Cellules Communistes Combattantes

La flèche et la cible

 

27. Quelle doit être la stratégie révolutionnaire aujourd’hui en Europe?

Quelles sont les tâches immédiates des militants communistes?

Quelles méthodes de lutte faut-il développer prioritairement?

Lorsque l’on parle de stratégie révolutionnaire à l’échelle européenne, il convient d’être extrêmement prudent et de bien définir le cadre dans lequel pareille réflexion est possible.

Car n’en déplaise aux camarades pour qui telle prudence est superflue devant la recherche de transnationalisation de la lutte révolutionnaire en Europe, il faut prendre acte des nombreuses particularités de chaque espace national - qui finalement les différencient strictement et mesurer ce qu’elles exigent de spécifique.

Certes, il existe de grands traits communs à tous les pays d’Europe de l’Ouest, qui permettent d’esquisser une conception stratégique générale de lutte révolutionnaire (citons entre autres: une révolution démocratique bourgeoise achevée depuis longtemps, un fort taux de prolétarisation, une crise du réformisme et du révisionnisme, un haut développement économique et des baisses régulières du niveau de vie des masses, un fort patrimoine de lutte ouvrière et une certaine maturité de classe, une diminution relative - voire absolue - de la classe ouvrière, une domination exercée sur les pays du tiers-monde, etc.) et nous y reviendrons précisément plus loin en abordant les différents aspects de la conception stratégique révolutionnaire aujourd’hui dans les centres impérialistes.

Mais il est aussi certain que des différences substantielles parmi les réalités nationales interdisent de concevoir une ligne unique, des tâches identiques et des choix semblables, valables pour tous, en tout et partout.

Nous avons ainsi déjà eu l’occasion de signaler qu’un des caractères propres à la situation de la lutte de classe en Belgique, outre le décalage entre d’une part l’ampleur et la profondeur de la contradiction prolétariat/bourgeoisie, et de l’autre la faiblesse politique et organisationnelle extrême du mouvement de classe, est l’inexistence d’une force politique structurée riche d’une expérience, d’une implantation et d’une perspective, susceptible d’accueillir et d’organiser en son sein les avant-gardes de la classe et de guider tout le mouvement révolutionnaire.

Pour leur part, les Cellules Communistes Combattantes ne pouvaient prétendre à ce rôle en 1984/85.

Non que la ligne politique et les orientations stratégiques de notre organisation aient été erronées ou qu’elle ait sous-estimé la nécessité d’une organisation centrale à même de rallier et ordonner l’ensemble des avant-gardes révolution­naires, mais simplement les conditions objectives de l’émergence d’une telle organisation n’étaient pas -et ne sont d’ailleurs pas encore - réunies dans notre pays.

L’existence ou l’inexistence d’une force organisée, expérimentée et implantée assumant légitime­ment la responsabilité de Parti révolutionnaire entraîne une approche et des tâches différentes pour les militants révolutionnaires.

L’absence d’une telle structure a des conséquences pratiques directes.

Dans notre pays elle impose aux militants révolutionnaires dévoués de s’organiser autonomement, où et dès que faire se peut, avec les moyens du bord et même à quelqu’échelle réduite que ce soit.

C’est d’ailleurs l’inexistence d’une force capable et digne d’exercer une action centripète dans la lutte révolutionnaire qui a justifié - et justifie toujours - le mot d’ordre stratégique lancé par notre organisation: «Que mille Cellules naissent!»

Mais ce mot d’ordre, dicté par les conditions objectives et subjectives de la lutte des classes en Belgique, n’est certainement pas transposable partout en Europe. Dans certains pays des forces centrales et centralisantes sont déjà constituées, ainsi en Espagne avec le Parti Communiste d’Espagne (reconstitué) et les Groupes de Résistance Anti-fasciste du Premier Octobre, ou en Turquie.

Dans d’autres (comme l’Italie) ces forces sont potentielles.

En Espagne, le devoir immédiat de chaque communiste est de rejoindre le Parti et la tâche de chaque militant du Parti est d’en défendre la politique et en étendre l’influence, de l’enrichir, voire de la critiquer dans le cadre du centralisme démocratique, d’en appliquer rigoureusement les directives, etc.

En Belgique, les faiblesses des Cellules Communistes Combattantes et notamment celle de leur implantation de classe empêchaient de fixer comme tâche immédiate pour tous les communistes de les rallier.

Et nous croyons que cette limite ne pourra pas être rapidement dépassée par les nouvelles forces qui surgiront à l’avenir, qu’elle persistera durant une période plus ou moins longue.

La tâche immédiate de chaque communiste dans notre pays est d’organiser autour de lui, avec d’autres communistes de son usine, son quartier, etc., une cellule révolutionnaire clandestine capable d’entrer autonomement (même faiblement) en action sur le terrain de la propagande armée et/ou de l’agit-prop révolutionnaire.

Une tâche qui doit contribuer à la création des conditions subjectives et objectives de l’émergence et de la fondation d’une organisation centrale capable d’intégrer toutes les forces d’avant-garde, d’être la représentante exclusive des intérêts historiques du prolétariat, de synthétiser les expériences et les aspirations de celui-ci pour le guider correctement et concrètement sur le chemin du socialisme.

Les tâches immédiates des militants communistes varient donc considérablement d’un pays à l’autre, puisque ces tâches sont définies par les caractères objectifs de chaque situation et non par la subjectivité des camarades.

Même si, nous l’avons dit, les pays d’Europe de l’Ouest présentent des caractères communs qui permettent de tracer des grands axes stratégiques finalement valables partout.

Ainsi, il est indiscutable que partout en Europe la stratégie de la Guerre Révolutionnaire Prolongée doit être retenue comme seule perspective à même de mener le prolétariat à la victoire.

Et cette exigence stratégique impose d’elle-même les méthodes de lutte qu’il faut développer prioritairement: d’abord la propagande armée et ensuite - inséparable - l’agit-prop classique.