
personne, on mesure combien la crainte et le rejet de la guerre
impérialiste se sont cristallisés dans notre pays
sur la seule question du déploiement des missiles Cruise.
Une question particulière
qui avait le mérite de révéler aux masses
populaires combien la tendance à la guerre impérialiste
était forte mais qui, prise seulement pour elle-même,
devint en quelque sorte larbre qui cache la forêt.
Soigneusement maintenue
par les forces réformistes et pacifistes dans le cadre
restrictif de «lanti-Cruise à Florennes»,
la mobilisation populaire contre la guerre na pu atteindre
la maturité politique qui lui aurait permis de relier
leffet à la cause, la menace de guerre à
son origine: le mode de production capitaliste dans son stade
impérialiste.
Lencadrement
social-démocrate du mouvement veillait à ce que
seules les condamnations morales contre «la guerre»
aient droit de cité.
Notre organisation
a mené deux campagnes politico-militaires autour de cette
question (la «Pre­mière campagne anti-impérialiste
dOctobre» et la «Campagne Pierre Akkerman -
Combattre le militarisme bourgeois et le pacifisme petit-bourgeois»).
Elle a mis en avant
lobligation faite au mouvement populaire anti-guerre de
dépasser lhorizon étroit et stérile
du seul refus de limplantation des missiles Cruise pour
poser la question de la tendance à la guerre comme produit
cyclique du mode de production capitaliste arrivé à
son stade impérialiste.
Les Cellules ont
souligné la stérilité des protestations
lénifiantes et la corruption parlementariste quand le
mouvement de masse doit adopter un caractère résolument
anti-capitaliste.
La mobilisation
populaire anti-guerre des années 80 en Belgique na
pas enfanté de tendance radicale, de fraction qui sen
serait détachée pour constituer une force réelle,
dynamique, consciente et efficace.
Cela a conduit à
limpuissance puis à la démobilisation.
Limplantation
des Cruise eut lieu en mars 1985 et leur démantèlement
en février 1989 ne fut que la conséquence dun
accord passé entre grandes puissances.
En deux mots: léchec
du large mouvement anti-guerre des années 80 fut terrible
et la désillusion assez générale.
Cependant, la sensibilité
populaire à la guerre et au militarisme ne séteint
jamais réellement dans notre pays. La guerre du Golfe
a été loccasion de nouvelles mobilisations
au cours de lhiver 1990/91 mais encore et toujours manipulées
par les pacifistes et les social-démocrates, dont le seul
souci est un impérialisme «à visage humain»
(le C.N.A.P.D. par exemple, soutenait lembargo économique
contre lIrak - donc lextermination par la faim, la
maladie, etc. - mais sindignait du fracas des explosions).
Notons aussi que
lenvoi de la soldatesque beige au Rwanda (1990), en Yougoslavie
et en Somalie aujourdhui ne soulève aucune véritable
protestation.
Lintox «humanitaire»
fonctionne à plein rendement.
Lanti-militarisme
a pourtant une longue tradition «de base» en Belgique.
Dans le sud du pays, limplication systématique de
larmée dans la répression anti-ouvrière
devait marquer pour longtemps le P.O.B. dun caractère
anti-militariste.
A partir de 1887
les Jeunes Gardes Socialistes allaient organiser une lutte vaste
et énergique contre le militarisme. Dans un écrit
de 1908, Lénine la cite dailleurs longuement en
exemple aux révolutionnaires russes.
La profession de
foi anti-militariste du P.O.B. allait être sévèrement
- et définitivement - démentie à loccasion
de la première guerre mondiale.
Dès que lAllemagne
viola la neutralité beige il rejoignit un gouvernement
«dunion sacrée». Il adoptait alors la
position la plus droitière de toute la 11ème Inter­nationale,
dans laquelle il pesait dun poids non négligeable
puisque Émile Vandervelde en fut Président et Camille
Huysmans Secrétaire.
Le P.O.B. versa
sans aucune retenue dans le chauvinisme, le jusquau-boutisme
et même lannexionnisme (le P.O.B. ne fut dailleurs
pas seulement hostile à la Conférence de Zimmerwald,
animée en 1915 par Lénine, il devait aussi condamner
- par 70 voix contre 5, dont celle de Jacquemotte - la Conférence
de Stockholm en faveur de la paix négociée, conférence
quavaient pourtant acceptée les social-démocrates
allemands, anglais et français).
Les mouvements dhostilité
à la guerre et sa poursuite restèrent latents et
confus parmi les soldats, ce qui peut sexpliquer pour une
part par linexistence dune direction révolutionnaire
à même de défendre lobjectif de transformation
de la guerre impérialiste en guerre révolutionnaire.
Dans le nord du
pays, la première guerre mondiale allait donner naissance
au «frontisme» , un mouvement populaire alliant lobjectif
de la paix et celui des droits nationaux et culturels du peuple
flamand (jusque là administration, justice, universités,
cadre de larmée, etc. étaient exclusivement
francophones).
Ce mouvement «pacifiste-nationaliste»
allait marquer pour longtemps la conscience sociale en Flandre.
Après la
seconde guerre mondiale, - à lépoque de la
guerre froide -, le P.C.B. anima dénergiques campagnes
anti-militaristes dont, principalement, celle de 1951/52 contre
le doublement de la durée du service militaire (24 mois
au lieu de 12).
Importantes manifestations
(20.000 personnes à Bruxelles le 23 septembre), mutineries
dans des garnisons (Soest, en Allemagne, et Namur), affrontements
très violents avec la police militaire et la gendarmerie,
etc.
En août 1952
la F.G.T.B. appelle à la grève générale
et à des manifestations dont le succès (ainsi que
lagitation croissante dans les casernes où les incidents
se multiplient) font reculer le gouvernement, - du moins partiellement:
le service militaire passe à 21 mois.
Au début
des années 70, les projets de réforme de larmée
du ministre Van den Boeynants (et principalement leur volet concernant
le service militaire) allait entraîner une importante mobilisation
des lycéens et des étudiants, qui ne contribuera
pas peu à lassise de lextrême-gauche
«post-P.C.B».
On peut donc dire
quavec des hauts et des bas lanti-militarisme «de
base» parcourt dun fil continu la conscience sociale
dans notre pays.
Un trait subjectif
qui ajouté au caractère de la contradiction opposant
la population à la guerre impérialiste (contradiction
qui ne peut être résolue que par la révolution
socialiste) fait que ce domaine constitue un axe central de lutte
pour les révolutionnaires en Belgique.
Et de fait, la lutte
contre le militarisme et la guerre impérialiste, lutte
indissociable dune authentique pratique dinternationalisme
prolétarien - cest-à-dire dun soutien
entier aux peuples en lutte dans les pays dominés par
notre impérialisme - a représenté,
avec la lutte contre le rapport social capitaliste, la principale
base du travail de notre organisation en 1984/85.
|