Cellules Communistes Combattantes

La flèche et la cible

 

35. Quelle est votre conception des rapports qui doivent exister entre la lutte armée et le Parti?

En quoi votre conception diffère-t-elle de celle du Parti Communiste d’Espagne (reconstitué) que vous avez eu l’occasion d’interpeller à ce sujet?

Nous avons en effet présenté en mai 1990 un texte intitulé «Sur le Parti combattant (une divergence avec les camarades espagnols)», dans lequel nous exposons notre propre conception du rapport entre Parti et lutte armée et portons une critique au point de vue des militants du PCE(r) sur la question.

Ce texte a été publié dans la revue Correspondances Révolutionnaires, numéro 8 (octobre-décembre 1990), et il constitue notre réponse la plus complète à la question posée ici.

Nous nous contenterons donc d’évoquer l’idée principale de ce document.

Notre position est d’une grande simplicité. Dans la mesure où la lutte armée est appelée à remplir des fonctions capitales à caractère politique tout au long du processus révolutionnaire, elle doit être directement assumée par le Parti révolutionnaire.

Le rôle du Parti est de rassembler dans une structure unique, centralisée et hiérarchisée, les avant-gardes prolétariennes et les militants révolutionnaires afin de constituer la machine de guerre de la classe contre la bourgeoisie, de tracer la voie qui mène à la révolution et d’y guider les masses.

Une donnée stratégico-politique aujourd’hui aussi fondamentale que la lutte armée ne peut donc échapper à la centralisation partitiste.

Il était possible (il pouvait même s’avérer préférable sinon nécessaire) que le Parti du prolétariat ne prenne pas directement en charge la guérilla lorsqu’elle n’était qu’une simple tâche pratique en marge des méthodes de lutte politique (lorsque les tâches des groupes de combat se limitaient, par exemple, à récolter des fonds en expropriant des banques, à libérer des militants en attaquant les prisons, à liquider des policiers et des infiltrés, etc).

Cette séparation formelle entre le Parti et la guérilla était aussi possible (voire nécessaire, inévitable) quand la lutte armée contre le régime réunissait d’autres classes que le prolétariat.

Dans ce cas, les combattants révolutionnaires issus de la paysannerie, de la petite-bourgeoisie et du prolétariat luttent côte à côte dans une structure militaire reproduisant l’alliance ponctuelle de classe comme I’A.L.N. du F.L.N. en Algérie ou l’Armée Populaire du Viêt-minh, par exemple, ou encore comme les «Partisans Armés» et les «Milices Patriotiques» du Front de l’indépendance de la Résistance anti-nazie belge.

Mais dans la situation contemporaine des pays impérialistes de l’Europe de l’Ouest, où la lutte armée joue un rôle non seulement militaire mais aussi et surtout stratégico-politique dans le processus révolutionnaire et où seul le prolétariat affronte en tant que classe le pouvoir bourgeois, le lien entre lutte armée et Parti de classe doit, à notre avis, être des plus étroits.

Pour leur part, les camarades du PCE(r) sont opposés à la thèse de la lutte armée comme tâche de Parti (et conséquemment à la conception du «Parti combattant»).

Ils préconisent une séparation organisationnelle entre le Parti et les forces de la guérilla.

Pareille divergence de point de vue se répercute bien entendu sur le schéma général de l’organisation politico-militaire et, dans notre docu­ment de mai 1990, nous illustrons le problème de la façon suivante:

Notre conception: le Parti combattant

Organisation du Parti
 Structures clandestines
d'activités politiques
 Structures militaires

influence

Aire ouverte d'Agit-Prop

La conception du PCE(r) et des GRAPO: Parti et Guérilla

Organisation du Parti
 Groupes d'agit-prop ouverte   Structures clandestines
d'activités politiques

influence

 Organisation de Guérilla

 

A l’appui de leur thèse, les camarades espagnols font valoir que le Parti doit remplir de multiples tâches qui n’ont rien de militaire: tâches politiques, idéologiques, mobilisatrices, etc.

Ils évoquent aussi le risque de militarisation du Parti - c’est-à-dire l’incapacité d’une structure militaire à accomplir pleinement des tâches non militaires - et enfin le danger de dérive militariste.

Rappelons que la position des militants du PCE(r) est précisément exposée dans leur document «Parti et guérilla» aussi repris au sommaire du numéro 8 de la revue Correspondances Révolutionnaires.

Bien évidemment nous ne contestons ni la difficulté de mener de front des tâches militaires et non militaires, ni la réalité du risque de dérive militariste.

Mais il n’y a là rien d’insurmontable ou, plus exactement, rien qu’il ne faille surmonter tôt ou tard dans l’activité communiste puisque, selon nous, le développement de la lutte armée comme tâche de Parti est vitale pour les progrès et le succès du processus révolutionnaire dans les pays capitalistes avancés à régime démocratique.

La seule manière d’affronter les problèmes soulevés par les camarades espagnols consiste à les résoudre correctement et pratiquement sans dévier de l’essentiel.

La voie est sans aucun doute escarpée et pleine d’embûches, mais c’est la seule voie qui mène au but.