La question du Parti, du fascisme et de la reconstruction du MCI

(mai 2003)

 

(Les camarades travaillant à la fondation du (Nouveau)Parti communiste italien ont rendu public en novembre 2002 un texte intitulé "Que les communistes des pays impérialistes unissent leurs forces pour assurer la renaissance du mouvement communiste!"

Voici un document d'un camarade qui a déjà envoyé une lettre ouverte à l'Etoile Rouge].

Je veux revenir sur le débat autour du texte des communistes italiens : « Que les communistes des pays impérialistes unissent leurs forces pour assurer la renaissance du mouvement communiste ! », publié par la Commission Préparatoire du Congrès de fondation du (Nouveau) Parti Communiste Italien.


Sur la reconstruction du Parti Communiste

Le concept de Forces Antithétiques de l’Unité Sociale (FAUS) des communistes italiens, repris de Marx (Cf. ses travaux préparatoires de critique de l’économie politique appelé Grundisse), n’a pas pour but de remplacer la nécessité du Parti Communiste comme « force consciente ».

Beaucoup de FAUS sont né des conquêtes sociales des masses, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, arrachées et obtenues dans le cadre de la société bourgeoise («programme du capitalisme à visage humain »).

Il ne s’agit pas de confondre, d’un côté la défense des FAUS (Sécu, retraite, etc.), une résistance défensive au développement de la crise du capitalisme qui cherche à se valoriser en cassant les conditions sociales historiques qui l’en empêchent.

Et d’un autre côté, la lutte pour la conquête du pouvoir politique qui a pour tache de résoudre la contradiction entre les forces productives associées et collectives et les rapports sociaux privés capitalistes qui les encadrent, en faisant sauter ces dernières.

La lutte défensive et revendicative est une lutte pour la répartition du produit social. La lutte politique est une lutte stratégique d’accumulation des forces pour le pouvoir d’Etat.
Le socialisme est ainsi un programme pour la gestion collective afin d’adapter, assumer, développer et généraliser le caractère collectif actuel des forces productives, en faisant correspondre les rapports de production et les autres rapports sociaux à cet état.

Sous le socialisme, cela signifie créer les organismes, institutions, connaissances culturelles et comportements nécessaires à cette tache.

Aujourd’hui, il s’agit donc de reconstruire, comme tache numéro un, le Parti Communiste, pour diriger le peuple vers cette tache historique.

Qui est vraiment en désaccord avec cela ? Ni les communistes italiens, ni Etoile Rouge, ni ma première intervention (cf. Lettre ouverte d’avril 2003) !

Il n’y a aucune raison de parler alors de « marxisme mécaniste…[ où] l’infrastructure économique produirait mécaniquement des forces dont l’objectif est le bouleversement du mode de production. »

Mais :

1. Ceux qui prétendent diriger la lutte de la classe ouvrière et du prolétariat contre la bourgeoisie doivent connaître le mouvement économique de la société, ses tendances, ses forces motrices (dont les FAUS), parce que c’est là que se trouve l’origine de l’essentiel des conditions dans lesquelles la lutte se déroule.

2. La qualité qui manque aujourd’hui aux Forces Subjectives pour la Révolution Socialiste (FSRS), c’est précisément l’existence d’un Parti Communiste.

Un Parti doté de caractéristiques différentes de celles des FSRS : une ligne politique: le marxisme-léninisme-maoïsme et une direction et une structure clandestines.

Le Parti doit être libre du contrôle de la bourgeoisie car celle-ci fera tout pour empêcher qu’un véritable Parti communiste construise et accumule les forces révolutionnaires.


Sur le fascisme et sa différence
avec la contre-révolution préventive

Je ne pense pas que la thèse des communistes italiens « nie le fascisme… c’est vers le fascisme que l’on va à toute vitesse, pas vers le socialisme ».

C’est considérer un seul aspect de la contradiction.

Ni les forces de police, ni les manipulations ne peuvent maintenir les masses d’un pays dans la soumission à un ordre social qui n’assure pas, à la grande masse, la production et la reproduction des conditions matérielles d’existence.

Les FAUS deviennent les instruments déterminant de l’ordre public, davantage que les forces de police, les services secrets, la Justice de classe, etc.

Le ciment de la cohésion de la société bourgeoise ne sont ni les armes, ni les idées, mais les procès de production et de reproduction des conditions matérielles de l’existence qui existe sous la forme de production de marchandises et de plus-value.

Là est le secret de ses périodes de stabilité, mais aussi son talon d’Achille et les tendances révolutionnaires objectives en son sein. Car aujourd’hui on vit une situation révolutionnaire en développement.

Je reviens aussi sur l’idée qui a souvent cours, sur le fait que la classe ouvrière française aurait voté massivement pour le Front National aux dernières élections présidentielles 2002, comme l’ont dit les médias de marché (30% des ouvriers, selon eux).

Cela fait partie d’une guerre psychologique de la bourgeoisie qui renforce alors l’idée d’une fascisation de la société.

C’est un chiffre (30% des ouvriers) qu’on obtient uniquement, en tenant compte des ouvriers votant, comme s’ils étaient l’ensemble de la classe ouvrière alors que le « geste électoral» fondamental en France est plutôt l’abstention.

Replacé dans ses justes proportions, le vote ouvrier lepéniste a en réalité représentée 10% des ouvriers (la classe ouvrière entendue selon les critères statistiques bourgeois).

Au lieu de parler de « fascisme », les communistes italiens parlent plutôt de contre-révolution préventive, lié à l’impérialisme et la militarisation des sociétés bourgeoises, corrélative, à la formation et la concentration des pouvoirs et des capitaux, des monopoles et d’une oligarchie financière.

Car la bourgeoisie a pour préoccupation numéro Un, la stabilité et la conservation du régime, avant le respect de n’importe quels droits civils et politiques.

Mais le régime de contre-révolution préventive se distingue du fascisme ouvert (domination terroriste de la bourgeoisie) par le fait que la bourgeoisie emploie, d’une façon générale, la répression et la terreur non pas contre les masses populaires, mais seulement contre les forces révolutionnaires. Les masses populaires sont l’objet plutôt d’une tentative de mobilisation réactionnaire (par la guerre psychologique, propagande, divertissement de masses et diversion).

Ainsi, le terme fascisme n’apporte aujourd’hui pas grand chose comme catégorie d’analyse.

On pourrait dire alors que le fascisme est permanent pour les masses !

Je m’explique.

La bourgeoisie mène une guerre d’extermination contre les masses populaires.

C’est vrai.

Mais elle ne les tue généralement pas de la main des policiers, de la répression, de soldats, de camps de concentration.

Elles sont plutôt victimes des rapports sociaux quotidiens : des accidents du travail, du chômage, de la fatigue et des maladies du travail, de l’espérance de vie moindre des ouvriers.

Même l’ONU dit que 11 millions d’enfants meurent chaque année, dans le monde, de malnutrition, de faim et de maladies guérissables, dans le cadre si normal du capitalisme et de l’impérialisme…


La reconstruction du MCI

Malheureusement, au lieu de répondre par une mobilisation révolutionnaire, reconstruire le Mouvement Communiste International, on assiste en Europe (France, Allemagne, etc.) au fait que les groupes communistes existants se mettent à la remorque de leur bourgeoisie !

C’est le cas du mouvement contre la guerre en Irak, basé sur le pacifisme.

Même les communistes italiens de la CP/(N)PCI n’y échappe pas.

Que vaut un « Front international de résistance active pour la paix dans le monde » ?, un appel signé par eux en mars 2003, conjointement avec le MLPD allemand, Voie Prolétarienne (France) et le PC(ML) du Pérou (un avatar semble t-il, de Patrie Rouge) ?

La situation ressemble à l’époque de la faillite de la II ème Internationale ou à la veille de la II ème guerre mondiale, lorsque devant les menaces de guerre, les socialistes puis les communistes faisaient l’unité la plus large, toujours plus à droite, sans principes.

La même chose vaut pour la participation aux élections bourgeoises qui a pour tache soi-disant de démasquer la bourgeoisie et de faire connaître la ligne communiste.

C’est une idée erronée de penser que les masses pauvres ont besoin de « démasquer » les élites politiques, pour montrer que celles-ci ne veulent pas résoudre les problèmes des opprimées.

Dans l’antiquité, les esclaves n’avaient pas besoin de « démasquer » leurs maîtres pour avoir une conscience que leur ennemi principal était la classe esclavagiste.

Les élections ne favorisent pas le mouvement communiste. Les masses s’unissent au mouvement révolutionnaire, non pas par un comportement théorique et un débat d’idées, mais plutôt au cours d’un processus de lutte contre la police, le patron, l’armée et les autres institutions de l’Etat.

----12 Mai 2003